La restructuration des entreprises en France

Dossier : L'entreprise en difficultéMagazine N°713 Mars 2016
Par Hubert KIRCHNER (80)

Les restruc­tu­ra­tions peuvent être subies par des entre­prises en dépot de bilan ou auto­fi­nan­cées. En France le coût de la restruc­tu­ra­tion est exor­bi­tant à cause du volet social, mais le droit de l’entreprise en dif­fi­cul­té est l’un des plus performants.

La France est très sen­sible aux restruc­tu­ra­tions des entre­prises car il est, dans notre pays, signi­fi­ca­ti­ve­ment plus dif­fi­cile de retrou­ver du tra­vail que dans des pays plus libé­raux. Le cadre légis­la­tif est ici bâti pour pro­té­ger le sala­rié et l’entreprise : évi­ter que les dif­fi­cul­tés ren­con­trées ne viennent détruire l’entreprise et les emplois qu’elle a su créer.

De nom­breuses restruc­tu­ra­tions sont cepen­dant inévi­tables. Chaque année, des dizaines de mil­liers d’entreprises déposent leur bilan. Mais ce sont en grande majo­ri­té de toutes petites entreprises.

Ain­si, en 2014, 62 600 entre­prises repré­sen­tant 244 000 sala­riés (soit en moyenne moins de quatre sala­riés par entre­prise) ont dépo­sé leur bilan, mais seules 452 avaient plus de cin­quante sala­riés et 4 000 de dix à cin­quante salariés.

“ Le coût des restructurations est exorbitant en France ”

Cette « héca­tombe » doit bien sûr être rela­ti­vi­sée au regard du nombre d’entreprises en France : envi­ron 3 mil­lions, dont 150 000 de plus de dix salariés.

Au-delà de ces dépôts de bilan aux causes très variées, les restruc­tu­ra­tions touchent sou­vent des socié­tés et groupes qui auto­fi­nancent leur restruc­tu­ra­tion. Et c’est là le point pivot : le coût des restruc­tu­ra­tions est exor­bi­tant en France.

Essen­tiel­le­ment de nature sociale, il dépasse sou­vent les 100 000 euros par emploi détruit, quand le salaire brut annuel du titu­laire est infé­rieur à 40 000 euros Et le droit fis­cal n’aide pas quand, depuis 2012, il taxe deux fois à l’impôt sur les socié­tés la sub­ven­tion qu’un cédant d’une socié­té ou acti­vi­té en dif­fi­cul­té est prêt à accor­der dans le cadre d’un pro­jet de reprise (voir enca­dré p. 35).

Le seul coût de la restruc­tu­ra­tion fait ain­si dis­pa­raître de nom­breux emplois struc­tu­rel­le­ment pérennes et pousse même par­fois une entre­prise pérenne au dépôt de bilan. Il y a là un thème d’études pour ten­ter de retrou­ver un équi­libre plus satisfaisant.

En contre­point de ces coûts et rigi­di­tés, la France dis­pose d’un droit de l’entreprise en dif­fi­cul­té par­mi les plus per­for­mants du monde occi­den­tal. Il est sou­vent cité en réfé­rence mal­gré sa pro­pen­sion à pro­té­ger l’actionnaire plus que le créancier.

C’est là un point en cours d’évolution, car les échecs dans le redres­se­ment des entre­prises sont mal­heu­reu­se­ment nom­breux, sou­vent dus à un désa­li­gne­ment des inté­rêts des par­ties pre­nantes : créan­ciers, action­naires, sala­riés, pou­voirs publics et l’entreprise elle-même.

Cha­cun pousse ses inté­rêts de façon ration­nelle et irra­tion­nelle : la psy­cho­lo­gie a aus­si ses exigences.

La France dis­pose de grands pro­fes­sion­nels recon­nus dans toutes les matières tou­chant aux restruc­tu­ra­tions : mana­ge­ment de crise et de retour­ne­ment, droit de l’entreprise, droit social, admi­nis­tra­tion judi­ciaire, audits et conseils finan­ciers, banques des situa­tions spé­ciales, fusion-acqui­si­tion d’entreprises en dif­fi­cul­té, inves­tis­se­ments en situa­tion de retour­ne­ment, etc.

Un monde riche et varié qui éla­bore, chaque jour et opi­niâ­tre­ment, des solu­tions pour assu­rer un nou­vel ave­nir à des socié­tés et acti­vi­tés en situa­tion de crise.

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