Implantation d’Électricité de France en Ukraine

Dossier : UkraineMagazine N°547 Septembre 1999
Par Bruno CARRIER

Une histoire commune dynamique, des relations durables et une implication sans cesse renforcée

Élec­tric­ité de France est présente en Ukraine depuis son indépen­dance, il y a déjà sept ans, et y a ouvert un Bureau de représen­ta­tion en 1993. EDF a pro­gres­sive­ment ren­for­cé son tis­su de rela­tions et appro­fon­di ses engage­ments auprès des acteurs du sys­tème élec­trique. Ainsi :

  • EDF a élar­gi l’éven­tail de ses inter­locu­teurs en nouant des liens durables et d’es­time mutuelle avec les dif­férents acteurs du sys­tème élec­trique ukrainien (pro­duc­teurs, trans­porteurs, dis­trib­u­teurs), les cen­trales, les insti­tuts de con­cep­tion, le tis­su indus­triel ukrainien, la société de pro­duc­tion élec­tronu­cléaire Ener­goatom, le Minen­er­go, la Com­mis­sion nationale de régu­la­tion du sys­tème élec­trique, le min­istère de l’En­vi­ron­nement et de la Sûreté nucléaire…
  • EDF a aug­men­té l’im­por­tance de ses impli­ca­tions dans les pro­jets dévelop­pés avec ses homo­logues ukrainiens ; ayant com­mencé par met­tre en œuvre des jume­lages entre cen­trales nucléaires (Zaporo­jie-Bugey, Rivne-Golfech, Khmel­nyt­skyï-Chi­non) tou­jours act­ifs, EDF a ensuite été, dans le cadre du pro­gramme européen Tacis, con­sul­tant pour divers pro­jets avec des parte­naires européens ; soucieuse d’être con­crète, EDF a accom­pa­g­né finan­cière­ment la mise en œuvre par Tacis de l’as­sis­tance sur le site de la cen­trale de Rivne depuis 1994 et par­ticipe, en parte­nar­i­at avec DTN et GKN, à l’as­sis­tance sur le site de la cen­trale de Khmel­nyt­skyï ; depuis 1995, EDF est impliquée comme assis­tant aux maîtres d’ou­vrages (à Rivne, à Khmel­nyt­skyï mais aus­si dans le domaine clas­sique, à Staro­biechievs-kaya et pour la cen­trale de pom­page du Dniestr) dans le cadre de pro­jets de réha­bil­i­ta­tion ou d’achève­ment de cen­trales de pro­duc­tion d’élec­tric­ité. Depuis 1998 EDF s’est égale­ment posi­tion­née comme investis­seur-opéra­teur de sociétés de distribution.

Dans le cadre d’une stratégie éprouvée et… prometteuse

En résul­tat cumulé depuis 1991, EDF a dévelop­pé et développe env­i­ron 38 pro­jets, et mobilise chaque jour pour ses pro­jets ukrainiens une cen­taine d’ex­perts. EDF a dégagé un chiffre d’af­faires cumulé d’en­v­i­ron 280 MFF (dont 60 % financés sur fonds Tacis et BERD) et accueille chaque année en France env­i­ron 60 experts ukrainiens (cer­tains pour des stages de longue durée) alors que 150 experts d’EDF vien­nent en Ukraine.

EDF a tenu à être présente, tant dans le domaine nucléaire que non nucléaire :

  • compte tenu de ses com­pé­tences mul­ti­ples d’ar­chi­tecte-con­cep­teur et d’ex­ploitant de cen­trales hydrauliques (notam­ment de pom­page comme à Grand’­Mai­son), ther­miques clas­siques (avec des tech­nolo­gies nou­velles comme les chaudières LFC, dévelop­pées à Gar­danne avec Char­bon­nages de France), nucléaires (jusqu’aux plus avancées et véri­ta­ble­ment opéra­tionnelles dans le monde, comme les PWR-N4 de 1 450 MW de Chooz), mais aus­si de réseaux de trans­port, et en tant que dis­trib­u­teur attachant une impor­tance cer­taine à la ges­tion de la clientèle,
  • car la pour­suite de l’ex­ploita­tion de cen­trales nucléaires dans des con­di­tions de sûreté qui ne sont pas assez sat­is­faisantes con­stitue un risque pour l’en­vi­ron­nement. C’est pour cette rai­son, mais aus­si par sol­i­dar­ité avec les exploitants nucléaires ukrainiens qui ont une prob­lé­ma­tique sim­i­laire à celle d’EDF, qu’elle s’est engagée forte­ment dans les pro­jets du secteur nucléaire, tant sur ses fonds pro­pres que sur des finance­ments internationaux,
  • dans le domaine non nucléaire avec la volon­té d’être un jour, puisque les con­di­tions le per­me­t­tent désor­mais, investis­seur-opéra­teur : il con­vient de not­er par ailleurs que cer­tains pro­jets non nucléaires sur lesquels EDF coopère sont inscrits dans le Mem­o­ran­dum of Under­stand­ing signé à Ottawa en décem­bre 1995 par l’Ukraine, les pays du G7 et l’U­nion européenne, en vue de la fer­me­ture de la cen­trale de Tch­er­nobyl en 2000.

Les quatre volets de la coopération d’EDF en Ukraine

Premier volet : coopération en faveur de la sûreté nucléaire

Coopéra­tion pour amélior­er la sûreté d’ex­ploita­tion sur les sites

L’ob­jec­tif est de con­tribuer à dévelop­per la cul­ture de sûreté des exploitants à tra­vers des actions de partenariat.

Rivne : une équipe de trois per­son­nes est détachée sur le site de Rivne depuis avril 1994.
Elle intervient :

  • dans le cadre d’ac­tions d’as­sis­tance pour l’amélio­ra­tion de la sûreté à l’ex­ploita­tion et à la con­cep­tion (finance­ment européen Tacis et finance­ment EDF),
  • pour la four­ni­ture d’équipement et de matériels (finance­ment Tacis et EDF).

La cen­trale française Golfech, jumelée avec Rivne, est le sup­port de ce projet.

Khmel­nyt­skyï : une action d’as­sis­tance sur site ana­logue à celle de Rivne et sur finance­ment Tacis a été lancée en liai­son avec DTN (Espagne). La cen­trale de Chi­non est la cen­trale de sup­port jumelée.

Zaporo­jie : un jume­lage act­if avec la cen­trale française du Bugey existe depuis plusieurs années.

Coopéra­tion avec le niveau cen­tral d’Energoatom :

  • mise en place d’un sys­tème de retour d’ex­péri­ence con­cer­nant la col­lecte et l’analyse des infor­ma­tions et événe­ments provenant des cen­trales nucléaires (pro­jet CIA),
  • pro­jet de créa­tion du Cen­tre nation­al de crise.

 
Coopéra­tion pour la mod­erni­sa­tion des centrales

EDF n’est pas un vendeur d’équipements mais pos­sède une solide expéri­ence d’ingénierie comme “archi­tecte-ingénieur” des cen­trales en France. EDF offre ses ser­vices comme “con­sul­tant” des exploitants nucléaires d’Eu­rope de l’Est en vue de pré­par­er et réalis­er des pro­jets de mod­erni­sa­tion ou d’achève­ment des réac­teurs VVER de con­cep­tion récente (VVER 440/213 et 1 000–320).

Achève­ment et mod­erni­sa­tion de Rivne 4 et Khmel­nyt­skyï 2

EDF, en con­sor­tium avec Tractebel et IVO, coopère à la phase pré­para­toire du pro­jet d’achève­ment et de mod­erni­sa­tion de ces réac­teurs VVER 1 000. L’ob­jec­tif est d’amen­er ces deux unités à un niveau de sûreté com­pa­ra­ble à celui des cen­trales de même généra­tion en Occi­dent. Ce pro­jet fait par­tie inté­grante du Mem­o­ran­dum of Under­stand­ing signé par le G7 avec le prési­dent ukrainien en décem­bre 1995 à Ottawa. Il est financé par Tacis. Actuelle­ment, une équipe inté­grée de vingt per­son­nes (dont trois EDF) est instal­lée à Kiev et sur les sites, sur trois dossiers essen­tielle­ment ; le plan de finance­ment, la négo­ci­a­tion des con­trats des acteurs de la phase de réal­i­sa­tion, la con­sul­ta­tion du pub­lic lancée le 18 août 1998.

Rela­tions indus­trielles dans le secteur électronucléaire

EDF apporte son assis­tance à Ener­goatom pour :

  • la struc­tura­tion du tis­su indus­triel ukrainien dans le domaine de l’in­dus­trie nucléaire civile. L’ob­jec­tif est de pré­par­er les four­nisseurs pour qu’ils puis­sent pren­dre une part active aux pro­grammes d’achève­ment et de modernisation,
  • la mise en place de struc­tures cen­tral­isées pour l’achat des équipements de cen­trales nucléaires en Ukraine.


Un sémi­naire sur la réor­gan­i­sa­tion du tis­su indus­triel nucléaire ayant per­mis à 50 entre­pris­es français­es et à 50 entre­pris­es ukraini­ennes de se ren­con­tr­er a eu lieu à Kiev en févri­er 1997.

Mise en sûreté du sar­cophage de Tchernobyl

EDF, avec ses parte­naires améri­cains Bech­tel et Bat­telle, apporte son assis­tance depuis mai 1998 à Ener­goatom et à la cen­trale de Tch­er­nobyl pour le pilotage du pro­jet Shel­ter Imple­men­ta­tion relatif au sar­cophage de la tranche 4 acci­den­tée. Une équipe de treize experts d’EDF est détachée sur site dans le cadre d’une équipe intégrée.

Deuxième volet : coopération dans le domaine de la modernisation des parcs thermique classique et hydraulique

Le parc ther­mique clas­sique représente une part impor­tante de la pro­duc­tion en Ukraine. La mod­erni­sa­tion et la trans­for­ma­tion de ce parc pour lui per­me­t­tre de mieux brûler le char­bon nation­al et de respecter l’en­vi­ron­nement sont donc primordiales.

EDF, qui a dévelop­pé et qui maîtrise les tech­niques de com­bus­tion pro­pre du char­bon (lits flu­idis­és cir­cu­lants en par­ti­c­uli­er) coopère dans ce domaine avec le Minenergo.

  • Cen­trale de Starobeche­vo — mod­erni­sa­tion d’une tranche de 200 MW
    EDF, à côté de CdFI, va super­vis­er la phase de réal­i­sa­tion de ce pro­jet de con­struc­tion d’une chaudière LFC sur finance­ment BERD.
  • Cen­trale de Lougansk
    Réal­i­sa­tion sur finance­ment EDF de l’ingénierie prélim­i­naire pour la mod­erni­sa­tion d’une tranche de 200 MW et la con­struc­tion de deux chaudières LFC de 65,5 MW.


Le parc hydraulique fait l’ob­jet de réha­bil­i­ta­tion sur fonds de la Banque Mon­di­ale. Elle pré­pare entre autres un pro­jet de mise en ser­vice de trois groupes de 324 MW de la cen­trale de pom­page du Dniestr. Compte tenu de l’ex­péri­ence d’EDF dans le domaine des sta­tions de pom­page, le Minen­er­go a sol­lic­ité l’aide de la France.

EDF a réal­isé, sur finance­ment du gou­verne­ment français com­plété par un finance­ment pro­pre, la final­i­sa­tion des études de con­cep­tion et a apporté une assis­tance tech­nique à la pré­pa­ra­tion des appels d’of­fres relat­ifs à la phase de réal­i­sa­tion de ce pro­jet. La Banque Mon­di­ale vient de sus­pendre ce projet.

Troisième volet : coopération dans le domaine de la distribution et de l’efficacité énergétique

L’op­ti­mi­sa­tion de la ges­tion des ressources et la recherche d’une meilleure effi­cac­ité énergé­tique sont un volet indis­pens­able de toute poli­tique énergé­tique. Les actions d’EDF dans ce domaine en coopéra­tion avec Minen­er­go ont été et sont les suivantes :

  • réal­i­sa­tion d’une étude tar­i­faire dans le cadre d’un finance­ment Tacis,
  • expéri­men­ta­tion sur finance­ment EDF avec Kieven­er­go de cer­taines propo­si­tions faites dans le cadre de l’é­tude tar­i­faire notam­ment dans le domaine du comptage,
  • réal­i­sa­tion sur finance­ment EDF d’une étude des pertes tech­niques sur le réseau de Kievenergo,
  • assis­tance sur finance­ment EDF aux cinq sociétés de dis­tri­b­u­tion de la région de Lvov nou­velle­ment créées dans le cadre de la réforme du secteur élec­trique (pro­jet Banque Mondiale),
  • pro­jets pilotes d’é­conomie d’én­ergie dans des petites et moyennes entre­pris­es en liai­son avec le dis­trib­u­teur d’én­ergie Kievenergo.

EDF s’in­téresse de près au pro­gramme de pri­vati­sa­tion des sociétés de dis­tri­b­u­tion lancé par le gou­verne­ment ukrainien en décem­bre 1997.

Un nou­veau pro­gramme de pri­vati­sa­tion est en cours d’élab­o­ra­tion afin de relancer un proces­sus qui n’a pour l’in­stant pas attiré les grandes sociétés occidentales.

Quatrième volet : coopération dans le domaine de la formation

Quelle que soit la tech­nolo­gie dévelop­pée, celle-ci est conçue et mise en œuvre par les hommes. Il est donc indis­pens­able de con­cevoir un accom­pa­g­ne­ment en matière de for­ma­tion pour leur per­me­t­tre de dévelop­per con­nais­sance, savoir-faire et com­porte­ment. Dans ce domaine, EDF met un accent par­ti­c­uli­er sur la for­ma­tion de for­ma­teurs qui seront eux-mêmes capa­bles de démul­ti­pli­er leurs connaissances.

For­ma­tion dans le domaine nucléaire

  • For­ma­tion en France pen­dant un an de 12 for­ma­teurs ukrainiens.
  • Assis­tance à la mise en place et au fonc­tion­nement du Cen­tre d’ingénierie tech­nique de for­ma­tion du Minenergo.
  • Assis­tance à la mise en place d’un sys­tème glob­al de for­ma­tion des exploitants (pro­jet européen Tacis), en parte­nar­i­at avec Tec­natom et Siemens.
  • Créa­tion d’un cen­tre de for­ma­tion à la main­te­nance à Zaporo­jie (pro­jet Tacis) avec les mêmes parte­naires que ci-dessus.

 
For­ma­tion dans le domaine conventionnel

  • À l’is­sue d’un audit du sys­tème de for­ma­tion du Minen­er­go, for­ma­tion en France pen­dant un an de 12 for­ma­teurs ukrainiens dans le domaine du dis­patch­ing, de l’ex­ploita­tion des cen­trales ther­miques et des réseaux de dis­tri­b­u­tion (cofi­nance­ment EDF, Tacis, MAE).
  • For­ma­tion des cadres dirigeants des 27 sociétés de dis­tri­b­u­tion nou­velle­ment créées dans le cadre de la réforme du secteur élec­trique (finance­ment Tacis).

En conclusion

L’ac­tion d’EDF en Ukraine mon­tre une volon­té de tra­vailler durable­ment en col­lab­o­rant étroite­ment et en pro­fondeur avec les acteurs ukrainiens. Cette col­lab­o­ra­tion se fait au tra­vers de finance­ment inter­na­tionaux mais aus­si sur fonds pro­pres dans le cadre de pro­grammes visant l’amélio­ra­tion de la sûreté des cen­trales nucléaires des pays d’Eu­rope cen­trale et orientale.

Cette implan­ta­tion durable d’EDF dans ce pays pour­ra, le cas échéant, se matéri­alis­er par l’ac­qui­si­tion d’une ou plusieurs sociétés de dis­tri­b­u­tion d’électricité.

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