La directive Inspire au service des politiques environnementales européennes

Dossier : Géo-information et SociétéMagazine N°662 Février 2011
Par Daniele RIZZI

REPÈRES

REPÈRES
Le secteur Gis­co est respon­s­able du Sys­tème d’in­for­ma­tion géo­graphique (SIG) qui met à la dis­po­si­tion de la Com­mis­sion européenne des don­nées topographiques de référence, telles que les régions admin­is­tra­tives ou les réseaux de trans­port et hydro­graphiques. Les activ­ités du secteur inclu­ent égale­ment la pro­duc­tion de cartes thé­ma­tiques et le développe­ment de pro­jets d’analyse spa­tiale en sup­port des poli­tiques d’Eu­ro­stat et des autres ser­vices de la Com­mis­sion. Gis­co est égale­ment respon­s­able, en col­lab­o­ra­tion avec deux autres ser­vices de la Com­mis­sion, la Direc­tion générale envi­ron­nement et le Cen­tre com­mun de recherche, de la mise en œuvre de la direc­tive Inspire.

Ces dernières années, l’U­nion européenne a inté­gré le développe­ment durable dans un large éven­tail de poli­tiques, telles que la lutte con­tre le change­ment cli­ma­tique ou la réduc­tion des émis­sions de CO2. Le développe­ment durable con­stitue, en effet, aux ter­mes du Traité, son objec­tif général et à long terme. Plusieurs straté­gies et plans d’ac­tion ont été adop­tés, visant sept ” grands défis” : le change­ment cli­ma­tique et l’én­ergie pro­pre ; le trans­port durable ; la con­som­ma­tion et la pro­duc­tion durables ; la con­ser­va­tion et la ges­tion des ressources naturelles ; la san­té publique ; l’in­clu­sion sociale et les ques­tions démo­graphiques et migra­toires ; la pau­vreté dans le monde.

Un support indispensable

Pour pou­voir attein­dre ces objec­tifs, à tra­vers des poli­tiques appro­priées et adap­tées à leur com­plex­ité, une con­di­tion indis­pens­able est la disponi­bil­ité à tous les niveaux déci­sion­nels, du niveau com­mu­nau­taire jusqu’aux niveaux nationaux, régionaux et locaux, d’in­for­ma­tion fiable, à jour et facile­ment accessible.

Les phénomènes liés à l’en­vi­ron­nement ne con­nais­sent pas de frontières

Une com­posante fon­da­men­tale de cette infor­ma­tion est à l’év­i­dence la géo-infor­ma­tion. Pra­tique­ment tout ce qui a une influ­ence sur l’en­vi­ron­nement, et tout indi­ca­teur qui con­tribue à la mesure des phénomènes naturels ou liés à des activ­ités humaines, a une com­posante géo­graphique qui per­met de le lier à une por­tion plus ou moins grande de la sur­face ter­restre. Et par leur nature, les phénomènes liés à l’en­vi­ron­nement ne con­nais­sent pas de fron­tières poli­tiques ; la pol­lu­tion, les inon­da­tions, les man­i­fes­ta­tions atmo­sphériques majeures ne s’ar­rê­tent pas aux lim­ites d’É­tat ou de région.

La géo-infor­ma­tion sup­por­t­ant les poli­tiques envi­ron­nemen­tales de l’U­nion européenne, de ses pays mem­bres et de ses com­mu­nautés locales, pour être exploitable d’une manière sim­ple et rapi­de, doit donc non seule­ment être fiable et à jour, mais aus­si facile d’ac­cès et har­mon­isée. C’est sur la base de ces principes que la direc­tive Inspire a été conçue.

La directive Inspire

Hydrographie

L’en­vi­ron­nement ne con­naît pas de fron­tières : les bassins hydro­graphiques trans­frontal­iers occu­pent 60 % du ter­ri­toire de l’U­nion européenne. Leur ges­tion exige des don­nées compatibles.

Au début des années 2000 la Com­mis­sion européenne et ses pays mem­bres ont recon­nu la néces­sité d’une ini­tia­tive pour définir un cadre légal à ce qui a été défi­ni comme une ” infra­struc­ture d’in­for­ma­tion géo­graphique au niveau européen “. Le con­cept de ” Spa­tial Data Infra­struc­ture ” (SDI) n’est certes pas nou­veau. Ce n’est toute­fois qu’à par­tir de cette décen­nie que, favorisé par l’évo­lu­tion tech­nologique, et asso­cié à un besoin accru d’in­for­ma­tions plus facile­ment exploita­bles par les nou­velles tech­nolo­gies, l’étab­lisse­ment de SDI au niveau nation­al ou inter­na­tion­al a vu le jour sous forme de dif­férentes initiatives.

De nom­breuses déf­i­ni­tions de l’in­fra­struc­ture d’in­for­ma­tion géo­graphique ont été don­nées ; par­mi elles, on peut men­tion­ner celle qui la définit comme “l’ensem­ble des tech­nolo­gies, poli­tiques, normes, ressources humaines et activ­ités asso­ciées, néces­saires pour l’ac­qui­si­tion, le traite­ment, la dis­tri­b­u­tion, l’u­til­i­sa­tion, la mise à jour et la con­ser­va­tion des géodon­nées “. Il est impor­tant de soulign­er que cette déf­i­ni­tion ne se lim­ite pas à une liste de com­posantes tech­niques, mais inclut comme élé­ments essen­tiels d’une infra­struc­ture d’in­for­ma­tion géo­graphique les aspects organ­i­sa­tion­nels et de poli­tique de données.

Quatre ans de préparation

Définir un cadre légal à une infra­struc­ture d’in­for­ma­tion géo­graphique au niveau européen

Les activ­ités pré­para­toires de 2000 à 2004, menées par la Com­mis­sion européenne (et notam­ment par trois de ses direc­tions générales, la Direc­tion générale de l’en­vi­ron­nement, Euro­stat et le Cen­tre com­mun de recherche) en étroite col­lab­o­ra­tion avec les acteurs clés de la géo-infor­ma­tion européenne, par le biais d’une série de groupes de tra­vail, ont con­duit à l’adop­tion, le 23 juil­let 2004, d’une “Propo­si­tion de Direc­tive du Par­lement européen et du Con­seil étab­lis­sant une infra­struc­ture d’in­for­ma­tion géo­graphique dans la Com­mu­nauté (Inspire)” (COM/2004/0516 final).

Cette propo­si­tion a abouti, trois ans plus tard, à l’adop­tion de la direc­tive Inspire (Direc­tive 2007/2/CE du 14 mars 2007).

Populations

L’en­vi­ron­nement ne con­naît pas de fron­tières : 20% des citoyens européens vivent à moins de 50 km d’un pays voisin ; 60 mil­lions de citoyens se trou­vent à moins d’une demi-heure de tra­jet de la fron­tière avec un autre mem­bre de l’Union.

Chiffres des pop­u­la­tions proches des frontières

Cinq principes

Pro­mou­voir et faciliter le partage des don­nées et ser­vices de l’infrastructure

Inspire se base sur cinq principes fondamentaux :

  1. les don­nées faisant par­tie de l’in­fra­struc­ture doivent être con­servées, main­tenues et mis­es à la dis­po­si­tion des util­isa­teurs au niveau le plus appro­prié ;
  2. les don­nées faisant par­tie de l’in­fra­struc­ture doivent pou­voir être partagées à tous les niveaux ;
  3. il faut don­ner la pos­si­bil­ité de com­bin­er les don­nées en prove­nance de dif­férentes sources d’une manière directe et trans­par­ente ;
  4. les con­di­tions d’u­til­i­sa­tion de l’in­fra­struc­ture ne doivent pas faire obsta­cle à son util­i­sa­tion exten­sive ;
  5. il faut assur­er la disponi­bil­ité d’in­stru­ments pour iden­ti­fi­er, éval­uer et utilis­er les don­nées faisant par­tie de l’infrastructure.

Champ d’ap­pli­ca­tion
Les pro­duc­teurs de don­nées con­cernés par Inspire four­nissent des géodon­nées détenues par une autorité publique, après avoir été pro­duites ou reçues par une autorité publique, ou bien gérées ou mis­es à jour par cette autorité et ren­trant dans le champ de ses missions.

Partage des données

Tous ces principes et leur con­créti­sa­tion dans la direc­tive et ses règle­ments de mise en oeu­vre ne visent en effet qu’un seul principe fon­da­men­tal, pro­mou­voir et faciliter le partage des don­nées et ser­vices de l’in­fra­struc­ture. Les activ­ités pré­para­toires d’In­spire ont en effet mon­tré que le prob­lème prin­ci­pal n’é­tait pas (et n’est tou­jours pas) le manque de don­nées, mais plutôt leur dif­fi­culté d’ac­cès et d’u­til­i­sa­tion. Le paysage des pro­duc­teurs de don­nées géo­graphiques est car­ac­térisé par une mul­ti­plic­ité d’ac­teurs, dont la dynamique est en évo­lu­tion constante.

Du mod­èle tra­di­tion­nel basé sur une pro­duc­tion d’in­for­ma­tion géo­graphique con­cen­trée, dans chaque État mem­bre, dans une seule entité respon­s­able au niveau nation­al (les insti­tuts géo­graphiques nationaux), les deux dernières décen­nies ont vu une frag­men­ta­tion pro­gres­sive évolu­ant vers une con­fig­u­ra­tion plus com­plexe, où la géo-infor­ma­tion est aus­si col­lec­tée et gérée au niveau région­al ou local ou pour des besoins de com­mu­nautés thé­ma­tiques spécifiques.

Les don­nées sont dev­enues plus abon­dantes, sou­vent plus pré­cis­es et plus adap­tées aux besoins spé­ci­fiques ; par con­tre, le manque de coor­di­na­tion et par­fois d’une cul­ture de partage de don­nées ont généré des dif­fi­cultés d’ac­cès amenant sou­vent à une dupli­ca­tion de don­nées, indisponibles à cer­taines caté­gories d’u­til­isa­teurs, ne répon­dant pas à des normes com­munes ou trop chères.

Une multitude de thèmes

Le champ d’ap­pli­ca­tion d’In­spire cou­vre une grande var­iété de thèmes. La direc­tive vise à l’étab­lisse­ment d’une infra­struc­ture de géo-infor­ma­tion, ses com­posants cou­vrant les thèmes topographiques mul­ti­fonc­tions regroupés dans les Annex­es I et II ain­si que des domaines envi­ron­nemen­taux mais aus­si socio-économiques, météorologiques et sta­tis­tiques inclus dans les 21 thèmes de l’An­nexe III.

Développer l’infrastructure nécessaire

Les mesures d’exé­cu­tion sont d’ap­pli­ca­tion directe dans chaque pays de l’Union

Les dis­po­si­tions d’In­spire visent à l’étab­lisse­ment de normes tech­niques con­cer­nant les méta­don­nées, l’in­teropéra­bil­ité des don­nées et ser­vices, et l’étab­lisse­ment de ser­vices en réseau, ain­si qu’à des mesures de coor­di­na­tion et de facil­i­ta­tion du partage des don­nées et services.

En tant que direc­tive, Inspire doit être trans­posée dans chaque pays de l’U­nion européenne à tra­vers des mesures nationales d’exé­cu­tion (loi, décrets, etc.), per­me­t­tant de mieux en adapter les principes au con­texte pro­pre à chaque pays de l’U­nion. En tant que “direc­tive cadre “, la trans­po­si­tion d’In­spire est accom­pa­g­née de l’adop­tion d’un cer­tain nom­bre de ” mesures d’exé­cu­tion “, con­cer­nant des sujets tech­niques tels que des normes sur les méta­don­nées ou sur l’har­mon­i­sa­tion et l’in­teropéra­bil­ité des don­nées et de ser­vices faisant par­tie de l’infrastructure.

Ces mesures d’exé­cu­tion, prenant la forme de règle­ments com­mu­nau­taires, sont d’ap­pli­ca­tion directe dans chaque pays de l’U­nion, et sont accom­pa­g­nées de recom­man­da­tions expli­quant leur mise en oeu­vre. Qua­tre de ces règle­ments ont déjà été adop­tés par la Com­mis­sion européenne, trois autres étant en voie d’adop­tion ; les mesures restantes seront adop­tées par la Com­mis­sion avant la fin 2012.

Toutes les com­posantes de l’in­fra­struc­ture sont prévues pour être mis­es en place avant la fin de l’an­née 2019.

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