DVD : A Gershwin night par Seiji Ozawa

George GERSHWIN : Rhapsody in blue, Un américain à Paris, Concerto en fa

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°726 Juin/Juillet 2017Par : l'orchestre philharmonique de Berlin, Marcus Roberts Trio, direction Seiji OzawaRédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : Un DVD ou Blu-ray Euroarts 2053094

Les con­certs que le Phil­har­monique de Berlin donne à la Wald­bühne, lieu de con­certs en plein air, sont un suc­cès pop­u­laire, aux­quels les Berli­nois en famille se retrou­vent à plus de vingt mille chaque année. 

Comme en 1993, le maître d’œuvre de la soirée en 2003 (qui com­mence en fin d’après-midi, la nuit tombe sur le con­cert) est Sei­ji Oza­wa, pro­tégé de Kara­jan et qu’on don­nait dans les années qua­tre-vingt comme un des pré­ten­dants les plus sérieux à la suc­ces­sion du maestro. 

Oza­wa a choisi un pro­gramme tout Gersh­win. Il a pour cela con­va­in­cu le jazzman Mar­cus Roberts, qu’il avait fait jouer à Boston quelques années aupar­a­vant, d’en être le soliste, en lui pro­posant d’être accom­pa­g­né de son trio (per­cus­sion et con­tre­basse) et d’improviser au cours des œuvres. 

Cela nous donne des ver­sions de la célébris­sime Rhap­sody in Blue et du trop mécon­nu Con­cer­to en fa qui sont pro­pre­ment inouïes. C’est déjà impres­sion­nant et pas­sion­nant de voir les vents du Phil­har­monique de Berlin jouer avec la couleur néces­saire aux effets jazzy de Gersh­win (men­tions spé­ciales pour les trompettes et clar­inettes), mais il est épous­tou­flant de voir ce trio de jazz s’intégrer au milieu du flux orches­tral d’un des plus vieux orchestres du monde. 

Mar­cus Roberts est un pianiste de jazz assez orig­i­nal. J’ai dû voir ce con­cert une dizaine de fois (en DVD d’abord, avant sa paru­tion en Blu-ray) sans réalis­er que ce pianiste est aveu­gle depuis l’âge de cinq ans. Avec des doigts gigan­tesques, il se joue de la par­ti­tion de Gersh­win et peut ain­si impro­vis­er con­stam­ment sur les œuvres, atti­tude que n’aurait pas dés­ap­prou­vée le compositeur. 

Gersh­win est le père du jazz sym­phonique, a com­posé à la fois revues, comédies musi­cales, opérettes, con­cer­tos et un opéra. Sa musique est influ­encée par les mélodies juives « klezmer » (les frères George et Ira Gersh­win sont nés Jacob et Israël Ger­showitz à Brook­lyn, d’une famille juive orig­i­naire de Saint- Péters­bourg), les mélodies et styles du jazz noir améri­cain, et les com­pos­i­teurs clas­siques qu’il a côtoyés (Rav­el, Stravinski…). 

Ses plus grands suc­cès sont joués lors de ce con­cert (Un Améri­cain à Paris a été com­posé après la vis­ite de Gersh­win à Paris pour y voir jouer son Con­cer­to en fa). Gersh­win aurait été ravi d’un tel con­cert en plein air, lui qui jouait par­fois sa musique devant près de 20 000 spec­ta­teurs dans un stade à New York. 

Oza­wa est le lien entre les deux mon­des, celui de la Phil­har­monie de Berlin et celui de Gersh­win. Admiré de Kara­jan, qui lui a pro­posé de diriger le Phil­har­monique dès 1966 (!), il est aus­si un élève de Leonard Bern­stein et a passé quar­ante ans aux États-Unis. 

Sa sou­p­lesse, son énergie sont com­mu­nica­tives à l’orchestre. Le suc­cès de ce con­cert est le sien !

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