Une exposition d’histoire des sciences

Dossier : ExpressionsMagazine N°525 Mai 1997
Par Marie-Christine THOORIS

Dès l’o­rig­ine, le souci d’une instruc­tion solide­ment basée sur l’expérience en lab­o­ra­toire appa­raît dans l’enseignement de l’École polytechnique :

“Par rap­port au cours de physique, on a l’intention que les expéri­ences qui s’y fer­ont en présence des élèves, aient pour objet (…) ou de con­stater quelque phénomène nou­veau, ou de redress­er des erreurs dans les expli­ca­tions des faits déjà con­nus. Dans cette vue, on for­mera le pro­jet d’une série d’expériences les plus intéres­santes à ten­ter ; et la pub­lic­ité qui leur sera don­née, à mesure qu’elles seront éxé­cutées, con­tribuera effi­cace­ment au pro­grès de la sci­ence. ” (Jour­nal de l’École poly­tech­nique : Bul­letin du tra­vail fait à l’École cen­trale des travaux publics. Pre­mier cahi­er, ger­mi­nal an III).

Cent ans plus tard, le Livre du cen­te­naire de l’École poly­tech­nique inti­t­ule un chapitre : “L’École et la science ”.

Le général Brutin et le général Novacq inau­gurent l’exposition. 
© PHILIPPE LAVIALLE – ÉCOLE POLYTECHNIQUE

À tra­vers les biogra­phies de poly­tech­ni­ciens célèbres, il mon­tre l’importance de la part prise par l’École dans les pro­grès sci­en­tifiques du XIXe siè­cle. Dès l’introduction de cet ouvrage sont citées les célébrités sci­en­tifiques des pre­mières pro­mo­tions telles que Biot, Gay-Lus­sac, Dulong…, puis plus pré­cisé­ment par­mi les physi­ciens – Fres­nel, Bec­quer­el, Reg­nault – ou par­mi les astronomes, Ara­go. Ce sont ces mêmes célébrités sci­en­tifiques que l’on retrou­vera tout au long de l’exposition présen­tée à la bib­lio­thèque, inti­t­ulée “ Les objets sci­en­tifiques, un siè­cle d’enseignement et de recherche à l’École poly­tech­nique. Pro­mo­tions 1794 à 1900 ”.

Le pre­mier plan d’instruction de l’École, élaboré par Mon­ge, met l’accent sur les math­é­ma­tiques et la physique que l’on acquiert par l’expérience dans les laboratoires.

C’est pourquoi, dès l’origine, des col­lec­tions d’instruments de physique, des col­lec­tions de chimie, une bib­lio­thèque furent réu­nies par les physi­ciens Jaco­tot et Bar­ru­el. Choi­sis par­mi les objets rassem­blés par les con­fis­ca­tions révo­lu­tion­naires, ils ont été don­nés à l’École qui con­sti­tu­ait ses col­lec­tions en 1794 et 1795. Cet ensem­ble s’est accru tout au long du XIXe siè­cle d’objets acquis ou réal­isés spé­ciale­ment à la demande des enseignants dans le cadre des travaux pra­tiques des cours de physique et de chimie.

Depuis avril 1995, un musée virtuel sur le Web fait décou­vrir une par­tie de la col­lec­tion d’objets sci­en­tifiques anciens jusque-là peu acces­si­ble au pub­lic. Les images numérisées des instru­ments ne sont pas seule­ment une présen­ta­tion du fonds, elles illus­trent égale­ment le con­texte his­torique et tech­nique de leur réalisation.

Dans le même esprit, l’exposition qui se tient de mars à sep­tem­bre 1997, en évo­quant les poly­tech­ni­ciens ou les pro­fesseurs célèbres de l’École, per­met au ser­vice Pat­ri­moine de sor­tir une cinquan­taine d’objets de ses réserves. Cette expo­si­tion a pu être réal­isée grâce au sou­tien de la direc­tion de la com­mu­ni­ca­tion. Son inau­gu­ra­tion a eu lieu le 13 mars à l’occasion de la pas­sa­tion de la garde du Drapeau.

Un sort par­ti­c­uli­er a été réservé à l’évocation de Gay-Lus­sac, à tra­vers une ten­ta­tive de recon­sti­tu­tion de son lab­o­ra­toire qui présente, pour la pre­mière fois à l’École, la grande bal­ance de Gay-Lus­sac, en dépôt au musée Gay-Lus­sac de Saint-Léonard-de-Noblat, restau­rée par l’École poly­tech­nique et la Société des amis du musée Gay-Lussac.

Par ailleurs, un appareil à deux globes de verre, ayant appartenu à Gay-Lus­sac, a été restau­ré pour l’occasion, par Yves Bor­rel, souf­fleur de verre à l’École. Une cas­sette vidéo réal­isée par le ser­vice audio­vi­suel de l’École présente cette restauration.

Le tra­vail effec­tué autour de chaque objet n’est jamais exhaus­tif car il s’appuie unique­ment sur les col­lec­tions pat­ri­mo­ni­ales de l’École (Archives et Réserve de livres anciens). Les notices descrip­tives des appareils invi­tent à appro­fondir une con­nais­sance des tech­niques comme des théories. Elles sont un point de départ à des travaux plus appro­fondis, une invi­ta­tion à entre­pren­dre des recherch­es annex­es. Il faut saluer, à cette occa­sion, la con­tri­bu­tion sci­en­tifique pour l’optique de Guil­hem Gal­lot et pour la chimie de Louis Patard, tous deux doc­tor­ants dans les lab­o­ra­toires de l’École. Par ailleurs Yan­nick Courseaux, sci­en­tifique du con­tin­gent affec­té à la Bib­lio­thèque, agrégé d’histoire et doc­tor­ant, a par­ticipé active­ment à l’élaboration de l’exposition et de son cat­a­logue par un tra­vail de recherche bib­li­ographique très appro­fon­di. Seule une telle col­lab­o­ra­tion de sci­en­tifiques, d’historiens et de pro­fes­sion­nels de la doc­u­men­ta­tion per­met de met­tre en valeur le pat­ri­moine de l’École à tra­vers de nou­velles man­i­fes­ta­tions de ce type.

L’aspect esthé­tique de ces instru­ments de lab­o­ra­toire peut sus­citer autant d’émotion chez les pro­fanes que d’intérêt sci­en­tifique chez les spé­cial­istes : c’est finale­ment l’objectif de cette exposition.

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