Véronique ROUCHON (86)

L’histoire d’un très bon projet : celui de Véronique Rouchon (86) et de Lionel Quillet

Dossier : Le tissu des PME françaisesMagazine N°522 Février 1997
Par Véronique ROUCHON (86)

Véronique Rou­chon entre à l’X en 1986 avec une pas­sion : l’é­tude sci­en­tifique des oeu­vres d’art anci­ennes en vue de leur restau­ra­tion et de leur con­ser­va­tion. Au cours de son ser­vice mil­i­taire, elle ren­con­tre Lionel Quil­let, un col­lec­tion­neur de doc­u­ments anciens, pas­sion­né égale­ment par tous les aspects liés à leur restau­ra­tion et à leur con­ser­va­tion. Ils se mari­ent en 1990.

À sa sor­tie de l’É­cole, Véronique con­sacre qua­tre ans à appro­fondir sa for­ma­tion en sci­ences des matéri­aux (DEA et Doc­tor­at à l’U­ni­ver­sité de Paris VI — Paris VII) et à étudi­er l’His­toire de l’Art (Licence d’His­toire de l’Art à l’U­ni­ver­sité de Paris I).

Pen­dant ce temps, Lionel Quil­let crée un ate­lier de restau­ra­tion de doc­u­ments anciens, d’abord en région parisi­enne, puis sur l’Ile de Ré, où il a des attach­es famil­iales. Les con­nais­sances sci­en­tifiques de Véronique l’aident à amélior­er ses tech­niques et à nouer des rela­tions pro­fes­sion­nelles avec des spé­cial­istes de la Bib­lio­thèque nationale et des Archives nationales. L’ate­lier Quil­let répond avec suc­cès au cahi­er des charges de ces grandes insti­tu­tions, et un marché élar­gi s’ou­vre devant lui.

La SARL Quil­let compte aujour­d’hui 10 salariés, avec une per­spec­tive de développe­ment jusqu’à 20–25 salariés. Elle est spé­cial­isée dans la restau­ra­tion de doc­u­ments à plat : affich­es, plans calques, man­u­scrits, par­chemins, reg­istres. Elle fait par­tie des quelques ate­liers privés qui tra­vail­lent en parte­nar­i­at avec les insti­tu­tions publiques, nationales et régionales, qui lui assurent 90 % de son chiffre d’affaires.

Au sein de l’en­tre­prise, Véronique assure un rôle de con­sul­tante dans le domaines des inno­va­tions tech­niques, et de for­ma­trice du per­son­nel. Mais sa mis­sion prin­ci­pale se trou­ve à l’U­ni­ver­sité de La Rochelle. Elle y pré­pare, pour 1997, un pro­jet glob­al de recherche sur la sauve­g­arde du Pat­ri­moine écrit, aux trois stades de la restau­ra­tion des doc­u­ments, de leur con­ser­va­tion et de leur stock­age ; ce qui réclame des com­pé­tences mul­ti­ples : physi­co-chimie, biochimie, infor­ma­tique, et génie civ­il des bâti­ments. Ain­si un pôle de com­pé­tence pluridis­ci­plinaire unique en France est en voie de con­sti­tu­tion à La Rochelle. Ce pôle per­me­t­tra de dévelop­per une recherche uni­ver­si­taire directe­ment liée aux prob­lé­ma­tiques de ter­rain ren­con­trées par les con­ser­va­teurs et les restau­ra­teurs de doc­u­ments anciens.

Out­re le réc­it de son aven­ture, que nous avons été oblig­és de résumer, Véronique a bien voulu répon­dre à quelques ques­tions de l’AIMVER.

- Pen­siez-vous, à la sor­tie de l’X, en choi­sis­sant la voie de la Recherche dans un domaine qui vous pas­sion­nait, que vous alliez par­ticiper au lance­ment d’une PME ?

Documents restaurés J’é­tais bien décidée, à ma sor­tie de l’X, à tra­vailler dans un domaine lié à l’é­tude sci­en­tifique des oeu­vres d’Art. Les stages que j’avais effec­tués au Lab­o­ra­toire des Musées de France m’avaient entière­ment con­fortée dans cette optique. J’é­tais cepen­dant bien loin d’imag­in­er que je serais un jour l’as­so­ciée d’une entre­prise de restau­ra­tion de doc­u­ments anciens.

En réal­ité, mon par­cours et celui de Lionel ont été jalon­nés d’op­por­tu­nités que nous avons su saisir, en restant toute­fois fidèles à notre option pour la province et si pos­si­ble l’Ile de Ré, pour des raisons familiales.

Trois cir­con­stances favor­ables nous ont aidés : la créa­tion de l’U­ni­ver­sité de La Rochelle en 1993 m’a per­mis de pos­tuler pour un poste de maître de con­férences ; le marché de la restau­ra­tion de doc­u­ments anciens a subi une forte crois­sance au cours de ces dernières années ; enfin, la con­struc­tion du Pont de l’Ile de Ré a ren­du pos­si­ble l’in­stal­la­tion d’une entre­prise à l’an­née sur l’île. Le reste est affaire de capac­ité d’adap­ta­tion, de volon­té et de ténacité.

Dans ce lance­ment d’en­tre­prise, le prob­lème du finance­ment a‑t-il été une grosse préoc­cu­pa­tion ?

Toute entre­prise qui suit une forte crois­sance a besoin de tré­sorerie. Bien évidem­ment, les ban­ques sont nos parte­naires priv­ilégiés. Nous avons pu égale­ment béné­fici­er des aides sur les créa­tions d’emploi et sur les investisse­ments, dis­pen­sées par le Départe­ment et la Région, aux petites entre­pris­es en forte crois­sance. Ces aides nous ont per­mis d’avoir en 1996 une tré­sorerie très saine. Notre car­net de com­man­des pour 1997 nous laisse encore envis­ager une forte crois­sance, avec la créa­tion prob­a­ble de 5 emplois nou­veaux. Le finance­ment de cette crois­sance est donc effec­tive­ment une de nos préoc­cu­pa­tions actuelles, mais des solu­tions existent.

Une bonne moitié de vos clients sont implan­tés en région parisi­enne, ain­si que de nom­breux pro­fes­sion­nels de votre méti­er. N’est-ce pas un gros hand­i­cap d’être implan­té dans une région excentrée ?

Franche­ment non. Les plus gros con­cur­rents de l’Ate­lier Quil­let ne sont d’ailleurs pas implan­tés à Paris, ni en région parisi­enne, mais dans dif­férentes provinces de France. L’Ate­lier effectue la prise en charge et la livrai­son de ses com­man­des sur Paris tous les quinze jours en moyenne. Ce rythme n’est pas trop astreignant pour notre organ­i­sa­tion et con­vient jusqu’à présent à notre clien­tèle. De plus, l’Ate­lier tra­vaille avec de nom­breux parte­naires implan­tés en province (archives départe­men­tales, archives munic­i­pales, bib­lio­thèques, musées…).


Votre pro­jet famil­ial se déroule-t-il aus­si bien que votre pro­jet pro­fes­sion­nel ?

Lorsque nous avons fait le choix de quit­ter Paris, nous avons misé sur la qual­ité de vie que pou­vait offrir un site comme celui de l’Ile de Ré. Il est plus facile, lorsqu’on vit en province, d’al­li­er vie pro­fes­sion­nelle et vie famil­iale. De plus, mon poste d’en­seignant- chercheur à l’U­ni­ver­sité de La Rochelle me laisse une grande liber­té pour organ­is­er mon tra­vail à ma guise, et c’est avec sérénité que j’at­tends la venue de mon pre­mier enfant pour le mois de février.

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