Le juge du commerce et l’expert

Dossier : Juges - Experts - CitoyensMagazine N°610 Décembre 2005
Par Serge RUEL (63)
Par Roland SCHIFF (60)
Par Philippe FLEURY (59)

.L’organisation de la justice en France1

.L’organisation de la justice en France1

On par­le générale­ment du ” tri­bunal ” pour évo­quer le lieu où les per­son­nes en con­flit vien­nent chercher jus­tice et où celles qui n’ont pas respec­té les lois sont jugées et sanc­tion­nées. En fait, il existe plusieurs caté­gories de tri­bunaux, appelés juri­dic­tions, répar­ties en deux grands ordres, l’or­dre judi­ci­aire et l’or­dre admin­is­tratif, selon la nature des lit­iges ou des per­son­nes en cause, leur impor­tance ou la grav­ité des infractions.

En cas de doute ou de con­tes­ta­tion pour savoir si une affaire relève de l’or­dre judi­ci­aire ou de l’or­dre admin­is­tratif, le Tri­bunal des con­flits désigne le tri­bunal compétent.

Il est clair que l’ex­per­tise judi­ci­aire, mesure par laque­lle le juge con­fie à des pro­fes­sion­nels une mis­sion d’in­for­ma­tion ou de con­stata­tion visant à l’é­clair­er sur des élé­ments d’une affaire va con­cern­er tous les tri­bunaux. Toute­fois il y a une dif­férence dans la nature des exper­tis­es ordonnées.

Ain­si, des exper­tis­es sur les Travaux publics, par exem­ple, seront très sou­vent ordon­nées par le juge admin­is­tratif ou le juge du tri­bunal de grande instance et rarement voire jamais par le juge pénal sauf acci­dent de per­son­nes (ter­mi­nal E de Rois­sy…). Elles sont sou­vent ordon­nées avant toute instance au fond (référé2 exper­tise). De même, le réex­a­m­en d’une affaire comme le con­trôle de la bonne appli­ca­tion des règles de droit3 (cas­sa­tion) ne néces­siteront que rarement des exper­tis­es (mais par­fois des compléments).

Peu impor­tent cepen­dant la nature des exper­tis­es et la juri­dic­tion4, le rôle de l’ex­pert reste tou­jours d’é­clair­er le juge sur les aspects tech­niques qu’il ne maîtrise pas et aus­si de faire une pre­mière analyse d’un dossier sou­vent complexe.

L’ordre judiciaire

Le pre­mier juge­ment (dit ” en pre­mière instance ”)

Une pre­mière caté­gorie de juri­dic­tions règle les lit­iges entre les per­son­nes et sanc­tionne les atteintes con­tre les per­son­nes, les biens et la société. Lorsqu’elles sont chargées de juger les per­son­nes soupçon­nées d’une infrac­tion, ce sont les juri­dic­tions pénales ou répres­sives. Celles qui n’in­fli­gent pas de peines mais tranchent un con­flit sont les juri­dic­tions civiles. Enfin, cer­taines affaires sont exam­inées par des tri­bunaux spé­cial­isés. Par exem­ple, un salarié con­teste un licen­ciement qu’il estime abusif ; il peut saisir le con­seil de prud’hommes.

PREMIER JUGEMENT5
Juri­dic­tions civiles Juri­dic­tions spécialisées Juri­dic­tions pénales
JUGE DE PROXIMITÉ Petits lit­iges jusqu’à 1500 euros (con­som­ma­tion, con­flit de voisi­nage, injonc­tions de pay­er et de faire…). CONSEIL DES PRUD’HOMMES Lit­iges entre salariés ou appren­tis et employeurs por­tant sur le respect des con­trats de tra­vail ou d’apprentissage. JUGE DE PROXIMITÉ Juge cer­taines con­tra­ven­tions, pas­si­bles d’amendes et d’autres peines, com­mis­es par des majeurs ou des mineurs.
TRIBUNAL D’INSTANCE Lit­iges de moins de 7600 euros et lit­iges de crédit à la con­som­ma­tion, bail d’habitation. TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE Lit­iges entre les organ­ismes de sécu­rité sociale et les per­son­nes assujetties TRIBUNAL DE POLICE Con­tra­ven­tions pas­si­bles d’amendes ou d’autres peines (exem­ple : sus­pen­sion de per­mis de conduire).
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE Lit­iges de plus de 7 600 euros : divorce, autorité parentale, suc­ces­sion, fil­i­a­tion, immobilier TRIBUNAL DE COMMERCE Lit­iges entre com­merçants ou sociétés commerciales. TRIBUNAL CORRECTIONNEL Dél­its pas­si­bles d’emprisonnement jusqu’à dix ans et d’autres peines (amendes, peines com­plé­men­taires, tra­vail d’intérêt général).
TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX Lit­iges entre pro­prié­taires et exploitants de terre ou de bâti­ments agricoles. COUR D’ASSISES Crimes (infrac­tions les plus graves) pas­si­bles de la réclu­sion jusqu’à la perpétuité.
Source : site Inter­net du min­istère de la Justice.

 
L’appel

Lorsqu’une ou plusieurs per­son­nes ne sont pas sat­is­faites du pre­mier juge­ment, elles peu­vent faire appel. La cour d’ap­pel réex­am­ine alors l’affaire.

Depuis le 1er jan­vi­er 2001, les ver­dicts des cours d’as­sis­es peu­vent faire l’ob­jet d’un appel devant une nou­velle cour d’as­sis­es com­posée de trois juges pro­fes­sion­nels et de douze jurés.

Le con­trôle (pour­voi en cassation)

La Cour de cas­sa­tion, unique pour l’ensem­ble des juri­dic­tions judi­ci­aires, ne rejuge pas l’af­faire mais elle véri­fie si les lois et la jurispru­dence ont été cor­recte­ment appliquées par les tri­bunaux de pre­mière instance et les cours d’ap­pel. Elle est située à Paris.

L’ordre administratif

Les juri­dic­tions de l’or­dre admin­is­tratif sont organ­isées en trois éch­e­lons hiérar­chisés. Les admin­is­tra­tions soumis­es à leur juri­dic­tion en dépen­dent. Jusqu’en 1953, le con­tentieux admin­is­tratif rel­e­vait du Con­seil d’É­tat créé par Napoléon Bona­parte en 1799 et des con­seils de pré­fec­ture, trans­for­més en 1926 en con­seils inter­dé­parte­men­taux. Une réforme en 1953 institue les tri­bunaux admin­is­trat­ifs, puis une loi de 1987 crée les cours admin­is­tra­tives d’ap­pel. Les mag­is­trats de l’or­dre admin­is­tratif sont recrutés à la sor­tie de l’É­cole nationale d’ad­min­is­tra­tion ou au tour extérieur par­mi les fonc­tion­naires et officiers ; leur statut et leur for­ma­tion dif­fèrent donc de ceux des mag­is­trats de l’or­dre judiciaire.

1er juge­ment : tri­bunal administratif

Lit­iges entre les usagers et les pou­voirs publics, c’est-à-dire :

  • les admin­is­tra­tions de l’É­tat, les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, les étab­lisse­ments publics admin­is­trat­ifs ou assimilés,
  • les entre­pris­es publiques dans cer­tains cas.


Exem­ples : refus de per­mis de con­stru­ire, con­tes­ta­tion d’un plan d’oc­cu­pa­tion des sols ou du tracé d’une autoroute, expro­pri­a­tion, demande de répa­ra­tion des dom­mages causés par l’ac­tiv­ité des ser­vices publics, refus de titre de séjour, expul­sion d’un étranger, con­tes­ta­tions rel­a­tives aux impôts et à leur recou­vre­ment, lit­iges relat­ifs aux marchés publics… C’est un tri­bunal interdépartemental.

Juri­dic­tions spécialisées

  • Com­mis­sion de recours des réfugiés,
  • Com­mis­sion départe­men­tale d’aide sociale,
  • Sec­tion dis­ci­plinaire des ordres professionnels,
  • Com­mis­sion d’in­dem­ni­sa­tion des rapatriés.


Cer­tains organ­ismes nor­mat­ifs admin­is­trat­ifs ont égale­ment le car­ac­tère d’une juri­dic­tion de pre­mière instance (Con­seil de la con­cur­rence, Autorité des marchés financiers) mais l’ap­pel de leurs déci­sions peut relever de la cour d’ap­pel judiciaire.

L’ap­pel : cour admin­is­tra­tive d’appel

Si l’une des par­ties n’est pas sat­is­faite du pre­mier juge­ment, elle peut faire appel. La cour admin­is­tra­tive d’ap­pel réex­am­ine alors l’af­faire déjà jugée.

Le con­trôle de l’er­reur de droit (pour­voi) : le Con­seil d’État

Il véri­fie que les cours admin­is­tra­tives d’ap­pel ont cor­recte­ment appliqué la loi et la jurispru­dence. Il stat­ue directe­ment sur cer­taines affaires con­cer­nant les déci­sions les plus impor­tantes des autorités de l’É­tat. Pour cer­taines affaires (rares), il est juge d’ap­pel. Il est situé à Paris, au Palais-Royal.

Tribunal de commerce6

Nous ne nous intéres­sons dans la suite de cet arti­cle qu’aux tri­bunaux de commerce.

Quelques rappels

Les tri­bunaux de com­merce7 sont des juri­dic­tions de l’or­dre judi­ci­aire du pre­mier degré com­posées de juges élus par leurs pairs. Ils stat­uent sur les lit­iges com­mer­ci­aux qui opposent des com­merçants à l’oc­ca­sion de leurs activ­ités pro­fes­sion­nelles ou entre com­merçants et sociétés com­mer­ciales, et ceux qui por­tent sur les actes de com­merce, c’est-à-dire en pra­tique tous les inter­venants de la vie économique à l’ex­cep­tion des mutuelles (sauf ban­caires), des asso­ci­a­tions loi de 1901 et des pro­fes­sions libérales, entre asso­ciés de sociétés com­mer­ciales et aus­si dans les actions à l’en­con­tre d’un com­merçant ou d’une société com­mer­ciale. Les tri­bunaux de com­merce trait­ent aus­si des défail­lances des entre­pris­es com­mer­ciales et arti­sanales ” les faillites “.

Par exemple :

  • les lit­iges entre les entre­pris­es, y com­pris bour­siers et financiers, en droit com­mu­nau­taire et en droit nation­al en matière de com­merce et de concurrence ;
  • les lit­iges relat­ifs aux actes de com­merce entre toutes les personnes ;
  • les lit­iges relat­ifs à une let­tre de change ;
  • les lit­iges opposant des par­ti­c­uliers à des com­merçants ou à des sociétés com­mer­ciales dans l’ex­er­ci­ce de leur commerce ;
  • les con­tes­ta­tions entre les asso­ciés d’une société commerciale ;
  • le traite­ment des défail­lances d’en­tre­pris­es com­mer­ciales et arti­sanales : préven­tion, mise en redresse­ment judi­ci­aire, mise en liq­ui­da­tion judiciaire.


Le tri­bunal de com­merce est com­posé de juges non pro­fes­sion­nels, des com­merçants bénév­oles, élus pour deux ou qua­tre ans par d’autres com­merçants. Ils sont cen­sés bien con­naître le monde dans lequel ils vivent. Ils sont par­ti­c­ulière­ment à même de définir la mis­sion des experts et de com­pren­dre le lan­gage du tech­ni­cien, étant eux-mêmes des tech­ni­ciens dans leur domaine professionnel.

Une longue histoire

Nous emprun­tons l’essen­tiel de ce para­graphe à Louis DOMAIN8 (39) qui a rédigé une belle syn­thèse sur le sujet. Il rap­pelle notam­ment que l’o­rig­ine des tri­bunaux de com­merce est la mise en œuvre d’un droit plus sim­ple que le droit romain.

C’est en Ital­ie en effet, qu’il faut chercher les orig­ines de cette insti­tu­tion. Après la chute de l’Em­pire romain de nom­breuses cor­po­ra­tions se con­sti­tuèrent dans les villes libres de la péninsule.

À la tête de ces cor­po­ra­tions, des ” con­suls ” élus par la col­lec­tiv­ité des marchands (d’où le nom de ” juri­dic­tion con­sulaire ” qui survit encore) prê­taient ser­ment, fai­saient con­naître les règles applic­a­bles aux trans­ac­tions et créaient ain­si un droit plus sim­ple, moins for­mal­iste, que le droit romain.

Comme le souligne un rap­port récent du Sénat9 sur le sujet :
… l’ex­is­tence d’un droit, d’une procé­dure par­ti­c­ulière et de juri­dic­tions spé­cial­isées10 spé­ci­fique­ment adap­tées aux rela­tions com­mer­ciales ne saurait être con­testée. En effet, les trans­ac­tions com­mer­ciales car­ac­térisées par leur répéti­tion, leur fréquence et leur rapid­ité s’ac­com­mod­eraient dif­fi­cile­ment de la procé­dure civile.

Ces insti­tu­tions nou­velles se propagèrent en France à l’oc­ca­sion des grandes foires inter­na­tionales qui réu­nis­saient péri­odique­ment tous les marchands de l’Eu­rope, notam­ment à Lyon, à Beau­caire, en Champagne…

Le roi Charles IX insti­tua les ” Juges-con­suls ” à Paris, par l’édit célèbre de novem­bre 1563, que nous devons au chance­li­er Michel de L’Hospital.

La juri­dic­tion con­sulaire pro­pre­ment dite était née.

L’expert judiciaire devant les Tribunaux de Commerce

L’ex­per­tise devant les tri­bunaux de com­merce obéit aux règles générales exposées par ailleurs. Les experts sont des pro­fes­sion­nels qual­i­fiés choi­sis par le tri­bunal sur une liste établie par la cour d’ap­pel. Leur mis­sion est d’ap­porter si néces­saire des élé­ments utiles pour per­me­t­tre au tri­bunal de juger une affaire en con­nais­sance de cause. Néan­moins, comme ces juri­dic­tions con­nais­sent des lit­iges entre com­merçants, des modal­ités par­ti­c­ulières vont affecter l’ex­per­tise judiciaire.

Les sta­tis­tiques du tri­bunal de com­merce de Paris sont révéla­tri­ces des types d’ex­per­tis­es ordonnées.

Quelques statistiques du Tribunal de Commerce de Paris

Le nom­bre total d’ex­per­tis­es par année s’établit comme suit au tri­bunal de com­merce de Paris :

1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 Total
589 615 677 521 470 418 336 3626

Les coûts et délais de l’expertise

La répar­ti­tion par spé­cial­ité11, tou­jours au tri­bunal de com­merce de Paris, s’établit comme suit de 1995 à 2001
TOTAL PROFESSIONS du CHIFFRE et ASSIM. 1077 31,04%
TOTAL PROFESSIONS DU BÂTIMENT 1038 29,91%
TOTAL INGENIEURS HORS BATIMENT 1237 35,65%
TOTAL DIVERS 88 2,54%
Non classé 30 0,86%
TOTAL 3470 100%

Pour les pro­fes­sions du chiffre et assim­ilées, le tableau ci-après mon­tre l’écras­ante supré­matie des exper­tis­es de compt­abil­ité et de finances
DE 1995 A 2001
PROFESSIONS DU CHIFFRE ET ASSIM. Nombre % sur la catégorie % sur le total
COMPTABILITE 733 68,1% 21,1%
FINANCES 220 20,4% 6,3%
ESTIM. FONDS ET IMMOBILIERES 45 4,2% 1,3%
TOTAL PROF. DU CHIFFRE ET ASSIM. 1077 100% 31%

Les exper­tis­es des pro­fes­sions du bâti­ment sont plus dispersées
DE 1995 A 2001
PROFESSIONS DU BÂTIMENT Nombre % sur la catégorie % sur le total
ARCHITECTES 200 19,3% 5,8%
GÉNIE CIVIL, SOLS — FONDATIONS 185 17,8% 5,3%
CHAUFFAGE — ISOLATION — FROID 153 14,7% 4,4%
MENUISERIE 136 13,3% 3,9%
AMENAGEMENT — DECORATION 102 9,8% 2,9%
ELECTRICITE 95 9,2% 2,7%
TOTAL PROFESSIONS DU BÂTIMENT 1038 100% 29,9%

Les exper­tis­es des ingénieurs hors bâti­ment sont encore plus dispersées
DE 1995 A 2001
INGENIEURS HORS BÂTIMENT Nombre % sur la catégorie % sur le total
INFORMATIQUE 320 29,5% 9,2%
MECANIQUE — METALLURGIE 193 15,6% 5,6%
TEXTILES + CUIRS 90 7,3% 2,6%
ELECTRONIQUE 85 6,9% 2,4%
CHIMIE + MATIERES PLASTIQUES 77 6,2% 2,2%
AUTOMOBILES 72 5,8% 2,1%
IMPRIMERIE 67 5,4% 1,9%
CONSTRUCTION NAVALE 62 5% 1,8%
TOTAL INGENIEURS HORS BÂTIMENT 1237 100% 35,6%

Les mêmes sta­tis­tiques per­me­t­tent de don­ner un ordre de grandeur du coût de ces exper­tis­es ain­si que leur durée (en euros), voir tableau ci-après.

Il y a lieu de not­er leur long délai moyen (supérieur à un an) préju­di­cia­ble à la bonne marche des affaires et leur coût rel­a­tive­ment élevé.

Les con­flits entre com­merçants doivent être réglés rapi­de­ment. La durée des exper­tis­es rap­pelée ci-avant n’est donc pas sat­is­faisante. Heureuse­ment les par­ties appor­tent sou­vent la preuve du déroule­ment des faits (exper­tise sur les marchan­dis­es suite à un inci­dent de trans­port par exem­ple) sans qu’il soit besoin pour le juge de procéder à des exper­tis­es complémentaires.

De même, lorsqu’une entre­prise est en dif­fi­culté, le déroule­ment de la procé­dure (y com­pris en préven­tion) obéit à un tim­ing pré­cis et à des règles déon­tologiques strictes. Il est impor­tant que les exper­tis­es néces­saires se déroulent rapi­de­ment faute de quoi la sit­u­a­tion peut se révéler défini­tive­ment compromise.

Nous don­nons ci-après quelques indi­ca­tions à ce sujet.

L’ex­per­tise sur les marchandises

Les con­tes­ta­tions sur la qual­ité ou la quan­tité de marchan­dis­es néces­si­tent sou­vent de procéder à une exper­tise. Celle-ci, pour être oppos­able aux par­ties, doit sat­is­faire à cer­taines conditions.

Lieu de l’expertise

La règle générale est sim­ple. L’ex­per­tise doit s’ef­fectuer au lieu d’exé­cu­tion du con­trat. Donc à des­ti­na­tion pour les ventes au débar­que­ment et au port de charge pour les ventes à l’embarquement. Mais l’ap­pli­ca­tion de ce principe ne va pas sans dif­fi­cultés (en par­ti­c­uli­er il y a des con­di­tions strictes pour l’exé­cu­tion d’opéra­tions d’ex­per­tise hors de France).

Ain­si, l’ex­per­tise au port d’embarquement est en tout cas un sys­tème plus logique que pra­tique. C’est en effet sup­primer l’un des avan­tages essen­tiels de la vente CAF, que de con­train­dre l’a­cheteur à être représen­té au port de charge.

Les modal­ités d’exé­cu­tion et notam­ment les délais

L’ex­per­tise doit être demandée dès l’ar­rivée de la marchan­dise et, au plus tard, dès que l’a­cheteur a con­nais­sance du vice qui l’af­fecte. Elle ne saurait être accordée plusieurs mois après le prélève­ment d’échan­til­lons car le vendeur doit faire toute diligence.

Ain­si : ” Pour obtenir des dom­mages-intérêts, l’a­cheteur ne peut se pré­val­oir d’une exper­tise uni­latérale faite sur ses dili­gences, et sur des marchan­dis­es prélevées chez divers des­ti­nataires plus de quinze jours après le débar­que­ment (CA Paris, 18 déc. 1958 : DMF 1959, p. 472). ”

Redresse­ment et liq­ui­da­tion judiciaires

Les experts en diag­nos­tic d’en­tre­prise sont désignés en jus­tice pour établir un rap­port sur la sit­u­a­tion économique et finan­cière d’une entre­prise en cas de règle­ment ami­able ou de redresse­ment judi­ci­aire, ou con­courir à l’élab­o­ra­tion d’un tel rap­port en cas de redresse­ment judiciaire.

L’im­por­tance de leur mis­sion n’échappe pas au lég­is­la­teur qui s’in­ter­roge sur les voies et moyens d’amélio­ra­tion de leur fonc­tion­nement, mais aus­si sur la déon­tolo­gie de la pro­fes­sion. Ain­si de l’ar­ti­cle L. 813–1 du Code de com­merce, dans lequel est inséré notam­ment l’al­inéa suiv­ant ain­si rédigé : ” Ces experts ne doivent pas, au cours des cinq années précé­dentes, avoir perçu à quelque titre que ce soit, directe­ment ou indi­recte­ment, une rétri­bu­tion ou un paiement de la part de la per­son­ne physique ou morale faisant l’ob­jet d’une mesure d’ad­min­is­tra­tion, d’as­sis­tance ou de sur­veil­lance ou de la part d’une per­son­ne qui détient le con­trôle de cette per­son­ne morale, ni s’être trou­vés en sit­u­a­tion de sub­or­di­na­tion par rap­port à la per­son­ne physique ou morale con­cernée. Ils doivent, en out­re, n’avoir aucun intérêt dans le man­dat qui leur est donné. ”

CATEGORIE Délai moyen en jours Prix moyen en euros Nom­bre de rapports Chiffre d’af­faire en euros
PROFESSIONS DU CHIFFRE 474 12 403,11 787 9 761 243,91
sauf > 45 000 euros 456 8 781,61 753 6 612 552,65
PROFESSIONS DU BÂTIMENT 472 7 661,29 660 5 056 451,83
sauf > 45 000 euros 361 5 255,51 652 3 426 592,50
INGENIEURS HORS BÂTIMENT 419 9 686,74 808 7 826 884,75
sauf > 45 000 euros 386 7 892,52 791 6 242 979,63
TOTAL GENERAL 454 10 041,94 2 255 22 644 580,49

Conclusion

Il est dif­fi­cile de présen­ter l’ensem­ble des prob­lèmes que pose l’ex­per­tise dans les tri­bunaux de com­merce de manière aus­si résumée. Néan­moins il y a lieu de faire observ­er que cette activ­ité devrait séduire les ingénieurs que nous sommes dans la mesure où elle cor­re­spond bien à notre domaine tech­nique. Elle implique une grande disponi­bil­ité pour assur­er une aus­si grande rapid­ité que pos­si­ble, ce qui ne va pas tou­jours de soi. 

______________________________
1.
Source : site Inter­net du min­istère de la Jus­tice, www.justice.gouv.fr/
2. Procé­dure d’ur­gence engagée devant le prési­dent d’une juri­dic­tion pour faire cess­er une sit­u­a­tion con­traire à la loi. Elle per­met d’obtenir, à titre provisoire :
 • toutes mesures qui ne se heur­tent pas à une con­tes­ta­tion sérieuse ;
 • ou toutes mesures de con­ser­va­tion ou de remise en état pour prévenir un dom­mage immi­nent ou faire cess­er un trou­ble man­i­feste­ment illicite.
Le juge des référés est le juge de l’év­i­dence mais aus­si et, his­torique­ment, surtout celui de l’ur­gence. . Il est aus­si celui qui ordonne des mesures qui ne préju­di­cient pas au fond et c’est juste­ment le cas de l’expertise.

3. La Cour de cas­sa­tion a pour rôle de véri­fi­er si une déci­sion qui lui est déférée a été ren­due en con­for­mité aux règles de droit.
4. Désigne un tri­bunal ou une cour.
5. Il existe des juri­dic­tions spé­ci­fiques pour les mineurs.
6. Ce thème a déjà été par­tielle­ment traité dans La Jaune et la Rouge.
7. Source : Legitravail.com
8. Cf. : La Jaune et la Rouge, octo­bre 1988
9. Rap­port sur la réforme des TC. GIROD (Paul) RAPPORT 178 (2001–2002) — com­mis­sion des lois.
10. Encore que les TGI peu­vent égale­ment con­naître des affaires com­mer­ciales, comme cer­tains tri­bunaux des départe­ments de l’Est de la France.
11. Source : sta­tis­tiques du TC de Paris.

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