Liens entre progrès technologiques et identifications des contaminants

Peut-on éliminer les substances chimiques dangereuses du milieu marin ?

Dossier : Océans et littoralMagazine N°575 Mai 2002
Par Michel MARCHAND

Pollution marine et contamination chimique

Pollution marine et contamination chimique

Le GESAMP (groupe mixte d’ex­perts char­gés d’é­tu­dier les aspects scien­ti­fiques de la pol­lu­tion des mers) défi­nit la pol­lu­tion marine comme » intro­duc­tion par l’homme, direc­te­ment ou indi­rec­te­ment, de sub­stances ou d’éner­gie dans le milieu marin (y com­pris les estuaires) occa­sion­nant des effets néfastes tels que nui­sances envers les res­sources bio­lo­giques, risques pour la san­té de l’homme, entraves aux acti­vi­tés mari­times (y com­pris la pêche), alté­ra­tion de la qua­li­té de l’eau de mer du point de vue de son uti­li­sa­tion et dégra­da­tion des valeurs d’a­gré­ment « .

La pol­lu­tion chi­mique n’est donc qu’une des moda­li­tés pos­sibles de la per­tur­ba­tion anthro­pique des milieux marins qui com­prend aus­si la pol­lu­tion bac­té­rio­lo­gique, la pol­lu­tion ther­mique, les effets liés à des apports de macro­dé­chets, de matières sédi­men­taires ou l’in­tro­duc­tion d’es­pèces allochtones.

Concer­nant les sub­stances chi­miques, le mot pol­lu­tion est néces­sai­re­ment asso­cié à l’ob­ser­va­tion d’ef­fets néfastes sur la faune et la flore marines. En leur absence, il convient de par­ler plu­tôt de conta­mi­na­tion chi­mique des milieux aqua­tiques, dési­gnant la simple pré­sence de sub­stances dans le milieu.

Figure 1 – Liens entre pro­grès tech­no­lo­giques et iden­ti­fi­ca­tions des contaminants

Figure 2​– Rela­tion entre la pro­duc­tion de DDT et de PCB aux États-Unis et les niveaux de conta­mi­na­tion obser­vés dans des carottes sédi­men­taires du lac Ontario

L’ob­ser­va­tion de la qua­li­té du milieu marin, l’é­va­lua­tion des niveaux de conta­mi­na­tion chi­mique et de leurs varia­tions spa­tiales et tem­po­relles néces­sitent la mise en œuvre de pro­grammes de sur­veillance, tels que le RNO (Réseau natio­nal d’ob­ser­va­tion), et l’exis­tence d’ou­tils ana­ly­tiques per­for­mants et fiables. Les années soixante et soixante-dix, qui ont été consa­crées à la recherche des » mau­vais acteurs » pour l’en­vi­ron­ne­ment, ont ain­si per­mis de mon­trer le lien qui peut exis­ter entre les pro­grès de la mesure et l’i­den­ti­fi­ca­tion de cer­tains conta­mi­nants chi­miques. Trois exemples illus­trent ces propos.

La pro­duc­tion et l’u­sage des PCB ont débu­té vers 1930 et ce n’est qu’en 1966 qu’un cher­cheur sué­dois, S. Jen­sen, les iden­ti­fie pour la pre­mière fois dans l’en­vi­ron­ne­ment, dans l’ar­chi­pel de Stock­holm (figure 1). Cette décou­verte était consé­cu­tive à la mise au point quelques années aupa­ra­vant d’un nou­veau détec­teur en chro­ma­to­gra­phie en phase gazeuse, le détec­teur à cap­teurs d’élec­trons. Quelques années plus tard, les recherches démon­traient que la conta­mi­na­tion des PCB s’é­ten­dait à l’é­chelle pla­né­taire. Le second exemple montre qu’il a fal­lu attendre 1950 pour savoir que la chlo­ra­tion des eaux, pra­ti­quée depuis le début du XXe siècle pour leur dés­in­fec­tion, géné­rait des sub­stances vola­tiles toxiques, comme le chloroforme.

Enfin la figure 2 illustre les effets d’une réduc­tion à la source des apports en DDT (il s’a­git d’un insec­ti­cide chlo­ré) et en PCB (sub­stances orga­no­chlo­rées uti­li­sées notam­ment comme iso­lants dans les trans­for­ma­teurs élec­triques) sur la concen­tra­tion obser­vée dans des carottes sédi­men­taires pré­le­vées dans le lac Onta­rio, qui per­mettent de dis­po­ser d’un enre­gis­tre­ment daté du niveau de pré­sence de ces sub­stances dans le milieu. Il y a une cor­ré­la­tion totale entre cette pré­sence et les volumes pro­duits aux États-Unis sur une période contem­po­raine de qua­rante ans.

Plus géné­ra­le­ment, la qua­li­té de la mesure condi­tionne toute conclu­sion sur la conta­mi­na­tion de l’en­vi­ron­ne­ment. Par exemple, dans les années soixante-dix, il a été recon­nu que seuls quelques labo­ra­toires au niveau mon­dial étaient véri­ta­ble­ment capables de déter­mi­ner la teneur en plomb de l’eau de mer, abou­tis­sant à un para­doxe appa­rent : plus les études se mul­ti­pliaient au fil des années, plus les teneurs mesu­rées de cer­tains conta­mi­nants, notam­ment les métaux, deve­naient faibles, tra­dui­sant en réa­li­té non pas une évo­lu­tion à la baisse de la conta­mi­na­tion chi­mique dans l’en­vi­ron­ne­ment mais plu­tôt une maî­trise ana­ly­tique de plus en plus grande des équipes scien­ti­fiques impli­quées dans ce type d’études.

Cette évo­lu­tion de la qua­li­té de la mesure ana­ly­tique se tra­duit par des termes que les chi­mistes aujourd’­hui connaissent bien : exer­cice d’in­ter­ca­li­bra­tion, usage de maté­riaux de réfé­rence, salles » blanches « , bonnes pra­tiques de laboratoire…

L’é­tude des effets des conta­mi­nants chi­miques sur la faune et la flore marines consti­tue un enjeu com­plexe qui peut se décli­ner sché­ma­ti­que­ment selon deux niveaux d’ap­proche : celui des orga­nismes et celui des peuplements.

L’ap­proche bio­lo­gique ou phy­sio­lo­gique per­met tout d’a­bord de com­prendre l’ac­tion d’un conta­mi­nant chi­mique sur les orga­nismes marins et d’é­va­luer les consé­quences pour un indi­vi­du, pour sa sur­vie, sa repro­duc­tion ou sa crois­sance. Au niveau des peu­ple­ments, l’ap­proche éco­lo­gique, infi­ni­ment plus com­plexe, étu­die la struc­ture et la dyna­mique des uni­tés fonc­tion­nelles d’un écosystème.

La figure 3 illustre la diver­si­té des approches pour éva­luer les effets des conta­mi­nants chi­miques sur le milieu vivant, cou­vrant des champs dis­ci­pli­naires et des échelles de temps variés.

Substances chimiques et contaminants chimiques

Figure 3 – Éva­lua­tion des effets des conta­mi­nants chi­miques sur le milieu vivant
Évaluation des effets des contaminants chimiques sur le milieu vivant

Il est admis qu’il existe plus de 4 mil­lions de sub­stances chi­miques, essen­tiel­le­ment des sub­stances orga­niques issues de la bio­syn­thèse ani­male et végé­tale. Sur ces 4 mil­lions de sub­stances, seules 100 000 étaient pro­duites et/ou uti­li­sées sur le mar­ché euro­péen en 1981, dont 50 000 uti­li­sées com­mu­né­ment à des fins tech­niques. Cer­taines de ces sub­stances sont dan­ge­reuses pour l’homme et l’en­vi­ron­ne­ment. Avant d’é­vo­quer quelques » mau­vais acteurs » (les pol­luants his­to­riques) et l’i­dée de pol­luants prio­ri­taires, nous essaie­rons de clas­ser les pro­duits chi­miques en quelques grandes catégories.

Les métaux. Les plus toxiques pour l’en­vi­ron­ne­ment sont le mer­cure, le cad­mium, le zinc, le cuivre et le nickel. Les sources de conta­mi­na­tion com­prennent les acti­vi­tés minières, la sidé­rur­gie, le trans­port (plomb), l’u­sage des piles (600 millions/an) et des bat­te­ries, l’in­dus­trie des pein­tures et colo­rants, ain­si que la fabri­ca­tion des engrais phos­pho­rés (cad­mium).

Les hydro­car­bures dési­gnent les pétroles bruts, les car­bu­rants (essences, kéro­sènes, fuels domes­tiques, fuels lourds, etc.) et les pro­duits de base de la syn­thèse orga­nique indus­trielle. Les hydro­car­bures aro­ma­tiques poly­cy­cliques (HAP), qui résultent de la com­bus­tion incom­plète des pro­duits pétro­liers, sont les plus pré­oc­cu­pants pour les milieux aqua­tiques. Les émis­sions atmo­sphé­riques natio­nales sont esti­mées à 3 500 t/an.

Les pes­ti­cides ou pro­duits phy­to­phar­ma­ceu­tiques recouvrent les her­bi­cides, les fon­gi­cides et les insec­ti­cides et incor­porent quelque 900 matières actives. Ces pro­duits sont essen­tiel­le­ment issus de la syn­thèse orga­nique bien que l’on retrouve des miné­raux comme le soufre ou le sul­fate de cuivre (bouillie bor­de­laise). Envi­ron 100 000 t sont épan­dues chaque année par les agri­cul­teurs, les ges­tion­naires d’in­fra­struc­tures rou­tières (DDE, Socié­tés d’au­to­routes) et fer­ro­viaires (SNCF), et même les particuliers.

Les bio­cides dési­gnent les sub­stances chi­miques actives uti­li­sées dans un cadre non phy­to­phar­ma­ceu­tique. Ain­si EDF tire direc­te­ment de l’eau de mer, par élec­tro­lyse, 10 000 t de chlore par an pour net­toyer les cir­cuits de refroi­dis­se­ment des cen­trales nucléaires ins­tal­lées en bord de mer. L’u­ti­li­sa­tion de pein­tures anti­sa­lis­sures sur la coque des navires pro­voque une conta­mi­na­tion non négli­geable par dif­fé­rentes matières actives métal­liques (cuivre), orga­no­mé­tal­liques (tri­bu­ty­lé­tain TBT) ou orga­niques (atra­zine comme l’Ir­ga­rol 1 057).

Les sub­stances orga­niques de syn­thèse repré­sentent un très grand nombre de sub­stances qu’il serait vain de vou­loir décrire en quelques lignes. Elles com­prennent les sol­vants chlo­rés (uti­li­sa­tion d’en­vi­ron 8 500 t/an), les agents diélec­triques uti­li­sés dans les trans­for­ma­teurs et conden­sa­teurs élec­triques (Pyra­lène ou PCB), les phta­lates, déter­gents, colo­rants… Les sub­stances les plus pré­oc­cu­pantes pour l’en­vi­ron­ne­ment sont les sub­stances orga­no­chlo­rées aux formes très diverses : sol­vants, PCB, chlo­ro­ben­zènes, chlo­ro­phé­nols, chlo­ro-alcanes, ain­si que les sub­stances bro­mées comme les retar­deurs de flamme. Il convient de pré­ci­ser que les dioxines et furanes (PCDD/F) ne sont pas des sub­stances pro­duites par l’in­dus­trie chi­mique mais résultent essen­tiel­le­ment de la com­bus­tion plus ou moins com­plète de sub­stances orga­no­chlo­rées. Les émis­sions de dioxines sont esti­mées au niveau natio­nal à envi­ron 1,5 kg/an.

Les sub­stances eutro­phi­santes, qui n’ont pas de toxi­ci­té directe, ne sont pas de véri­tables conta­mi­nants chi­miques. Les rejets d’a­zote et de phos­phore dans les milieux aqua­tiques peuvent pro­vo­quer le déve­lop­pe­ment exces­sif d’or­ga­nismes végé­taux dans les eaux de sur­face, condui­sant à des phé­no­mènes d’eu­tro­phi­sa­tion que l’on observe dans les eaux conti­nen­tales ain­si que dans les eaux marines lit­to­rales. La consom­ma­tion agri­cole d’en­grais azo­tés se situe à envi­ron 13 Mt/an, les rejets domes­tiques de phos­phore par les les­sives et déter­gents sont éva­lués à 1,5 Mt/an.

Quelques polluants historiques

C’est durant la période d’a­près- guerre, » les trente glo­rieuses « , que les pre­miers et prin­ci­paux pol­luants chi­miques ont été mis en évidence.
Les consé­quences tra­giques de la conta­mi­na­tion de la baie de Mina­ma­ta au Japon par des rejets indus­triels conte­nant du mer­cure ont mon­tré un fait fon­da­men­tal, la néces­si­té de connaître le cycle bio­géo­chi­mique d’un élé­ment pour en éva­luer son éven­tuel impact. Le mer­cure à l’é­tat métal­lique est modé­ré­ment toxique. Sa trans­for­ma­tion en méthyle mer­cure, forme orga­no­mé­tal­lique, par la micro­flore bac­té­rienne du milieu marin le rend bio­dis­po­nible, ce qui explique sa forte capa­ci­té d’ac­cu­mu­la­tion dans les pois­sons et coquillages, et l’in­toxi­ca­tion des pêcheurs de la baie de Mina­ma­ta consom­mant les pro­duits de leur pêche locale.

Le livre de Rachel Car­son, Le prin­temps silen­cieux, est asso­cié à la dénon­cia­tion des effets inat­ten­dus de l’u­sage immo­dé­ré du DDT, insec­ti­cide chlo­ré, qui peut res­ter pré­sent dans l’en­vi­ron­ne­ment sur de très longues périodes, du fait de sa non-dégra­da­bi­li­té, et se dis­per­ser dans l’en­vi­ron­ne­ment, sur de longues dis­tances, par le biais du trans­port atmo­sphé­rique. Le DDT a la capa­ci­té de s’ac­cu­mu­ler dans les graisses des ani­maux aqua­tiques et ter­restres, et se pro­page ain­si le long de la chaîne alimentaire.

En bout de chaîne, le DDT accu­mu­lé per­turbe le méta­bo­lisme du cal­cium d’oi­seaux pré­da­teurs (péli­cans, aigles, fau­cons) : les coquilles d’œufs deviennent trop minces, engen­drant une éclo­sion pré­ma­tu­rée, ce qui per­turbe nota­ble­ment la repro­duc­tion des oiseaux.

L’in­ter­dic­tion d’u­sage du DDT (1972 en France) est la consé­quence d’un impact visible non sur l’homme mais sur l’en­vi­ron­ne­ment. Là encore, l’é­tude du cycle bio­géo­chi­mique d’une telle molé­cule s’a­vère indis­pen­sable pour en com­prendre les méfaits.

Les hydro­car­bures dans l’en­vi­ron­ne­ment marin sont asso­ciés aux marées noires, ren­voyant aux aléas de la navi­ga­tion et à la sécu­ri­té du trans­port mari­time. Les exemples du Tor­rey-Canyon, de l’Amo­co Cadiz et plus récem­ment de l’Eri­ka ont mon­tré la vul­né­ra­bi­li­té du lit­to­ral fran­çais devant ce type d’é­vé­ne­ments, mais ne doivent pas mas­quer les opé­ra­tions de débal­las­tage frau­du­leuses en mer (entre 200 et 300 consta­tées chaque année le long des côtes françaises).

Le tri­bu­ty­lé­tain (TBT), sub­stance active asso­ciée aux pein­tures anti­sa­lis­sures, est très cer­tai­ne­ment à l’heure actuelle la sub­stance chi­mique qui induit des effets toxiques obser­vables à des niveaux de concen­tra­tions dans l’eau les plus bas, aus­si faibles que 20 à 30 ng/l (effets sur la crois­sance et la repro­duc­tion des huîtres), voire 2 à 3 ng/l (effets sur la modi­fi­ca­tion du sexe de gas­té­ro­podes marins). Une telle concen­tra­tion est obte­nue en ver­sant un sachet de sucre en poudre (5 g) dans 5 ou 50 mil­liards de tasses de café de 50 ml chacune.

Figure 4 – Les prin­ci­paux rejets d’eaux rési­duaires industrielles
Les principaux rejets d’eaux résiduaires industrielles

Pollutions chroniques et pollutions accidentelles

L’é­mo­tion légi­time sus­ci­tée par les consé­quences d’une pol­lu­tion acci­den­telle en milieu marin ne doit pas non plus mas­quer la situa­tion de fond consti­tuée par les apports de pol­lu­tion chro­nique d’o­ri­gine mul­tiple, qu’ils soient ponc­tuels (rejets indus­triels, rejets urbains), dif­fus (apports agri­coles, retom­bées atmo­sphé­riques) ou inté­grés (apports par des fleuves), sans oublier les conta­mi­na­tions d’o­ri­gine marine liées à l’u­sage du milieu (rejet des sédi­ments de dra­gage) et de la navi­ga­tion mari­time (débal­las­tages frau­du­leux des navires, apports dif­fus des bio­cides incor­po­rés dans les pein­tures antisalissures).

Pollutions accidentelles

Elles inter­viennent essen­tiel­le­ment sur les sites indus­triels et au cours du trans­port des matières dangereuses.

Le BARPI, Bureau du ser­vice de l’en­vi­ron­ne­ment indus­triel du minis­tère de l’En­vi­ron­ne­ment, char­gé de recen­ser les évé­ne­ments acci­den­tels fran­çais, en relève chaque année envi­ron 700 et 23 % d’entre eux occa­sionnent des pol­lu­tions dans les eaux de surface.

Par ailleurs, 240 Mt d’hy­dro­car­bures (1 000 pétro­liers Amo­co Cadiz) et envi­ron 40 Mt de pro­duits chi­miques tran­sitent chaque année le long des côtes de la Manche et de la mer du Nord. Mais la pol­lu­tion des mers par les hydro­car­bures ne relève pas que d’ac­ci­dents maritimes.

À l’é­chelle mon­diale, on estime (avec toute l’in­cer­ti­tude qui accom­pagne de tels chiffres) à 2,4 Mt/an les apports liés à des phé­no­mènes natu­rels (retom­bées atmo­sphé­riques, suin­te­ments sous-marins), à 1,5 Mt/an les apports chro­niques d’o­ri­gine tel­lu­rique et à 0,3 Mt/an les apports consé­cu­tifs à des acci­dents de navires, englo­bant car­gai­sons (pétroles bruts et pro­duits raf­fi­nés pour 0,2 Mt/an) et fuels de pro­pul­sion (pour 0,1 Mt/an).

Entre 1979 et 2001, le Cedre (orga­nisme créé suite à la pol­lu­tion de l’Amo­co Cadiz pour conseiller les auto­ri­tés fran­çaises sur les meilleurs moyens de lutte en cas de pol­lu­tion acci­den­telle) a ain­si recen­sé trente- neuf cas signi­fi­ca­tifs de pol­lu­tion ou risques de pol­lu­tion le long des côtes fran­çaises (métro­pole et DOM/TOM). 18 pro­ve­naient d’hy­dro­car­bures, 11 de la perte de conte­neurs trans­por­tant des matières dan­ge­reuses, 8 du déver­se­ment de pro­duits chi­miques, enfin 2 d’autres causes (perte en mer de plu­sieurs mil­liers de déto­na­teurs, déver­se­ment de blé).

Nous retien­drons que le risque de déver­se­ment de pro­duits chi­miques est aus­si grand que celui des hydro­car­bures. Une étude de la Com­mis­sion euro­péenne, por­tant sur 1 776 acci­dents mari­times, montre par contre que si l’ac­ci­dent concerne des pro­duits chi­miques, la quan­ti­té déver­sée est en moyenne 5 fois plus faible que s’il s’a­git de pro­duits pétro­liers et 25 fois plus faible que s’il s’a­git de pétrole brut.

Pollutions chroniques

Le lit­to­ral reçoit envi­ron 20 % de la pol­lu­tion toxique indus­trielle, soit 8,4 MEq. tox/jour [l’é­qui­valent toxique ‑Eq. tox- est une mesure reliant une charge toxique à l’ef­fet obser­vé sur un crus­ta­cé (daph­nie) selon une pro­cé­dure nor­ma­li­sée]. Au niveau natio­nal, il existe envi­ron 600 000 ins­tal­la­tions clas­sées, dont 4 800 doivent sur­veiller leurs rejets d’eaux résiduaires.

Les 480 plus gros émet­teurs indus­triels sont à l’o­ri­gine de 5 à 17 % des rejets totaux en zone lit­to­rale pour un cer­tain nombre de métaux, 36 à 57 % pour le chrome et les hydro­car­bures et 100 % pour le titane. Les rejets les plus impor­tants sont loca­li­sés dans les zones indus­trielles por­tuaires du Nord-Pas-de-Calais, de la Seine-Mari­time et des Bouches-du-Rhône et pro­viennent prin­ci­pa­le­ment de la chi­mie, de la para­chi­mie et du pétrole (figure 4).

Les rejets urbains des agglo­mé­ra­tions lit­to­rales de plus de 10 000 eq. hab tota­lisent 10 M eq. hab (par rap­port à la matière orga­nique), soit 17 % de la pol­lu­tion émise par l’en­semble de la popu­la­tion urbaine natio­nale. Le taux de dépol­lu­tion moyen sur le lit­to­ral est de 47 %, com­bi­nant un taux de col­lecte des rejets de 71 % et un taux d’é­pu­ra­tion par les sta­tions de trai­te­ment de 65 %. L’ob­jec­tif visé du trai­te­ment glo­bal de la pol­lu­tion urbaine est de 65 %.

Les apports dif­fus d’o­ri­gine agri­cole sont dif­fi­ciles à quan­ti­fier. Envi­ron 130 000 t/an d’a­zote sont émis par l’en­semble des com­munes lit­to­rales, 38 % pro­ve­nant des effluents d’é­le­vage et 62 % des engrais azo­tés, mais la diver­si­té des pra­tiques rend les chiffres bruts peu signi­fi­ca­tifs, de même que pour les pes­ti­cides dont l’u­sage régio­nal varie fortement.

Les apports d’eaux douces à la mer (160 à 170 km³/an) pro­viennent de 80 fleuves et cours d’eau, mais la Seine, la Loire, la Gironde et le Rhône en repré­sentent 80 %. Les apports conta­mi­nants les plus impor­tants sont le fait de la Seine et du Rhône, consé­quence de l’ur­ba­ni­sa­tion et des acti­vi­tés indus­trielles sur les bas­sins ver­sants de ces deux fleuves. Le Rhône déverse ain­si 4 à 6 t/an de mer­cure et de cad­mium, 200 à 600 t/an de cuivre, nickel et plomb, envi­ron 1 t/an de PCB et 16 t/an d’HAP.

Un cas par­ti­cu­lier doit être men­tion­né pour l’es­tuaire de la Gironde qui reçoit 20 à 25 t/an de cad­mium, le lit du Lot ayant long­temps ser­vi de décharge pour des déblais miniers (le cad­mium est un sous-pro­duit de l’ex­trac­tion du zinc) près de Deca­ze­ville. Cette charge pol­luante repré­sente 4 à 5 fois les apports en cad­mium des autres grands fleuves et 50 fois l’en­semble des prin­ci­paux rejets indus­triels dans l’eau.

Politique française sur les substances dangereuses

Tableau 1 – Arrê­té d​u 2 février 1998 Valeurs limites d’émissions des ins­tal­la­tions clas­sées (concen­tra­tions et flux
Substance Concent​rations maxi­males (mg/l) Si flux​supé­rieurs à… (g/j)
Phénols 0,3 3
Métaux (Cr, Cu, Mn, Ni, Pb, Sn, Zn, Fe, Al) 0,1 – 0,2 1 – 20
Hydrocarbures 10 100
Sub­stances toxiques ou néfastes à long terme (37 appar­te­nant à la liste I de la Direc­tive 76/464/CEE 0,05 0,5
Sub­stances nocives pour l’environnement (40 appar­te­nant à la même liste) 1,5 1
Sub­stances sus­cep­tibles d’avoir des effets néfastes pour l’environnement (8 appar­te­nant à la même liste) 4,0 10
Sub­stances visées par les Direc­tives com­mu­nau­taires (Hg, Cd, HCH, CCl4, drines, HCB, hexa­chlo­ro­bu­ta­diène, CHCl3, 1,2‑dichloroéthane, TCE, PERT, TCB) 0,05 – 2,0 -
Dis­po­si­tions par­ti­cu­lières pour cer­taines activités :
coke­ries, fabri­ca­tion TiO2, raf­fi­ne­ries, abat­toirs, fabri­ca­tion d’aluminium par élec­tro­lyse, ta​nneries et mégis­se­ries, bras­se­ries, trai­te­ment des maté­riaux, trai­te­ment et déve­lop­pe­ment de sur­faces pho­to­sen­sibles, sta­tions d’épuration mixtes

La Direc­tive euro­péenne 76/464/ CEE consti­tue le texte euro­péen de base concer­nant la pol­lu­tion cau­sée par cer­taines sub­stances dan­ge­reuses, et cadre l’ac­tion pour 132 sub­stances consi­dé­rées comme prio­ri­taires, par suite de leur toxi­ci­té propre, de leur teneur dans les effluents et des quan­ti­tés pro­duites et/ou uti­li­sées en Europe. Les fon­de­ments juri­diques au niveau natio­nal ren­voient à la régle­men­ta­tion des éta­blis­se­ments clas­sés et à la légis­la­tion sur l’eau. Une poli­tique volon­ta­riste de réduc­tion des rejets indus­triels de matières toxiques a été mise en œuvre durant les trente der­nières années, et les rejets toxiques natio­naux, esti­més à 76,5 Meq. tox/jour en 1974, ont été rame­nés à 19,0 Meq. tox/jour en 1997.

La dis­po­si­tion prin­ci­pale de la régle­men­ta­tion est l’ins­tau­ra­tion de valeurs limites de rejet (tableau 1).

Mais les objec­tifs de qua­li­té ne sont pas tou­jours décli­nés sub­stance par sub­stance : des para­mètres glo­baux sont aus­si uti­li­sés. Si l’on prend comme exemple la qua­li­té des eaux conchy­li­coles, nous trou­vons des objec­tifs défi­nis comme suit :

  • hydro­car­bures pétro­liers : pas de film visible et/ou de dépôt sur les coquillages. Pas d’ef­fets nocifs pour les coquillages (valeur impé­ra­tive) ;
  • sub­stances orga­no­ha­lo­gé­nées et métaux : la concen­tra­tion de chaque sub­stance doit être telle qu’elle contri­bue à une bonne qua­li­té des pro­duits conchy­li­coles (valeur guide), la concen­tra­tion de chaque sub­stance doit être telle qu’elle ne doit pas pro­vo­quer d’ef­fets nocifs sur les coquillages et larves (valeur impérative).

Une nouvelle politique internationale de gestion des produits chimiques

Le cha­pitre 19 de l’Agen­da 21 de la Confé­rence de Rio en 1992 a fixé les grands prin­cipes d’une nou­velle poli­tique de ges­tion des pro­duits chi­miques et a ins­pi­ré la poli­tique actuelle de réduc­tion ou d’é­li­mi­na­tion des sub­stances chi­miques dan­ge­reuses du milieu marin. Les prin­ci­pales recom­man­da­tions que l’on peut rete­nir sont les suivantes :

  • la néces­si­té d’une har­mo­ni­sa­tion inter­na­tio­nale de la clas­si­fi­ca­tion et de l’é­ti­que­tage des pro­duits chi­miques. Ce tra­vail a été confié à l’OCDE et s’est ter­mi­né fin 1998 ;
  • l’en­cou­ra­ge­ment d’une cir­cu­la­tion large de l’in­for­ma­tion. Depuis juin 2001, l’en­semble des infor­ma­tions sur les pro­duits chi­miques recen­sées par les prin­ci­pales orga­ni­sa­tions inter­na­tio­nales (OIT, OMS, FAO, PNUE, etc.) est acces­sible gra­tui­te­ment sur le Net :
    (http :/www.inchem.org) ;
  • l’o­bli­ga­tion d’é­va­luer les risques des sub­stances chi­miques (exis­tantes ou nou­velles, bio­cides ou pro­duits pharmaceutiques) ;
  • le ren­for­ce­ment des capa­ci­tés natio­nales de sur­veillance et de ges­tion. Ain­si, l’I­fre­mer et l’I­ne­ris ont consti­tué une struc­ture com­mune (à Nantes) char­gée d’é­va­luer les risques chi­miques en milieu marin ;
  • la pré­ven­tion du tra­fic illé­gal des sub­stances toxiques et pro­duits dangereux.

Protection de l’environnement marin vis-à-vis des substances dangereuses

La Convention MARPOL 7378

Cette conven­tion est rela­tive à la pré­ven­tion de la pol­lu­tion des mers depuis les navires. Elle consti­tue un cadre régle­men­taire inter­na­tio­nal pour les hydro­car­bures, les pro­duits chi­miques trans­por­tés en vrac ou en colis, les eaux usées des navires et leurs déchets. Le cadre régle­men­taire est basé sur les pro­fils de dan­gers des pro­duits trans­por­tés, les­quels, pour les seuls aspects envi­ron­ne­men­taux, reposent sur les cri­tères suivants :

  • la bio­ac­cu­mu­la­tion, qui tra­duit la capa­ci­té d’une sub­stance à se concen­trer dans les coquillages et les poissons ;
  • la bio­dé­gra­da­bi­li­té, qui concerne la per­sis­tance d’une sub­stance en cas de déver­se­ment en mer ;
  • la toxi­ci­té, aiguë ou chro­nique, notam­ment si la sub­stance est persistante ;
  • l’al­té­ra­tion du goût et/ou de l’o­deur des pro­duits de la mer en cas de contamination ;
  • les effets phy­siques en cas de déver­se­ments acci­den­tels. En dehors de tout contexte de toxi­ci­té, les pro­duits déver­sés peuvent engluer ou étouf­fer la faune sau­vage (oiseaux, mam­mi­fères marins) ou les fonds marins.


Le pro­fil de dan­ger, qui concerne les effets poten­tiels mais ne quan­ti­fie pas le risque, per­met de clas­ser les sub­stances chi­miques selon cinq caté­go­ries de dan­ge­ro­si­té décrois­sante, de A (ex. penta­chlo­ro­phé­nol), à D (ex. huiles végé­tales) et » hors clas­se­ment » (ex. jus de pomme). Toute la régle­men­ta­tion du trans­port en vrac des pro­duits chi­miques par voie mari­time (construc­tion des navires, rejets des eaux de lavage des citernes en mer) repose sur cette classification.

La législation européenne sur les produits chimiques

La légis­la­tion euro­péenne impose une éva­lua­tion des risques des sub­stances chi­miques afin d’as­su­rer une pro­tec­tion de l’homme et de l’en­vi­ron­ne­ment. La mise en œuvre de cette poli­tique com­mu­nau­taire est assu­rée jus­qu’à pré­sent par un par­tage des tâches entre les États membres, la Com­mis­sion et les indus­triels. La pro­cé­dure adop­tée est basée sur un manuel tech­nique d’é­va­lua­tion du risque chi­mique pour les sub­stances nou­velles, exis­tantes et bio­cides, com­mun à l’U­nion euro­péenne (le Tech­ni­cal Gui­dance Docu­ment ou TGD).

Figure 5 – Prin­cipes direc­teurs de l’analyse du risque chi­mique environnemental
Principes directeurs de l’analyse du risque chimique environnemental

À l’o­ri­gine, ce docu­ment guide concer­nait essen­tiel­le­ment l’en­vi­ron­ne­ment conti­nen­tal, et n’é­tait pas uti­li­sable pour le milieu marin. Sa révi­sion a ame­né à consa­crer un cha­pitre spé­ci­fique pour le milieu marin. Il prend notam­ment en compte le fait que le deve­nir ultime de la plu­part des conta­mi­nants chi­miques est le milieu marin, que les effets à long terme de l’ac­cu­mu­la­tion de sub­stances chi­miques dan­ge­reuses dans cet envi­ron­ne­ment ne sont pas pré­vi­sibles et qu’une telle accu­mu­la­tion est dif­fi­ci­le­ment réversible.

La sélec­tion des sub­stances dan­ge­reuses est basée selon des cri­tères de per­sis­tance ℗, de bio­ac­cu­mu­la­tion (B) et de toxi­ci­té (T) [d’où l’ap­pel­la­tion sub­stances PBT]. La pré­ven­tion repose non sur une ana­lyse des risques, mais sur une éva­lua­tion des sources d’é­mis­sion et des voies de trans­fert vers le milieu marin afin de défi­nir les mesures les plus appro­priées pour réduire et faire ces­ser les apports.

L’a­na­lyse du risque (figure 5) vise à carac­té­ri­ser des effets pré­vi­sibles ou leur absence pour les niveaux de conta­mi­na­tion mesu­rés (ou déduits avec des modèles appropriés).

La sen­si­bi­li­té du milieu s’ob­tient grâce à des tests éco­toxi­co­lo­giques effec­tués sur des espèces appar­te­nant au mini­mum à trois niveaux tro­phiques dif­fé­rents (algues, crus­ta­cés, pois­sons), ce qui est repré­sen­ta­tif d’un éco­sys­tème simplifié.

La concen­tra­tion dite sans effets (PNEC) est défi­nie empi­ri­que­ment, notam­ment à par­tir de don­nées éco­toxi­co­lo­giques. La pro­tec­tion de l’en­vi­ron­ne­ment marin concerne les espèces du milieu péla­gique (eau), du milieu ben­thique (sédi­ment) et les grands pré­da­teurs (oiseaux, mam­mi­fères). Pour illus­trer la com­plexi­té du pro­blème, com­pa­rons la consom­ma­tion de pois­son par un consom­ma­teur euro­péen de 70 kg (10 g/jour) et celle d’un cor­mo­ran de 2 à 3 kg (500 g/jour). Il est aisé de mon­trer que la dose jour­na­lière du conta­mi­nant chi­mique rame­née par kg de poids peut être 1 000 fois plus impor­tante pour le cor­mo­ran que pour le consom­ma­teur humain, ce qui montre bien que le stan­dard de pro­tec­tion du cor­mo­ran (concer­nant la teneur en pol­luant du pois­son) ne peut pas être celui de l’homme.

La Convention OSPAR

La Conven­tion OSPAR vise à la pro­tec­tion du milieu marin de la zone Atlan­tique Nord-Est ; l’une de ses dis­po­si­tions est consa­crée spé­ci­fi­que­ment aux sub­stances dan­ge­reuses. L’ob­jec­tif affi­ché est de par­ve­nir en 2020 à des teneurs dans l’en­vi­ron­ne­ment marin qui soient proches des teneurs ambiantes (pour les sub­stances qui sont pré­sentes à l’é­tat natu­rel), ou proches de zéro pour les sub­stances de syn­thèse. À l’heure actuelle, 27 sub­stances font l’ob­jet d’une action prio­ri­taire, la liste res­tant ouverte à d’autres sub­stances dites pré­oc­cu­pantes. Il est inté­res­sant de faire remar­quer que l’a­dap­ta­tion du guide métho­do­lo­gique d’é­va­lua­tion du risque chi­mique (TGD) au milieu marin a fait l’ob­jet d’un tra­vail com­mun entre l’U­nion euro­péenne et la Conven­tion OSPAR.

La Directive Cadre sur l’Eau (2000/60/CE)

Cette direc­tive, qui concerne tous les milieux aqua­tiques, rap­pelle en pré­am­bule que l’eau n’est pas un bien mar­chand comme les autres, mais un patri­moine qu’il faut pro­té­ger et trai­ter comme tel. L’ob­jec­tif deman­dé aux États membres est de par­ve­nir à un » bon état » des eaux de sur­face (douces et salées) d’i­ci 2015. Un second objec­tif affi­ché concerne la sup­pres­sion des émis­sions, rejets et pertes de 33 sub­stances dan­ge­reuses prio­ri­taires (10 pes­ti­cides, 4 métaux et 19 sub­stances orga­niques diverses), défi­nies comme telles à par­tir de cri­tères PBT, de don­nées sur les ton­nages uti­li­sés, des usages et des niveaux d’ex­po­si­tion dans l’environnement.

Des eaux en » bon état » doivent à la fois per­mettre un bon fonc­tion­ne­ment des éco­sys­tèmes aqua­tiques et satis­faire à des normes de qua­li­té envi­ron­ne­men­tale (dites NQE) physicochimiques.

La défi­ni­tion de ces normes NQE repose sur l’i­dée qu’en pro­té­geant les espèces, on pro­tège aus­si l’é­co­sys­tème dans son ensemble. Les niveaux maxi­maux admis­sibles sont obte­nus en divi­sant par un fac­teur conven­tion­nel (10 à 1 000) la teneur la plus faible pour laquelle une toxi­ci­té est obser­vée sur au moins une espèce.

À titre d’exemple, la toxi­ci­té chro­nique (géné­ra­le­ment plus signi­fi­ca­tive pour l’en­vi­ron­ne­ment que la toxi­ci­té aiguë tou­chant à la sur­vie à bref délai) du 4‑nonylphénol est res­pec­ti­ve­ment de 6, 24 et 694 µg/l selon l’es­pèce, la plus basse ser­vant alors de réfé­rent. Avec un fac­teur d’ex­tra­po­la­tion de 10, la norme de qua­li­té envi­ron­ne­men­tale (NQE) pour le 4‑nonylphénol sera de 0,6 µg/l.

Pour le milieu marin, l’ap­proche sera iden­tique mais la marge de pré­cau­tion sera plus grande, c’est-à-dire que l’on va appli­quer un fac­teur allant jus­qu’à 10 000 pour défi­nir une NQE. Cette pré­cau­tion se jus­ti­fie par une diver­si­té bio­lo­gique du milieu marin supé­rieure à celle des eaux conti­nen­tales (sauf excep­tions – estuaires, mer Bal­tique) et des don­nées éco­toxi­co­lo­giques en moindre quan­ti­té (les don­nées exis­tantes concernent à 85 % les espèces vivant en eaux douces).

Pour les sub­stances dan­ge­reuses prio­ri­taires, l’ob­jec­tif de la Direc­tive Cadre sur l’Eau est de faire ces­ser les apports. À ce titre, la défi­ni­tion de normes de qua­li­té envi­ron­ne­men­tale n’a pas de sens, l’ac­tion devant por­ter sur l’i­den­ti­fi­ca­tion des apports et des voies de trans­fert pour faire ces­ser la conta­mi­na­tion du milieu marin.

Conclusion

Biblio­gra­phie

  • ECB (Euro­pean Che­mi­cals Bureau) : http://ecb.jrc.it/
  • IFEN (1999) L’Environnement en France. Ins­ti­tut fran­çais de l’environnement. Ed. La Décou­verte : 480 p. et http://www.ifen.org
  • IFREMER (Ins­ti­tut fran­çais de recherche pour l’exploitation de la mer) http://www.ifremer.fr
  • IPCS (Inter­na­tio­nal Pro­gramme on Che­mi­cal Safe­ty) http://www.inchem.org
  • Mar­chand M. & R. Kan­tin Conta­mi­nants chi­miques en milieux aqua­tiques. Ocea­nis vol. 21 (2), 1995, vol. 22 (3), 1996, vol. 23 (4), 1997.
  • Mar­chand M. & C. Bru­not (1997) L’environnement lit­to­ral et marin. Ins­ti­tut fran­çais de l’environnement. Études et Tra­vaux n° 16 : 116 p.
  • OCDE (Orga­ni­sa­tion de coopé­ra­tion et de déve­lop­pe­ment éco­no­miques) http://www.oecd.org/
  • OSPAR (Conven­tion pour la pro­tec­tion du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est) http://www.ospar.org
  • RNDE (Réseau natio­nal des don­nées sur l’eau) http://www.rnde.tm.fr/francais/rnde.htm

La pol­lu­tion chi­mique couvre un large spectre de sub­stances, de voies d’ap­port et d’ef­fets pos­sibles à diverses échelles de temps sur les espèces, effets qui ne sont pas sou­vent pré­vi­sibles, ni réver­sibles. C’est pour­quoi toutes les stra­té­gies de ges­tion, notam­ment celles de l’U­nion euro­péenne ou des conven­tions inter­na­tio­nales, s’o­rientent vers la pré­ven­tion en cou­plant, autant que pos­sible, des cri­tères de » bon état » éco­lo­gique (basés sur des indi­ca­teurs hydro­bio­lo­giques et fau­nis­tiques) à des cri­tères qua­li­fiant la réduc­tion des apports conta­mi­nants (basés sur des concentrations).

La Direc­tive Cadre sur l’Eau et la stra­té­gie de la Conven­tion OSPAR visant les sub­stances dan­ge­reuses affichent toutes deux une poli­tique à rela­ti­ve­ment court terme (quinze, vingt ans) pour réduire ou éli­mi­ner les rejets des sub­stances chi­miques jugées les plus dan­ge­reuses. L’ap­pli­ca­tion de la Direc­tive Cadre sur l’Eau, por­tant à la fois sur la qua­li­té éco­lo­gique et l’ap­ti­tude aux usages (bai­gnade, conchy­li­cul­ture…) oblige les pays de l’U­nion euro­péenne à pas­ser d’une action glo­bale à une ges­tion par sub­stance, avec une obli­ga­tion de résul­tat d’i­ci à quinze ans.

Cette Direc­tive laisse cepen­dant entiers deux pro­blèmes : d’une part la per­ti­nence des essais in vitro pour défi­nir des normes appli­cables aux milieux natu­rels (s’o­riente-t-on vers une sur- ou sous-pro­tec­tion des milieux ?), d’autre part les moyens tech­niques et finan­ciers qui doivent être mis en œuvre pour juger de l’ef­fi­ca­ci­té des actions conduites, notam­ment pour les pol­luants prioritaires. 

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