Les vins de la Côte-Rôtie

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°557 Septembre 2000Rédacteur : Laurens DELPECH

A une trentaine de kilo­mètres au sud de Lyon, sur le Rhône, autour du gros bourg d’Ampuis, la vigne monte à l’assaut de pentes ver­tig­ineuses, sur des coteaux abrupts, exposés plein sud-est. Sur ces ter­rass­es caill­ou­teuses poussent des plants de syrah et de viog­nier qui sont à l’origine d’un des plus grands vins de France et du monde : la Côte-Rôtie. Un rouge puis­sant et velouté, avec de très beaux arômes de fruits rouges, de vio­lette, de truffe, de gibier et d’épices, des tanins fins et élégants.

À table, la Côte-Rôtie va bien avec des mets puis­sants et goû­teux, comme les recettes à base de truffes (Alain Senderens pré­conise une Côte-Rôtie avec son canard sauvage au céleri et aux truffes), le gibier (salmis de bécasse, civet de lièvre, filet de san­gli­er en daube…), le canard au sang, les vian­des en sauce, les belles pièces de viande gril­lées ou rôties (côte de bœuf, onglet à l’échalote) et les fro­mages régionaux (Saint-Mar­cellin bien affiné).

On ne saurait évo­quer les vins de Côte-Rôtie sans racon­ter l’étonnante saga de la famille Gui­gal : un roman à la Dick­ens qui finit en con­te de fée. En 1917, quand Éti­enne Gui­gal, le père de Mar­cel, a huit ans, il doit aban­don­ner l’école pour tra­vailler. Son père vient de mourir et sa mère n’a plus les moyens de sub­venir à ses besoins. À onze ans, il est ouvri­er d’usine à Saint-Cha­mond. En 1923, à l’âge de qua­torze ans, Éti­enne trou­ve un tra­vail de jour­nalier à Ampuis, dans la mai­son de négoce Vidal- Fleury.

Le jour de son embauche, il dit à son frère : un jour cette mai­son m’appartiendra… un rêve que Mar­cel réalis­era en 1984. Il crée ensuite (en 1946) sa pro­pre affaire de négoce, que Mar­cel repren­dra en 1961, et com­mence à acheter des vignes…

Aujourd’hui, la mai­son Gui­gal est le plus gros négo­ciant du nord de la val­lée du Rhône et pos­sède les plus belles vignes de l’appellation Côte-Rôtie…

La mai­son est pro­prié­taire en Côte Brune et en Côte Blonde, elle est surtout con­nue pour les trois micro­cli­mats qu’elle vini­fie : La Mouline, La Turque et La Lan­donne. Gui­gal pro­pose aus­si aux ama­teurs deux autres Côte-Rôtie, “La Brune et La Blonde ”, un assem­blage de vins issus des deux côtes et le Château d’Ampuis, assem­blage de lieux-dits entourant le château d’Ampuis. Ces deux vins, plus vite prêts à boire que les trois grandes cuvées, se situent néan­moins tout à fait au som­met de la gamme des vins de Côte-Rôtie… Des vins inde­struc­tibles, pas­sion­né­ment recher­chés par nom­bre d’amateurs à tra­vers le monde.

Autre vini­fi­ca­teur excep­tion­nel, René Ros­taing pos­sède sept hectares de vignes. Une super­fi­cie qui peut sem­bler mod­este, mais en Côte-Rôtie, seuls trois vignerons pos­sè­dent plus de cinq hectares… Des vins élé­gants et très fins : Cuvée Clas­sique (assem­blage de onze par­celles), Côte Blonde et surtout deux grandes cuvées : La Viail­lère et La Lan­donne. La demande inter­na­tionale est telle que René Ros­taing ne vend que 5 % de sa pro­duc­tion en France…

Le

domaine Jas­min (4 hectares) pro­duit des vins con­cen­trés (90 % de syrah, 10 % de viog­nier) jouant sur l’élégance et la longueur, mais plus hétérogènes que ceux des trois pro­prié­taires précédents.

Avec 6 hectares, Jean- Paul et Jean-Luc Jamet comptent par­mi les plus grands pro­prié­taires de vignes en Côte- Rôtie. Ils font des vins tout en sub­til­ité, avec des tan­nins soyeux, élé­gants et fins.

Bernard Bur­gaud pos­sède 3,5 hectares de vignes, dont une très belle par­celle en Côte Blonde. Il pro­duit des grands vins, très con­cen­trés, avec des robes noires presque opaques, beau­coup de gras et d’ampleur en bouche. Ce sont des vins de syrah, sans viog­nier, qui ont sou­vent des arômes ani­maux puissants.

Georges Ver­nay, surtout con­nu pour être une grande référence en viog­nier (il fait un excel­lent Con­drieu), pro­duit une Côte-Rôtie tout en finesse mais de bonne garde.

Le domaine Clusel-Roch pos­sède 4 hectares de vignes, dont l’essentiel en Côte-Rôtie et 50 ares en Con­drieu. Depuis quelques années, il pro­duit une grande cuvée de Côte-Rôtie à par­tir de vieilles vignes situées sur un ter­roir appelé Les Grandes Places. Un vin bien char­p­en­té mais fin, avec un nez de fruits rouges et d’épices et une belle longueur en bouche.

Jean-Michel Gérin exploite un domaine de 8 hectares, 5 en Côte-Rôtie, 2 en Con­drieu, un en Côtes-du-Rhône. Il pro­duit des vins de grande qual­ité, notam­ment une remar­quable Côte-Rôtie Les Grandes Places, opu­lent et gras, au nez de vio­lette et de gril­lé avec une touche giboyeuse. La cuvée Champin Le Seigneur est aus­si un très beau vin, suave et riche. Très bon Côtes-du-Rhône, issu de syrah de plateau non classées Côte-Rôtie, à l’excellent rap­port qualité/prix.

Quelques grands négo­ciants font aus­si de bonnes Côte- Rôtie : Vidal-Fleury (La Châtil­lonne), Jaboulet (Les Jumelles), Chapouti­er, de Vallouit…

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Gui­gal : 04.74.56.10.22.
Ros­taing : 04.74.56.12.00.
Jas­min : 04.74.56.11.41.
Jamet : 04.74.56.12.57.
Bur­gaud : 04.74.56.11.86.
Clusel-Roch : 04.74.56.15.95.
Ver­nay : 04.74.56.52.22.
Gérin : 04.74.56.16.56.

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