Les gestes du maquillage en Egypte ancienne

Les cosmétiques au temps de l’Egypte pharaonique

Dossier : ExpressionsMagazine N°564 Avril 2001Par : Georges Tsoucaris, Philippe Walter, Pauline Martinetto et Jean-Luc Lévêque

Conservé au Musée du Lou­vre, un frag­ment de cal­caire peint, daté de 1200 avant J.-C., met en scène en Égypte, sous une ton­nelle, une ser­vante qui présente un miroir et un étui à khôl à sa maîtresse allai­tant son enfant. Sur d’autres représen­ta­tions égyp­ti­ennes, une femme se farde les joues avec un tis­su ou dépose une sub­stance sur ses lèvres avec un pinceau ; un sculp­teur tra­vaille à la réal­i­sa­tion d’une colonne tan­dis qu’un autre per­son­nage farde ses paupières. Si ces représen­ta­tions mon­trant directe­ment les gestes du maquil­lage quo­ti­di­en sont rel­a­tive­ment rares, les nom­breux textes et objets relat­ifs aux fards témoignent de l’im­por­tance de ces activ­ités cos­mé­tiques à l’époque des pharaons.


Les gestes du maquil­lage : pein­ture sur un frag­ment de cal­caire représen­tant sous une ton­nelle une ser­vante présen­tant un miroir et un étui à khôl à sa maîtresse en train de don­ner le sein (E25333), vers 1220 avant J.-C.
© RMN, R. G. OJEDA

En fait, la parure et les soins du corps ont tou­jours motivé la recherche de matéri­aux var­iés, dotés de pro­priétés esthé­tiques et par­fois phar­ma­ceu­tiques, et issus de pré­pa­ra­tions chim­iques ou de traite­ments physiques. L’ob­ser­va­tion des représen­ta­tions humaines préhis­toriques et l’analyse des ves­tiges archéologiques asso­ciés ont ain­si per­mis de recueil­lir une mul­ti­tude d’in­for­ma­tions ténues sur les pein­tures liées aux arts du corps, il y a 10 000 à 40 000 ans (Wal­ter, 1995).

Les pig­ments rouges et jaunes à base de fer (hématite et goethite), noirs à base de car­bone ou d’oxyde de man­ganèse étaient broyés et mélangés afin de dis­pos­er des dif­férentes teintes utiles pour décor­er rit­uelle­ment ou sym­bol­ique­ment le corps à l’aide de tatouage et de pein­ture. Après les péri­odes du paléolithique et du néolithique, l’im­por­tance du maquil­lage peut être mise en évi­dence en étu­di­ant les récip­i­ents par­fois encore rem­plis de poudre cos­mé­tique, décou­verts lors de fouilles en Mésopotamie ou en Égypte.

Ces coquil­lages, vas­es en pierre, boîtes en bois ou sim­ples roseaux nous per­me­t­tent de révéler les habi­tudes cos­mé­tiques dès le troisième mil­lé­naire avant notre ère. Ain­si, toutes les tombes de femmes du cimetière roy­al d’Ur (Mésopotamie) ont livré dans des coquil­lages de nom­breux fards de couleur blanche, rouge, jaune, bleue, verte ou noire. Ces pro­duits col­orés, datés d’en­v­i­ron 2500 avant J.-C., étaient élaborés avec dif­férentes matières minérales, prin­ci­pale­ment à base de cuiv­re, man­ganèse, fer et plomb (Bim­son, 1980).

Porteuse d’auge egyptienne : statue polychrome en bois, Moyen Empire, Musée du Louvre.
Por­teuse d’auge : stat­ue poly­chrome en bois, Moyen Empire, Musée du Lou­vre© D. BAGAUT/C2RMF

Les fouilles de cer­taines tombes égyp­ti­ennes ont, elles aus­si, livré de véri­ta­bles cof­frets de maquil­lage qui con­te­naient des miroirs, des épin­gles à cheveux et des stylets aux côtés de récip­i­ents à cos­mé­tiques (onguents, par­fums et fards). Les fla­cons à fards (cf. p. 41) étaient le plus sou­vent en pierre (albâtre, hématite, mar­bre), avec un col resser­ré et un bord large et plat. La cav­ité était par­fois fer­mée par un cou­ver­cle entouré d’un tis­su de lin ; des bou­chons d’étoffe ser­vaient dans d’autres cas à main­tenir la poudre au fond du récipient.

D’autres fla­cons en forme de tube étaient façon­nés en roseau, os, ivoire, bois ou céramique glaçurée. Enfin, des boîtes à mul­ti­ples com­par­ti­ments ont été util­isées pour con­serv­er cer­tains cos­mé­tiques (Vandi­er d’Ab­badie, 1972).

L’ob­ser­va­tion de ces matières de l’É­gypte anci­enne encore con­tenues dans les fla­cons mon­tre que la couleur des fards était lim­itée à une palette restreinte, avec la dom­i­nance des teintes blanch­es, gris­es, noires et acces­soire­ment vertes. Ain­si, si la galène naturelle broyée était à la base de la plu­part des maquil­lages fon­cés, ses pro­priétés de réflex­ion de la lumière étaient mod­ulées par l’ad­jonc­tion de poudres blanch­es, naturelles ou syn­thé­tiques. En ajoutant des quan­tités vari­ables de graiss­es, les Égyp­tiens pou­vaient ain­si créer, à par­tir de mélanges, toute une gamme de pro­duits allant du gris clair au noir sous la forme de poudres ou de pâtes plus ou moins grass­es (Wal­ter et al., 1999).

Les pré­para­teurs se sont lim­ités à ces nuances alors qu’ils dis­po­saient pour­tant des pig­ments var­iés — util­isés d’ailleurs dans la pein­ture — qui leur auraient per­mis d’obtenir une palette com­pa­ra­ble à celle qui est observée sur le site d’Ur. On cherchera dans cet arti­cle à mon­tr­er com­ment les infor­ma­tions fournies par les textes anciens, les représen­ta­tions de maquil­lages dans la stat­u­aire et la pein­ture ain­si que les analy­ses de lab­o­ra­toire per­me­t­tent de retrou­ver les habi­tudes du maquil­lage en Égypte ancienne.

Les représentations de fards et les textes religieux

Lorsque l’on observe une stat­ue égyp­ti­enne, le relief autour des yeux suf­fit sou­vent à ren­seign­er sur les traits cos­mé­tiques alors employés. Par­fois, dans le cas des objets les mieux con­servés, la poly­chromie pré­cise la couleur. Si un maquil­lage vert, appliqué en trait épais sur la paupière inférieure, est aujour­d’hui encore très vis­i­ble sur de rares représen­ta­tions très anci­ennes (vers 2650 avant J.-C.), seules les nuances de noir sem­blent avoir été abon­dam­ment employées pour le maquil­lage des yeux, appa­rais­sant sur de très nom­breux vis­ages en allongeant l’œil d’un trait noir vers la tempe et vers le nez.

Une obser­va­tion détail­lée du dessin autour des yeux (cf. p. 42, fig­ure du haut) a per­mis la déf­i­ni­tion de dif­férents mod­èles de maquil­lage qui ont été décrits pour la péri­ode de la XVIIIe dynas­tie dans le cadre d’une étude de l’art à l’époque d’Aménophis III (Both­mer, 1993) :

  • dans le pre­mier cas, l’œil ” hiéro­glyphique ” est entouré par un trait fin et la paupière supérieure est par­fois pro­longée par une ligne qui peut pren­dre dif­férentes épais­seurs et formes. Le fin trait noir est par­fois pro­longé par un large ban­deau devenant par­al­lèle à la ligne des sourcils ;
  • l’autre type cor­re­spond à notre image de ” l’œil égyp­tien ” : il regroupe les représen­ta­tions où l’œil est rehaussé par un ban­deau supérieur et inférieur large, remon­tant sur la par­tie mobile de la paupière supérieure. Le trait large peut entour­er entière­ment les yeux, ou être pro­longé par un ban­deau, un trait se finis­sant en pointe ou un trait plus épais suiv­ant la ligne des sourcils.


Au-delà de ces représen­ta­tions, les fards, de couleurs vertes et noires, appa­rais­sent dès le début de l’époque pharaonique comme des matières asso­ciées aux rit­uels. Le fard vert est présent dans les listes d’of­fran­des funéraires, dès le milieu de la troisième dynas­tie, vers 2650 avant J.-C., le fard noir est men­tion­né un siè­cle plus tard à par­tir de l’époque de Chéops.

Radiographie de flacon de fard égyptien
Radi­ogra­phies mon­trant la forme et le rem­plis­sage des fla­cons. Les zones blanch­es cor­re­spon­dent à la répar­ti­tion des com­posés de plomb qui atténu­ent les rayons X — (a) roseau E11048b, rem­pli de fard ; (b) vase en albâtre E20514, avec un bou­chon de tis­su ; © vase en albâtre avec son cou­ver­cle E23092 ; il con­tient des restes de fard col­lés sur les bor­ds internes

L’é­tude du vocab­u­laire égyp­tien employé pour décrire ces matières mon­tre que la sub­stance verte était alors sim­ple­ment nom­mée par le terme ouad­jou qui sig­nifi­ait poudre verte alors que le noir était décrit par le terme mes­demet dont la racine est le verbe égyp­tien ” enten­dre “, qui, appliqué à l’œil, avait pris la sig­ni­fi­ca­tion ” ren­dre les yeux par­lants, expres­sifs ” ou ” pein­dre les yeux “.

Dans le masta­ba d’Akhethetep con­servé au Musée du Lou­vre (vers 2450 avant J.-C.), une très longue liste d’of­fran­des, inscrites en quadrillage, accom­pa­g­nées de leurs rations, indique les onguents, fards et den­rées pre­scrits dans les rit­uels (Ziegler, 1993). Les fards verts et noirs sont asso­ciés aux par­fums, aux huiles, à l’en­cens et au natron(cf. p. 42).

Les rôles respec­tifs des deux fards et l’ex­pli­ca­tion de leur asso­ci­a­tion sont pré­cisés dans d’autres doc­u­ments qui se repor­taient au culte divin : dans cer­taines scènes, le roi-prêtre était représen­té offrant aux divinités deux petites bours­es con­tenant les fards verts et noirs qui ser­vaient respec­tive­ment à ” assainir ” le vis­age du dieu et à lui per­me­t­tre de ” voir par l’œil d’Ho­rus ” (cf. p.42, fig­ure du bas). Ces offran­des entraient dans le rit­uel jour­nalier du culte divin et, lors des jours de fête, elles étaient com­plétées par l’onc­tion d’huiles qui rendaient au corps sa vigueur (Moret, 1902).

Ces doc­u­ments met­tent en évi­dence le rôle pri­mor­dial des fards dans la sym­bol­ique cos­mique : les anciens Égyp­tiens croy­aient que le cycle lunaire était la man­i­fes­ta­tion du com­bat entre les dieux Horus et Seth, entre la lumière et l’ob­scu­rité. D’après le mythe, durant leur com­bat, Seth blessa Horus à son œil et mit ain­si en péril le retour de la pleine lune. Pour arrêter les phénomènes de destruc­tion et rétablir l’or­dre cos­mique instau­ré par les dieux, l’œil devait être guéri, c’est-à-dire être ” com­plété, recon­sti­tué, pourvu de ses divers élé­ments ” (Troy, 1993).

La san­té des yeux était alors con­fiée à la force des deux sub­stances qui inter­ve­naient pour ” met­tre les yeux en fête, les ren­dre bril­lants, les met­tre en per­fec­tion, les faire briller de vie “.

Les rites qui préser­vaient de la mort les dieux avaient aus­si pour but de ressus­citer les hommes défunts. Dif­férentes études ont en effet mon­tré que les doc­u­ments liés aux cultes divins et funéraires étaient très proches et con­sti­tu­aient un rit­uel com­mun (Moret, 1902). On retrou­ve donc les mêmes élé­ments dans les rit­uels de l’embaumement qui intè­grent les huiles comme des ” flu­ides mag­iques de Ra qui péné­traient les chairs de qui en fai­sait usage ” et les fards qui con­tribuaient au rite de l’ou­ver­ture de la bouche et des yeux.

De même que le fard ser­vait à rem­plir et à recon­stituer l’œil d’Ho­rus et des défunts, le maquil­lage quo­ti­di­en de l’œil était assim­ilé à une action pro­phy­lac­tique et thérapeu­tique. Les fards étaient alors devenus des ” flu­ides divins “, le vert étant une éma­na­tion sor­tie de l’œil d’Ho­rus et le noir de l’œil de Ra. Inverse­ment, on peut penser que cet échange entre l’or­dre humain et l’or­dre divin a dû con­tribuer à la recherche de pro­duits thérapeu­tiques comme en témoignent cer­taines recettes réper­toriées dans les papyrus médi­caux (Ebers 385 traduit par Bar­dinet, 1995) :

” Viens, mala­chite ! Viens, mala­chite ! Viens, la verte ! Viens écoule­ment de l’œil d’Ho­rus ! Viens, rejet de l’œil d’A­toum ! Viens, sécré­tion sor­tie d’Osiris ! Viens à lui (le malade) et chas­se pour lui les sérosités, le pus, le sang, la faib­lesse de la vue… ”

Ces paroles étaient à réciter sur de la mala­chite pilée dans du miel fer­men­té avant son appli­ca­tion sur les yeux pour ” chas­s­er la mon­tée des sérosités “.

Dotés de pro­priétés à la fois esthé­tiques, thérapeu­tiques et religieuses, on pou­vait s’at­ten­dre à trou­ver dans les fards égyp­tiens des matières com­plex­es que l’analyse doit per­me­t­tre de préciser.

Une chimie analytique moderne pour identifier les matières

Iden­ti­fi­er à l’aide de la chimie ana­ly­tique les matéri­aux cos­mé­tiques employés et les procédés mis en œuvre n’est pas une recherche nou­velle. Dif­férents chercheurs ont ain­si démon­tré, à la fin du XIXe siè­cle, l’emploi par les anciens Égyp­tiens de fards var­iés et com­plex­es, très sou­vent à base de plomb. La galène (sul­fure de plomb PbS), la cérusite (car­bon­ate de plomb PbCO3), la pyro­lusite (bioxyde de man­ganèse MnO2), la chryso­colle (sil­i­cate de cuiv­re hydraté) et la mala­chite (car­bon­ate basique de cuiv­re) avaient ain­si été iden­ti­fiées à par­tir de l’ob­ser­va­tion micro­scopique et de l’analyse microchim­ique de plus d’une cen­taine de prélève­ments (Fish­er, 1892 ; Flo­rence et Loret, 1895 ; Lucas et Har­ris, 1963).

Maquillage des yeux dans l'Egypte ancienne
Exem­ples de formes du trait cosmétique
autour de l’oeil à l’époque d’Aménophis III.
(D’après Both­mer, 1990.)

Les développe­ments récents des grands instru­ments comme le syn­chro­tron, plus puis­sants (de plusieurs ordres de grandeur) que les sources de rayons X du lab­o­ra­toire, alliés aux pro­grès en infor­ma­tique, offrent des nou­velles pos­si­bil­ités bien adap­tées à la pré­ci­sion néces­saire pour traiter les mul­ti­ples prob­lèmes dans le con­texte his­torique et cul­turel évo­qué ci-dessus.

La com­plex­ité des mélanges élaborés par les Égyp­tiens a été appréhendée à par­tir de l’é­tude de 65 prélève­ments effec­tués dans des fla­cons à fards con­servés au Musée du Lou­vre. De minus­cules prélève­ments (lim­ités à 1 mm3 au max­i­mum étant don­né le car­ac­tère pré­cieux de ces objets archéologiques) ont été dans un pre­mier temps observés par micro­scopie élec­tron­ique à bal­ayage qui ren­seigne sur la mor­pholo­gie et, en même temps, per­met d’at­tein­dre la com­po­si­tion chim­ique élé­men­taire des grains de la poudre par leur émis­sion de rayons X, car­ac­téris­tique de chaque élément.

Des mélanges com­plex­es de com­posés de plomb ont ain­si été observés, mais cette analyse élé­men­taire restait insuff­isante pour iden­ti­fi­er cha­cune des phas­es minérales. C’est la dif­frac­tion des rayons X, d’abord réal­isée au Lab­o­ra­toire de recherche des musées de France au Lou­vre, qui a per­mis leur iden­ti­fi­ca­tion minéralogique.

Offrande de fard dans l'Egypte ancienne
Offrande des fards verts et noirs dans deux sacs.
Beni Has­san (d’après New­ber­ry, 1893, pl. VII).

Cette même tech­nique a été ensuite mise en œuvre au Lab­o­ra­toire d’u­til­i­sa­tion des ray­on­nements élec­tro­mag­né­tiques (LURE, Orsay) et à l’Eu­ro­pean Syn­chro­tron Radi­a­tion Facil­i­ty (ESRF, Greno­ble) pour béné­fici­er de la bril­lance du ray­on­nement syn­chro­tron, asso­ciée à la pos­si­bil­ité d’une haute résolution.

Une quan­tifi­ca­tion pré­cise des pro­duits minéraux a alors été pos­si­ble et elle a per­mis de déter­min­er les for­mu­la­tions cos­mé­tiques réal­isées par les Égyptiens.

Par­mi les com­posés iden­ti­fiés, deux étaient con­nus de longue date comme con­sti­tu­ants de fards : la cérusite PbCO3, blanche, et la galène PbS, noire ; cette dernière est le minéral bien con­nu des fards noirs de l’É­gypte anci­enne, mais aus­si de la plu­part des khôls encore tra­di­tion­nelle­ment employés aujour­d’hui dans cer­tains pays d’Ori­ent, d’Asie et d’Afrique du Nord. La cérusite, minéral blanc retrou­vé en asso­ci­a­tion avec la galène, est un pig­ment facile­ment accessible.

Mais deux autres con­sti­tu­ants sont observés, tout à fait inat­ten­dus : la phos­génite Pb2Cl2CO3 et la lau­ri­on­ite PbO­HCl, toutes les deux blanch­es. En effet, ces matéri­aux sont très rares dans la nature et les Égyp­tiens ne pou­vaient pas les extraire d’un gise­ment de min­erai. Par ailleurs, on a mon­tré qu’il était haute­ment improb­a­ble que ces com­posés aient pu être engen­drés par une lente trans­for­ma­tion in situ à par­tir de pro­duits naturels intro­duits ini­tiale­ment dans les récip­i­ents. Il restait donc l’hy­pothèse d’une pré­pa­ra­tion chim­ique inten­tion­nelle, préal­able à leur intro­duc­tion dans la for­mu­la­tion. Cette démarche doit répon­dre à d’autres moti­va­tions que la sim­ple pro­duc­tion d’un autre pro­duit blanc, puisque les Égyp­tiens dis­po­saient d’abon­dants gise­ments de cérusite blanche.

Une chimie de synthèse en solution sophistiquée répondant à des motivations spécifiques

Ces mélanges témoignent donc de la volon­té de for­muler des cos­mé­tiques dotés de pro­priétés spé­ci­fiques, décrites par ailleurs sur cer­tains récip­i­ents et dans cer­tains man­u­scrits anciens. Des indi­ca­tions sont par­fois inscrites sur les vas­es à fards, men­tion­nant la nature du pro­duit con­tenu et par­fois les con­di­tions d’u­til­i­sa­tion. Ain­si, des pots con­servés au British Muse­um provenant de la tombe du scribe Ahmès (Nou­v­el Empire) com­por­tent plusieurs cav­ités dif­féren­ciées par des inscrip­tions pré­cisant la péri­ode d’emploi des fards, sans doute en rela­tion avec des com­po­si­tions variées :

” bon pour chaque jour “,
” du pre­mier au qua­trième mois de l’inondation “,
” du pre­mier au qua­trième mois d’hiver “,
” du pre­mier au qua­trième mois d’été “.

D’autres exem­ples d’as­so­ci­a­tion de la cos­mé­tolo­gie et de la médecine sont four­nis par le papyrus médi­cal Ebers, daté d’en­v­i­ron 1550 avant J.-C. (Bar­dinet, 1995). Cet impor­tant doc­u­ment indique des recettes pour tein­ter les cheveux, mod­i­fi­er la couleur de la peau, embel­lir le corps. On peut claire­ment iden­ti­fi­er de nom­breuses matières organiques telles que des gommes, des résines, des huiles végé­tales, des graiss­es provenant de divers ani­maux et plusieurs matières minérales, dont la mala­chite verte, la galène noire, l’ocre rouge, le lapis-lazuli bleu. Ce papyrus détaille les recettes de col­lyres, d’emplâtres et de fards pour les yeux et les paupières qui devaient être pre­scrits pour soign­er dif­férentes mal­adies de l’iris ou de la cornée, le tra­chome, les con­jonc­tivites, etc.

Les dosages étaient indiqués par référence à une mesure de vol­ume, avec des pro­por­tions par­fois aus­si faibles que 1/64. Cer­tains fards avaient des com­po­si­tions très sim­ples, asso­ciant le minéral noir à un liant (Ebers 401) :

galène : 2, graisse d’oie : 2, eau : 4

et d’autres néces­si­taient le mélange d’un plus grand nom­bre de matières, cer­taines restant dif­fi­ciles à traduire (Ebers 391) :

galène : 1 ; bois pour­ri : 1/8 ; suc de bau­mi­er : 1/16 ;
calamine : 1/16 ; ocre rouge : 1/64 ; oliban sec : 1/64 ;
graines de la plante-ten­ti : 1/64.

Aucune des recettes égyp­ti­ennes que nous avons exam­inées jusqu’à présent n’indique un proces­sus sus­cep­ti­ble d’aboutir à la lau­ri­on­ite et la phos­génite, alors que Pline l’An­cien et Dioscoride au Ier siè­cle après J.-C (Zehnack­er, 1983 ; Well­man, 1958) offrent des procédés de pré­pa­ra­tion rel­a­tive­ment pré­cis. Il est vrai néan­moins que les textes de ces recettes sont postérieurs de 2000 ans à la pré­pa­ra­tion des pre­miers matéri­aux cos­mé­tiques que nous avons identifiés.

Ces auteurs expliquent com­ment ” l’éc­ume d’ar­gent puri­fiée ” (en fait le monoxyde de plomb ou litharge) était broyée puis mélangée dans l’eau avec du sel gemme et par­fois du natron (car­bon­ates de sodi­um prin­ci­pale­ment) et enfin fil­trée ; la procé­dure était répétée quo­ti­di­en­nement pen­dant une à six semaines :

Recette de préparation de phosgénite par Dioscoride (De Materia Medica) :

[…] Mélange un poids de litharge de pi drachmes attiques à une ” livre ” de sel gemme, et écrase (les) ; après un inter­valle (de temps), ajoute 47 drachmes du natron le plus blanc dilué dans l’eau et écrase de nou­veau jusqu’à ce que la litharge devi­enne suff­isam­ment blanche. Puis pré­cip­ite la dans un cratère à ouver­ture large, verses‑y de l’eau abon­dam­ment, laisse repos­er, décante, ajoute encore de l’eau, agite avec tes mains, laisse de nou­veau repos­er et décante. Refais alter­na­tive­ment ce qui vient d’être dit jusqu’à ce que l’eau décan­tée devi­enne très pro­pre, douce et exempte de salin­ité […]. À utilis­er dans les mal­adies des yeux .

Les dif­férentes ” écumes d’ar­gent lavées ” ser­vaient à l’époque gré­co-romaine à soign­er les mal­adies des yeux et de la peau et à laver les cheveux. Elles entraient dans la for­mu­la­tion de nom­breux collyres.

En sym­bol­es d’au­jour­d’hui on écrira :

  • PbO + NaCl + H2O (Litharge)  ⇒ Pb (OH) Cl + NaOH (Lau­ri­on­ite)
     
  • 2 PbO + 2 NaCl + Na2CO3 + 2 H2O (Litharge)  Pb2Cl2CO3 + 4 NaOH (Phos­génite)


Cette réac­tion, apparem­ment sim­ple, cache une dif­fi­culté tech­nique impor­tante : le pH ini­tiale­ment neu­tre ou presque devient de plus en plus basique au fur et à mesure que la réac­tion avance. Il en résulte l’ar­rêt du proces­sus décrit par cette réac­tion réversible. D’ailleurs, un pH devenant de plus en plus basique con­duit à d’autres réac­tions aboutis­sant à d’autres com­posés. Il est donc néces­saire de main­tenir le pH dans des lim­ites étroites.

On com­prend ain­si que les recettes con­duisent à une lente réac­tion de trans­for­ma­tion de l’oxyde PbO rouge orangé, faible­ment sol­u­ble, pro­duisant une solu­tion alca­line qui doit impéra­tive­ment être ramenée à un pH proche de la neu­tral­ité par des rem­place­ments fréquents de la solu­tion réac­tion­nelle aque­use par de l’eau pure : c’est une manière rudi­men­taire mais effi­cace de résoudre un prob­lème de régu­la­tion de l’acid­ité, bien avant de dis­pos­er d’une con­nais­sance pré­cise de cette notion fon­da­men­tale en chimie. On remar­que d’ailleurs une capac­ité de recon­nais­sance visuelle et gus­ta­tive (!) en fin de proces­sus : ” douce, exempte de salin­ité ” pour la solu­tion, pro­duit ” blanchi ” pour le pro­duit phar­ma­ceu­tique en poudre.

Ces réac­tions chim­iques ont été recon­sti­tuées au lab­o­ra­toire en mélangeant des poudres de monoxyde de plomb ou litharge, de chlorure de sodi­um et de car­bon­ate de sodi­um dans l’eau et en étu­di­ant la sta­bil­ité des phas­es minérales à base de plomb en fonc­tion du pH, de la con­cen­tra­tion en chlore et en car­bon­ate dans la solu­tion de pré­pa­ra­tion. Dans ces con­di­tions, de la lau­ri­on­ite et de la phos­génite se for­ment dans des pro­por­tions vari­ables selon la con­cen­tra­tion en car­bon­ates dissous.

Mastaba d’Akhethetep : Descriptions de maquillage
Masta­ba d’Akhethetep (Musée du Lou­vre). Inscrip­tions de la liste d’offrande du mur sud : (3) par­fum : un vase, (4) huile : un vase, (5) huile de cèdre : un vase, (6) huile : un vase, (7) huile : un vase, (8) cèdre de pre­mière qual­ité : un vase, (9) huile libyenne de pre­mière qual­ité : un vase, (10) poudre de mala­chite : un sachet, (11) poudre de galène : un sachet, (12) bande d’étoffe : 2, (13) brûler l’encens : 1, (14) une liba­tion et deux boulettes de natron.

L’art de la formulation

Les divers com­posés que nous avons iden­ti­fiés ont été mélangés par les Égyp­tiens dans des pro­por­tions très vari­ables, répon­dant très prob­a­ble­ment à des usages spé­ci­fiques. Mais, des traite­ments sup­plé­men­taires étaient appliqués avant de don­ner aux fards leurs formes définitives.

En effet, on a mon­tré que l’on pou­vait retrou­ver les traces d’un broy­age dans les échan­til­lons de galène archéologique. Ce broy­age était suivi d’un tri gran­u­lométrique pour ne garder que des grains cubiques de 50 µm env­i­ron qui con­fèrent à la poudre un éclat gris métallique. Par con­tre, un broy­age plus poussé con­duit à des grains fins et l’aspect de la poudre passe pro­gres­sive­ment au noir. Il est remar­quable que ces traite­ments physiques trou­vent leur con­trepar­tie dans les pro­fils des raies de dif­frac­tion. On obtient ain­si une infor­ma­tion expéri­men­tale sur ” l’his­toire de chaque matéri­au par­ti­c­uli­er “, se super­posant à la grande ” his­toire de la chimie ” évo­quée ci-dessus.

Aux mélanges de phas­es minérales, les Égyp­tiens ajoutaient des graiss­es organiques, d’o­rig­ine minérale ou végé­tale. L’analyse de la par­tie organique a été effec­tuée par spec­trométrie infrarouge et par chro­matogra­phie en phase gazeuse (Com­paron et al., 1999). L’é­tude de quelques échan­til­lons a per­mis de met­tre en évi­dence la présence de matières grass­es dans des pro­por­tions allant de 0,1 à 10 %, ajouts qui devaient don­ner au fard une tex­ture et des pro­priétés d’ad­hé­sion intéres­santes. Une analyse plus fine a mon­tré qu’un con­sti­tu­ant majori­taire de ces matières grass­es est le sel de plomb de l’acide oléique (en C18) et d’autres acides gras ana­logues. Ceci pose de nou­veaux prob­lèmes sur l’o­rig­ine — inten­tion­nelle ou acci­den­telle — de ces com­posés par­ti­c­uliers, sur leur mode de pré­pa­ra­tion, en rela­tion avec les pro­priétés exactes recher­chées par les Égyptiens.

Ces faits sig­ni­fient claire­ment que les ” cos­mé­to­logues ” égyp­tiens avaient le souci con­stant d’une for­mu­la­tion opti­male pour un usage appro­prié avec une final­ité cos­mé­tique ou pro­phy­lac­tique ou thérapeutique.

Conclusion et perspectives

On est donc amenés à con­sid­ér­er que les syn­thès­es chim­iques de divers com­posés ont dû être mis­es en œuvre — et peut-être inven­tées — par les Égyp­tiens dans le courant du IIIe mil­lé­naire avant J.-C. afin de con­fér­er à leurs maquil­lages des pro­priétés thérapeu­tiques sem­blables à celles qui nous sont con­nues par les textes gréco-romains.

Cette inter­pré­ta­tion per­met de mieux com­pren­dre les analy­ses de fards, ain­si que les textes des papyrus médi­caux et elle illus­tre la trans­mis­sion jusqu’à l’époque romaine d’un savoir à la fois chim­ique et oph­tal­mologique mis au point en Égypte, pays réputé dans l’An­tiq­ui­té pour ses traite­ments des yeux et dont les habi­tants étaient sujets à de nom­breuses mal­adies ocu­laires (con­jonc­tivites, leu­comes, tra­chome, etc.), notam­ment lors de la crue du Nil.

La présence de phas­es syn­thétisées par voie aque­use démon­tre la maîtrise de ces ” tech­nolo­gies chim­iques ” dans l’an­ci­enne Égypte, incon­nues jusqu’à présent. Les tech­nolo­gies util­isant les arts du feu ont été très tôt maîtrisées pour met­tre en forme des objets en cuiv­re (dès le cinquième mil­lé­naire) et syn­thé­tis­er des pig­ments comme le bleu égyp­tien (durant le troisième millénaire).

La preuve de la syn­thèse de la lau­ri­on­ite et de la phos­génite démon­tre que la chimie des solu­tions était égale­ment employée dès 2000 avant J.-C. pour la fab­ri­ca­tion de matéri­aux nou­veaux, répon­dant cette fois à des moti­va­tions cos­mé­tiques et thérapeu­tiques. Les réac­tions chim­iques mis­es en jeu étaient rel­a­tive­ment sim­ples, mais le procédé, inclu­ant des opéra­tions répéti­tives, devait être dif­fi­cile à met­tre au point.

On peut toute­fois remar­quer que l’É­gypte est un pays qui offre, du fait de la présence des crues du Nil et du désert, la pos­si­bil­ité d’ob­serv­er de nom­breuses minéral­i­sa­tions excep­tion­nelles. Ain­si les lacs salés du Oua­di Natroum fournirent le natron indis­pens­able dans les procédés de momi­fi­ca­tion des corps. L’eau salée du lac pro­duit, en réagis­sant avec le sub­strat cal­caire du fond, des car­bon­ates de sodium.

On a avancé que cette réac­tion est ren­due pos­si­ble du fait que les deux pro­duits sont con­tin­uelle­ment élim­inés du milieu réac­tion­nel, le chlorure de cal­ci­um étant drainé à tra­vers les sols et les car­bon­ates pré­cip­i­tant sur les rives.

C’est notam­ment à par­tir de ces obser­va­tions en Égypte durant la cam­pagne dirigée par Bona­parte que Claude-Louis Berthol­let a été con­duit à exprimer, il y a deux cents ans, les notions d’affinité et d’équili­bre chim­ique, pro­posant une expli­ca­tion aux réac­tions de pré­cip­i­ta­tion des sels.

L’analyse des pro­duits cos­mé­tiques util­isés en Égypte anci­enne nous a mon­tré une grande var­iété de mélanges à base de plomb et un savoir-faire très avancé dans le domaine de la chimie. Les Égyp­tiens ne souhaitaient pas seule­ment obtenir des pro­duits col­orés avec des tex­tures agréables qui pou­vaient adhér­er à la peau ; ils ajoutaient dans leurs fards des com­posés syn­thé­tiques dotés de ver­tus thérapeu­tiques ou prophylactiques.

Les Égyp­tiens anciens sem­blent avoir décou­vert d’une manière empirique l’in­térêt des pré­pa­ra­tions chim­iques. Il reste main­tenant à rechercher les raisons du choix de com­posés chlorés de plomb et à dress­er la liste des sub­stances phar­ma­ceu­tiques minérales qui ont pu être syn­thétisées. En tra­vail­lant en asso­ci­a­tion avec les égyp­to­logues sur la base de ces récentes analy­ses, ain­si qu’avec des phar­ma­ciens spé­cial­istes des inter­ac­tions médica­menteuses, on peut espér­er mieux com­pren­dre la nature des divers pro­duits employés et fournir des tra­duc­tions plus pré­cis­es des recettes cos­mé­tiques et phar­ma­ceu­tiques anciennes.

On peut ain­si faire en sorte que les pro­grès les plus récents en méthodolo­gies sci­en­tifiques soient mis au ser­vice de l’Archéolo­gie et de l’his­toire des Arts et Civil­i­sa­tions. Inverse­ment, cer­tains prob­lèmes posés par des objets archéologiques inci­tent à dévelop­per des méthodolo­gies orig­i­nales en physique et en chimie ou à abor­der des ques­tions sci­en­tifiques qui n’ont pas encore été posées ou n’ont pas encore trou­vé des solu­tions sat­is­faisantes. On voit ain­si se dessin­er le con­tour d’une ” Archéolo­gie molécu­laire et struc­turale “, à l’in­ter­face entre cette chimie ” au long terme ” et l’his­toire des sociétés.

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