La physique contemporaine ignorée par les programmes

Dossier : Les prépasMagazine N°703 Mars 2015
Par Pierre LÉNA

La rela­ti­vi­té, la phy­sique quan­tique, la méca­nique sta­tis­tique n’ont encore qu’une place bien modeste, limi­tée par les capa­ci­tés de for­ma­li­sa­tion d’étudiants qui ne maî­trisent pas les équa­tions aux déri­vées par­tielles ou la trans­for­ma­tion de Fourier.

REPÈRES

En 2013 et 2014, les programmes des classes préparatoires scientifiques ont été modifiés. L’exercice fut sans doute difficile, puisque placé entre trois contraintes. Les nouveaux programmes de lycée réduisent la place des mathématiques – géométrie, analyse – et ont une approche plus qualitative de la physique.
La demande moyenne de nos écoles d’ingénieurs se préoccupe peu de physique moderne.
Enfin, les étudiants de prépas, même sélectionnés, sont de niveaux très variables.

Une physique fortement mathématisée

Cela reflète une cer­taine tra­di­tion fran­çaise d’excellence dans l’enseignement d’une phy­sique for­te­ment mathé­ma­ti­sée, au détri­ment par­fois de la culture d’un sens phy­sique éclai­ré par l’expérience et l’intuition. La rela­ti­vi­té res­treinte, comme cas limite, est à peine consi­dé­rée, la rela­ti­vi­té géné­rale ignorée.

“ La relativité restreinte est à peine considérée, la relativité générale est ignorée ”

La phy­sique quan­tique est mieux trai­tée, en par­ti­cu­lier en seconde année PC, qui com­pare les trai­te­ments clas­siques et quan­tiques ; optique et laser y trouvent natu­rel­le­ment leur place.

Enfin, le déve­lop­pe­ment des pro­ba­bi­li­tés en ter­mi­nale per­met de don­ner quelques éclai­rages micro­sco­piques à la ther­mo­dy­na­mique classique.

Acquérir le goût de l’expérimentation

Serge Haroche, prix Nobel de phy­sique 2012,
un jon­gleur de photons.
© ÉCOLE POLYTECHNIQUE – JÉRÉMY BARANDE

L’évolution de ces pro­grammes, sur un demi-siècle, est qua­si inexis­tante, même si l’on sai­sit la logique et la cohé­rence qui en sous-tendent la construction.

L’interrogation qui demeure à leur lec­ture concerne l’enthousiasme, au-delà de la réus­site au concours, que peuvent appor­ter les étu­diants à ce qui leur est offert, et le goût de l’expérimentation qu’ils en acquer­ront. La phy­sique d’aujourd’hui et de demain ne sera ren­con­trée, dans le meilleur des cas, qu’en licence 3, ou encore – il faut s’en réjouir – lors du choix des tra­vaux d’initiative per­son­nelle enca­drés (TIPE).

Plus que jamais, la capa­ci­té du pro­fes­seur sera déter­mi­nante pour sol­li­ci­ter la curio­si­té de ses étu­diants, pour faire le lien entre les notions du pro­gramme et la phy­sique contem­po­raine, pour ouvrir à la créa­ti­vi­té et l’esprit de recherche qu’illustrent les tra­vaux de nos phy­si­ciens, lau­réats ou non du prix Nobel, et la mul­ti­tude d’applications engen­drées dans l’industrie.

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