Biotechnologie : biogaz et bioraffinerie

Étymologie :
À propos des biotechnologies

Dossier : ExpressionsMagazine N°726 Juin/Juillet 2017
Par Pierre AVENAS (X65)

Les biotech­nolo­gies sont des tech­nolo­gies faisant inter­venir des êtres vivants. Elles néces­si­tent des con­nais­sances en biolo­gie, rel­e­vant sou­vent du génie géné­tique. Si biotech­nolo­gie est un néol­o­gisme récent, apparu dans le Petit Larousse 1982, les ter­mes tech­nolo­gie et biolo­gie sont beau­coup plus anciens, et leur his­toire mérite d’être con­tée. On recon­naît ici trois élé­ments d’origine grecque : bio-, du grec bios « vie », tech­no-, du grec tekhnê « art, tech­nique » et –logie, calqué sur le grec –logia « traité, dis­cours », dérivé de logos « parole, raison ».

La technologie chez les anciens et les modernes

Le grec tekhnê désig­nait d’abord l’art, l’habileté manuelle. Son dérivé tekhnikos a abouti en français à une tech­nique, ou à la tech­nique en général.

Le terme tekhnolo­gia appa­raît en grec tardif pour le dis­cours sur la tech­nique, et c’est le pre­mier sens de tech­nolo­gie en français, et de tech­nol­o­gy en anglais, surtout à pro­pos de l’enseignement tech­nologique, des IUT ou de l’UTC en France, du MIT ou du Cal­tech aux États-Unis.

Toute­fois, depuis les années 1960, tech­nol­o­gy, et à sa suite tech­nolo­gie en français, s’emploient aus­si, sinon plus sou­vent, pour désign­er un ensem­ble de tech­niques ou une tech­nique par­ti­c­ulière­ment com­plexe, faisant appel aux dernières décou­vertes scientifiques.

On évoque alors les nou­velles tech­nolo­gies, dont les biotech­nolo­gies, la haute tech­nolo­gie, de l’anglais high-tech­nol­o­gy, d’où high-tech, entré dans le Petit Larousse 1989 !

D’ailleurs, on par­le aus­si de biotech, en lieu et place de biotech­nolo­gie, ou de biotech­nique qui existe aussi.

La biologie, une science récente

Certes, on trou­ve en grec tardif le verbe biolo­gein, mais il est trompeur : il sig­ni­fie « racon­ter la vie de quelqu’un », à par­tir du grec bios dans le sens par­ti­c­uli­er de « réc­it de la vie », sens qui sub­siste dans biogra­phie.

En fait, le terme biolo­gie n’a pas d’équivalent en grec ancien, ni en latin. Et pour cause, c’est un néol­o­gisme qui n’apparaît qu’en 1802 dans l’ouvrage du nat­u­ral­iste alle­mand Tre­vi­ranus : Biolo­gie oder Philoso­phie der leben­den Natur, c’est-à-dire Biolo­gie ou Philoso­phie de la nature vivante.

Son con­frère Lamar­ck l’adopte immé­di­ate­ment en français, biolo­gie, plus per­ti­nent pour désign­er la sci­ence de la vie, que l’expression sci­ences naturelles, plus large car elle com­porte aus­si la géolo­gie. Le mot est aus­si adop­té rapi­de­ment en anglais, biol­o­gy.
Et en défini­tive, dans biotech­nolo­gie (en anglais biotech­nol­o­gy, attesté en 1921), le pré­fixe bio– indique un rap­port avec la vie, mais en même temps une inter­ven­tion de la biologie.

Épilogue

L’importance gran­dis­sante des ques­tions de san­té et d’écologie se voit dans le vocab­u­laire : on observe une mul­ti­pli­ca­tion assez éton­nante du pré­fixe bio- dans les mots. Ain­si, dans le Petit Larousse 2017, de bio à biovig­i­lance en pas­sant par biogra­phie, biolo­gie et biotech­nolo­gie, on ne compte pas moins de 70 mots (et même 90 en comp­tant leurs dérivés, comme biologique) com­mençant par bio-, y com­pris bio­tique et biotope, mais pas biotite, qui désigne un mica noir ain­si nom­mé en l’honneur du physi­cien Jean-Bap­tiste Biot (X 1794).

D’autre part, l’adjectif biologique a pris un sens par­ti­c­uli­er avec l’agri­cul­ture biologique, qui four­nit des pro­duits biologiques, dits bio.

On ne con­fon­dra pas le bio, dans l’alimentation, la bio, dans l’enseignement et la recherche, et une bio, qui racon­te une vie !


En illus­tra­tion : À par­tir de bio­masse, de matière biodégrad­able, de biodéchet ou de biopét­role, par bio­con­ver­sion ou biosyn­thèse, une bio­raf­finer­ie pour­ra pro­duire un biogaz comme le bio­méthane, un bio­car­bu­rant comme le bioéthanol, un biodiésel, un bio­com­bustible, ou encore de la bioén­ergie. Cette biotech­nolo­gie, qui fait appel aux bio­sciences que sont la biolo­gie, la biochimie et la bio­physique, est à la base de toute une bio-indus­trie.

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