ROLLON ou la Trêve du roi Charles

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°668 Octobre 2011Par : Jacques Henry, préface de Jean RenaudRédacteur : Arnaud Lépine (91)Editeur : Éditions Zurfluh – Andas

Rollon ou la trêve du roi CharlesAprès ses publi­ca­tions pré­cé­dentes, Un Doc­teur pour tous, saint Tho­mas d’Aquin, puis Dar­win mécon­nu, notre cama­rade qui signe sous le pseu­do­nyme de Jacques Hen­ry conti­nue à mêler his­toire et phi­lo­so­phie, mais cette fois au théâtre. Rol­lon ou la Trêve du roi Charles nous emmène en l’an 911, à Saint-Clair-sur-Epte, et nous y fait revivre l’un des épi­sodes fon­da­teurs de notre pays : l’allégeance du chef viking Hrol­fr au roi des Francs Charles III. Évé­ne­ment his­to­rique appris par coeur par des mil­lions d’élèves, mais dif­fi­ci­le­ment expli­cable : com­ment un Viking vivant de rapines a‑t-il pu deve­nir le fidèle vas­sal de son enne­mi d’hier ? Com­ment un roi a‑t-il pu confier l’une de ses plus riches pro­vinces à celui qui la ravageait ?

La pièce recons­ti­tue la ren­contre de deux hommes et de deux peuples que tout oppo­sait. Le style rap­pelle La guerre de Troie n’aura pas lieu, mais l’intrigue se dénoue à l’opposé : alors que tout sem­blait conver­ger vers une guerre inter­mi­nable, c’est la paix qui l’emporte, et avec elle l’ordre et la civi­li­sa­tion. Tra­gé­die grecque, intem­po­relle, gran­diose dans son décor et avec toutes les règles désuètes qui en font le charme : uni­té de lieu, de temps et d’action, pré­sence des chœurs, etc.

On pour­ra regret­ter une fin un peu rapide, mais l’idée n’est sans doute pas de tout expli­quer. Elle serait plu­tôt de sou­le­ver dans le lec­teur la ques­tion inté­rieure que cha­cun se pose si sou­vent : « Face aux évé­ne­ments, com­ment dois-je réagir ?

Je per­çois plus ou moins confu­sé­ment ce que je devrais faire pour le bien de ceux que je conduis, y com­pris mal­gré eux, et même contre eux. Mais tant d’éléments me por­te­raient vers une autre déci­sion, facile à brève échéance, mais qui ne mène à rien. Tout repose sur moi, que vais-je déci­der ? » Un dénoue­ment sans doute inex­pli­cable, donc, si ce n’est par la Pro­vi­dence et le sens de res­pon­sa­bi­li­té des chefs. Réflexion de fond, éga­le­ment, sur le pou­voir. L’alliance n’est pos­sible que parce qu’elle repose essen­tiel­le­ment sur deux per­sonnes, Hrol­fr-Rol­lon et Charles.

Aux grands hommes la hau­teur de vue pour prendre les grandes déci­sions, alors qu’autour les petits chefs ambi­tieux et fina­le­ment irres­pon­sables sont inca­pables de lever les yeux. Un éloge du cou­rage poli­tique, donc ? À vous de voir – cela en vaut la peine.

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