Portrait de Pierre-Olivier GOURINCHAS (87)

Pierre-Olivier Gourinchas (87), faire rêver, beau destin

Dossier : TrajectoiresMagazine N°730 Décembre 2017
Par Pierre LASZLO

C’est un ardent, pas­sion­né par les gens et leurs intérêts, intel­lectuels ou matériels.

Son enfance se déroula à Mont­pel­li­er. Du côté pater­nel, sa famille venait de Souil­lac, dans le Périg­ord. Quant à sa mère, elle est orig­i­naire de Nouméa, en Nou­velle- Calédonie.

Ses par­ents eurent une grande influ­ence : « Ma mère m’a tou­jours poussé vers l’excellence. D’une famille mod­este, elle était la pre­mière à accéder à l’université, mais n’avait pu pouss­er ses études autant qu’elle le souhaitait. Il était très impor­tant pour elle que ses enfants puis­sent prof­iter pleine­ment du sys­tème d’enseignement supérieur français. »

UN « POUGNEUR »

Il entra en pré­pa à Louis-le-Grand. Son pro­fesseur de math­é­ma­tiques supérieures, Jean-Daniel Bloch, l’éblouit : « Tout sem­blait facile. »

Après son admis­sion à l’X, il fit son ser­vice mil­i­taire dans les com­man­dos de l’air ; leur local­i­sa­tion à Reims lui per­me­t­tait de ren­tr­er régulière­ment à Paris y retrou­ver sa petite copine (et main­tenant épouse depuis vingt-cinq ans).

Il garde d’excellents sou­venirs de l’École. Il lui fal­lait se prou­ver à lui-même qu’il y était bien à sa place : « J’ai donc tra­vail­lé d’arrache-pied pour avoir le classe­ment néces­saire (pour le corps des Ponts). J’étais un pougneur. »

Dessin : Lau­rent SIMON

Il ambi­tion­nait en effet de pré­par­er un doc­tor­at en économie. Pourquoi cette branche ? « J’ai tou­jours été attiré par les sci­ences sociales. L’économie promet­tait une for­mal­i­sa­tion poussée (mod­èles théoriques, analy­ses statistiques). »

Son stage de recherche de l’X se fit sous la direc­tion de Patrick Artus, alors directeur des études à la Caisse des dépôts : une pile d’articles de recherche à creuser.

POG s’y plongea, oubliant de dormir, de manger. Il en tira un arti­cle, pub­lié dans Économie et Sta­tis­tique, trou­vant cela une aven­ture fantastique !

GO WEST, YOUNG MAN

Son directeur d’études doc­tor­ales, Charles Wyplosz, l’incita à pour­suiv­re sa for­ma­tion aux États-Unis. Il débar­qua donc, en 1992, avec son épouse enceinte de leur pre­mier enfant, à Cam­bridge, dans le Mass­a­chu­setts, pour pré­par­er un doc­tor­at au MIT.

En 1996, Stan­ford l’embaucha, tout juste diplômé, comme assis­tant professor.

Les Gour­in­chas décou­vrirent la Cal­i­fornie avec ivresse, les collines vertes plongeant dans le Paci­fique, la Bay Area et son goulet d’entrée, la Gold­en Gate. Tout cela était mer­veilleux de fraîcheur, de promesses.

Ils retournèrent cepen­dant vivre cinq ans sur la Côte Est, où Gour­in­chas avait obtenu un poste d’enseignant à Prince­ton. Il y acquit sa dilec­tion pour les petites villes uni­ver­si­taires améri­caines, proches des métropoles.

UNE MAISON ADOSSÉE À LA COLLINE

En 2002, à une réu­nion du Brook­ings Insti­tu­tion, tel une Cas­san­dre, il annonça que les emprunts con­sid­érables con­trac­tés sur les marchés financiers par l’Espagne, la Grèce et l’Irlande feraient problème.

Cette opin­ion con­trastait alors avec un con­sen­sus béat ancré dans un opti­misme quant à la magie de l’euro. Gour­in­chas avait vu juste. Par con­tre, il ne vit pas venir la débâ­cle de 2008.

Lui et sa femme con­ser­vaient la nos­tal­gie de la Côte Ouest. Aus­si l’invitation de l’université de Cal­i­fornie à Berke­ley, en 2003, fut irré­sistible : « C’est mul­ti­cul­turel, vivant, bar­i­olé, incroy­able­ment dynamique. C’est la démon­stra­tion qu’un enseigne­ment supérieur pub­lic de qual­ité, avec des moyens, c’est pos­si­ble, tout en préser­vant l’enseignement de masse. »

Il affec­tionne la prom­e­nade, juste der­rière leur mai­son, sur Panora­ma Hill : « C’est un méchant raidil­lon, bien récom­pen­sé par des vues panoramiques sur la baie ».

Ses travaux por­tent prin­ci­pale­ment sur la macroé­conomie et la finance inter­na­tionale. Il croit aux « mod­èles sim­ples qui expliquent bien des phénomènes de pre­mier ordre ».

Il a trou­vé à équili­br­er, admirable­ment, la car­rière pro­fes­sion­nelle et le développe­ment personnel.

Pour en savoir plus :

U.S. Mon­e­tary Pol­i­cy, ‘Imbal­ances’ and the Finan­cial Cri­sis, Remarks pre­pared for the Finan­cial Cri­sis Inquiry Com­mis­sion Forum, Wash­ing­ton DC, Feb­ru­ary 26–27, 2010 ;

Avec Olivi­er Jeanne, Cap­i­tal Flows to Devel­op­ing Coun­tries : The Allo­ca­tion Puz­zle, The Review of Eco­nom­ic Stud­ies, 2013, 80 (4), 1484–1515 ;

The Fun­da­men­tal Struc­ture of the Inter­na­tion­al Mon­e­tary Sys­tem, NBER Reporter, 2016 (1), http://nber.org/reporter/2016number1/gourinchas.html

Thèse de doc­tor­at au MIT, départe­ment sci­ences économiques, 1996 : Essays on exchange rates, and consumption


Et également :

Son blog, Uni­ver­sité de Cal­i­fornie à Berkeley

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