Faire entrer le soleil à l’intérieur des locaux

Dossier : TrajectoiresMagazine N°699 Novembre 2014
Par Quentin MARTIN-LAVAL (08)
Par Florent LONGA (08)

Au milieu de l’année 2010, nous présen­tons notre idée d’éclairage, en util­isant la lumière du soleil, à un con­cours de pro­jets étu­di­ants (« be.project »), sans imag­in­er que trois mois plus tard nous seri­ons lau­réats et que l’on nous offrirait 15 000 euros sous con­di­tion de pour­suiv­re le pro­jet une année de plus.

“ Sur Excel la vie est belle, en vrai c’est plus compliqué ”

Une fois pris dans l’engrenage, nous arrivons au fameux busi­ness plan indis­pens­able à toute start-up tech­nologique. Le nôtre : accès au marché rapi­de et évi­dent, grosse lev­ée de fonds au démar­rage, et le mil­lion d’euros de chiffre d’affaires en moins de deux ans.

Trouver un incubateur

En qua­trième année, Quentin choisit l’École des ponts et chaussées et Flo­rent l’Imperial Col­lege de Lon­dres. Pour autant, le pro­jet n’est pas mis de côté.

Flo­rent assure la com­mu­ni­ca­tion et les dossiers de can­di­da­tures à plusieurs con­cours. Les con­cours per­me­t­tent de con­fron­ter le busi­ness plan et la stratégie à des jurys com­pé­tents. Rem­porter des prix (comme le prix Geron­deau attribué par Zodi­ac-Aero­space) aide sur le plan financier et fait gag­n­er en visibilité.

Mais atten­tion, cela peut vite devenir très chronophage et nous auri­ons par­fois mieux fait de nous con­cen­tr­er sur l’avancement direct du projet.

UN ÉCLAIRAGE ÉCOLOGIQUE

C’est une grande histoire d’amitié qui commence en 2008. Dans la même section lors de notre formation militaire, à Barcelonnette puis à Coëtquidan, nous avons fait nos classes ensemble. De retour sur le campus, nous sommes restés soudés.
C’est en deuxième année que nous réalisons le PSC (Projet scientifique collectif) qui allait donner naissance à Echy. Au sein d’une équipe de cinq, avec Claire Monfront, Clémence Morel et Pierick Monville, les débats pour le choix du sujet étaient intenses : canard robotisé, réseau de transport urbain ont côtoyé une curieuse solution d’éclairage écologique. Ce dernier sujet fut retenu à l’unanimité.
Notre motivation est simple, répondre à ce gaspillage énergétique : l’utilisation d’électricité pour l’éclairage lorsque, dehors, le soleil brille.

Nous inté­grons enfin l’Incubateur Descartes de Marne-la-Val­lée (uni­ver­sité Paris-Est), qui sou­tient des pro­jets inno­vants. Pen­dant ce temps, Quentin tra­vaille sur la tech­nolo­gie Echy au cours des pro­jets de con­cep­tion de tech­nolo­gie nouvelle.

À la fin de leurs études, forts de ces parte­naires (École des ponts et Incu­ba­teur Descartes), la start-up Echy est fondée le 24 octo­bre 2012. Le pro­jet étu­di­ant sor­ti de l’X est devenu une entre­prise. Quentin est prési­dent, Flo­rent directeur tech­nique et une nou­velle asso­ciée, Stéphanie Le Beuze, issue d’une grande école com­mer­ciale, assure le développe­ment com­mer­cial et financier.

L’APPORT DES PONTS

« Je me souviens de ma première rencontre avec Quentin, en mai 2010. Sa tête bouillonnait déjà de nombreux projets et sa personnalité attachante et son enthousiasme avaient éveillé mon intérêt. J’ai donc été très heureux de le voir postuler pour sa quatrième année de l’X à la formation que je proposais aux Ponts. Il a su gagner ma confiance et me faire confiance.
Aussi, lorsqu’il m’a demandé de pouvoir faire un projet sur la suite de son Projet scientifique collectif dans l’intention de créer ensuite une start-up, je n’ai pas hésité. C’est un des atouts importants de nos écoles d’ingénieur que de permettre l’adaptation de la formation d’un élève à son projet professionnel. Quentin a su se faire accepter par les équipes du laboratoire et établir des relations franches de collaboration avec les personnels techniques. Au bout du compte, il a présenté une soutenance originale et de grande qualité.
Lorsque la start-up nouvellement créée a eu besoin d’un hébergement, Quentin s’est naturellement tourné vers l’École pour demander son aide. »

Alain Ehrlacher (73), directeur de département à l’École nationale des ponts et chaussées

Le B. A.-BA De l’entreprise innovante

A : Lever des fonds. Pour con­va­in­cre, il faut mon­tr­er. Pour pro­duire, il faut dépenser de l’argent. Notre mise de départ ? Out­re 20 000 euros obtenus via divers con­cours, nous avions con­ver­ti une troisième asso­ciée : Stéphanie, douze années d’expérience dans la finance, deux créa­tions d’entreprise antérieures, et bénév­ole dans un club de busi­ness angels.

Pan­neau collecteur.

Stéphanie pro­fes­sion­nalise notre tra­vail. Nous gagnons en effi­cac­ité, elle pose les bonnes ques­tions et l’équipe s’oriente sur les bonnes pri­or­ités. Elle méta­mor­phose le pro­jet. Nous devenons une start-up.

Cette pre­mière mise a été suiv­ie d’autres. Fin 2012, une min­isub­ven­tion pour un dépôt de brevet. Début 2013, une sub­ven­tion cou­plée à une aug­men­ta­tion de cap­i­tal auprès de nos proches (love mon­ey). Mi-2013, prêt d’honneur cou­plé à une aug­men­ta­tion de cap­i­tal auprès de busi­ness angels (BA). Fin 2013, nou­velle sub­ven­tion un peu plus conséquente.

Mi-2014, lev­ée de fonds de cinq cent mille euros (via BA). Pour 2015, nous espérons une ultime lev­ée per­me­t­tant enfin d’atteindre l’équilibre.

B : Open inno­va­tion. La mode est à l’open inno­va­tion. Lorsqu’on a un pro­duit un peu « sexy », on ren­con­tre rapi­de­ment bon nom­bre de chargés de veille tech­nologique. Il ne faut pas nég­liger ces con­tacts, ils porteront leurs fruits, plus tard.

Si le fac­teur chance est très loin d’être nég­lige­able, en cette fin 2012 il a été excep­tion­nel. Un homme, Gérard Massin, à la tête de la Setec (Société d’études tech­niques et économiques, groupe d’ingénierie bien con­nu des étu­di­ants des Ponts) for­mule une ques­tion unique : « De quoi avez-vous besoin ? »

En une heure d’entretien, il est décidé que la fil­iale Setec Inter­na­tion­al héberg­era notre pre­mier pilote, lorsqu’il sera prêt. Tel un phare, cette promesse, parce qu’elle fut fiable à chaque instant, devint le moteur de nos efforts.

Ce principe de mécé­nat, à notre niveau, nous le suiv­ons à chaque fois qu’un créa­teur en herbe prend con­tact avec nous.

Quentin Martin-Laval (gauche) et Florent Longa (droite)
Quentin Mar­tin-Laval (gauche) et Flo­rent Lon­ga (droite)

UNE ACTION DE MÉCÉNAT

J’ai rencontré Echy à une réunion de la Fondation de l’École des ponts et chaussées pour une collecte de fonds au profit de l’École. Parmi les actions envisagées figurait l’appui à la création d’entreprises issues des labos de recherche de l’École. L’exemple d’Echy m’a paru concret, et plutôt que de verser une aide « en blanc » à la Fondation, j’ai proposé à Quentin Martin- Laval de voir comment on pourrait l’accompagner.
Il est apparu rapidement qu’il avait besoin de réaliser un prototype en situation réelle. Il se trouve que nous possédions à Vitrolles un bâtiment s’y prêtant assez bien. Nous avons donc offert à Echy l’occasion de cette première réalisation en vraie grandeur.
Cette intervention était clairement une action de mécénat. Quand on a, comme moi, bénéficié de tout l’apport de Polytechnique et de l’École des ponts, il est normal de renvoyer un peu l’ascenseur ! En outre, cela s’inscrivait pour nous dans une démarche plus globale sur la mobilité, l’efficacité énergétique, la maquette numérique et les nouveaux matériaux. Nous avons offert à une trentaine de jeunes ingénieurs de Setec de disposer d’une demi-journée par semaine pour explorer librement des sujets d’innovation au sein de quatre laboratoires, les « Setec labs » créés à cet effet et déboucher éventuellement sur le lancement d’une start-up. Notre relation avec Echy avait pris un tout petit peu d’avance sur cette démarche.
C’est une bonne méthode pour faire le pont entre la « vieille économie » et les nouveaux horizons de « l’économie numérique ».

Gérard Massin (65), P‑DG de Setec

Poster un commentaire