L’intelligence artificielle au service de la banque

Dossier : Vie des EntreprisesMagazine N°736 Juin 2018
Par Stéphane BERGER (CNAM)

Le secteur bancaire évolue sous l’impulsion des nouvelles technologies. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Depuis quelques années, les nou­velles tech­nolo­gies boule­versent com­plète­ment le secteur ban­caire en intro­duisant de nou­veaux usages pour les clients. Amenées par les géants du Web, ces tech­nolo­gies trans­for­ment mas­sive­ment toutes les habi­tudes de com­mu­ni­ca­tion, de tra­vail et de consommation. 

Aujourd’hui, les Fin­tech, dont nous enten­dons de plus en plus par­ler, com­plè­tent l’activité des ban­ques en se posi­tion­nant sur une par­tie ou sur la total­ité de la chaîne de valeur, au car­refour entre ces nou­velles tech­nolo­gies et les nou­veaux usages bancaires. 

Ayant per­du sa cen­tral­ité au prof­it du client, la banque doit se réin­ven­ter et trou­ver le moyen de se posi­tion­ner sur les par­cours dig­i­taux des clients. Si l’arrivée de ces nou­velles tech­nolo­gies con­stitue des men­aces pour cer­tains, elles représen­tent égale­ment un énorme poten­tiel pour les ban­ques qui sauront maîtris­er les technologies. 

L’intelligence arti­fi­cielle est l’un des piv­ots essen­tiels de la trans­for­ma­tion dig­i­tale avec ses nou­veaux usages. 

Aujourd’hui, l’intelligence artificielle révolutionne de nombreux domaines, dont celui de la banque ?
Qu’en est-il ?

L’intelligence arti­fi­cielle est une tech­nolo­gie qui per­met de trans­former, rénover, voire inven­ter de nou­veaux proces­sus méti­er et de nou­velles expéri­ences clients dans des secteurs qui n’étaient jusque-là pas éligibles. 

L’intelligence arti­fi­cielle apporte de la valeur autour de trois grands axes : 

  • L’amélioration de l’expérience util­isa­teur, qu’il soit client, parte­naire ou employé ; 
  • L’optimisation de l’efficacité opéra­tionnelle en amélio­rant les proces­sus, la pro­duc­tiv­ité et la qual­ité. Plus par­ti­c­ulière­ment, ce sont les proces­sus de mid­dle office et du back office man­age­ment au sein de l’entreprise qui sont concernés ; 
  • L’amélioration, très con­voitée, des ventes, dans un monde BtoC ou BtoBtoC. 

En par­al­lèle, la ques­tion trans­ver­sale au recours à l’intelligence arti­fi­cielle con­cerne les béné­fices de cette tech­nolo­gie. Si elle per­met de rem­plac­er des tâch­es qui représen­tent une faible valeur ajoutée pour les humains, son prin­ci­pal béné­fice, voire le plus intéres­sant, reste la pos­si­bil­ité d’augmenter, en dia­logue et en intel­li­gence les proces­sus humains. 

En effet, à terme, cette tech­nolo­gie per­me­t­tra d’accroître quan­ti­ta­tive­ment et qual­i­ta­tive­ment la pro­duc­tiv­ité, les dia­logues tout en réduisant les délais. 

Quelles sont les applications concrètes de l’intelligence artificielle ?

Avec l’intelligence arti­fi­cielle, nous sommes capa­bles d’avoir un chat­bot basé sur l’intelligence arti­fi­cielle disponible 24 h/24 pour rem­plac­er un vrai dia­logue humain. Il est capa­ble de com­pren­dre et de fournir une solu­tion sat­is­faisante au prob­lème du client de la banque. 

La fac­ulté d’ubiquité d’une solu­tion basée sur l’intelligence arti­fi­cielle a un intérêt et un impact extrême­ment impor­tants pour la sat­is­fac­tion client. 

Au niveau de l’augmentation de l’humain, les solu­tions basées sur l’intelligence arti­fi­cielle per­me­t­tent au con­seiller ban­caire de faire face aux prob­lèmes liés à la com­plex­ité et la maîtrise des offres de pro­duits et de ser­vices, ain­si que des régle­men­ta­tions. En com­prenant le con­texte d’un entre­tien entre un con­seiller et son client, l’IA per­me­t­tra au con­seiller de délivr­er le mes­sage per­ti­nent, la bonne valeur ajoutée, et ce, même dans le cas où le con­seiller ne maîtrise pas une com­pé­tence ou un sujet demandé. 

Qu’en est-il des enjeux qui découlent de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le secteur bancaire ?

Plus que jamais, il est essen­tiel de démys­ti­fi­er l’intelligence arti­fi­cielle pour pou­voir en saisir le poten­tiel et com­pren­dre ce qu’il est pos­si­ble d’accomplir grâce à cette technologie. 

En effet, les vingt dernières années ont été mar­quées par une ten­dance des géants de l’industrie à sur­ven­dre les capac­ités de l’intelligence artificielle. 

Actuelle­ment, l’intelligence arti­fi­cielle est portée par deux mécan­ismes récents : la grande quan­tité de don­nées et la puis­sance de cal­cul. L’enjeu, à ce niveau, est de pou­voir trou­ver une tech­nolo­gie assez mature pour être effi­cace dans les cas clients et avoir un impact sat­is­faisant au niveau des marchés. Pour nous, le défi est donc d’être en capac­ité de définir la véri­ta­ble valeur ajoutée des solu­tions basées sur l’intelligence arti­fi­cielle sans tomber dans une sur­vente des solutions. 

Dévelop­per des solu­tions basées sur l’intelligence arti­fi­cielle est un véri­ta­ble chal­lenge tech­nique dans la mesure où un acteur, comme Sopra Bank­ing Soft­ware, doit par exem­ple pou­voir appréhen­der de nou­velles com­pé­tences lin­guis­tiques pour tra­vailler sur les sys­tèmes cog­ni­tifs basés sur le langage. 

Il en est de même pour le Machine Learn­ing qui néces­site de pou­voir tra­vailler avec des Data Sci­en­tists. Or, il s’agit de com­pé­tences sur lesquelles il existe des tensions. 

“ Il est essentiel de démystifier l’intelligence artificielle pour pouvoir en saisir le potentiel et comprendre ce qu’il est possible d’accomplir grâce à cette technologie ”

Il est donc essen­tiel de pou­voir iden­ti­fi­er les bons pro­fils, mais aus­si de dévelop­per nos com­pé­tences. Ce développe­ment tech­nique entraîne ain­si une véri­ta­ble trans­for­ma­tion qui doit être opérée au sein de toutes les grandes organisations. 

Sur un volet social, même si l’intelligence est un vecteur de valeur ajoutée, elle va remet­tre en cause un cer­tain nom­bre d’emplois. Il faut donc d’ores et déjà pré­par­er la société à cette évo­lu­tion, en soulig­nant notam­ment le fait que l’intelligence arti­fi­cielle sera aus­si un fac­teur de créa­tion d’emplois.

Elle va, en effet, faire ressor­tir de nou­veaux besoins qui vont néces­siter de nou­veaux métiers et com­pé­tences. Néan­moins, il est encore trop tôt pour pou­voir dire si le vol­ume des emplois créés va con­tre­bal­ancer celui des emplois qui vont disparaître. 

Enfin, il y a aus­si un décalage en ter­mes d’appropriation de cette tech­nolo­gie à une échelle mon­di­ale. Si pour les États-Unis et les pays asi­a­tiques, l’utilisation de l’intelligence arti­fi­cielle ne fait plus de doute, il n’en est pas de même en Europe. 

Peu d’acteurs européens se démar­quent dans le développe­ment de solu­tions basées sur l’intelligence arti­fi­cielle. Nous ressen­tons un décalage entre le pos­i­tivisme volon­tariste des Anglo-sax­ons face à l’intelligence arti­fi­cielle et la retenue, voire le ques­tion­nement des acteurs européens. 

Vos perspectives ?

Dans un con­texte où chaque solu­tion est portée par un acteur dif­férent qui développe sa pro­pre tech­nolo­gie, la valeur des solu­tions basées sur l’intelligence arti­fi­cielle reste assez atomisée. 

Le bouil­lon­nement actuel va finir par se struc­tur­er, sur le moyen terme, autour de grandes tech­nolo­gies et de grands acteurs. 

SOPRA BANKING SOFTWARE EN BREF

  • 4000 experts, un chiffre d’affaires 2017 de 402,2 millions d’euros
  • Filiale du groupe Sopra Steria, avec près de 42 000 collaborateurs, un chiffffre d’affffaires de 3,8 milliards d’euros)
  • Un partenariat avec plus de 800 banques dans 70 pays

Néan­moins, ce que nous vivons aujourd’hui avec l’intelligence arti­fi­cielle est com­pa­ra­ble à ce que nous avons vécu avec le mobile, il y a déjà plusieurs décen­nies. Nous com­mençons à imag­in­er des fonc­tion­nal­ités, des solu­tions et des inno­va­tions basées sur l’intelligence arti­fi­cielle pour amélior­er un proces­sus de rela­tion client avec un chat­bot, faire de l’analyse pré­dic­tive sur un rap­port financier ou éval­uer les risques de fraude, etc. 

Nous avons récem­ment dévelop­pé une plate­forme dig­i­tale, « Dig­i­tal eXpe­ri­ence plat­form » pour opti­miser l’intégration et l’appropriation de l’intelligence arti­fi­cielle. Ain­si, les ban­ques pour­ront con­cevoir de nou­veaux scé­nar­ios d’usages plus rapi­de­ment en s’affranchissant du choix des tech­nolo­gies d’IA.

C’est aus­si un moteur d’intégration dans un écosys­tème tech­nologique qui bouge en per­ma­nence. Il per­me­t­tra aux ban­ques d’utiliser la bonne tech­nolo­gie au bon moment pour servir de manière opti­male les user cas­es qu’ils souhait­ent développer.

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