Pourquoi la maintenance ?

Dossier : La maintenanceMagazine N°564 Avril 2001Par Henri ARNOUX (46)

Dans son arti­cle ” Main­te­nance : un nou­veau regard sur la nor­mal­i­sa­tion ” Bernard Méchin nous explique entre autres com­ment un comité tech­nique du comité européen de nor­mal­i­sa­tion a défi­ni le terme main­te­nance, en com­pag­nie de 118 autres ter­mes, cela au bout de plus de trois ans de dis­cus­sions par­fois très vives. 

La main­te­nance est donc : ” L’ensem­ble de toutes les actions tech­niques, admin­is­tra­tives et de ges­tion durant le cycle de vie d’un bien, des­tinées à le main­tenir ou à le rétablir dans un état dans lequel il peut accom­plir la fonc­tion req­uise. ” Le terme de main­te­nance a déjà par lui-même une cer­taine con­no­ta­tion sta­tique et cette déf­i­ni­tion pour­rait à pre­mière lec­ture con­firmer ce sen­ti­ment. On pense au petit garçon de la légende hol­landaise qui enfonce son doigt dans le trou par lequel la digue en avarie laisse pass­er l’eau de la mer : il fait de la main­te­nance puisqu’il main­tient la digue dans un état dans lequel elle con­tin­ue à rem­plir sa fonc­tion req­uise, qui est d’ar­rêter la mer, et d’ailleurs il le dit : ” Je main­tiendrai “, même si son inter­ven­tion ne relève pas d’une tech­nique très élaborée. La main­te­nance serait-elle seule­ment cette fonc­tion statique ? 

Les arti­cles qui suiv­ent mon­treront au lecteur qu’il n’en est rien et que la main­te­nance est une activ­ité dynamique, qui évolue autant, sinon plus, que d’autres activ­ités indus­trielles d’au­jour­d’hui, et que par ailleurs la main­te­nance peut par­ticiper à la solu­tion de quelques-uns des grands prob­lèmes de notre époque : la sécu­rité des per­son­nes, l’emploi, la pro­tec­tion de l’environnement. 

La main­te­nance évolue, et cela depuis l’époque où elle a com­mencé à être, mod­este­ment d’abord, puis de façon plus affir­mée, une activ­ité recon­nue. À l’o­rig­ine, on avait ten­dance à inter­venir sur un matériel seule­ment quand il était en panne, c’est-à-dire que l’on fai­sait unique­ment ce qu’on appelle main­tenant de la main­te­nance cor­rec­tive, mais on a rapi­de­ment réal­isé qu’il était net­te­ment préférable d’in­ter­venir avant la défail­lance : le pas­sager d’un train n’ap­pré­cie pas telle­ment que la loco­mo­tive tombe en panne, et le pas­sager d’un avion aime encore bien moins qu’il y ait des prob­lèmes en vol ! 

De plus, il est presque tou­jours moins cher d’in­ter­venir avant plutôt qu’après la défail­lance, et on épargne les coûts indi­rects, qui peu­vent attein­dre des mon­tants très élevés, par exem­ple lorsqu’une défail­lance entraîne des dom­mages cor­porels ou des morts d’homme, ou des pol­lu­tions. La main­te­nance cor­rec­tive a donc pro­gres­sive­ment cédé la plus grande place à la main­te­nance préven­tive. (Même si l’ob­jec­tif ” zéro défaut ” est très à la mode, il y aura tou­jours des pannes, on ne ver­ra donc pas dis­paraître la main­te­nance corrective.) 

Inter­venir avant la défail­lance, c’est bien, mais encore faut-il savoir quand ? Philippe Chenevi­er rap­pelle au début de son arti­cle sur la main­te­nance des Air­bus qu’en 1930 la pre­mière règle d’en­tre­tien aéro­nau­tique édic­tée par l’ad­min­is­tra­tion améri­caine stip­u­lait que ” les instru­ments et les équipements devront être révisés à inter­valles suff­isants pour assur­er leur fonc­tion­nement cor­rect à tout moment ” ce qui était indis­cutable, mais quelque peu insuff­isant pour en déduire des règles opéra­tionnelles précises. 

Il a donc fal­lu met­tre au point des échéanciers en ten­ant compte de la longévité des com­posants d’un matériel. Cette longévité peut s’ex­primer en temps, en général nom­bre d’heures de fonc­tion­nement, mais aus­si dans cer­tains cas en durée cal­endaire, ou en nom­bre d’opéra­tions (nom­bre d’at­ter­ris­sages pour un pneu d’avion, nom­bre de déclenche­ments pour un disjoncteur). 

On peut aus­si ren­con­tr­er des com­bi­naisons de critères. Ces échéanciers définis­sent des pro­grammes d’opéra­tions plus ou moins impor­tants com­prenant des vis­ites, des con­trôles et des rem­place­ments de pièces, exé­cutés a pri­ori ou en fonc­tion de l’é­tat de la pièce. On par­lera alors de main­te­nance pro­gram­mée, ou de main­te­nance sys­té­ma­tique si les opéra­tions sont déclenchées par le comp­teur de temps ou d’u­nités d’usage, sans qu’il soit procédé à un con­trôle d’é­tat. Pour pren­dre un exem­ple de la vie courante, le pro­prié­taire d’une voiture qui con­fie sa voiture au garag­iste tous les 10 000 ou 20 000 kilo­mètres pour une révi­sion fait de la main­te­nance systématique. 

On a donc pro­gressé depuis la main­te­nance après défail­lance, mais cette procé­dure n’évite pas deux risques opposés : si la péri­od­ic­ité retenue est trop faible, on rem­place des com­posants qu’on aurait pu main­tenir plus longtemps en ser­vice, ce qui coûte cher à la fois en com­posants et en temps de travail1. Si au con­traire, elle est trop longue on risque de voir sur­venir quand même des défail­lances, et on n’au­ra pas atteint le but recher­ché. On s’ef­forcera donc de con­naître l’é­tat du bien con­sid­éré, de façon à n’in­ter­venir que lorsque c’est nécessaire. 

Pour cela on suiv­ra l’évo­lu­tion de paramètres représen­tat­ifs de l’é­tat du bien con­sid­éré : con­som­ma­tion spé­ci­fique d’én­ergie ou de matières (par exem­ple la masse de com­bustible con­som­mé par kWh pour une unité de pro­duc­tion d’élec­tric­ité), niveau des tem­péra­tures ou des pres­sions ; on pour­ra aus­si procéder à des con­trôles non destruc­tifs, qui ne néces­si­tent aucun démon­tage (analyse des huiles, analyse des vibra­tions, ther­mo­gra­phie, etc.). 

On n’in­ter­vien­dra que si la valeur de ces paramètres ou le résul­tat de ces essais révè­lent qu’une opéra­tion de main­te­nance est néces­saire. L’é­tude de ces paramètres ou des résul­tats de ces essais donne d’ailleurs en général des indi­ca­tions utiles sur l’in­ter­ven­tion à exé­cuter, et sur les com­posants en fin de vie. Cette main­te­nance, qui est tou­jours de la main­te­nance préven­tive, s’ap­pelle de la main­te­nance con­di­tion­nelle.

Ce suivi des paramètres représen­tat­ifs de l’é­tat d’un bien va tout naturelle­ment con­duire à s’in­téress­er à leur évo­lu­tion, dis­ons pour faire sim­ple à leur dérivée, et, à par­tir de la valeur actuelle d’un paramètre don­né con­sid­éré comme représen­tatif et de sa dérivée, essay­er de déter­min­er à l’a­vance à quel moment ce paramètre va attein­dre la cote d’alerte. On aura donc la pos­si­bil­ité de faire à l’a­vance une pro­gram­ma­tion qui échap­pera aux défauts sig­nalés à pro­pos de la main­te­nance sys­té­ma­tique. On est alors au stade de la main­te­nance prévi­sion­nelle. (Cer­tains par­lent de main­te­nance pré­dic­tive, mais il vaut mieux éviter ce terme qui a un léger par­fum de prophétie, voire de voyance…) 

Il n’a été ques­tion jusqu’i­ci que de la main­te­nance d’un bien qui existe, et on pour­rait en con­clure que la main­te­nance com­mence avec la vie opéra­tionnelle de ce bien, mais ce serait une lourde erreur. En réal­ité, il faut com­mencer très tôt à penser à la main­te­nance d’un bien, et on notera que dans la déf­i­ni­tion de la main­te­nance on cite ” L’ensem­ble de toutes les actions tech­niques, admin­is­tra­tives et de ges­tion durant le cycle de vie d’un bien ” or le cycle de vie, selon la même norme, débute à la con­cep­tion du bien. 

La con­cep­tion du bien ne sig­ni­fie pas le moment où sont arrêtées ses spé­ci­fi­ca­tions mais bien le moment où l’on définit les per­for­mances atten­dues et le pro­gramme d’ac­tiv­ité, les deux notions con­sti­tu­ant un tout. Pour con­serv­er à un bien les per­for­mances souhaitées par l’ex­ploitant en respec­tant le pro­gramme d’ac­tiv­ité qu’il a défi­ni, il faut prévoir un pro­gramme de main­te­nance qui dans la plu­part des cas con­tien­dra à inter­valles réguliers un arrêt com­plet de son fonctionnement. 

L’ar­ti­cle de Jean-Louis Rotru­bin et d’Em­manuel Chol nous mon­tre que la disponi­bil­ité opéra­tionnelle d’un sous-marin nucléaire lanceur d’en­gins, avec toutes les con­di­tions de sécu­rité que demande la part du nucléaire à bord de ces navires, exige une longue péri­ode d’indisponi­bil­ité pen­dant laque­lle tous les équipements sont débar­qués, vis­ités et remis en état si besoin est. Dans l’in­dus­trie, on par­lera des ” grands arrêts ” qui ont la même finalité. 

Naturelle­ment il faut aus­si penser à la main­te­nance au moment de l’étab­lisse­ment des plans et spé­ci­fi­ca­tions. L’ar­ti­cle de Philippe Chenevi­er déjà cité mon­tre que depuis le temps où l’ad­min­is­tra­tion améri­caine de l’avi­a­tion demandait des révi­sions à des inter­valles suff­isants pour assur­er un fonc­tion­nement cor­rect à tout moment, les régle­men­ta­tions ont énor­mé­ment évolué et la déf­i­ni­tion d’un plan de main­te­nance est encadrée par des pre­scrip­tions extrême­ment rigoureuses qui ont un impact évi­dent sur la con­cep­tion même du bien. 

Cette évo­lu­tion, qui appa­raît de façon par­ti­c­ulière­ment frap­pante dans le cas du trans­port aérien, s’ex­plique facile­ment par une évo­lu­tion de nos tech­niques qu’on pour­rait, de façon évidem­ment sim­pliste et réduc­trice, sym­bol­is­er par la fameuse devise olympique : Citius, altius, for­tius. Dans le cas du trans­port aérien, cela peut d’une cer­taine manière résumer l’évo­lu­tion des avions qui trans­portent de plus en plus vite et à une alti­tude de plus en plus élevée des pas­sagers de plus en plus nom­breux pour aller de plus en plus loin. 

Mais en con­trepar­tie, les con­séquences des acci­dents sont de plus en plus lour­des, et il est donc impératif de réduire ce risque d’ac­ci­dent, même si on ne doit jamais oubli­er que le risque zéro n’ex­iste pas. 

On peut naturelle­ment tenir le même raison­nement à pro­pos des cen­trales nucléaires ou des gross­es unités de pro­duc­tion chim­iques, pour ne citer que ces deux exem­ples. Dans tous les cas, une main­te­nance bien conçue et stricte­ment exé­cutée con­stituera, en par­al­lèle avec un respect rigoureux des règles de mise en œuvre, un des piliers de la sécurité. 

Cette sécu­rité con­cerne naturelle­ment les per­son­nes, mais elle con­cerne aus­si l’envi­ron­nement. On peut rap­pel­er par exem­ple qu’à l’oc­ca­sion des deux dernières marées noires on a mis en cause la main­te­nance insuff­isante des deux navires sin­istrés. Mais la main­te­nance inter­vient aus­si pour la pro­tec­tion de l’en­vi­ron­nement dans des domaines beau­coup moins médi­atisés. Tout d’abord, la ” fonc­tion req­uise ” à laque­lle il est fait référence dans la déf­i­ni­tion de la main­te­nance inclut dans sa descrip­tion un ren­de­ment nom­i­nal que le con­struc­teur s’ef­forcera de ren­dre le plus élevé pos­si­ble et que la main­te­nance aura à charge de main­tenir à ce niveau. 

Un matériel bien main­tenu con­som­mera donc un min­i­mum de ressources naturelles, générale­ment non renou­ve­lables, et pro­duira un min­i­mum de rejets. Cette pro­tec­tion de l’en­vi­ron­nement est évidem­ment cru­ciale dans des activ­ités directe­ment liées à l’en­vi­ron­nement telles que la pro­duc­tion et la dis­tri­b­u­tion de l’eau où un dys­fonc­tion­nement con­duira soit à dis­tribuer de l’eau pol­luée, soit à en ren­voy­er dans les riv­ières ou les nappes phréa­tiques. Cette liai­son entre la main­te­nance et l’en­vi­ron­nement est exam­inée plus en détail dans un des arti­cles de ce numéro : ” Main­te­nance et environnement “. 

Un autre aspect plutôt mécon­nu con­cerne la durée de vie des instal­la­tions. Une usine où la main­te­nance est bien exé­cutée dur­era plus longtemps qu’une usine mal entretenue. Cela aura des réper­cus­sions pos­i­tives dans deux secteurs, qu’on aurait plutôt ten­dance à con­sid­ér­er comme antag­o­nistes : la ges­tion finan­cière et la pro­tec­tion de l’environnement. 

Sur le plan financier, l’aug­men­ta­tion de la durée de vie d’un bien est syn­onyme d’al­longe­ment de la durée d’amor­tisse­ment, et elle a donc un effet posi­tif du point de vue de la ges­tion finan­cière de l’en­tre­prise. Mais en même temps elle réduit le rythme de con­som­ma­tion des matières pre­mières néces­sitées par la con­struc­tion de l’u­nité de pro­duc­tion : il y a en quelque sorte un amor­tisse­ment écologique qui décroît en même temps que l’amor­tisse­ment financier. 

On doit soulign­er à ce sujet que l’ac­croisse­ment de la taille des unités de pro­duc­tion, sig­nalé plus haut, fait que ces prélève­ments de matières pre­mières sont loin d’être négligeables. 

L’ar­ti­cle de Mar­cel Saba­ton nous décrit le pro­gramme ” durée de vie ” de l’EDF dont l’ob­jec­tif est de pro­longer la durée de vie de cer­taines cen­trales, et notam­ment des cen­trales nucléaires, au-delà de la durée de vie prévue au moment de leur con­cep­tion. On con­state, en lisant cet arti­cle, que la main­te­nance des cen­trales nucléaires fait appel à toutes les ressources sci­en­tifiques actuelles, y com­pris au niveau de la recherche fon­da­men­tale, sans oubli­er la rigueur dont les arti­cles précédem­ment cités nous ont mon­tré la nécessité. 

L’im­por­tance de la main­te­nance dans la vie de l’en­tre­prise, son car­ac­tère trans­ver­sal, puisque nous venons de voir qu’elle met en jeu toutes les tech­nolo­gies exis­tantes, ont con­duit les entre­pris­es et les pou­voirs publics à entre­pren­dre un tra­vail de nor­mal­i­sa­tion d’un type orig­i­nal. L’ar­ti­cle de Bernard Méchin nous mon­tre qu’il ne s’ag­it plus de nor­malis­er des objets, ce qui n’est déjà pas sim­ple, mais des con­cepts, ce qui est encore plus com­pliqué, et une des tâch­es impor­tantes des nor­mal­isa­teurs a été de don­ner de ces con­cepts une déf­i­ni­tion sur laque­lle l’ensem­ble des par­tic­i­pants, à l’échelle de l’Eu­rope, soit d’ac­cord et cela ne fut pas tou­jours un tra­vail aisé ; il s’agis­sait en effet de trou­ver des déf­i­ni­tions accept­a­bles aus­si bien par des pays nordiques que par des pays méditer­ranéens, en dépit des dif­férences cul­turelles qui peu­vent sépar­er ces pays aus­si bien que la dis­tance. Il en a été de même pour la norme européenne pour la pré­pa­ra­tion des con­trats de main­te­nance, qui devait rester com­pat­i­ble avec des sys­tèmes et des tra­di­tions juridiques extrême­ment diverses. 

La main­te­nance est donc une fonc­tion impor­tante de l’en­tre­prise, et ce serait une regret­table erreur de ne la con­sid­ér­er que comme un poste de dépens­es et par con­séquent de tout faire pour réduire les coûts de main­te­nance, comme cela sem­ble mal­heureuse­ment être actuelle­ment le cas (voir l’ar­ti­cle de Daniel Dunet sur le poids économique de la main­te­nance). Cela per­met certes d’amélior­er la rentabil­ité immé­di­ate, mais au prix d’une dégra­da­tion de l’é­tat de l’outil de tra­vail et d’une réduc­tion de sa durée de vie2. 

Une main­te­nance bien organ­isée est au con­traire un fac­teur de pro­duc­tiv­ité, par le main­tien des car­ac­téris­tiques de fonc­tion­nement de l’outil de tra­vail et le main­tien de sa sécurité. 

Mais ce serait encore une erreur dans ce sur­vol de la main­te­nance de rester à l’in­térieur du cadre étroit de l’en­tre­prise, on doit aus­si con­sid­ér­er qu’il s’ag­it d’une activ­ité économique qui peut par­ticiper de façon sig­ni­fica­tive à la solu­tion de quelques-uns des prob­lèmes majeurs du siè­cle qui com­mence : l’emploi, la sécu­rité des per­son­nes, la pro­tec­tion de l’en­vi­ron­nement. Les dif­férents arti­cles de ce numéro spé­cial de La Jaune et la Rouge qui ont été évo­qués per­me­t­tront au lecteur de se faire une idée plus pré­cise des enjeux de cette activ­ité et de son impor­tance dans notre société technique. 

Enfin, n’ou­blions pas le poids économique et social de la main­te­nance. L’ar­ti­cle de Daniel Dunet nous décrit la sit­u­a­tion actuelle du marché de la main­te­nance. L’im­por­tance de ce marché est mal con­nue en rai­son du fait que la main­te­nance est une activ­ité trans­ver­sale qui ne con­stitue pas une branche indus­trielle, et que de ce fait elle est plus dif­fi­cile à pren­dre en compte. 

On voit que la main­te­nance indus­trielle représente à l’échelle française un vol­ume d’ac­tiv­ités de l’or­dre de 23 mil­liards d’eu­ros, et que la main­te­nance immo­bil­ière et ter­ti­aire représente de son côté un vol­ume d’af­faires de l’or­dre de 18 mil­liards d’eu­ros. En ajoutant la main­te­nance des ouvrages d’art le total des dépens­es con­sacrées à la main­te­nance est de l’or­dre de 46 mil­liards d’eu­ros. Ces mon­tants impor­tants sont d’au­tant plus sig­ni­fi­cat­ifs qu’il s’ag­it d’une activ­ité de ser­vices dans laque­lle la part ” main-d’œu­vre ” est prépondérante (de l’or­dre de 70 %) et qui requiert des pro­fes­sion­nels qual­i­fiés dans des spé­cial­ités très diverses. 

On cit­era tout d’abord les travaux de main­te­nance pro­pre­ment dits qui deman­dent en général des pro­fes­sion­nels qual­i­fiés et dans cer­tains cas une haute qual­i­fi­ca­tion, assez fréquem­ment com­plétée par une habil­i­ta­tion spé­ciale (travaux sur les instal­la­tions élec­triques ou travaux avec risque d’ex­po­si­tion aux radi­a­tions : nucléaire ou médi­cal). Mais comme on l’a déjà dit plus haut, il ne faut pas se lim­iter aux opéra­tions de main­te­nance pro­pre­ment dites, mais penser à la pré­pa­ra­tion à la main­te­nance qui exig­era de nom­breux spé­cial­istes dans les bureaux d’é­tude pour toutes les études de sûreté de fonctionnement3, d’analyse de pannes, de nou­velles méth­odes de main­te­nance telles que la main­te­nance cen­trée sur la fiabilité4, etc. 

Il ne faut pas oubli­er non plus le tra­vail d’élab­o­ra­tion de la doc­u­men­ta­tion tech­nique qui demande des rédac­teurs de doc­u­men­ta­tion, des dessi­na­teurs, des tra­duc­teurs tech­niques, des cod­ifi­ca­teurs… Il s’ag­it là de véri­ta­bles métiers et non de petits boulots, selon l’ex­pres­sion consacrée. 

L’ar­ti­cle de Daniel Dunet nous mon­tre égale­ment qu’il ne faut pas con­sid­ér­er seule­ment la main­te­nance indus­trielle, mais égale­ment la main­te­nance immo­bil­ière et ter­ti­aire qui est d’une impor­tance économique com­pa­ra­ble en ter­mes de bud­gets et d’ef­fec­tifs. Il s’ag­it de la main­te­nance d’im­meubles qui peu­vent être des immeubles d’habi­ta­tion, des immeubles de bureaux, ou des immeubles à voca­tion spé­ci­fique : grandes sur­faces com­mer­ciales, théâtres, musées, hôpitaux… 

Tous ces immeubles sont munis d’équipements tech­niques de plus en plus impor­tants et de plus en plus com­plex­es : ascenseurs, cen­trales de chauffage ou de con­di­tion­nement d’air, réseaux de toutes sortes selon le type d’im­meubles (eau, eaux usées, eau chaude, air com­primé, vide, télé­phone, télévi­sion, réseau infor­ma­tique, etc.), sys­tèmes de sur­veil­lance, et la sûreté de fonc­tion­nement de ces sys­tèmes peut devenir vitale. 

Une bonne main­te­nance est donc un impératif aus­si pour ces immeubles et requiert des pro­fes­sion­nels con­fir­més. Cet aspect de la main­te­nance n’a pas été traité dans les arti­cles qui suiv­ent, mais il ne doit être ni oublié, ni sous-estimé. Sans entr­er dans toutes les con­séquences, il suf­fit de citer les prob­lèmes de sécu­rité que peut entraîn­er une main­te­nance inadap­tée dans un hôpi­tal ou dans un grand immeu­ble de bureaux.
Le total des dépens­es con­sacrées à la main­te­nance est, on l’a dit, de l’or­dre de 46 mil­liards d’eu­ros. Il con­vient d’a­jouter que si l’ef­fec­tif du per­son­nel de main­te­nance demeure à peu près con­stant, l’é­tude de la pyra­mide des âges con­duit à prévoir de nom­breux départs en retraite dans les prochaines années. Il y aura donc un besoin impor­tant en per­son­nel de main­te­nance à sat­is­faire à brève échéance. 

En pré­parant le som­maire de ce numéro on n’a pas voulu se lim­iter stricte­ment au cadre français, et notre cama­rade Mek­ki Zidi a bien voulu nous présen­ter un état de la main­te­nance en Tunisie. Son arti­cle nous mon­tre que la néces­sité de cette activ­ité est par­faite­ment com­prise dans son pays. 

Pour ter­min­er sur une note humoris­tique, on détourn­era deux slo­gans pub­lic­i­taires bien connus : 

La main­te­nance ne coûte cher qu’a­vant la panne.
La main­te­nance, c’est dif­fi­cile, c’est cher, mais ça rap­porte gros.

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1. Sans oubli­er que des démon­tages trop fréquents ne sont pas favor­ables à la longévité du bien.
2. Sans oubli­er les risques pour la qual­ité des pro­duits ou des services.
3. Pour les lecteurs qui ne dis­poseraient pas d’un recueil de normes sur la main­te­nance, la sûreté de fonc­tion­nement est définie comme ” l’ensem­ble des pro­priétés qui définis­sent la disponi­bil­ité et les fac­teurs qui la con­di­tion­nent : fia­bil­ité, disponi­bil­ité, main­ten­abil­ité et logis­tique de maintenance “.
4. Ceci est la tra­duc­tion du sigle RCM (Reli­a­bil­i­ty cen­tered main­te­nance) qui représente une méthode util­isée par l’EDF sous le sigle OMF (Opti­mi­sa­tion de la main­te­nance par la fiabilité).

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