Le logement à l’ère du développement durable

Dossier : ImmobilierMagazine N°643 Mars 2009
Par Raphaël SLAMA (60)

En dépit d’une grande sta­bil­ité du ” pro­duit ” final, le loge­ment évolue pro­fondé­ment dans ses modes de pro­duc­tion et dans ses com­posants. La cer­ti­fi­ca­tion, grâce aux nom­breuses opéra­tions qu’elle exam­ine, per­met d’ob­serv­er et pro­mou­voir les pra­tiques des opéra­teurs immo­biliers les plus engagés dans la qual­ité et dans l’innovation.

Quali­tel, Asso­ci­a­tion loi de 1901, est un organ­isme indépen­dant et une struc­ture spé­cial­isée dans le secteur immo­bili­er, qui fédère, depuis trente ans, les prin­ci­paux acteurs du loge­ment — pou­voirs publics, asso­ci­a­tions de con­som­ma­teurs, organ­i­sa­tions pro­fes­sion­nelles de la con­struc­tion — autour d’un objec­tif com­mun : éval­uer et pro­mou­voir la qual­ité de l’habi­tat. La cer­ti­fi­ca­tion per­met d’établir une com­mu­ni­ca­tion com­mer­ciale loyale sur les pro­duits indus­triels, grâce à l’in­ter­ven­tion d’une ” tierce par­tie “. Elle repose sur l’at­teinte d’un ensem­ble de critères prédéfi­nis, réu­nis dans un ” référen­tiel ” validé par Qualitel.

Généraliser une démarche au départ élitiste

La démarche HQE (Haute qual­ité envi­ron­nemen­tale), dévelop­pée par l’As­so­ci­a­tion du même nom, avait au départ un car­ac­tère expéri­men­tal et ” éli­tiste “, donc réservé à de grandes opéra­tions d’équipements publics. Pour se généralis­er à des immeubles d’habi­ta­tion courante, la démarche a dû être sim­pli­fiée à cet effet. C’est ce qui a été fait avec la cer­ti­fi­ca­tion ” Habi­tat & Envi­ron­nement “, lancée en 2003. Aujour­d’hui, 50 000 loge­ments ont demandé cette cer­ti­fi­ca­tion en 2008. Pro­fes­sion­nels et élus ont per­mis cette réus­site. Les archi­tectes et bureaux d’é­tudes d’abord, puis les indus­triels et enfin les pro­mo­teurs, maîtres d’ou­vrage et arti­sans ont perçu le car­ac­tère stratégique de cette évolution.

La qual­ité envi­ron­nemen­tale est dev­enue l’affaire de tous les professionnels

Si la demande finale (celle de l’oc­cu­pant du loge­ment) demeure encore peu per­cep­ti­ble sur les aspects envi­ron­nemen­taux, les élus ont précédé leurs admin­istrés, dans la prise de con­science envi­ron­nemen­tale. Ils en ont don­né la preuve avec leurs agen­das 21 qui com­por­tent sou­vent des exi­gences sur la qual­ité envi­ron­nemen­tale de l’habi­ta­tion. Ils se sont intéressés au mode de preuve et à la mesure des per­for­mances apportés par la cer­ti­fi­ca­tion Habi­tat & Envi­ron­nement. Un nou­v­el élan est don­né à cette poli­tique avec le Grenelle de l’En­vi­ron­nement. Aujour­d’hui l’in­for­ma­tion du pub­lic est cen­trée sur les béné­fices très directs que le par­ti­c­uli­er peut tir­er d’un loge­ment con­stru­it selon des règles de la HQE : con­fort et dura­bil­ité, bien sûr, mais aus­si économies d’én­ergie, béné­fice pour la san­té grâce à l’at­ten­tion apportée aux émis­sions de sub­stances dan­gereuses et à la qual­ité de la ven­ti­la­tion. La demande de cer­ti­fi­ca­tion Habi­tat & Envi­ron­nement a dou­blé pra­tique­ment chaque année depuis la créa­tion de la mar­que en 2003.

Pour l’an­née 2007, le nom­bre de deman­des de cer­ti­fi­ca­tion s’élève à 48 812 loge­ments. Cette rapi­de crois­sance s’ex­plique par l’in­térêt tant des col­lec­tiv­ités locales que des acteurs du loge­ment libre pour la cer­ti­fi­ca­tion envi­ron­nemen­tale. La répar­ti­tion entre social et privé tend à s’équili­br­er. Toute­fois la crois­sance s’est beau­coup assagie en 2008. Dans le con­texte de crise actuel, on enreg­istre des annu­la­tions à hau­teur de 5 000 loge­ments env­i­ron sur les deman­des 2007.

Une démarche aux multiples facettes

Le référen­tiel Habi­tat & Envi­ron­nement impose la mise en place d’un man­age­ment envi­ron­nemen­tal du pro­jet. La prin­ci­pale moti­va­tion des maîtres d’ou­vrage, lors de la demande de cer­ti­fi­ca­tion, réside dans l’af­fir­ma­tion d’une volon­té poli­tique du dirigeant d’in­té­gr­er une démarche envi­ron­nemen­tale. L’at­tri­bu­tion de sub­ven­tions des col­lec­tiv­ités locales con­stitue un fac­teur égale­ment influ­ent pour le secteur social, auquel ces sub­ven­tions sont réservées.

L’isolation intérieure prédomine

L’iso­la­tion par l’ex­térieur a été choisie dans seule­ment 4 % des opéra­tions cer­ti­fiées. La créa­tion d’e­space tam­pon de préchauffage de l’air extérieur (serre ou véran­da) émerge timide­ment (2 % des opérations).

L’iso­la­tion répar­tie (mono­mur en terre cuite ou béton cel­lu­laire) con­cerne moins de 5 % des opéra­tions cer­ti­fiées. Les tech­niques de pose de ces pro­duits (pose à joints minces) néces­si­tent une main-d’oeu­vre bien for­mée. L’iso­la­tion intérieure pré­domine, sys­tème très ancré dans la cul­ture française, bien qu’il ne traite pas les ponts ther­miques, respon­s­ables de 20 % à 25 % des déperdi­tions. Le dou­ble vit­rage peu émis­sif est le pro­duit le plus répan­du. La tech­nolo­gie util­isant de l’ar­gon émerge. Un quart reste équipé de fenêtres à dou­ble vit­rage simple.

Aucun n’a recours au triple vit­rage. À not­er qu’en 2008 85 % des dou­bles vit­rages com­mer­cial­isés sont des vit­rages à iso­la­tion ren­for­cée (VIR) (35 % air — 65 % argon).

L’extraction d’air s’adapte à l’humidité

En matière de ven­ti­la­tion mécanique con­trôlée (VMC), les sys­tèmes hygro-réglables adaptent l’ex­trac­tion d’air à l’hu­mid­ité des pièces. Dans la majorité des cas ils agis­sent aus­si sur l’ad­mis­sion d’air. Ces sys­tèmes s’im­posent large­ment face aux autres types de VMC. Bien que très per­for­mant d’un point de vue énergé­tique et en qual­ité d’air, le dou­ble flux (assur­ant un préréchauffage de l’air frais par rap­proche­ment avec l’air extrait dans un échangeur) peine à se faire une place en rai­son de son coût. L’u­til­i­sa­tion très répan­due du chauffage indi­vidu­el au gaz per­met à la VMC gaz d’af­fich­er un résul­tat hon­or­able. Les sys­tèmes de ven­ti­la­tion naturelle assistée ne sont pas présents à ce jour.

La com­bi­nai­son élec­tric­ité et énergie renou­ve­lable appa­raît unique­ment dans le loge­ment collectif

En matière de chauffage, on note une légère prépondérance du gaz, par rap­port à l’élec­tric­ité. Cette car­ac­téris­tique tient au fait que le secteur social (prépondérant dans la pop­u­la­tion cer­ti­fiée) priv­ilégie l’én­ergie gaz. La com­bi­nai­son élec­tric­ité et éner­gies renou­ve­lables appa­raît unique­ment dans le loge­ment col­lec­tif mais reste à un niveau encore anec­do­tique. Adap­té au col­lec­tif, l’usage des réseaux de chaleur est con­di­tion­né par son implan­ta­tion lim­itée. Aucune opéra­tion n’est recen­sée avec une cli­ma­ti­sa­tion ou un sys­tème de rafraîchisse­ment. La régle­men­ta­tion ther­mique est pénal­isante et dis­sua­sive vis-à-vis de ces instal­la­tions dont les con­som­ma­tions d’én­ergie doivent être com­pen­sées par des efforts impor­tants sur les autres postes (ven­ti­la­tion, isolation…). 

L’eau chaude individuelle

En matière d’eau chaude san­i­taire (ECS), 62 % des loge­ments ont un sys­tème indi­vidu­el, sys­tème priv­ilégié par les maîtres d’ou­vrage. Au même titre que pour le chauffage, le gaz reste l’én­ergie la plus couram­ment util­isée. L’élec­tric­ité vient en deux­ième posi­tion avec une part de marché de 30 %. La part des loge­ments util­isant un réseau de chaleur avec l’ECS est négligeable.

L’ECS solaire sem­ble s’im­pos­er comme troisième voie. Cepen­dant, l’ef­fi­cac­ité de ce sys­tème est vari­able en fonc­tion des régions. Les régions du sud de la France béné­fi­cient d’une cou­ver­ture solaire pour l’ECS très favor­able. Cepen­dant, les risques de sur­di­men­sion­nement peu­vent génér­er des désagré­ments et des con­tre-références. Le sys­tème solaire col­lec­tif util­isé dans 76 % des opéra­tions cer­ti­fiées est un sys­tème avec appoint col­lec­tif d’én­ergie. Les opéra­tions CESCI (chauffe-eau solaire col­lec­tif indi­vid­u­al­isé, com­por­tant un appoint d’én­ergie indi­vidu­el) restent, pour l’in­stant, mar­ginales et devraient prochaine­ment faire l’ob­jet d’une démarche d’ap­pro­fondisse­ment. La sur­face de cap­teur solaire est en moyenne de 1,5 m² par loge­ment pour du col­lec­tif, et 3,7 m² par loge­ment pour de l’in­di­vidu­el groupé, le besoin en cap­teur solaire étant plus important.

Enfin en matière d’én­ergie pho­to­voltaïque, seules deux opéra­tions ont été recen­sées. La sur­face totale des pan­neaux va de 1,8 à 2,2 m² par loge­ment. Le marché actuel se développe forte­ment, mal­gré des temps de retour sur investisse­ment de l’or­dre de 8,5 ans à 19 ans selon la tar­i­fi­ca­tion, les aides fis­cales et la région.

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