L’Inde démocratique dans un imaginaire de caste

Dossier : Les différences culturellesMagazine N°624 Avril 2007
Par Jean-Claude GALEY

Premiers contrastes, premières interactions

Premiers contrastes, premières interactions

En France, depuis la Révo­lu­tion, l’É­tat est organ­isa­teur d’une com­plète refon­da­tion sociale, refon­da­teur d’une socia­bil­ité qui ne pou­vait désor­mais plus pass­er par les corps inter­mé­di­aires, les ordres et les dig­nités de l’An­cien Régime. Il a fal­lu de fait recon­stru­ire, restruc­tur­er le lien social, réa­gencer une société à par­tir d’in­di­vidus-citoyens. La société s’est iden­ti­fiée ain­si à un pur pro­duit poli­tique. En Inde au con­traire l’É­tat, sou­verain mais advenu dans un con­texte de dom­i­na­tion, se sura­joute, se super­pose à un corps social qui con­tin­ue d’ex­is­ter, de vivre et de se penser indépen­dam­ment de lui. L’É­tat est régu­la­teur et comme addi­tion­nel. Quant à la démoc­ra­tie qui l’ac­com­pa­gne, elle est sans précédent.

Le citoyen existe déjà mais ailleurs, pris dans un tis­su où un mail­lage de castes lui four­nit son état — de spé­cial­ité, de savoir-faire, de devoir, de pro­tec­tion ou d’oblig­a­tion. Il est ain­si inscrit dans une mor­pholo­gie de groupe où son appar­te­nance pre­mière n’ex­iste que par rela­tion à une échelle des êtres, hiérar­chique et morale­ment partagée, où cha­cun par­ticipe, depuis sa place et à sa mesure, à la réal­i­sa­tion d’une ontolo­gie com­mune. Ini­tiale­ment, la démoc­ra­tie ne s’in­stalle, ne se greffe et ne se déploie ici que comme une démoc­ra­tie de pro­mo­tion sociale où la poli­tique inau­gure les jeux de seules aspi­ra­tions au pouvoir.

Intro­duite depuis le haut, portée par un mou­ve­ment de mass­es mobil­isé con­tre une dom­i­na­tion étrangère, la démoc­ra­tie en Inde c’est d’abord l’élan d’une vic­toire. Elle pose le cadre d’une nation libérée du joug colo­nial et lui emprunte une forme, pour elle très extérieure, du poli­tique. Pour les élites mil­i­tantes, elle est un espace de con­quête. Elle mobilise une volon­té con­struc­tiviste et une logique de pou­voir. Elle se dou­ble d’aspi­ra­tions à la crois­sance, à l’é­gal­i­sa­tion des con­di­tions, la réduc­tion des pau­vretés, la fin des exclu­sions. L’en­tre­prise colo­niale, que l’his­to­rien Robert Darn­ton qual­i­fi­ait d’im­péri­al­isme libéral, a engagé elle-même la tran­si­tion dans un dia­logue et dans une coopéra­tion exem­plaires. De sim­ples sujets colonisés, les Indi­ens de l’Em­pire sont devenus les parte­naires d’une tran­si­tion qui les mèn­era de la soumis­sion jusqu’à l’au­tonomie. La Con­sti­tu­tion de 1949, large­ment inspirée du mod­èle de West­min­ster fini­ra de sceller le des­tin d’une sou­veraineté sans précédent.

Si le fédéral­isme appa­raît bien rétro­spec­tive­ment comme le seul mod­èle viable d’un exer­ci­ce démoc­ra­tique au vu de l’im­mense diver­sité d’his­toires, de langues et d’usages, la démoc­ra­tie par­lemen­taire qui l’ac­com­pa­gne va pro­gres­sive­ment brouiller jusqu’à la ren­dre prob­lé­ma­tique l’i­den­tité entre gou­ver­nants et gou­vernés. Il faut en out­re rap­pel­er la place effec­tive que con­tin­ue d’oc­cu­per, aux niveaux locaux des petites régions, l’au­torité que sym­bol­ise et représente encore la fonc­tion royale. Elle ne la doit qu’ac­ci­den­telle­ment aux élec­tions, mais la retire au con­traire des oblig­a­tions mutuelles de pro­tec­tion et de ser­vice com­mandés par des rela­tions inter­castes qu’elle mobilise, tra­vaille et réac­tu­alise. Et tous n’at­tribuent pas la respon­s­abil­ité des iné­gal­ités au régime des castes lui-même et ne voient pas l’ur­gence qu’il y aurait à le réformer.

L’histoire devant les pensées héritées

Et pour­tant, ils votent… Avec plus d’un mil­liard d’âmes l’Inde dis­pose aujour­d’hui de 600 mil­lions d’électeurs dont 60 % de pop­u­la­tions rurales. Avec un taux de par­tic­i­pa­tion d’en­v­i­ron 60 %, une forte mobil­i­sa­tion des femmes et des minorités religieuses et trib­ales, les élec­tions s’y opèrent dans un cli­mat d’ef­fer­ves­cence fes­tive. Les échéances régulières, la présence d’un mul­ti­par­tisme, les formes d’al­ter­nances majori­taires, les gou­verne­ments de coali­tion et la présence de lég­is­la­tures menées jusqu’à leur terme y sont con­sid­érés comme les preuves de son acces­sion à la matu­rité démocratique.

De ce point de vue, l’Inde serait donc admise dans le cer­cle restreint des démoc­ra­ties qui peu­vent ren­vers­er leurs gou­verne­ments de manière paci­fique. Le jeu des votes y demeure cepen­dant rarement le résul­tat de déci­sions per­son­nelles. Les choix se pren­nent sous l’égide de déci­sions vil­la­geois­es et de con­sid­éra­tions col­lec­tives de castes, de fac­tions et de clien­tèles dont l’in­flu­ence débor­de large­ment le mes­sage offi­ciel et le dis­cours des par­tis. Cinquante années d’ex­er­ci­ce d’une démoc­ra­tie con­sti­tu­tion­nelle et par­lemen­taire sont encore très loin d’avoir réduit l’in­flu­ence et le poids de loy­autés presque extérieures au jeu pub­lic qu’elles présen­tent. Ces loy­autés con­tin­u­ent d’habiter la matière et le devant d’une scène où les acteurs n’ont pas tou­jours la présence atten­due de leur emploi.

L’élec­torat lui-même n’est pas aus­si sta­bil­isé que la plu­part des poli­to­logues le lais­sent enten­dre. Volatile, con­textuel, cor­po­ratiste ou caté­goriel, il exprime ses décep­tions et ses désaveux en de grands mou­ve­ments pen­du­laires qui, d’une élec­tion à l’autre et dans une même cir­con­scrip­tion, changent les majorités et recom­posent les aligne­ments. Le rôle des nota­bil­ités, leurs intim­i­da­tions et leurs manœu­vres, la cor­rup­tion qui les accom­pa­gne par­fois, l’in­ter­sub­jec­tiv­ité pop­u­laire et pop­uliste de choix médi­a­tiques pour des fig­ures charis­ma­tiques ou des vedettes de ciné­ma, qui sem­blent peser infin­i­ment plus que le sim­ple bour­rage des urnes, débor­dent large­ment les agen­das poli­tiques des par­tis en présence.

Au plan nation­al, la démoc­ra­tie indi­enne réalise cepen­dant d’indé­ni­ables con­quêtes. Ain­si, le décol­lage économique, l’amélio­ra­tion des con­di­tions de vie, les redis­tri­b­u­tions internes de ressources entre les États, les pre­mières indus­tri­al­i­sa­tions s’ef­fectuent dans les pre­mières décen­nies sous l’emprise du Par­ti du congrès.

L’indépen­dance de la jus­tice, l’au­torité de la Cour suprême, une présence respec­tée de l’Élec­tion Com­mis­sion qui garan­tit la régu­lar­ité des scruti­ns et en sur­veille le déroule­ment, la lib­erté des opin­ions et de la presse com­plè­tent le dis­posi­tif d’un État de Droit où toutes les oppo­si­tions poli­tiques sont recon­nues jusqu’à tenir le gou­verne­ment d’É­tats régionaux, comme c’est le cas des majorités com­mu­nistes du Ben­gale et du Kérala. Ayant su domin­er ou négoci­er plusieurs crises intérieures, éviter la dérive des coups d’É­tat et l’in­stau­ra­tion de régimes mil­i­taires comme son voisin pak­istanais, la démoc­ra­tie indi­enne pré­parait sans trop de heurts l’al­ter­nance qui allait suc­céder aux décen­nies incon­testées du Con­grès. Il faut not­er en out­re la place incon­testée qu’oc­cupe l’U­nion indi­enne dans une géopoli­tique com­plexe, que son autorité de puis­sance nucléaire et sa présence habile dans la poli­tique régionale ne cessent de confirmer.

Une plus récente décen­tral­i­sa­tion des États, de nou­velles formes de libéral­i­sa­tion économique, l’en­trée de cap­i­taux étrangers et les investisse­ments qu’y effectue une dias­po­ra prospère, l’au­tonomi­sa­tion rel­a­tive des économies régionales avec les développe­ments très sig­ni­fi­cat­ifs d’un secteur privé, l’ex­cel­lence de ses écoles d’ingénieurs, de ses entre­pris­es de ser­vice et d’un tourisme en pleine expan­sion per­me­t­tent désor­mais au pays d’e­spér­er une forte croissance.

Mais l’émer­gence de nou­veaux par­tis de bass­es castes et les ten­sions engen­drées par la poli­tique de dis­crim­i­na­tion pos­i­tive et de quo­tas dans les emplois publics sig­na­lent encore toute la fragilité de cette démoc­ra­tie. La mon­tée des revival­ismes religieux, les crispa­tions crois­santes entre com­mu­nautés musul­manes et hin­doues, attes­tent aus­si la grande vul­néra­bil­ité de la laïc­ité répub­li­caine tant espérée.

D’autres signes d’in­quié­tude se repèrent et affleurent avec les années qua­tre-vingt-dix et ne cesseront de s’am­pli­fi­er. Les replis sur la famille et sur la caste d’o­rig­ine s’a­joutent à l’é­goïsme des intérêts privés. Ils entraî­nent la désaf­fec­tion crois­sante et très sig­ni­fica­tive de toute une pop­u­la­tion pour les moti­va­tions citoyennes. Beau­coup au sein des class­es moyennes se dés­in­téressent en effet pro­gres­sive­ment de la poli­tique, déser­tent les élec­tions à moins d’aller porter leurs suf­frages vers des for­ma­tions extrémistes qui exal­tent le com­mu­nau­tarisme d’une hin­douité d’au­tant plus sol­lic­itée qu’elle est idéologique­ment reconstruite.

Plus soucieux d’é­va­sion fis­cale, de con­som­ma­tion, de films bol­ly­woo­d­i­ens, de « Real­i­ty Shows » et de poli­tique spec­ta­cle que de sol­i­dar­ité par­tic­i­pa­tive, le « Shin­ing India » avec son osten­ta­tion de nou­veaux rich­es touche fort à l’ar­ti­fi­cial­isme. L’éloigne­ment matériel des plus aisés ne les pro­tège cepen­dant en rien de la prox­im­ité spa­tiale qu’ils parta­gent avec les couch­es les plus défa­vorisées. Pen­dant que les « Gat­ed Com­mu­ni­ties » des beaux quartiers urbains côtoient au quo­ti­di­en les « ser­vants quar­ters » et les « slums » sans se don­ner la moin­dre recon­nais­sance d’un voisi­nage partagé, la sépa­ra­tion ville-cam­pagne sem­ble n’avoir jamais été aus­si forte. Pareille jux­ta­po­si­tion d’ex­is­tences aus­si con­trastées d’altérités qui s’ig­norent rend désor­mais impos­si­ble la moin­dre vel­léité de sol­i­dar­ité, remet­tant même en cause tout sen­ti­ment con­cret d’ap­par­te­nance à un pro­jet commun.

L’au­tonomi­sa­tion rel­a­tive des États, avec la libéral­i­sa­tion de l’é­conomie qui l’ac­com­pa­gne, favorise pour sa part de nou­velles poli­tiques de développe­ment économique. Elles aus­si met­tent à mal la réal­i­sa­tion démoc­ra­tique poli­tique­ment tant atten­due. Sous les aus­pices de la Banque mon­di­ale, du FMI, et les con­seils de con­sul­tants privés, les gou­verne­ments régionaux, en par­ti­c­uli­er ceux du Maha­rasthra et de l’Andhra Pradesh, lan­cent leurs paysan­ner­ies dans de grandes trans­for­ma­tions agraires les con­traig­nant à s’en­det­ter pour inve­stir vers d’autres types d’a­gri­cul­ture espérés plus rémunérateurs.

Elles réduiront les aides con­cédées jusqu’i­ci en matière de sou­tien des prix, de sub­ven­tions pour les semences et les engrais, leur fac­turant désor­mais des sources d’én­er­gies autre­fois gra­tu­ites. Les échéances survi­en­nent sans que les prof­its soient au ren­dez-vous. Inca­pables alors de faire face à la dette, les paysans se sui­ci­dent par mil­liers. Très large­ment sous-estimées, ces tragédies témoignent de l’a­ban­don général et du manque d’in­térêt d’une classe poli­tique pour un monde rur­al qui con­tin­ue néan­moins, bon an mal an, à nour­rir le pays. Elles pèseront lourd dans l’avenir proche de cette démoc­ra­tie. Mais elles révè­lent aus­si la présence de nou­veaux types de mobil­i­sa­tion et des formes de dérives que ni l’idéolo­gie ni la logique insti­tu­tion­nelle n’avaient su jusqu’i­ci claire­ment envisager.

Qu’est-ce que la démocratie ?

Ain­si les mou­ve­ments de l’his­toire, sou­vent rap­portés comme con­sti­tu­tifs d’or­dres nou­veaux, ne représen­tent en réal­ité que les étapes d’un chem­ine­ment com­plexe et con­tourné forte­ment attaché à tout un précé­dent de manières de voir et de manières de faire. Les notions impliquées sont elles-mêmes le résul­tat de longs proces­sus de refor­mu­la­tions et d’a­juste­ments. Exposé en effet depuis des siè­cles à la présence de formes de dom­i­na­tion ou d’in­flu­ence musul­manes, chré­ti­ennes, européennes et mod­ernes, le sous-con­ti­nent indi­en s’est à la fois gardé d’en jamais rejeter les apports, sans pour autant renon­cer aux valeurs spé­ci­fiques défendues par sa cul­ture. Son accueil répété d’in­flu­ences extérieures l’en­traî­nait au con­traire à révis­er sans cesse, sans en trahir l’e­sprit, mais pour au con­traire en mieux véri­fi­er les prémiss­es, un univers de valeurs, chaque fois renou­velé, tou­jours immuable. L’in­clu­sivisme réac­t­if, l’ac­com­mo­da­tion, la tra­duc­tion, l’ap­pro­pri­a­tion deve­naient ain­si les modal­ités instru­men­tales que l’Inde n’al­lait cess­er de mobilis­er pour inter­préter l’in­cur­sion du nou­veau — par­fois jusqu’à en con­tredire les impli­ca­tions — en vue de mieux per­sévér­er dans son être.

Adap­ta­tion et refor­mu­la­tion, ouver­ture et dynamisme, dans l’u­nité de sa diver­sité l’Inde réver­bère sur elle-même le hasard de l’his­toire. Elle l’ap­préhende par le biais de normes et de sig­ni­fi­ca­tions qu’elle pré­tend recon­duire tout en les jouant avec de nou­velles donnes qui ne man­quent pas de les trans­former. Pareilles ouver­tures au change­ment inter­dis­ent alors qu’on puisse encore par­ler à son endroit de « tra­di­tion » avec le sens d’im­mutabil­ité déclassée que l’on attribue à ce terme.

Inter­ac­tions, répons­es et surenchères sem­blent donc jusqu’à récem­ment avoir habité la plas­tic­ité plu­ral­iste d’un univers socio­cul­turel au demeu­rant tou­jours peu pré­paré à se con­cevoir comme l’É­tat-nation que ses dirigeants veu­lent lui impos­er. Sa réal­ité d’au­jour­d’hui s’établit selon trois développe­ments : celui d’une logique régionale avec son pat­ri­moine d’his­toire, de langues, de con­fig­u­ra­tion de castes ; celui de logiques caté­gorielles pliées par les cor­po­ratismes de class­es — organ­isés autour des nou­veaux par­tis de bass­es castes et des éti­quettes de la dis­crim­i­na­tion pos­i­tive (Sched­uled Castes and Tribes, Back­ward Class­es, Oth­er Back­ward Class­es) — et les sol­i­dar­ités jux­ta­posées du com­mu­nau­tarisme iden­ti­taire ou du con­fes­sion­nal­isme religieux ; celui enfin de logiques con­textuelles, for­mant et refor­mant alliances et fidél­ités au gré de sit­u­a­tions. Com­pos­ites à n’en pas douter, ces développe­ments habitent encore une ontolo­gie très étrangère à celle de nos modes de pensée.

À l’heure des idéal­i­sa­tions ou du dis­crédit qu’il est par­fois de bon ton d’adress­er aujour­d’hui à la démoc­ra­tie pour n’en retenir que sa ver­sion idéale et uni­verselle, arti­fi­cielle­ment abstraite et idéologique­ment uni­forme, il n’est pas nég­lige­able de retenir la leçon dif­férente qu’en retire la prag­ma­tique indi­enne. Elle a su en effet engranger les gains de jus­tice sociale attachés à l’étab­lisse­ment démoc­ra­tique en en tirant tout le par­ti élec­toral mais en en réduisant les final­ités comme s’il s’agis­sait là de points de vue, ou d’épisodes, à insér­er dans une série presque indéfinie d’ex­péri­ences. Pour autant, la démoc­ra­tie des réformes n’a pas évité les mal­heurs de la démoc­ra­tie formelle.

Les nou­velles modal­ités bureau­cra­tiques, les égoïsmes d’aven­ture, les amende­ments répétés de la Con­sti­tu­tion con­damnent cette démoc­ra­tie, soit à utilis­er ses moyens et con­tredire ses principes, soit à les aban­don­ner tous deux aux par­tis et aux par­tic­u­lar­ismes jusqu’à ris­quer de ruin­er les fonde­ments de l’É­tat de droit. Dans la fidél­ité qu’elle con­serve néan­moins à son inclu­sivisme, à son appréhen­sion con­tex­tu­al­isée des événe­ments, à son ortho­prax­ie, l’Inde se plaît à maîtris­er l’im­por­tance spé­ci­fique des sit­u­a­tions sans se priv­er d’y apporter une pen­sée cri­tique. Les répons­es qu’elle provoque, tour à tour réac­tives et créa­tri­ces, ont l’or­don­nance d’une par­ti­tion chorale. Celle-ci opère sur un fond de basse con­tin­ue où s’or­donne et se réor­donne un con­tin­uel théâtre de recom­po­si­tions, véri­ta­ble décalque de ce que nous ont enseigné ses plus grandes épopées.

Avec sa démoc­ra­tie, l’Inde nous apporte un témoignage. Elle nous enseigne en effet qu’il est pos­si­ble d’amé­nag­er et de tenir ensem­ble les pos­si­bil­ités d’avène­ment d’une société de citoyens indi­vidu­els à dig­nités égales et aux aspi­ra­tions partagées avec la présence total­isante d’u­nités de castes à la fois sol­idaires et dépen­dantes d’une hiérar­chie con­sti­tu­tive d’iné­gal­ités. Holisme col­lec­tiviste et holisme struc­tur­al s’y trou­vent ain­si mêlés dans un alliage de sol­i­dar­ités que nous auri­ons trop vite ten­dance à écarter comme des antag­o­nismes ou des para­dox­es rel­e­vant de l’a­por­ie. Inscrit ici dans un tis­su social pro­fondé­ment renou­velé, le poli­tique, dans sa vari­ante mod­erne de la poli­tique, y fait à la fois l’épreuve du gref­fon et les répons­es de l’hybride.

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