Tournage d'un film par des polytechniciens

Les X font leur cinéma

Dossier : TrajectoiresMagazine N°732 Février 2018
Par Quentin CENSIER (12)

Deux mois après nous avoir présen­té “ Sur le champ ” Quentin nous décrit l’as­so­ci­a­tion Per­sis­tance com­posée de jeunes poly­tech­ni­ciens qui veu­lent faire du grand spec­ta­cle dans le ciné­ma français. Bien­tôt au Box Office ? 

Il y a main­tenant quelques mois que nous avons fondé l’association Per­sis­tance dans le but de faire du ciné­ma à un niveau pro­fes­sion­nel. Si nous ne sommes pas exclu­sive­ment poly­tech­ni­ciens, nous en for­mons la majorité. 

Allant de la pro­mo­tion 2010 à la pro­mo­tion 2014, cha­cun de nos mem­bres cherche à s’engager sur cette voie qu’est le ciné­ma et Per­sis­tance est rapi­de­ment dev­enue le moyen de met­tre en com­mun nos efforts et notre énergie pour attein­dre ce but. 

PREMIERS PAS AU JTX

Ce qui nous a per­mis de rassem­bler tant d’X pas­sion­nés par ce monde, c’est indé­ni­able­ment le binet JTX par lequel nous sommes tous passés. La mis­sion de ce binet était dou­ble entre la pro­duc­tion de trois pro­jec­tions par an de clips et courts-métrages et la cou­ver­ture vidéo des événe­ments du plateau. 

“ Cette expérience commune d’un engagement fort nous a liés ”

Si cer­tains con­nais­saient déjà leur pas­sion pour le ciné­ma à leur arrivée sur le cam­pus, d’autres l’ont décou­verte à tra­vers les activ­ités de ce binet. 

Durant plus d’une année, nous avons tous eu accès aux moyens du JTX, com­bi­nant débrouil­lardise, dépense d’énergie et appren­tis­sage accéléré pour pro­duire nos trois pro­jec­tions de près de deux heures cha­cune. Mais surtout, nous avions un pub­lic, de plus en plus assidu au fil des années, ce qui nous a per­mis de goûter à la puis­sance des images et du cinéma. 

SCINÉMA : UNE CHAÎNE YOUTUBE DE VULGARISATION SCIENTIFIQUE À TRAVERS LE CINÉMA

Le cinéma est non seulement un art technique mais c’est également un art qui propose une image de la technique et de la science. Par exemple, les différentes solutions proposées par la trilogie du Seigneur des anneaux pour donner l’illusion de différence de taille entre les hommes, les nains et les hobbits sont toutes des moyens de parler des concepts scientifiques sous-jacents. C’est ce que cette chaîne se propose de faire en profitant de la puissance du cinéma pour intéresser un maximum de personnes.
 

La chaîne Scinéma

UN BINET ET UN PUBLIC EXIGEANTS

À tra­vers la mon­tée en puis­sance du JTX auprès des dif­férentes pro­mo­tions, ces « pro­js » sont devenus des moments insti­tu­tion­nels forts, rassem­blant deux pro­mo­tions au « Point K » pour rire des derniers événe­ments avec un humour bon enfant ou pour prof­iter d’histoires aux thèmes for­cé­ment influ­encés par les ques­tion­nements des X en tant qu’habitants du plateau. 

Dans cet écosys­tème minia­ture qu’est le plateau, nous avons con­nu les dis­cus­sions enflam­mées sur la pro­jec­tion de la veille, les opin­ions diver­gentes, les cri­tiques mais aus­si l’attente qui gran­dis­sait au fur et à mesure que la date de la prochaine se rapprochait. 

Bien enten­du, nos créa­tions étaient ama­teurs, loin des canons du ciné­ma pro­fes­sion­nel. Mais nous y avons énor­mé­ment appris sur les dif­férentes con­traintes qu’imposent l’image, le son, le scé­nario, et l’attente d’un pub­lic qui baigne dans l’image depuis sa naissance. 

C’est cette expéri­ence com­mune d’un engage­ment fort pour un binet deman­deur qui nous a liés et qui nous a per­mis non seule­ment de décou­vrir que cet univers nous atti­rait mais égale­ment que nous pou­vions aller plus loin encore. 

LOIN DU PLATEAU, PLUS PRÈS DES PLANCHES

Cha­cun de nous a dû quit­ter le plateau et penser à la suite des études. Mais nous n’avons pas pour autant aban­don­né cet esprit que le JTX nous avait trans­mis. Deux d’entre nous ont con­tin­ué dans le domaine de la vidéo en fon­dant deux chaînes Youtube dont une ayant pour thème la rela­tion entre sci­ences et cinéma. 

LE CINÉMA, ART ET TECHNIQUE

La relation entre art et science est toujours au centre de l’apparition de nouveaux mouvements artistiques. Dans ce domaine, le cinéma est particulièrement concerné.
Entre l’optique, le son, les caméras ou encore les effets spéciaux, toute innovation technique est immédiatement récupérée par l’industrie du cinéma, très demandeuse de nouveaux moyens de construire une image ou un mouvement.
Ce n’est pas un hasard si Hollywood entretient des rapports étroits avec l’université de Los Angeles ou que James Cameron est diplômé de physique !

Deux autres ont pu, avec l’aide de l’École, organ­is­er une année de césure en mas­ter à Louis-Lumière durant laque­lle ils ont pu décou­vrir les métiers du monde du ciné­ma et goûter au tra­vail pro­fes­sion­nel. D’autres ont souhaité explor­er le tra­vail de l’acteur au ciné­ma et suiv­re un cours de théâtre, d’autres ont tourné un doc­u­men­taire pen­dant leur qua­trième année à l’étranger sur les con­flits iden­ti­taires et religieux… 

En bref, cha­cun à notre manière nous avons cul­tivé cette pas­sion de la vidéo et du ciné­ma. C’est ain­si qu’en juin 2017 nous sommes venus à la con­clu­sion que notre objec­tif com­mun méri­tait des efforts com­muns. Per­sis­tance en est le fruit. 

Si la mise en place a été com­pliquée par les dif­férences d’emplois du temps et de visions du pro­jet, nous sommes par­venus petit à petit à met­tre en avant dif­férents scé­nar­ios de notre main et avons décidé d’en dévelop­per les projets. 

LE MONDE DU CINÉMA EN LIGNE DE MIRE

N’ayant pour l’instant rien à présen­ter aux pro­duc­teurs ou aux comités d’attribution des bours­es de réal­i­sa­tion telles que celles du CNC, des Sofi­ca (Sociétés de finance­ment de l’industrie ciné­matographique et de l’audiovisuel) ou des régions, il nous est dif­fi­cile d’espérer pou­voir déblo­quer des fonds par ces moyens clas­siques. C’est pourquoi nous avons mon­té le pro­jet de Baby­Keep­er comme un pre­mier court-métrage de démonstration. 

“ Nous pensons avoir quelque chose à apporter à cette industrie en tant qu’ingénieurs versés dans la technologie et les sciences ”

Ce court-métrage est ain­si pen­sé comme un trem­plin devant nous per­me­t­tre de mon­tr­er la force de notre groupe ini­tié par une majorité de poly­tech­ni­ciens, et désor­mais enrichi par un archi­tecte, un mon­teur vidéo, un musi­cien et un scé­nar­iste. Des pas­sion­nés et amis qui nous rejoignent dans cette aven­ture, con­va­in­cus de la sin­gu­lar­ité de Persistance. 

En effet, le ciné­ma est un art tech­nique et plus que dépen­dant des avancées tech­nologiques et sci­en­tifiques. Fait trop sou­vent oublié en France, nous pen­sons sincère­ment avoir quelque chose à apporter à cette indus­trie en tant qu’ingénieurs ver­sés dans la tech­nolo­gie et les sciences. 

Notre but n’est donc pas tant de devenir des tech­ni­ciens du ciné­ma mais bien plus d’apporter ce qui fait l’identité de notre for­ma­tion, entre pluridis­ci­pli­nar­ité et haut niveau mathématique. 

LUMIÈRE ET MÉLIÈS VERSION 4.0


Adrien Djer­bet­ian (2013) et Antoine Devul­der (2013) sur le tour­nage du Flam­beau avec l’ENS Louis-Lumière.

Notre volon­té annon­cée est de pro­duire et de réalis­er des films de genre comme l’horreur, la sci­ence-fic­tion ou encore l’aventure. Cepen­dant, on remar­que en France que le pub­lic cinéphile con­somme autant de films améri­cains que français. 

Et quand les films améri­cains les plus con­som­més sont Titan­ic ou Avatar, c’est la comédie qui reste le genre dom­i­nant de la pro­duc­tion française depuis une ving­taine d’années. En sachant que plusieurs grands noms de l’animation sont des Français émi­grés aux États-Unis pour la seule rai­son qu’il n’y a pas de pro­jets pou­vant se faire au pays de Méliès, on peut alors penser qu’il y a une place pour un autre ciné­ma dans notre pays. 

Ain­si, de ce dou­ble con­stat que le ciné­ma est un art tech­nique et tech­nologique et que la France a les moyens d’étendre son ciné­ma à des gen­res jusqu’alors exclu­sive­ment pro­duits par les États-Unis, nous comp­tons nous inté­gr­er dans ce monde et enfin porter la force des images dans notre pays au niveau qu’on lui con­naît à l’international.

C’est pourquoi, notre vision à long terme part d’une volon­té de per­sis­ter et de « cass­er la baraque ». Pour apporter à notre pas­sion com­mune du ciné­ma ce qui fait notre force : un esprit d’équipe, un esprit de corps.
 

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Chris­t­ian Gui­t­tet (X 1970)répondre
18 février 2018 à 22 h 38 min

Sous-titrage pour les sourds et les malentendants

Je viens de lire votre arti­cle : votre ini­tia­tive est vrai­ment très intéres­sante. Je suis moi-même pas­sion­né de ciné­ma, sourd suite à un grave acci­dent dont j’ai été vic­time en décem­bre 2003. Je mène un com­bat acharné en faveur du sous-titrage des films en français dans les ciné­mas et viens de pro­duire un clip de 2 min­utes 30, avec Paul Vec­chiali (X 1953). 

Pour en savoir plus, vous pou­vez con­sul­ter notre site Inter­net ou relire mon inter­view de Paul dans le numéro d’oc­to­bre 2017 de La Jaune et la Rouge. 

Une façon de vous faire con­naître serait d’in­scrire vos courts-métrages à des Fes­ti­vals. Par exem­ple au Fes­ti­val Inter­na­tion­al de Créa­tiv­ité Audio­vi­suelle (FICA), qui aura lieu début juin à Cannes. Si ça vous intéresse, vous avez jusqu’au 15 mars pour vous inscrire. http://cannes4c.com/?page_id=198

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