Paris XIIIe arrondissement, la caserne Lourcine après la guerre.

Contribution à l’histoire de l’Ecole polytechnique pendant l’occupation. Les promotions 1942–1943 A, B et C

Dossier : Libres proposMagazine N°567 Septembre 2001Par Gérard BRUNSCHWIG (43)

Bien que l’his­toire de ces pro­mo­tions ait été évo­quée, notam­ment dans le roman de Philippe Saint-Gil (Gillet) pub­lié en feuil­leton dans plusieurs numéros suc­ces­sifs de La Jaune et la Rouge (qui sus­ci­ta quelques let­tres, dont celle de François du Cas­tel), et (briève­ment) dans l’ex­po­si­tion ” Des poly­tech­ni­ciens dans la Résis­tance “, il ne sem­ble pas qu’elle ait don­né lieu jusqu’à ce jour à une présen­ta­tion d’ensem­ble autre que celle qui fig­ure dans l’ou­vrage de J.-P. Cal­lot (His­toire et prospec­tive de l’É­cole poly­tech­nique, réédi­tion en 1993 par Lavauzelle, avec mise à jour, de son His­toire de l’É­cole poly­tech­nique parue en 1958 chez Stock) ; une par­tie du chapitre ” Le morne exil de Lyon ” lui est con­sacrée. L’ar­ti­cle de Vin­cent Guigueno paru en 1998 dans la revue Vingtième Siè­cle s’ar­rête à la pro­mo­tion 1941 et ne con­cerne que l’aspect par­ti­c­uli­er des élèves ” bis “. Quant aux Mémoires de Jean-Jacques Ser­van-Schreiber, ils com­por­tent pas mal d’erreurs.

Reçu au con­cours de 1945 que j’avais pré­paré au lycée Jacques Decour (Paris) à mon retour, en novem­bre 1944, du 11e BCA (Front des Alpes) où j’avais été affec­té après un séjour de huit mois au maquis du Gré­si­vau­dan (AS, Com­pag­nie Bernard), j’ai été reclassé dans la pro­mo­tion 43 C et j’ai donc fait la ren­trée de 1945 avec cette pro­mo­tion, alors que les 42–43 A et B com­mençaient leur deux­ième année.

Dans ces con­di­tions, la présente note a pour objet de ten­ter, mod­este­ment, de con­tribuer à combler quelques lacunes dans l’his­toire de ces pro­mo­tions de l’époque de l’oc­cu­pa­tion, grâce notam­ment aux archives de l’É­cole que j’ai pu con­sul­ter1.

Bref rappel du contexte

  • Été 1940 : sup­pres­sion du statut mil­i­taire de l’É­cole et rat­tache­ment au secré­tari­at d’É­tat aux Com­mu­ni­ca­tions (dirigé suc­ces­sive­ment par d’an­ciens X : Jean Berth­elot [1932], Robert Gibrat [1922], Jean Bich­e­lonne [1923]). Direc­tion de l’É­cole par un gou­verneur (poste cepen­dant occupé, jusqu’à la nom­i­na­tion en 1943 de René Claudon, par des généraux, Calv­el puis Durand).
    Démé­nage­ment de l’É­cole à Lyon ; ren­trée de novem­bre 1940 (pro­mo­tions 39 et 40 for­mant la 2e divi­sion et pro­mo­tion 38 for­mant la 1re division).
  • Rem­place­ment du ser­vice mil­i­taire par les Chantiers de la jeunesse pour les jeunes hommes de la zone non occupée.
  • Novem­bre 1942 : débar­que­ment allié en Afrique du Nord et occu­pa­tion de la zone sud.
  • Créa­tion en févri­er 1943 du Ser­vice du tra­vail oblig­a­toire (STO).
  • Avril 1943 : retour de l’É­cole à Paris.
  • Sur le plan intérieur, l’in­flu­ence de l’idéolo­gie vichys­soise s’é­tait rapi­de­ment traduite dans la vie quo­ti­di­enne de l’É­cole, qui s’im­prégna de l’e­sprit de la Révo­lu­tion nationale, et notam­ment dans l’im­por­tance con­sid­érable accordée à l’é­d­u­ca­tion physique et à des travaux manuels très élémentaires.
    Mais cela devait aller beau­coup plus loin, comme en témoigne Abel Thomas (pro­mo­tion 1941) qui relate un dis­cours tenu par le com­man­de­ment de l’É­cole devant sa pro­mo­tion en décem­bre 1942, ce dis­cours com­para­it la cat­a­stro­phe que représen­terait la vic­toire de l’URSS ou celle des Anglo-Sax­ons à la seule per­spec­tive sat­is­faisante (à laque­lle la France se devait de con­tribuer) : celle de la vic­toire de l’Allemagne…

Les concours de 1942 et 1943

Les 258 nou­veaux poly­tech­ni­ciens reçus en 1942 (dont 5 provenant du con­cours passé à Alger et 5 du con­cours passé à Casablan­ca) furent tous astreints à incor­po­ra­tion dans les Chantiers de la jeunesse, y com­pris ceux qui résidaient en zone occupée (et qui nor­male­ment n’é­taient pas astreints à cette oblig­a­tion) ; cette déci­sion avait été prise spé­ciale­ment par le haut- com­mis­saire des Chantiers, le général de La Porte du Theil (X 1903) pour met­tre tous les jeunes poly­tech­ni­ciens dans la même situation.

La pro­mo­tion 1943 comp­ta 260 élèves (dont 7 provenant du con­cours passé à Alger). Réu­nie à la pro­mo­tion 1942, l’ensem­ble fut, à la ren­trée de 1943, divisée en trois fractions.

Le STO

La paru­tion de la loi insti­tu­ant le Ser­vice du tra­vail oblig­a­toire avait don­né lieu, avant même le con­cours de 1943, à divers­es négo­ci­a­tions con­cer­nant le sort futur des can­di­dats admis, de même que celui de leurs anciens, qui accom­plis­saient pour le moment leur temps aux Chantiers de la jeunesse.

En ce qui con­cerne ces derniers, il sem­ble que le nou­veau gou­verneur, René Claudon, se fon­dant sur des assur­ances ver­bales, ait pu penser que ” leur présence aux Chantiers con­sti­tu­ait une pro­tec­tion con­tre toute autre affec­ta­tion ” (selon une note qu’il rédi­gea le 4 sep­tem­bre 1944, donc postérieure­ment aux faits). Une let­tre du 4 juin 1943 adressée au cor­re­spon­dant de l’É­cole à Lyon dis­ait même que ” les élèves de la pro­mo­tion 1942, même ceux qui sont nés en 1922, ne par­tiront pas pour l’Alle­magne ; leur ren­trée s’ef­fectuera nor­male­ment en octo­bre 1943. ”

La réal­ité devait démen­tir ces espérances.

Les élèves nés en 1922, au nom­bre de 133, furent en fait envoyés en Alle­magne2, soit à par­tir des Chantiers (pro­mo­tion 1942) soit à par­tir de Paris (pro­mo­tion 1943). Cette frac­tion fut appelée ultérieure­ment la 42–43 C.

Tout ce qu’il fut pos­si­ble d’obtenir pour eux, après l’a­ban­don des espoirs qu’on avait cru fondés, se bor­na à les main­tenir groupés et à les faire affecter à des bureaux d’é­tude de l’in­dus­trie aéro­nau­tique alle­mande, en qual­ité de dessi­na­teurs, dans qua­tre sites dif­férents (Asch­er­sleben, Hal­ber­stadt, Schönebeck et Leopoldshalle).

Les élèves nés en 1921, au nom­bre de 178, (con­sti­tu­ant ce qu’on appela ensuite la 42–43 A), furent soumis ultérieure­ment aux oblig­a­tions du STO, comme les jeunes de leur classe d’âge. Mais les dis­po­si­tions con­cer­nant cette classe d’âge, négo­ciées par Jean Bich­e­lonne, leur évitèrent le départ en Alle­magne. Ils furent affec­tés en France, et pour un cer­tain nom­bre d’en­tre eux, dans des con­di­tions plutôt satisfaisantes.

Les 207 élèves nés en 1923, (con­sti­tu­ant ce qu’on appela la 42–43 B), furent donc les seuls à être présents à l’É­cole, à Paris, durant l’an­née sco­laire 1943–1944.

Il faut soulign­er que cette sub­di­vi­sion en A, B et C rem­plaça en pra­tique pour les élèves l’ap­par­te­nance tra­di­tion­nelle en pro­mo­tions d’une même année d’en­trée à l’É­cole : elle est d’ailleurs men­tion­née dans l’annuaire.

Participation à la Libération

Le débar­que­ment du 6 juin 1944 eut comme con­séquence sec­ondaire la sup­pres­sion du con­cours de 1944 (il fut reporté et eut lieu en jan­vi­er 1945).

La libéra­tion de Paris inter­vint alors que les élèves (42–43 B), qui avaient ter­miné leurs exa­m­ens généraux de pre­mière année le 14 août, étaient en vacances… Plusieurs rejoignirent les Forces français­es de l’in­térieur (FFI), tan­dis que d’autres s’en­gagèrent dans la 2e DB de Leclerc ou dans la Ire armée de De Lat­tre de Tassigny.

Il en fut de même pour une par­tie des élèves de 42–43 A, libérés du STO en France, mais qui, nous le rap­pelons, n’avaient pas encore com­mencé leurs études.

Les uns et les autres furent rap­pelés par l’É­cole, qui avait retrou­vé son statut mil­i­taire, à l’au­tomne 1944, pour con­tin­uer (B) ou com­mencer (A) leurs études. Mais leur cas devait être exam­iné par une ” com­mis­sion d’en­quête sur les éventuelles par­tic­i­pa­tions des écoles de Saint-Cyr et de Poly­tech­nique à des opéra­tions en faveur des armées et des ser­vices d’oc­cu­pa­tion, ou de com­plic­ités d’ac­tions présen­tant le car­ac­tère de crimes de guerre “, dont la créa­tion avait été décidée par le général de Gaulle (arrêté du 26 octo­bre 1944). Cette com­mis­sion était com­posée du général Bro­card assisté du lieu­tenant Bataille (pour Saint-Cyr) et du général Brisac assisté du lieu­tenant Abel Thomas (pour Polytechnique).


Paris XIIIe arrondisse­ment, la caserne Lourcine après la guerre © COLLECTION VIOLLET

Il se pro­duisit pour les 42–43 B un malen­ten­du, assez bizarrement symétrique de ce qui s’é­tait passé pour le départ en Alle­magne des 42–43 C : des notes offi­cielles d’oc­to­bre 1944 lais­saient enten­dre que l’ensem­ble de ces élèves ayant déjà effec­tué une année d’é­tudes ” ne ren­treront pas en sec­onde année et seront dirigés sur le cen­tre d’in­struc­tion de Cherchell “.

Mais cette affec­ta­tion fut en fait sub­or­don­née à l’ex­a­m­en par la com­mis­sion d’en­quête de ” leur sit­u­a­tion du point de vue de la Résis­tance “. Celle-ci, qui siégea à Paris du 3 au 10 novem­bre, puis à Mar­seille du 14 au 21 novem­bre, reçut indi­vidu­elle­ment les élèves, exam­i­na les titres de résis­tance que cer­tains purent pro­duire (con­cer­nant leur activ­ité après le 15 août 1944, sem­ble-t-il…), et le 29 novem­bre fit con­naître sa déci­sion : 53 furent admis à l’É­cole d’aspi­rants de Cherchell, con­tre 99 qui ne le furent pas et qui, dans un pre­mier temps, furent main­tenus dans leurs corps (s’ils s’é­taient engagés) ou ” ren­voyés dans leurs foy­ers “, con­ser­vant cepen­dant la pos­si­bil­ité de s’en­gager dans les troupes sta­tion­nées en Afrique du Nord ou dans les divi­sions colo­niales d’Ex­trême-Ori­ent, (ce qui exclu­ait la 2e DB et la Ire armée…).

Cette dernière exclu­sion fut cepen­dant annulée peu après et ces élèves furent invités à souscrire un engage­ment et par­ticipèrent aux com­bats en Alle­magne, après une for­ma­tion rapi­de dans les cen­tres d’in­struc­tion de la Ire armée.

Le cas des 42–43 A (qui avaient fait leur ren­trée à l’É­cole à l’au­tomne 1944) fut exam­iné par la même com­mis­sion en jan­vi­er 1945, selon les mêmes principes de base, mais sa déci­sion se traduisit unique­ment par un retard d’a­vance­ment de six mois d’une par­tie des élèves par rap­port à l’autre. De plus, les élèves de la frac­tion ” pénal­isée ” ne devaient être nom­més sous-lieu­tenants qu’à leur sor­tie de l’É­cole (août 1946).

Cepen­dant une note (con­sacrée aux 42–43 C), non datée, mais vraisem­blable­ment rédigée fin 1945 ou début 1946, fait allu­sion à un pro­jet en cours d’ex­a­m­en au cab­i­net du Min­istre, ten­dant à nom­mer effec­tive­ment les élèves de la frac­tion pénal­isée des A au grade d’aspi­rant à la date où ils devaient théorique­ment être nom­més sous-lieu­tenants (soit le 1er avril 1945 pour la pro­mo­tion 1942 et le 1er avril 1946 pour la pro­mo­tion 1943).

L’après-Libération

L’ensem­ble des 42–43 A et 42–43 B devait donc entr­er à l’É­cole à l’au­tomne 1945, pour accom­plir leur sec­onde année d’études.

Le retour en 1945 d’Alle­magne des 42–43 C leur per­mit d’en­tr­er à l’É­cole à la même date, pour leur pre­mière année d’é­tudes. Mais leur sit­u­a­tion posa un prob­lème : leur sort avait déjà été évo­qué dès mai 1945, avant même qu’à leur retour d’Alle­magne ils aient été détachés pro­vi­soire­ment au min­istère de l’Air ; la direc­tion du Génie pro­po­sait alors de les envoy­er en août dans les cen­tres d’in­struc­tion de l’Ar­tillerie et du Génie de la 1re armée pour y recevoir une for­ma­tion mil­i­taire de base, avant leur entrée à l’É­cole en octo­bre, et même de les nom­mer aspi­rants avec prise de rang du 15 avril 1944.

Ces propo­si­tions de nom­i­na­tion ne furent pas approu­vées par l’é­tat-major de l’ar­mée, qui entendait faire ” soumet­tre le cas de cha­cun des intéressés à la com­mis­sion d’en­quête pour les écoles mil­i­taires, en prenant pour les poly­tech­ni­ciens déportés3 les mêmes mesures que celles déjà pris­es à l’é­gard des saint-cyriens dans la même situation. ”

Saisi d’une demande de pré­ci­sions de la direc­tion du Génie sur les con­di­tions d’en­voi des élèves en Alle­magne, le général Decharme, com­man­dant l’É­cole, rap­pela le 7 juil­let 1945 la promesse non tenue du min­istre des Com­mu­ni­ca­tions de 1943 de laiss­er ces élèves en France, souligna qu’au­cun n’é­tait par­ti volon­taire­ment, que tous avaient été con­stam­ment trompés sur leur sort, qu’ils s’é­taient très bien con­duits en Alle­magne (comme en fai­saient foi plusieurs témoignages de déportés poli­tiques) et con­clut qu’il était inutile de les faire pass­er indi­vidu­elle­ment devant une com­mis­sion d’enquête.

Ces argu­ments et cette con­clu­sion furent repris par la direc­tion du Génie, qui pro­posa de soumet­tre dans leur ensem­ble la sit­u­a­tion mil­i­taire des élèves, en vue d’une déci­sion générale à leur égard, qui con­cern­erait essen­tielle­ment leur grade et leur anci­en­neté : il était pro­posé de les nom­mer aspi­rants d’ac­tive, puis en 1947, date de leur sor­tie, sous-lieu­tenants, pour pren­dre rang du 1er octo­bre 1944 (pro­mo­tion 1942) ou du 1er octo­bre 1945 (pro­mo­tion 1943).

Les élèves avaient donc fait leur ren­trée en octo­bre 1945 après avoir été pro­vi­soire­ment affec­tés au min­istère de l’Air, pour traduire de l’alle­mand divers doc­u­ments et avoir effec­tué ensuite un stage mil­i­taire de six semaines à Saint-Goar pour le Génie et Idar-Ober­stein pour l’Ar­tillerie au terme duquel ils furent nom­més sous-officiers. À la fin de 1945 ils furent invités à rédi­ger cha­cun un compte ren­du de leur séjour au STO, en exé­cu­tion d’in­struc­tions du 22 décembre.

Trans­met­tant le 17 jan­vi­er 1946 ces dossiers à la direc­tion du Génie, le général Brisac, qui avait suc­cédé au général Decharme au com­man­de­ment de l’É­cole, ajou­ta ses pro­pres com­men­taires. ” De la lec­ture de ces dossiers se dégage l’im­pres­sion d’im­puis­sance découragée de ces jeunes gens devant la con­ju­ra­tion des événe­ments et des hommes. ”

Il souligna qu’au­cun d’eux n’é­tait par­ti volon­taire­ment, et évo­qua ” l’ha­bile chan­tage exer­cé par cer­tains cadres de l’É­cole “, don­nant comme raisons de par­tir en Alle­magne le fait de ne pas laiss­er à la classe ouvrière seule le poids du STO, le souci d’éviter des repré­sailles con­tre l’É­cole ou les familles, la pos­si­bil­ité de main­tenir à l’É­cole la pro­mo­tion 1942 et d’y faire entr­er les plus jeunes de la pro­mo­tion 1942.

Le général Brisac rap­pela égale­ment l’at­ti­tude digne et sou­vent courageuse de tous les élèves en Alle­magne et en par­ti­c­uli­er celle de Robert Deneri qui paya cette atti­tude de cinq mois de prison et de neuf mois de camp de con­cen­tra­tion à Flossen­burg. À ce sujet, les élèves, tout en récla­mant un sort com­mun, demandèrent cepen­dant un traite­ment priv­ilégié pour Deneri.

Conclusion

Ce qui précède con­cerne la très grande majorité des élèves de pro­mo­tions 42–43 A, B et C. Mais il y eut naturelle­ment des excep­tions indi­vidu­elles, com­pa­ra­bles à celles de la pro­mo­tion 19414.

Cer­tains d’en­tre eux gag­nèrent des maquis ou réseaux, d’autres l’Afrique du Nord par l’Espagne.

Le retour à Paris de l’É­cole rendait cepen­dant dif­fi­ciles, voire impos­si­bles, de tels départs. Il y eut en 1943–1944 for­ma­tion, à l’in­térieur de l’É­cole, d’un petit groupe clan­des­tin de résis­tance, en liai­son avec l’Or­gan­i­sa­tion civile et mil­i­taire (OCM), mais son activ­ité fut très réduite.

À la libéra­tion de Paris, il y eut des engage­ments d’élèves des pro­mo­tions 42–43 A et B dans les Forces français­es de l’in­térieur, ain­si que dans la Ire armée et la 2e DB.

Une quin­zaine d’élèves de la pro­mo­tion 42–43 C a réus­si à échap­per au départ en Alle­magne. Évo­quant leur cas dans la note déjà citée, le général Brisac attribua cette sit­u­a­tion au fait qu’ils étaient ” plus énergiques, ou plus favorisés par les rela­tions, les con­seils ou la chance “, ajoutant qu’en ce qui con­cerne les autres, ” il n’en est pas moins vrai qu’on se trou­ve en présence d’une col­lec­tiv­ité de jeunes gens égarés par la con­fi­ance trop naturelle qu’ils ont accordée à leurs chefs.

On ne saurait mieux dire, et on con­clu­ra sur cette appré­ci­a­tion, qui sem­ble val­oir pour la total­ité de la péri­ode som­bre de l’occupation.

_______________________________
1. J’ai demandé aux caissiers des pro­mo­tions 42–43 A, B et C leur avis sur cette note ; plusieurs m’ont pré­cisé cer­tains faits et rec­ti­fié quelques erreurs, ce dont je les remer­cie ; tous m’ont don­né leur accord, sauf l’un d’eux, peu favor­able à une pub­li­ca­tion et pré­con­isant un sim­ple dépôt aux archives. Il m’a cepen­dant paru pos­si­ble de ne pas pren­dre en compte cette restric­tion et de procéder à cette pub­li­ca­tion, en présen­tant mes excus­es pour les erreurs éventuelles qui subsisteraient.
2. Excep­tion faite d’une quin­zaine d’en­tre eux.
3. La ter­mi­nolo­gie de l’époque appelait les astreints au STO des déportés du travail.
4. Plusieurs groupes d’élèves avaient quit­té clan­des­tine­ment l’É­cole fin 1942 et début 1943 pour gag­n­er l’Es­pagne, puis l’Afrique du Nord et s’y engager dans divers­es for­ma­tions mil­i­taires et pren­dre leur part aux com­bats qui ont con­duit à la libéra­tion de la France.

3 Commentaires

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Georges Delan­noyrépondre
3 octobre 2011 à 23 h 16 min

pro­mo­tion 42
X42, Georges Edouard Delan­noy né en 05.1922, m’a con­fié qu’à la libéra­tion de son camp par les Améri­cains en mai 45, il lui fut proosé de con­tin­uer la guerre avec eux en tant qu’of­fici­er de ren­seigne­ment. Par­lant couram­ment l’alle­mand, il fut incor­poré, avec une poignée de ses cama­rades X, dans une unité améri­caine de ren­seigne­ments et par­tic­i­pa à de nom­breux con­tre-inter­roga­toires de respon­s­ables nazis pour leur faire avouer des infor­ma­tions impor­tantes pour la bonne con­tin­u­a­tion de la pro­gres­sion des troupes alliées. Peu avant la date de la ren­trée à l’Ecole Poly­techique pour y accom­plir son cur­sus de 2° année, il deman­da à l’of­fici­er améri­cain en respon­s­abil­ité de ses activ­ités de pou­voir ren­tr­er à Paris avec ses cama­rades X. Cette requête fut accep­tée, mais le gradé améri­cain leur sig­nifia qu’il ne pou­vait leur fournir de moyen de trans­port pour leur rap­a­triement. Georges Delan­noy lui pré­cisa qu’il en fai­sait son affaire et lui deman­da de lui fournir une arme pour assur­er sa sécu­rité et celle de ses com­pagnons. L’of­fici­er ne pou­vant obtenir cette dernière pour des recrues étrangères, lui offrit chevaleresque­ment la sienne. S’en­suiv­it alors un long chemin d’er­rance vers la France dont la ligne droite fut sys­té­ma­tique­ment ban­nie. Après de nom­breux jours de route dans une Alle­magne en guerre, il trou­vèrent dans une gare alle­mande un train san­i­taire spé­cial qui par­tait pour l’i­tal­ie afin d’y rap­a­tri­er des mil­i­taires ital­iens. Georges Delan­noy s’adres­sa à l’of­fici­er ital­ien le plus gradé pour lui deman­der l’au­tori­sa­tion d’embarquer avec ses cama­rades. L’of­fici­er ital­ien lui dit tout net que cela était impos­si­ble et que le wag­on dans leuels il se tenait était réservé aux seuls officiers ital­iens. Georges Delan­noy sor­ti alors son révolver et tira une balle dans le toit du wag­on, ce qui eut pour effet que l’I­tal­ien lui assura que “dans ces con­di­tions”, ils étaient bien oblig­és de les accepter par­mi eux et de partager le mod­este con­fort de cette voiture de train. les X descendirent lors de l’ar­rêt en gare de Lyon et regag­nèrent alors paris rapi­de­ment. Georges Lionel Delan­noy script­sit — P.S. Georges Edouard Delan­noy m’a con­fir­mé que son départ en Alle­magne était en par­tie dû à une poli­tique pro alle­mande de cer­tains dirigeants de l’Ecole, mais qu’il ne voudrait jamais rien dire, ni entre­pren­dre de son vivant pour ne pas porter le moin­dre tort à la répu­ta­tion son Ecole et/ou à un X. Georges Edouard Delan­noy est décédé le 19.09.2011.

Houëlrépondre
20 avril 2018 à 16 h 55 min

Ren­seigne­ment sur un aïeul 

Bon­jour, je suis à la recherche d’éléments (pho­togra­phies, arti­cles, dis­cours, témoignages,…) au sujet du colonel Louis Houël, dont je retrace le par­cours à par­tir d’une cor­re­spon­dance fournie. 

X22, il avait choisi l’artillerie. S’étant trou­vé affec­té à la liai­son fran­co-Bri­tan­nique en 1940, il a vécu de près l’invasion Alle­mande, puis s’est évadé en 1943 pour rejoin­dre l’Afrique du Nord. Sa remon­tée vers l’Allemagne s’est arrêtée en jan­vi­er 1945, alors qu’il était nom­mé com­man­dant en sec­ond de l’X.

Je sais qu’il lui a été très dif­fi­cile de quit­ter les com­bats, et qu’il a vécu cette nom­i­na­tion comme une épreuve, mais j’aimerais en savoir plus sur son pas­sage au sein de l’Ecole. Cer­tains « antiques » pour­raient-ils me renseigner ? 

Mer­ci d’avance Guil­laume Houël X05

MPHLErépondre
29 décembre 2020 à 19 h 29 min

J’ai lu avec grand intérêt votre arti­cle sur cette péri­ode trou­ble et som­bre de l’oc­cu­pa­tion alle­mande de 1942–43 et sur les événe­ments au sein de l’école.
J’ai eu l’oc­ca­sion de tra­vailler avec un X d’une des pro­mos de cette péri­ode qui est devenu un ami intime. Il m’a expliqué être par­ti volon­taire­ment au STO en Alle­magne. Il ne voulait s’é­ten­dre sur les raisons de cette déci­sion, mais sans doute comme vous l’écrivez cela est du au fait “que tous avaient été con­stam­ment trompés sur leur sort”, voire même une con­séquence de “l’ha­bile chan­tage exer­cé par cer­tains cadres de l’É­cole”, et “l’in­flu­ence de l’idéolo­gie vichyssoise”…
Néan­moins, il sem­blait que les sou­venirs de cette péri­ode du sto lui pesait encore lour­de­ment près de 70 ans plus tard, d’au­tant plus qu’il avait été “volon­taire” pour par­tir tra­vailler en Alle­magne sur des pro­jets de pointe de l’ar­mée allemande !
La guerre finie, il a pu par­tir aux USA quelques années, puis revenir en France faire une bril­lante car­rière. (sans doute ses con­nais­sances acquis­es sur les pro­jets du STO lui ont per­mis cette tran­si­tion pro­fes­sion­nelle d’après-guerre aux USA).
On ne peut juger, c’é­tait une autre époque, et les cir­con­stances d’alors ont fait que cer­tains jeunes élèves con­cernés par les faits (cf. “une col­lec­tiv­ité de jeunes gens égarés par la con­fi­ance trop naturelle qu’ils ont accordée à leurs chefs”) ont fait des choix dont le sou­venir leur a peser longtemps après sur la conscience.
Je ne sais pas si cet ingénieur X est encore vivant, j’ai per­du tout con­tact avec lui. Il aurait aujour­d’hui plus de 95 ans, mais il écrivait beau­coup. Peut être ses mémoires seront-elles publiées.
Cordialement.

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