De la défense à la sécurité : une vision industrielle

Dossier : La DéfenseMagazine N°639 Novembre 2008
Par Denis RANQUE (70)

Phénomène glob­al et mul­ti­forme touchant toutes les dimen­sions de la vie économique, sociale et poli­tique des sociétés con­tem­po­raines, la mon­di­al­i­sa­tion se car­ac­térise d’abord par le for­mi­da­ble essor des flux de per­son­nes, de biens, de cap­i­taux et de don­nées par-delà les fron­tières des États.

Aéro­nau­tique et dualité
Face à une clien­tèle de plus en plus exigeante, il est indis­pens­able de dis­pos­er d’atouts excep­tion­nels, à com­mencer par l’approche duale, depuis les fonc­tions et pro­duits com­muns des­tinés aux avions civils et mil­i­taires jusqu’aux tech­nolo­gies et exper­tis­es de ses équipes.
Par exem­ple, l’expérience de la con­duite du développe­ment des grands sys­tèmes logi­ciels com­plex­es, acquise dans des pro­grammes mil­i­taires, se décline naturelle­ment dans le domaine civ­il sur les sys­tèmes de ges­tion de vol de l’avion (Flight Man­age­ment Sys­tem) ou de mul­ti­mé­dias de bord des­tinés aux pas­sagers (In Flight Entertainment).

La sécu­rité est un enjeu transnational

Le pro­grès tech­nique joue un rôle déter­mi­nant dans cet essor. Il per­met le développe­ment rapi­de des infra­struc­tures indis­pens­ables à la mon­di­al­i­sa­tion : moyens de com­mu­ni­ca­tion et sys­tèmes d’in­for­ma­tion qui ser­vent de sup­port aux flux de cap­i­taux et de don­nées ; réseaux de trans­port aériens, mar­itimes et ter­restres indis­pens­ables à la mobil­ité des per­son­nes et des biens ; réseaux d’én­ergie per­me­t­tant une ren­con­tre de l’of­fre et de la demande d’énergie.

La mon­di­al­i­sa­tion offre d’abord des lib­ertés nou­velles aux indi­vidus : liber­té de cir­culer, d’in­ve­stir, d’échang­er des idées… Mais elle offre aus­si des oppor­tu­nités nou­velles à ceux qui veu­lent désta­bilis­er nos sociétés pour des motifs crim­inels ou politiques. 


Un cen­tre opéra­tionnel Thales Bat­tle­space Transformation.

Les groupes visant l’ac­cu­mu­la­tion de prof­its illé­gaux (grand ban­ditisme, mafias, nar­co­traf­ic) ou la désta­bil­i­sa­tion de l’or­dre poli­tique au sein d’un ou de plusieurs États don­nés (ter­ror­isme, séparatisme, fon­da­men­tal­isme religieux) béné­fi­cient eux aus­si des lib­ertés nou­velles de la mon­di­al­i­sa­tion qui décu­plent leurs pos­si­bil­ités de com­mu­ni­quer et favorisent leur accès à des équipements, à des savoirs ou à des tech­nolo­gies autre­fois pro­tégés der­rière les fron­tières éta­tiques ; et ils y puisent de nou­velles pos­si­bil­ités d’ac­tion. Ain­si quel serait, par exem­ple, l’im­pact sur l’é­conomie mon­di­ale d’une attaque cyberné­tique de grande ampleur con­tre le sys­tème financier mondial ?

Dans ce con­texte, les États ne peu­vent plus s’abrit­er der­rière leurs fron­tières géo­graphiques pour pro­téger leurs pop­u­la­tions, avec la police pour assur­er la sécu­rité à l’in­térieur et l’ar­mée pour pro­téger les fron­tières. La sécu­rité des sociétés et des per­son­nes est un enjeu pro­fondé­ment transna­tion­al, qui exige des États qu’ils déploient des moyens d’ac­tion nou­veaux, par-delà les fron­tières et en coopéra­tion avec leurs parte­naires. Ces moyens d’ac­tion doivent tir­er le meilleur par­ti du pro­grès tech­nologique, tout en restant com­pat­i­bles, dans les sociétés démoc­ra­tiques, avec le respect des droits et lib­ertés du citoyen. 

Un continuum défense-sécurité

Dans ce con­texte, la sépa­ra­tion entre poli­tique de sécu­rité et poli­tique de défense tend à s’estom­per au prof­it d’une vision d’ensem­ble des men­aces de toute nature et des répons­es qu’il est pos­si­ble d’y apporter. Le voca­ble sécu­rité est à pren­dre ici dans un sens très général, englobant aus­si bien la prise en compte des men­aces à car­ac­tère inten­tion­nel que celle des risques de toute nature.


Radar pour le con­trôle et la ges­tion du traf­ic aérien.

Seasame : la mer sous surveillance
Sécu­rité de la nav­i­ga­tion, répres­sion de la pira­terie, con­trôle de la pol­lu­tion, lutte con­tre la pêche illé­gale, les trafics en tous gen­res et l’im­mi­gra­tion illé­gale, préven­tion et ges­tion des cat­a­stro­phes naturelles, pro­tec­tion des ports, telle est l’am­bi­tion de la feuille de route du pro­jet Seasame, fruit du pro­to­cole d’ac­cord signé entre Thales et Fin­mec­ca­ni­ca afin de pro­pos­er, dévelop­per et met­tre en oeu­vre un pro­jet inté­gré de sûreté et de sécu­rité pour les zones mar­itimes européennes. Seasame est une ini­tia­tive des­tinée à fédér­er de mul­ti­ples sys­tèmes de sur­veil­lance mar­itime en Europe, encore très nationaux, qui cou­vrent tout à la fois la pro­tec­tion de l’en­vi­ron­nement, la sécu­rité et la sûreté. Cette propo­si­tion vise à créer le cadre du déploiement con­cret de la poli­tique mar­itime européenne adop­tée fin 2007 par la Com­mis­sion européenne.

Moyens mil­i­taires et civils sont employés conjointement

Le con­stat est partout fait que, dans un monde ouvert, la préser­va­tion de la sécu­rité nationale com­mence, en amont de toute réponse de nature mil­i­taire, par la capac­ité de pro­tec­tion des grandes infra­struc­tures dev­enues cri­tiques pour l’ex­er­ci­ce par chaque citoyen de ses lib­ertés fon­da­men­tales : liber­té de voy­ager (trans­port aérien et fer­rovi­aire), liber­té de com­mu­ni­quer (Inter­net), liber­té d’in­ve­stir et d’en­tre­pren­dre (sécu­rité du sys­tème financier), accès à l’én­ergie. Et cette capac­ité néces­site de dot­er les pou­voirs publics des moyens adap­tés de sur­veil­lance, de con­trôle et d’ob­ser­va­tion de manière à prévenir autant que pos­si­ble les attaques. À cette con­ti­nu­ité des men­aces fait écho une con­ti­nu­ité opéra­tionnelle qui des­sine une zone grise où les moyens mil­i­taires et civils sont employés con­join­te­ment, où des moyens mil­i­taires peu­vent servir à des fins civiles et des moyens civils à des fins mil­i­taires. Après la réori­en­ta­tion de la poli­tique de sécu­rité améri­caine au lende­main du 11 sep­tem­bre 2001, ce con­stat est au cœur des straté­gies de sécu­rité nationale récem­ment adop­tées par la France (Livre blanc ” Défense et Sécu­rité nationale ”) et par le Royaume-Uni.


Cock­pit de dernière généra­tion à la tech­nolo­gie duale.

Thales : une offre inté­grée pour répon­dre aux défis de la sécu­rité globale
Thales est l’un des lead­ers mon­di­aux de la sécu­rité des sys­tèmes d’in­for­ma­tion et de com­mu­ni­ca­tion pour la défense, les admin­is­tra­tions (gou­verne­ment), les opéra­teurs d’in­fra­struc­tures vitales, les ban­ques et les insti­tu­tions finan­cières. Thales sécurise, par exem­ple, les trans­ac­tions de forte valeur ou la pré­pa­ra­tion des don­nées pour l’émis­sion de cartes ban­caires ou d’i­den­tité, et offre des solu­tions avancées d’au­then­tifi­ca­tion forte pour les ban­ques ou les appli­ca­tions d’ad­min­is­tra­tion élec­tron­ique. Plus de la moitié des ban­ques dans le monde ain­si que la majorité des places bour­sières utilisent la tech­nolo­gie de Thales, qui pro­pose égale­ment des solu­tions d’héberge­ment et d’in­fogérance de ces sys­tèmes. Thales pour­suit une stratégie d’ap­proche duale.
L’ac­qui­si­tion d’ac­tiv­ités auprès d’Al­ca­tel-Lucent dans les domaines du trans­port, de la sécu­rité et de l’e­space par­ticipe de cette logique.

Solutions globales et technologies duales

Face à cette muta­tion pro­fonde et durable des enjeux de défense et de sécu­rité, les États et leurs parte­naires (pou­voirs locaux, opéra­teurs d’in­fra­struc­tures) rechercheront de plus en plus des solu­tions de sécu­rité. C’est pourquoi les entre­pris­es lead­ers du marché ont choisi de se dévelop­per dans les deux domaines de la défense et de la sécu­rité, pour béné­fici­er et faire béné­fici­er leurs clients de la dual­ité des tech­nolo­gies et des solu­tions développées.

Ce choix repose sur la con­vic­tion que l’ac­tion des pou­voirs publics et des opéra­teurs d’in­fra­struc­tures cri­tiques dans le domaine civ­il repose sur un socle dual de tech­nolo­gies et de savoir-faire qui ont déjà béné­fi­cié d’in­vestisse­ments impor­tants dans le domaine mil­i­taire et qui peu­vent être déclinés dans le domaine civil.

On peut citer par­mi les com­posantes majeures de ce socle :

— les tech­niques de détec­tion et d’i­den­ti­fi­ca­tion de men­aces et d’anomalies ;
— l’in­té­gra­tion de sys­tèmes complexes ;
— la capac­ité de traite­ment de l’in­for­ma­tion en temps réel ;
— l’ex­trac­tion d’in­for­ma­tions per­ti­nentes dans les très grandes bases de données ;
— les sys­tèmes d’aide à la décision ;
— les sys­tèmes de com­mu­ni­ca­tion sécurisés.

Les défis de la sécu­rité nationale et transna­tionale ne peu­vent trou­ver de répons­es qu’auprès de groupes indus­triels experts en inté­gra­tion de sys­tèmes et ayant la dou­ble com­pé­tence des sys­tèmes civils et mil­i­taires. Ils sont les mieux à même d’ap­porter des répons­es adap­tées aux défis de la sécu­rité nationale. Faire vivre cette dual­ité doit être un souci per­ma­nent de ces groupes, qui s’as­surent que les out­ils de développe­ment, les tech­nolo­gies et les com­pé­tences cir­cu­lent, pour tir­er le meilleur par­ti pos­si­ble de leurs per­for­mances au ser­vice de la sécu­rité glob­ale de leurs clients.

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