Vues de Monaco

Monaco, dynamisme économique au cœur de la Côte d’Azur

Dossier : La BanqueMagazine N°605 Mai 2005Par : Benjamin LAZIMY (95)

Historique de Monaco

Au xiiie siè­cle de notre ère le comté de Gênes fait bâtir une colonie à l’emplacement de l’actuel Mona­co qui devient alors le poste avancé d’un ter­ri­toire qui s’é­tend de Por­to Venere à Nice. À la suite d’une guerre civile génoise, la famille Grimal­di, puis­sante famille de patriciens génois, s’in­stalle à Mona­co et fonde la dynastie.

Au cours des siè­cles, le ter­ri­toire de la prin­ci­pauté s’é­ten­dra jusqu’à Men­ton, sera sous dom­i­na­tion tan­tôt génoise, tan­tôt française, jusqu’à ce que le traité de Paris, signé en 1814, restau­re les droits et prérog­a­tives du prince. Le prince Charles III con­cède à la France ses droits sur Men­ton et Roque­brune par le traité du 2 févri­er 1861, dont une clause prévoy­ait la créa­tion d’une union douanière entre les deux États, effec­tive à par­tir de 1865.

La Société des Bains de Mer et le casi­no de Monte-Car­lo sont fondés en 1856. Sous l’im­pul­sion de Rainier III, la prin­ci­pauté se dote d’une Con­sti­tu­tion en 1962, devient mem­bre de l’ONU en 1993 et du Con­seil de l’Eu­rope en 2004.

Aujour­d’hui Mona­co s’é­tend sur 1,97 km², compte 32 000 habi­tants (l’une des plus fortes den­sités au monde) dont env­i­ron 7 600 Moné­gasques, 10 000 Français et 6 500 Ital­iens (chiffre de 2004).

Les institutions

Mona­co est une monar­chie hérédi­taire et con­sti­tu­tion­nelle. La Con­sti­tu­tion du 17 décem­bre 1962 stip­ule la totale sépa­ra­tion des pou­voirs exé­cu­tif, lég­is­latif et judi­ci­aire. Le pou­voir exé­cu­tif est con­fié au Min­istre d’É­tat, directe­ment respon­s­able devant le prince, assisté de Con­seillers du gou­verne­ment ; le pou­voir lég­is­latif relève con­join­te­ment du prince et du Con­seil nation­al, cham­bre com­posée de vingt-qua­tre mem­bres élus pour cinq ans au suf­frage uni­versel direct ; la jus­tice est exer­cée par la Cour et les tribunaux.

La Con­sti­tu­tion moné­gasque pré­cise que Mona­co est un “État sou­verain et indépen­dant dans le cadre des principes généraux du droit inter­na­tion­al et des con­ven­tions par­ti­c­ulières avec la France”. Il s’en suit que Mona­co est lié par une con­ven­tion fran­co-moné­gasque de 1930 réser­vant aux Français des postes de hauts fonc­tion­naires (notam­ment ser­vices judi­ci­aires, pro­cureur général, Min­istre d’État).

Plus récem­ment, l’ad­hé­sion de Mona­co au Con­seil de l’Eu­rope, effec­tive en 2004, a entraîné une révi­sion de la Con­ven­tion de 1930, à la suite de quoi Mona­co devrait acquérir plus d’indépen­dance vis-à-vis de son voisin français.

L’économie

Mona­co a dévelop­pé une économie floris­sante, véri­ta­ble pôle dynamique de la Côte d’Azur, générant près de 39 000 emplois. Le chô­mage y est qua­si inexistant.

L’ad­min­is­tra­tion publique a réal­isé en 2003 une recette de l’or­dre de 600 mil­lions d’eu­ros qui provi­en­nent pour moitié des per­cep­tions de la TVA et à hau­teur de 20 % sur la ges­tion du domaine immo­bili­er pub­lic et sur les trans­ac­tions juridiques. L’É­tat réalise égale­ment 7 % de ses recettes à tra­vers la Société des Bains de Mer, société qui gère notam­ment le casi­no de Monte-Car­lo, plusieurs grands hôtels, les Ther­mes et le Mona­co Coun­try Club.

À côté de cela, le secteur privé a généré la même année un chiffre d’af­faires supérieur à 9 mil­liards d’eu­ros, en con­stante crois­sance depuis dix ans. Le secteur privé s’ar­tic­ule prin­ci­pale­ment autour des secteurs du com­merce de gros et de détail, dont le tourisme fait par­tie (40 % du chiffre d’af­faires), financier (14 % du chiffre d’af­faires) et de l’in­dus­trie (8,6 % du chiffre d’af­faires). Les entre­pris­es indus­trielles moné­gasques sont à la pointe dans les domaines des matériels médi­caux, des biens d’équipements pro­fes­sion­nels et de l’équipement auto­mo­bile, générant un excé­dent com­mer­cial de 110 mil­lions d’eu­ros et au nom­bre desquelles on peut citer par­mi les plus grandes Lan­cast­er Group (cos­mé­tiques, 85 mil­lions d’eu­ros de chiffre d’af­faires), Mécaplast (trans­for­ma­tion matières plas­tiques) ou Sin­gle Buoy Moor­ings (ingénierie pétrolière). Mona­co se dis­tingue égale­ment dans les ser­vices liés aux activ­ités mar­itimes, par­mi lesquels la ges­tion, la con­struc­tion et la vente de Yachts (Fras­er Yachts, Mona­co Marine, V. Ships…), le ship­ping (SBM Pro­duc­tion Con­trac­tors), les ser­vices de croisière (il est prévu que plus de 300 paque­bots vien­nent faire escale en 2005).

Enfin, Mona­co a su dévelop­per une activ­ité cul­turelle riche, autour notam­ment de ses musées, ses théâtres, son opéra et accueille de fréquentes expo­si­tions artistiques.

La place financière monégasque

L’ac­tiv­ité ban­caire moné­gasque représente 14 % du chiffre d’af­faires du secteur privé des entre­pris­es de la Prin­ci­pauté et emploie 7 % des salariés.

À l’im­age de la Suisse, Mona­co est un emplace­ment de choix en matière de ges­tion privée, regroupant notam­ment les plus grands étab­lisse­ments inter­na­tionaux du secteur et gérant de l’or­dre de 60 mil­liards d’eu­ros de dépôts (chiffre 2004).

Si les pre­miers étab­lisse­ments financiers ont été créés dès la fin du xixe siè­cle, c’est surtout depuis les années 1970 qu’ils se sont dévelop­pés. À l’o­rig­ine de sim­ples ban­ques de dépôt, ils sont devenus aujour­d’hui de véri­ta­bles pôles d’ex­cel­lence dans le domaine du con­seil au ser­vice de la clien­tèle “haut de gamme” et l’ac­tiv­ité finan­cière de la place s’est peu à peu spé­cial­isée, au cours des années 1990, dans la ges­tion d’ac­t­ifs et le con­seil en ges­tion pat­ri­mo­ni­ale et fiscale.

Les étab­lisse­ments de crédit moné­gasques sont soumis à la régle­men­ta­tion ban­caire française en vigueur. Ils sont donc con­trôlés par la Com­mis­sion ban­caire française en ver­tu de la con­ven­tion fran­co-moné­gasque sur le con­trôle des changes du 14 avril 1945 et des dif­férents échanges de let­tres de 1963, 1987 et 2001 fix­ant les modal­ités d’ap­pli­ca­tion de la lég­is­la­tion ban­caire en principauté.

L’attrait de la place

Une fiscalité et un savoir-faire attractifs…

Mona­co est un lieu de rési­dence attrac­t­if non seule­ment par son emplace­ment géo­graphique excep­tion­nel et son dynamisme cul­turel mais aus­si par la “fis­cal­ité douce” dont ses habi­tants jouis­sent. En effet, les rési­dents moné­gasques (à l’ex­cep­tion des ressor­tis­sants français) ne payent ni impôt sur la for­tune, ni impôt sur le revenu, ni tax­es fon­cières ; les droits de suc­ces­sion sont min­imes ; seuls la TVA et l’im­pôt sur les béné­fices com­mer­ci­aux des sociétés réal­isant plus de 25 % de leurs chiffres d’af­faires à l’é­tranger s’ap­pliquent, avec les mêmes barèmes qu’en France. Ces fac­teurs ten­dent à soutenir un marché immo­bili­er dont les prix sont par­mi les plus élevés du monde et attirent par con­séquence, sur ce petit ter­ri­toire, de gross­es for­tunes inter­na­tionales, con­tribuant à faire l’ex­cel­lence des ban­ques moné­gasques dans les ser­vices aux per­son­nes physiques fortunées.

Les étab­lisse­ments ban­caires moné­gasques attirent égale­ment la clien­tèle étrangère tant par leur savoir-faire et leur com­péti­tiv­ité au niveau inter­na­tion­al que par leur dis­cré­tion dans leurs rap­ports avec les clients : il con­vient de rap­pel­er que les ban­ques de la prin­ci­pauté pro­tè­gent de façon stricte l’i­den­tité de leurs clients y com­pris, comme la loi moné­gasque les y autorise, vis-à-vis d’au­torités nationales étrangères, puisque le gou­verne­ment princi­er n’est lié, de par une col­lab­o­ra­tion ban­caire bilatérale, à aucun pays excep­té la France.

… réglementés par un contrôle minutieux

Si l’i­den­tité des tit­u­laires des comptes est gardée secrète à l’ex­térieur, il n’en reste pas moins que le con­trôle interne de l’o­rig­ine des fonds est minu­tieuse­ment mis en œuvre par le ban­quier moné­gasque. Les ban­ques de la prin­ci­pauté respectent les mesures prévues par le GAFI1 dans la lutte con­tre le ter­ror­isme et le blanchi­ment. À ce titre, le gou­verne­ment moné­gasque a créé le SICCFIN2, un organ­isme indépen­dant des ban­ques dont la fonc­tion pre­mière est de recevoir et d’analyser les déc­la­ra­tions de soupçons. Ce con­trôle s’ap­plique à toute per­son­ne physique ou morale. Dans ce dernier cas, le ban­quier a le devoir de con­naître l’i­den­tité pré­cise du ou des pro­prié­taires et béné­fi­ci­aires d’une entité ouvrant un compte.

Cas particulier des ressortissants français

Mona­co et la France ont signé en 1963 la Con­ven­tion bilatérale fran­co-moné­gasque. Aux ter­mes de cet accord, les ressor­tis­sants français ne béné­fi­cient d’au­cun avan­tage fis­cal pro­pre aux ressor­tis­sants des autres nation­al­ités. En out­re, sur demande expresse d’une autorité gou­verne­men­tale française, toute banque de la place est tenue de don­ner tous les ren­seigne­ments con­cer­nant les comptes de ses clients français.

La nouvelle loi sur la fiscalité de l’épargne

C’est une pre­mière pour la place finan­cière moné­gasque : afin de préserv­er le secret ban­caire, Mona­co a signé, en 2004, un accord avec Brux­elles stip­u­lant le principe de retenue à la source de 15 % sur les intérêts du cap­i­tal des Européens non-rési­dents moné­gasques. Cet accord entr­era en vigueur à compter du 1er juil­let 2005 mais, bien que sem­blant met­tre un bémol à la fis­cal­ité attrac­tive du Rocher, ne devrait que très mod­éré­ment porter atteinte au dynamisme ban­caire. En effet, d’une part, cet accord s’ap­plique égale­ment aux autres États européens à fis­cal­ités priv­ilégiées (la Suisse, le Liecht­en­stein, l’Autriche, le Lux­em­bourg, Andorre et Saint-Marin) et d’autre part, les clients des ban­ques se sont avérés être moins attirés par les avan­tages fis­caux de la place que par le pro­fes­sion­nal­isme et la com­péti­tiv­ité des ban­ques monégasques.

Les établissements

Une cinquan­taine de ban­ques, par­mi les plus grandes au niveau mon­di­al, sont présentes sur la prin­ci­pauté. Même si quelques-unes ont le statut de Société anonyme moné­gasque, elles sont aujour­d’hui presque toutes des fil­iales de ban­ques étrangères.

Leurs prin­ci­pales activ­ités, out­re les activ­ités clas­siques des ban­ques de détail telles que le con­seil clien­tèle ou le crédit, sont la ges­tion sous man­dat et la ges­tion de Fonds com­muns de place­ment. Dans ce domaine, les autorités moné­gasques ont émis le souhait de plac­er Mona­co dans le sil­lage des États européens en agréant pour la pre­mière fois en 2005 un fonds de fonds alter­nat­ifs. Le développe­ment des ges­tions non direc­tion­nelles con­stitue une évo­lu­tion prob­a­ble dans les prochaines années.

Les trois prin­ci­paux étab­lisse­ments de la place sont :

  • la Com­pag­nie Moné­gasque de Banque. Son cap­i­tal est détenu par la banque d’af­faires ital­i­enne Medioban­ca. Elle emploie 140 employés, dis­pose en 2003 d’un encours de 6,25 mil­liards d’eu­ros et a présen­té un résul­tat net 2003 de 22 mil­lions d’eu­ros. Cette banque gère toute une gamme de Fonds com­muns de place­ments spé­cial­isés dans la ges­tion moné­taire, oblig­ataire, la ges­tion d’ac­tions et depuis 2005 la ges­tion de fonds alternatifs ;
  • le Crédit Fonci­er de Mona­co. Implan­té en prin­ci­pauté depuis 1922, c’est la banque la plus anci­enne de la place. Son cap­i­tal est détenu à plus de 70 % par le Crédit Agri­cole. Il emploie 328 per­son­nes et a obtenu un résul­tat net 2003 de 23 mil­lions d’euros ;
  • HSBC Pri­vate Bank. Rat­taché au group HSBC Hold­ings PLC, cette banque emploie 141 employés et dis­pose fin 2003 de 2 mil­liards de dépôts clients.

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1. Le GAFI est le Groupe d’ac­tion finan­cière sur le blanchi­ment des capitaux.
2. Le SICCFIN est le Ser­vice d’in­for­ma­tion et de con­trôle des cir­cuits financiers.

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