Eco-Tech Ceram

Eco-Tech Ceram : l’expert de la valorisation de la chaleur fatale

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°780 Décembre 2022
Par Antoine MEFFRE

Avec sa solu­tion clé-en-main, Eco-Tech Ceram s’attaque, entre autres, à la valo­ri­sa­tion de la cha­leur fatale inter­mit­tente, un gise­ment de décar­bo­na­tion inex­ploi­té jusque-là. Antoine Meffre, fon­da­teur et pré­sident d’Eco-Tech Ceram, nous en dit plus dans cet entre­tien et revient sur le posi­tion­ne­ment et l’offre de son entre­prise, ain­si que sur ses pers­pec­tives de développement. 

Quelques mots pour nous présenter votre entreprise. 

Eco-Tech Ceram est une entre­prise que j’ai créée en 2014 et qui dis­pose d’environ 1 mil­lion d’euros de capi­taux propres. Elle emploie aujourd’hui 33 per­sonnes. Son capi­tal est déte­nu par des acteurs publics (BPI, la Région Occi­ta­nie, ADEME) et pri­vés (RGREEN, QAIR, JOHES). En outre, 20 % de nos action­naires sont des citoyens. En 2022, nous allons réa­li­ser un chiffre d’affaires de plu­sieurs mil­lions d’euros après plu­sieurs années de recherche déve­lop­pe­ment et d’innovation.

Au cœur de votre activité, on retrouve la notion de décarbonation. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

La décar­bo­na­tion consiste à réduire les émis­sions de CO2. C’est un concept assez vague, car il existe plu­sieurs manières de faire de la décar­bo­na­tion. Par­mi celles-ci, une approche assez prag­ma­tique, simple et effi­cace est de com­men­cer par consom­mer le moins pos­sible. Concrè­te­ment, cela ren­voie aux notions de sobrié­té et d’efficacité éner­gé­tique, à la valo­ri­sa­tion de la cha­leur per­due ou fatale, puis à l’utilisation d’énergies renouvelables. 

C’est, en effet, l’enchaînement de ces actions qui per­met de décar­bo­ner intel­li­gem­ment une acti­vi­té industrielle. 

En s’appuyant sur cette logique, nous pro­po­sons un ser­vice de décar­bo­na­tion clé-en-main aux indus­triels autour de quatre actions complémentaires : 

  • Le mana­ge­ment de la sobrié­té et l’efficacité éner­gé­tique : nous nous ren­dons sur le site de nos clients pour pro­cé­der à une relève des don­nées que nous ana­ly­sons afin de pou­voir leur déli­vrer des recom­man­da­tions pour un meilleur pilo­tage de leur consommation ;
  • Dans un second temps, nous tra­vaillons sur l’efficacité éner­gé­tique en opti­mi­sant notam­ment le réglage des brû­leurs. En effet, très sou­vent, un mau­vais réglage à ce niveau peut être une source de sur­con­som­ma­tion éner­gé­tique. Ce sont des actions qui ne néces­sitent pas d’investissement par­ti­cu­lier et qui per­mettent d’obtenir en moyenne de 10 % d’économie. Il s’agit, d’ailleurs, du pour­cen­tage de réduc­tion qui est recher­ché par l’État fran­çais dans le cadre de son plan sobriété ; 
  • La valo­ri­sa­tion de cha­leur fatale : on estime que l’industrie perd envi­ron 36 % de l’énergie qu’elle consomme sous forme de cha­leur fatale. À ce niveau, nous recher­chons la meilleure solu­tion pour cap­ter, valo­ri­ser en réin­jec­tant ce gise­ment de cha­leur per­due dans le pro­cess. Cela per­met une éco­no­mie d’environ 20 % de gaz, mais néces­site des inves­tis­se­ments beau­coup plus conséquents ;
  • L’électrification des pro­cess ; l’utilisation des éner­gies renou­ve­lables en sub­sti­tu­tion d’une par­tie de la consom­ma­tion de gaz. 

Actuel­le­ment, nous dis­po­sons d’une ins­tal­la­tion en opé­ra­tion chez Tegu­lys depuis déjà 3 ans, un pro­to­type chez Arce­lor­Mit­tal. Cinq autres ins­tal­la­tions sont en cours d’installation, notam­ment chez Wie­ner­ber­ger et Vil­le­roy & Boch. 

Dans cette continuité, quelle est votre méthodologie d’intervention ?

Nous pro­po­sons une solu­tion clé-en-main tech­nique et finan­cière qui va cou­vrir le volet diag­nos­tic, études et ingé­nie­rie de finan­ce­ment, ins­tal­la­tion et mise en ser­vice. Selon les besoins de notre client, nous pou­vons l’accompagner dans la mobi­li­sa­tion des aides gou­ver­ne­men­tales comme les cer­ti­fi­cats d’économie d’énergie et les sub­ven­tions (ADEME, REGION) notam­ment. Dans ce cadre, nous finan­çons les ins­tal­la­tions pour le compte de nos clients et pre­nons éga­le­ment en charge l’exploitation et la main­te­nance. Nous cou­vrons véri­ta­ble­ment toute la chaîne de valeur ce qui, en retour, per­met à un indus­triel d’avoir un inter­lo­cu­teur unique. En paral­lèle, nous pro­po­sons à nos clients une offre addi­tion­nelle qui prend la forme de vente de cha­leur décar­bo­née à par­tir de 25 euros le méga­watt­heure. Concrè­te­ment, nous allons réin­jec­ter la cha­leur fatale que nous avons valo­ri­sée dans les pro­cess du client moyen­nant un coût fixe très com­pé­ti­tif. Et cette éner­gie est non seule­ment décar­bo­née, mais elle a aus­si un très fort ren­de­ment énergétique.

Pouvez-vous nous donner des cas d’usages concrets ?

Pour un indus­triel qui opère dans la céra­mique, nous nous concen­trons sur ses pro­cess inter­mit­tents qui sont les moins effi­caces et qui peuvent perdre jusqu’à 70 % de l’énergie consom­mée dans les fours. Nous récu­pé­rons donc cette cha­leur fatale afin d’alimenter par exemple le séchoir de l’usine. Il s’agit de deux pro­cé­dés inter­mit­tents qui ne fonc­tionnent pas de manière simul­ta­née. À ce niveau, l’ajout d’une solu­tion de sto­ckage per­met de faire tam­pon entre les deux pro­ces­sus et de s’adapter selon le besoin. Dans le domaine de la métal­lur­gie, un four de trai­te­ment ther­mique fonc­tionne géné­ra­le­ment à 800 degrés et perd de la cha­leur fatale par la che­mi­née. Nous la récu­pé­rons afin de la réin­jec­ter sous forme d’air chaud dans les brû­leurs, ce qui per­met, entre autres, d’améliorer le ren­de­ment de com­bus­tion du gaz natu­rel. La cha­leur fatale récu­pé­rée peut aus­si être uti­li­sée pour pro­duire de la vapeur qui est ensuite tur­bi­née afin de pro­duire de l’électricité. 

Quels sont les gains et les avantages pour les industriels ? 

Tout d’abord, nous per­met­tons à nos clients de réduire consi­dé­ra­ble­ment leur consom­ma­tion d’énergie fos­sile et leurs émis­sions de CO2 sans avoir à inves­tir de CAPEX donc sans aucun risque. Le réglage et l’optimisation de leur pro­ces­sus, au-delà des gains éner­gé­tiques, per­mettent éga­le­ment dans cer­tains cas d’améliorer la pro­duc­ti­vi­té en uti­li­sant les mêmes équi­pe­ments et installations. 

En paral­lèle, au tra­vers de notre offre de vente d’énergie, notre client va béné­fi­cier, durant toute la durée de son contrat, d’un prix fixe qui ne sera pas impac­té par les aléas du mar­ché de l’énergie. Les éco­no­mies géné­rées à ce niveau pour­ront être uti­li­sées pour l’optimisation et la pré­ser­va­tion de l’outil indus­triel. Enfin, cet enga­ge­ment en faveur de la décar­bo­na­tion a un impact très posi­tif en termes de marque employeur, mais aus­si vis-à-vis des banques et des finan­ceurs qui sont de plus en plus sen­sibles à la ques­tion de la tran­si­tion éco­lo­gique et énergétique. 

Dans cette démarche, quels sont peut-être les principaux enjeux et freins qui persistent ?

Nous sommes confron­tés à une régle­men­ta­tion assez contrai­gnante qui peut rendre com­plexe cer­taines démarches notam­ment en termes de recy­clage et de réuti­li­sa­tion de cer­tains maté­riaux. En paral­lèle, il y a encore de nom­breux efforts à réa­li­ser en termes de gas­pillage de l’énergie alors qu’on estime à 90 TWh la cha­leur fatale pro­duite en France (1 % du mar­ché mon­dial). De nom­breux appels à pro­jets, sou­tiens finan­ciers et sub­ven­tions existent pour accom­pa­gner les indus­triels dans leur démarche de décar­bo­na­tion et d’efficacité éner­gé­tique. Face à cette mul­ti­tude d’alternatives qui émanent de dif­fé­rents acteurs natio­naux, ces der­niers sont dému­nis et passent sou­vent à côté des plus per­ti­nents au regard de leur besoin. Il y a aus­si, à ce niveau, une réflexion à mener pour faci­li­ter l’accès à ces dif­fé­rents dis­po­si­tifs et mécanismes. 

Quelles sont les opportunités de carrière que vous pouvez offrir à des diplômés de l’école ?

Parce que nous four­nis­sons à nos clients une solu­tion clé-en-main, nos métiers et exper­tises couvrent l’intégralité de la chaîne de valeur. Dans ce cadre, nous recher­chons des pro­fils d’ingénieurs (éner­gie, concep­tion, pro­cess, auto­ma­tisme), des chefs de pro­jet qui ont une appé­tence pour le monde des indus­tries, les opé­ra­tions, ain­si que les sujets liés à la pro­duc­tion et la fabri­ca­tion. Nous avons éga­le­ment besoin de commerciaux. 

Et pour conclure, comment vous projetez-vous sur ce marché ? Quelles sont peut-être vos perspectives ?

Aujourd’hui, nous sommes en pleine crois­sance. Comme men­tion­né pré­cé­dem­ment, le mar­ché de la cha­leur fatale a un très fort poten­tiel qui peut for­te­ment contri­buer à la décar­bo­na­tion et la réduc­tion des émis­sions de CO2 de l’industrie fran­çaise, voire euro­péenne. Sur le volume de cha­leur fatale pro­duit en France, nous nous inté­res­sons plus par­ti­cu­liè­re­ment aux fumées de haute tem­pé­ra­ture propres et inter­mit­tentes. Sur ce seg­ment, il y a un poten­tiel de plu­sieurs mil­liards d’euros de chiffres d’affaires à réa­li­ser. Et au-delà, nous pour­sui­vons le déve­lop­pe­ment du volet élec­tri­fi­ca­tion et sto­ckage mas­sif de l’électricité.

Plus que jamais, Eco-Tech Ceram est posi­tion­né sur un mar­ché très por­teur aux pers­pec­tives qua­si-infi­nies dans un contexte d’accélération de la décar­bo­na­tion. Sur le long terme, notre ambi­tion est d’être recon­nu comme un lea­der euro­péen sur nos domaines d’expertises (tCO2_économisées/ETP), et plus par­ti­cu­liè­re­ment sur tout ce qui tourne autour de la valo­ri­sa­tion de la cha­leur fatale. 

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