Bernard Ziegler

Bernard Ziegler (54) homme clé du développement d’Airbus

Dossier : TrajectoiresMagazine N°770 Décembre 2021Par Pierre BAUD (57)

La car­rière de Bernard Ziegler, décédé le 4 mai dernier, lui a valu cet hom­mage d’Air­bus : « Air­bus ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui sans votre engage­ment et les con­tri­bu­tions si nota­bles que vous et votre entourage de pio­nniers avez réal­isées. Vous nous avez don­né, dans tous les sens du terme, notre envol. »

Né en 1933 à Boulogne-sur-Seine, fils d’Hen­ri Ziegler (26), résis­tant de la pre­mière heure et grande fig­ure de l’aéronautique française, Bernard fait sa pré­pa à Ginette. À sa sor­tie de l’X, il intè­gre l’École de l’air, pour devenir pilote de chas­se, et par­ticipe à la guerre d’Algérie sur avion T6. En mis­sion de guerre à basse alti­tude, il s’éjecte de son avion en perdi­tion sous la mitraille du sol et est récupéré in extrem­is par les héli­cop­tères d’appui.

À son retour, il fait Supaéro pour devenir pilote d’essai, suit un stage qui lui per­met de rejoin­dre le Cen­tre d’essais en vol d’Istres où il fait les essais sur de nom­breux pro­to­types : Éten­dard IV M, Jaguar, Mirage IV, Mirage F1, Mirage G8 avion à géométrie vari­able dont il fut le pilote de marque.

L’aventure Airbus

Au lance­ment d’Airbus, Roger Béteille (40), directeur tech­nique, embauche Bernard pour diriger les essais en vol. Son style de man­age­ment fait mer­veille, il implique plus les ingénieurs des bureaux d’études des parte­naires et prend au sérieux leurs avis. La cer­ti­fi­ca­tion du pre­mier bimo­teur gros por­teur européen est obtenue aux dates et bud­get prévus. La con­fi­ance alors établie avec Béteille per­met des déci­sions par­fois révo­lu­tion­naires, comme de cer­ti­fi­er l’A300 en équipage à deux, ce qui fut fait en 1982, mal­gré la forte oppo­si­tion de cer­tains syndicats. 

L’adoption des commandes électriques de vol 

Béteille nom­mé directeur général con­fie alors la direc­tion tech­nique à Bernard. Lorsque est prise la déci­sion de lancer un pro­gramme pour con­cur­rencer le Boe­ing 737 qui, avec dix ans d’avance, avait déjà inondé le marché, il fal­lait par­tir d’une feuille blanche et trou­ver des inno­va­tions dis­rup­tives, mais accept­a­bles par les pilotes. Con­corde ayant ouvert la voie, Bernard défend l’adoption des com­man­des de vol élec­triques sur l’A320, mais en allant plus loin dans le domaine de la sécu­rité. Citons les pro­tec­tions du domaine de vol ; l’introduction du side­stick latéral pour ne pas obstruer la vis­i­bil­ité des paramètres de vol sur la planche de bord des pilotes ; l’adaptation des lois de pilotage à l’aérodynamique des dif­férents types d’Airbus ; et une même philoso­phie des postes d’équipage per­me­t­tant une réduc­tion dras­tique du temps d’entraînement des équipages pour être qual­i­fié, en pas­sant d’un type d’Airbus à un autre.

Aux sug­ges­tions de Bernard, Béteille répondait : « Si vous pensez pou­voir le cer­ti­fi­er dans les temps, allez‑y. » L’A320 n°1 fit son pre­mier vol le 22 févri­er 1987, cer­ti­fié un an plus tard et mis en ser­vice le 18 avril 1988 à la date prévue, sans aucune mod­i­fi­ca­tion majeure aux com­man­des de vol de la famille Airbus. 

Un mot pour dire que Bernard était un amoureux de la mon­tagne et du vol en mon­tagne. Avec son frère Michel, guide de haute mon­tagne, créa­teur d’Air Alpes, un de mes meilleurs sou­venirs fut de faire avec eux la célèbre ran­don­née en peau de phoque Chamonix-Zermatt.


A lire : Air­bus : un for­mi­da­ble mégapro­jet européen dans La Jaune et la Rouge N° 745, Mai 2019

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