La classe de MP* du lycée Moulay-Idriss de Fès, au Maroc

Un engagement nouveau pour l’École

Dossier : L'AfriqueMagazine N°716 Juin/Juillet 2016
Par Mathieu Le TRAON

La présence d’élèves africains à l’É­cole est anci­enne, mais il faut main­tenant agir comme il y vingt ans avec la Chine. L’École doit anticiper l’émergence du con­ti­nent et for­mer des cadres qui porteront son développe­ment. L’É­cole développe ses réseaux et ultérieure­ment les pro­grammes de for­ma­tion en anglais per­me­t­tront d’aborder l’Afrique anglophone. 

Si la présence d’élèves africains à l’École poly­tech­nique est anci­enne – cer­tains occu­pent aujourd’hui des posi­tions économiques et poli­tiques de pre­mier plan au Maghreb, en Afrique sub­sa­hari­enne mais égale­ment en Europe ou en Amérique du Nord –, ce n’est que récem­ment que l’École a entre­pris de struc­tur­er ses actions de développe­ment inter­na­tion­al en direc­tion du con­ti­nent africain et d’en faire un des axes prin­ci­paux de sa poli­tique internationale. 

REPÈRES

Les élèves africains comptent aujourd’hui pour 30 % des élèves internationaux de l’École polytechnique, soit 7 % de la totalité d’une promotion. Le Maroc est la nationalité la plus représentée, avec 26 étudiants sur les 122 élèves internationaux que compte la promotion 2015.
L’École développe actuellement sa politique de relations internationale vers cinq pays francophones : Maroc, Tunisie, Sénégal, Côted’Ivoire et Cameroun.

DÉVELOPPER UNE RELATION ANCIENNE

Pour l’École, la sit­u­a­tion d’aujourd’hui n’est pas sans rap­pel­er celle qu’elle a con­nue il y a quinze ou vingt ans avec des pays comme la Chine ou le Brésil : 

“ L’École doit anticiper l’émergence du continent africain ”

l’École doit anticiper l’émergence du con­ti­nent et d’accompagner ses besoins en prenant sa part dans la for­ma­tion des cadres qui porteront son développe­ment économique et tech­nologique, et en pré­parant les diplômés de l’X à tra­vailler dans un monde où la crois­sance africaine aura pris toute sa place. 

MISER SUR LES PAYS FRANCOPHONES

LE PRIX HAMIDOUNE

L’École s’associe chaque année au prix Hamidoune décerné à un jeune étudiant mauritanien s’étant particulièrement distingué dans le domaine des mathématiques, domaine où la Mauritanie a développé une expertise reconnue sous l’impulsion du mathématicien Yahya Ould Hamidoune, disparu en 2011 et à qui ce prix rend hommage.

Dans cet esprit, l’École développe actuelle­ment sa poli­tique de rela­tions inter­na­tionale autour de trois grands axes prin­ci­paux : appui à la con­sti­tu­tion et la con­sol­i­da­tion de fil­ières académiques d’excellence, développe­ment du recrute­ment d’étudiants africains dans le cycle ingénieur, les mas­ters et en doc­tor­at, et sen­si­bil­i­sa­tion des étu­di­ants aux enjeux et oppor­tu­nités de l’émergence africaine. 

Cette poli­tique, lancée fin 2014, est mise en oeu­vre à l’heure actuelle prin­ci­pale­ment sur cinq pays fran­coph­o­nes his­torique­ment liés à l’X par le nom­bre d’étudiants passés sur ses bancs et par la part sig­ni­fica­tive qu’ils pren­nent à la crois­sance africaine : Maroc, Tunisie, Séné­gal, Côte‑d’Ivoire et Cameroun. 

Ces pays ont égale­ment en com­mun d’avoir entretenu un sys­tème d’enseignement sec­ondaire de qual­ité et d’investir dans l’enseignement supérieur avec la con­vic­tion qu’il s’agit d’une des clés de leur avenir. 

CONSOLIDER LES FILIÈRES D’EXCELLENCE EN AFRIQUE

Une des actions clés de l’X en Afrique est l’appui qu’elle apporte à la con­sol­i­da­tion de fil­ières d’excellence, qu’il s’agisse de class­es pré­para­toires, de fil­ières d’enseignement supérieur voire de fil­ières dans des lycées. 


La classe de MP* du lycée Moulay-Idriss de Fès, au Maroc ; accroupi au cen­tre en chemise blanche, Pierre-Élie Belouard-Raude (2015) en stage de for­ma­tion humaine.

Ce sou­tien prend en par­ti­c­uli­er la forme de l’envoi de jeunes élèves poly­tech­ni­ciens comme assis­tants péd­a­gogiques en math­é­ma­tiques ou en physique dans le cadre de leur stage de for­ma­tion humaine de six mois. Le dis­posi­tif est act­if au Maroc, où l’École a passé un accord avec deux lycées à class­es pré­para­toires (Rabat, Fès) et s’apprête à le faire avec le troisième lycée maro­cain pro­posant une fil­ière MP* (Mar­rakech).

À not­er qu’à eux trois ces lycées pla­cent à l’X près de la moitié des élèves de nation­al­ité maro­caine, soit une douzaine d’élèves par an. Le dis­posi­tif est égale­ment act­if à Tunis (classe pré­para­toire de l’IPEST) et en Côte‑d’Ivoire, à l’Institut nation­al poly­tech­nique Houphouët- Boigny. 

À la ren­trée 2016, il sera éten­du au Séné­gal et au Camer­oun ; des lycées seront égale­ment concernés. 

“ Une nouvelle voie d’accès pour les étudiants africains ”

De l’avis des équipes qui les accueil­lent, les élèves en stage FHM accom­plis­sent un tra­vail remar­quable et ent­hou­si­aste, dont nous ne man­querons pas de récolter prochaine­ment les fruits. Il faut ici saluer l’excellent accueil que ces étab­lisse­ments parte­naires réser­vent aux élèves sta­giaires, leur per­me­t­tant de men­er à bien leur mis­sion dans des con­di­tions d’accompagnement et de sécu­rité optimales. 

Ces actions s’accompagnent de l’invitation lancée par l’X aux pro­fesseurs de class­es pré­para­toires de ces insti­tu­tions à par­ticiper aux ses­sions de for­ma­tion que l’École coor­gan­ise chaque année pour les pro­fesseurs de class­es pré­para­toires français­es, dans un but d’amélioration con­tin­ue de leurs pratiques. 

IMPLIQUER LES ÉLÈVES

Le binet X‑Afrique joue un rôle impor­tant en accom­pa­g­ne­ment de l’École : il promeut active­ment auprès des lycéens africains l’École poly­tech­nique, et au-delà, les for­ma­tions sci­en­tifiques d’excellence, et ses mem­bres représen­tent des mod­èles de réus­site qui inspirent les lycéens et leur don­nent envie de suiv­re leur exemple. 

Au-delà de ces actions, l’École est égale­ment active dans l’appui au mon­tage de for­ma­tions de haut niveau dans plusieurs domaines d’intérêt partagé. C’est le sens par exem­ple de son parte­nar­i­at avec l’Université euro-méditer­ranéenne de Fès, avec laque­lle elle tra­vaille à la mise en place d’un mas­ter cen­tré sur les éner­gies renou­ve­lables et d’un mas­ter axé sur la ges­tion des grandes mass­es de données. 

DYNAMISER LE RECRUTEMENT

Macky Sall, Président de la République du Sénégal, en visite à l’X
Macky Sall, Prési­dent de la République du Séné­gal, en vis­ite à l’X le 2 décem­bre 2015. © LIONEL MANDEIX

Les élèves africains comptent aujourd’hui pour 30 % des élèves inter­na­tionaux. La plu­part de ces étu­di­ants sont issus des class­es pré­para­toires en France ou au Maghreb (Maroc et Tunisie) ; quelques-uns sont entrés par la voie uni­ver­si­taire française, après une licence de sci­ences en France. 

Toute­fois la dynamique actuelle de la présence des étu­di­ants africains en class­es pré­para­toires per­met dif­fi­cile­ment d’augmenter le nom­bre d’étudiants africains à l’X par cette voie, en par­ti­c­uli­er ceux d’Afrique sub­sa­hari­enne qui ne représen­tent aujourd’hui pas plus de trois à cinq étu­di­ants par promotion. 

Afin de favoris­er et d’accompagner l’augmentation de ces effec­tifs, l’X a ouvert au print­emps 2015 une nou­velle voie d’accès pour les étu­di­ants africains via l’établissement à Dakar du pre­mier cen­tre d’examen en Afrique du con­cours de la fil­ière uni­ver­si­taire internationale. 

Ce cen­tre s’ajoute à la quin­zaine de cen­tres ouverts dans le monde, par lesquels passent la majorité des élèves inter­na­tionaux de l’X (élèves chi­nois, brésiliens, russ­es, viet­namiens, etc.). Deux étu­di­ants séné­galais ont été sélec­tion­nés et ont rejoint la pro­mo­tion 2015. 

“ L’Afrique sera essentielle pour les étudiants diplômés en 2016 ”

Au print­emps 2016, les étu­di­ants de Côte‑d’Ivoire et du Camer­oun ont égale­ment pu pos­er leur can­di­da­ture à ce concours. 

Dans le même temps, Poly­tech­nique a lancé et accom­pa­g­né l’établissement de parte­nar­i­ats priv­ilégiés entre le Séné­gal et trois lycées à class­es pré­para­toires français (Hen­ri-IV, Louis-Le-Grand et le lycée du Parc). Ces parte­nar­i­ats per­me­t­tent l’accueil en class­es pré­para­toires, à par­tir de sep­tem­bre 2016, de lycéens séné­galais d’excellence soutenus finan­cière­ment par l’État séné­galais, et qui béné­ficieront par­al­lèle­ment d’un par­rainage par le binet X‑Afrique.

SENSIBILISER AUX ENJEUX DE L’AFRIQUE

De la même manière que la Chine fait aujourd’hui pleine­ment par­tie du paysage pro­fes­sion­nel (marchés, parte­nar­i­ats, con­cur­rence, etc.) des élèves diplômés en 1996, l’École fait le pari que l’Afrique sera essen­tielle pour les étu­di­ants diplômés en 2016. Il est donc indis­pens­able de sen­si­bilis­er les étu­di­ants actuelle­ment à l’École aux oppor­tu­nités et aux défis que représente l’Afrique.

À cet égard, les stages de for­ma­tion humaine con­stituent pour les élèves une chance unique de pass­er six mois en Afrique, au con­tact étroit des sociétés dans lesquelles ils se trouvent. 

DÉVELOPPER LES RÉSEAUX

Au-delà de ces trois axes d’action prin­ci­paux, l’École con­tin­ue d’explorer active­ment de nom­breuses autres pos­si­bil­ités, en rela­tion avec les entre­pris­es intéressées à la crois­sance du con­ti­nent, avec les autorités locales, et avec les alum­ni par­fois forte­ment struc­turés comme au Maroc. 

Pour éten­dre sa capac­ité d’action, l’X a rejoint à l’automne 2015 le Réseau d’excellence en sci­ences de l’ingénieur de la fran­coph­o­nie (RESCIF), réseau qui réu­nit plusieurs insti­tu­tions du Nord et du Sud et qui favorise les ini­tia­tives entre ses mem­bres, en par­ti­c­uli­er dans les domaines des MOOCs et de l’entrepreneuriat. Des actions sont à atten­dre dans ces domaines à court terme. 

“ En dix-huit mois, l’X a pris le tournant de l’Afrique ”

À plus long terme, les nou­veaux pro­grammes de for­ma­tion en anglais de l’École per­me­t­tront de ren­forcer l’action de l’X en lui per­me­t­tant d’aborder l’Afrique anglo­phone. Déjà, des ini­tia­tives com­men­cent à être portées en dehors de l’Afrique fran­coph­o­ne, comme en Éthiopie dans le domaine des éner­gies renou­ve­lables en lien avec EDF. 

L’École a placé le con­ti­nent au coeur de ses préoc­cu­pa­tions à l’international. Les chantiers sont nom­breux et s’inscrivent dans le développe­ment à long terme des rela­tions inter­na­tionales de l’X.

La com­mu­nauté poly­tech­ni­ci­enne africaine s’étend et monte en puis­sance, tou­jours plus dynamique et tou­jours plus désireuse de met­tre son tal­ent au ser­vice du pro­grès de l’Afrique.

Abdourahmane Cissé (2001), ministre du Budget de la Côte-d’Ivoire, en visite à l’X
Abdourah­mane Cis­sé (2001), min­istre du Bud­get de la Côte‑d’Ivoire, en vis­ite à l’X en jan­vi­er 2016. © JÉRÉMY BARANDE – ÉCOLE POLYTECHNIQUE

MODÈLES ET EXEMPLES

Les exemples de parcours prestigieux d’anciens élèves africains, source d’inspiration pour les étudiants actuels, ne manquent pas. Ainsi de Rose Dieng-Kuntz (75), première femme africaine à intégrer l’X, à la carrière scientifique remarquable, de Tidjane Thiam (81), directeur général de Crédit suisse, de Tidjane Dème (94) (Google Afrique francophone) régulièrement classé parmi les personnalités les plus influentes du continent, du député à l’Assemblée nationale sénégalaise Mamadou Lamine Diallo (79), d’André Siaka (71), P‑DG de Routes d’Afrique et ancien patron des patrons camerounais, de Khalid Safir (87), wali du Grand Casablanca, de Chakib Benmoussa (76), ambassadeur du Maroc en France, d’Abdourahmane Cissé (2001), ministre du Budget de la Côte‑d’Ivoire, en visite à l’X en janvier 2016, pour n’en citer que quelques-uns.

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