L’équipe de Yotta Capital Partners

Yotta Capital Partners : Financer dès aujourd’hui la reconquête industrielle bas carbone de la France

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°788 Octobre 2023
Par Christophe GEGOUT (X96)

Au tra­vers de son activ­ité de finance­ment des PME indus­trielles français, Yot­ta Cap­i­tal Part­ners con­tribue à l’adaptation de notre économie au nou­veau par­a­digme cli­ma­tique et envi­ron­nemen­tale. Au-delà de cette démarche, le fonds d’investissement par­ticipe aus­si la réin­dus­tri­al­i­sa­tion des ter­ri­toires. Christophe Gegout (X96), man­ag­ing part­ners de Yot­ta Cap­i­tal Part­ners, nous en dit plus sur le finance­ment de cette recon­quête indus­trielle bas car­bone qui est au cœur de l’ADN de cette société de ges­tion indépen­dante

Yotta Capital Partners finance les entrepreneurs de la reconquête industrielle bas carbone. Pourquoi ce choix de positionnement ? 

La réin­dus­tri­al­i­sa­tion de notre pays est aujourd’hui une évi­dence pour tous et pour de nom­breuses raisons : 

la ques­tion cli­ma­tique : en pro­duisant plus loin, les entre­pris­es ont générale­ment recours à des éner­gies plus car­bonées qu’en France ou en Europe. En plus, le trans­port et la logis­tique impactent égale­ment à la hausse l’empreinte carbone ; 

la géopoli­tique : les récents événe­ments ont rap­pelé à tous le risque géopoli­tique qui pèse sur une pro­duc­tion délo­cal­isée à l’autre bout du monde ; 

le risque san­i­taire : une pro­duc­tion locale per­met de pro­duire de manière plus sûre ; 

le main­tien des emplois indus­triels et des savoir-faire en France et en Europe.

Yot­ta Cap­i­tal Part­ners a vu le jour en 2018, bien avant la crise de la Covid, la guerre en Ukraine et l’accélération de la lutte con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Dès le départ, nous avons fait le choix fort de nous con­cen­tr­er sur la France, afin de con­tribuer, à notre niveau, à la réin­dus­tri­al­i­sa­tion de notre pays. 

Nous accom­pa­gnons et soutenons les entre­pre­neurs et les PME qui s’engagent dans cette recon­quête indus­trielle bas car­bone en met­tant à leur dis­po­si­tion un sou­tien financier ain­si que du con­seil et un accom­pa­g­ne­ment à forte valeur ajoutée qui leur per­me­t­tent, par ailleurs, d’être plus ambitieux dans leurs pro­jets industriels. 

Sur le marché de l’investissement, comment vous décririez-vous ? 

Yot­ta Cap­i­tal Part­ners est une société de ges­tion indépen­dante détenue par ses trois cofon­da­teurs, Benoît Per­rot, Xavier Her­rmann et moi. Nous avons une approche « hands-on ». Nous par­ticipons active­ment à la gou­ver­nance de l’entreprise, nous con­seil­lons les dirigeants et mobil­isons nos réseaux d’affaires au ser­vice de leurs projets.

Nous faisons par­tie des rares acteurs qui con­cen­trent leur activ­ité sur les PME indus­trielles implan­tées au cœur des ter­ri­toire afin de les aider à dévelop­per leur out­il indus­triel, le ren­dre plus per­for­mant en ter­mes d’émissions de CO₂, mieux adap­té et plus résilient face aux con­traintes cli­ma­tiques. L’ambition est de les inté­gr­er aux chaînes de valeur décar­bonées du futur, en inté­grant four­nisseurs et clients dans notre approche. Nous réal­isons des audits car­bone à l’entrée au cap­i­tal qui nous per­me­t­tent d’élaborer une stratégie de décar­bon­a­tion que nous décli­nons ensuite en un plan de décar­bon­a­tion et un busi­ness plan. En par­al­lèle, nous les aidons à repenser leur mod­èle et leur organ­i­sa­tion : posi­tion­nement sur des pro­duits plus vertueux, adap­ta­tion de leur porte­feuille de pro­duits, refonte de leur poli­tique d’achat, opti­mi­sa­tion de leurs proces­sus industriels…

Notre rémunéra­tion vari­able est con­di­tion­née par rap­port à un indi­ca­teur clé de per­for­mance sur le cli­mat qui vise une réduc­tion de 25 % sur les scopes 1, 2 et 3 tout au long de la durée de vie des fonds. Dans cette démarche, nous embar­quons toute l’entreprise. Nous col­laborons avec le directeur des achats pour revoir les achats en fonc­tion de leur empreinte car­bone. Au sein de Yot­ta Cap­i­tal Part­ners, nous sommes con­va­in­cus que cette démarche est généra­trice de valeur pour toutes les par­ties prenantes.

Et à partir de là, quelle est votre stratégie d’investissement ?

Nous iden­ti­fions les entre­pris­es pour lesquelles les gains de décar­bon­a­tion et une démarche RSE peu­vent libér­er une forte crois­sance. Il s’agit d’industries qui ont de très beaux savoir-faire ain­si que des pro­duits de très grande qual­ité. Même si l’investissement ini­tial reste assez élevé, les entre­pris­es sont aujourd’hui de plus en plus con­scientes des gains et des économies entraînés par la décar­bon­a­tion : réduc­tion des charges, de la con­som­ma­tion énergé­tique, de la matière…

Au-delà, cette stratégie est aus­si un levi­er d’attractivité et de fidéli­sa­tion des tal­ents sur un marché du tra­vail en ten­sion sur de nom­breux métiers, notam­ment techniques.

Notre objec­tif est véri­ta­ble­ment d’inscrire ces entre­pris­es non cotées dans un plan de décar­bon­a­tion à 5 ans avec la cer­ti­tude que cela leur per­me­t­tra de val­oris­er leurs act­ifs et de créer de la valeur. Au sein de Yot­ta Cap­i­tal Part­ners, nous sommes, en effet, con­va­in­cus qu’il est pos­si­ble de créer une rentabil­ité finan­cière et de la valeur sociale en décar­bo­nant les entreprises.

Comment sélectionnez-vous ces entrepreneurs et PME que vous financez et accompagnez ? 

Nous prenons en compte dif­férents critères. Nous éval­u­ons le sérieux et la per­ti­nence du pro­jet ain­si que les ambi­tions busi­ness et cli­ma­tiques. Nous prenons aus­si en compte l’implication et l’engagement des dirigeants, notam­ment sur le plan cli­ma­tique et social. Nous investis­sons en moyenne une dizaine de mil­lions d’euros dans ces entreprises.

Des exemples de participations et d’entreprises que vous accompagnez ? 

Toutes nos pris­es de par­tic­i­pa­tion ont voca­tion à accélér­er la crois­sance et la décar­bon­a­tion des entre­pris­es. Nous avons investi dans la société Eldim, basée à Caen, qui est spé­cial­isée dans les tests de qual­ité des dis­posi­tifs optiques des smart­phones. Depuis notre entrée au cap­i­tal, l’entreprise a dévelop­pé son activ­ité et s’est engagée dans une stratégie de décar­bon­a­tion dans le cadre de laque­lle elle a rem­placé son chauffage au gaz par de la géothermie.

Nous avons aus­si investi dans Recif Tech­nolo­gies, une entre­prise de robo­t­ique pour la micro-élec­tron­ique. C’est un secteur dont nous avons beau­coup enten­du par­ler au cours des derniers mois à cause de la pénurie de com­posants et de la dépen­dance de l’Europe vis-à-vis de l’Asie en matière de semi-con­duc­teurs. Au-delà de la réor­gan­i­sa­tion du cap­i­tal de cette PME occ­i­tane et de son ancrage au cœur de l’industrie mon­di­ale des semi-con­duc­teurs, nous avons con­sid­érable­ment réduit le con­tenu car­bone de ses produits.

Yotta Capital Partners est aussi particulièrement sensible à la question de la réindustrialisation de notre pays. Dans cette démarche, quels sont les freins qui persistent selon vous ? 

À mon sens, le prin­ci­pal frein est psy­chologique. Au-delà d’un manque d’ambition, il y a aus­si l’idée que réin­dus­tri­alis­er notre pays coûte plus cher. En par­al­lèle, en France, nous sommes con­fron­tés à un prob­lème de disponi­bil­ité du fonci­er. S’il y a beau­coup de frich­es indus­trielles dans le pays, leur amé­nage­ment est non seule­ment très coû­teux, mais aus­si à la charge des entre­pre­neurs qui envis­agent de les réamé­nag­er afin d’y implanter leur activ­ité indus­trielle. En par­al­lèle, il y a un enjeu humain. Il est aujourd’hui com­plexe de recruter des ingénieurs et des tech­ni­ciens sur de nom­breux métiers en ten­sion.  

Mal­gré ces con­traintes, pour des raisons géopoli­tiques, cli­ma­tiques et sociales évi­dentes, il nous faut réin­dus­tri­alis­er la France pour dévelop­per notre sou­veraineté indus­trielle, économique et sociale. Au-delà, la France, et plus large­ment l’Europe, ont un rôle à jouer dans le développe­ment d’une indus­trie plus durable qui intè­gre les notions de per­for­mance envi­ron­nemen­tale, d’éco-conception, de bio­di­ver­sité, de con­som­ma­tion raison­née des ressources, notam­ment de l’eau…

Cette réal­ité doit égale­ment con­tribuer à faire évoluer le monde de la finance et de l’investissement. Dans un con­texte de pres­sion régle­men­taire crois­sante, un porte­feuille basé sur des pro­duits tels qu’ils sont conçus et ven­dus en 2023 représente un réel risque d’exposition à des con­traintes plus dures en matière d’empreinte car­bone sur le court et le moyen terme. En France, nous avons la chance d’avoir un écosys­tème favor­able à cette évo­lu­tion. Au cours des dernières années, BpiFrance s’est large­ment engagée, via ses fonds pro­pres et les divers­es aides à l’innovation, en faveur de la mon­tée en puis­sance de nos industries. 

Au-delà, les acteurs de l’enseignement et de la recherche, comme le CEA ou encore le CNRS, peu­vent égale­ment con­tribuer à cet effort afin de don­ner une nou­velle dynamique en matière d’innovation et de val­oris­er nos métiers et nos indus­tries auprès des tal­ents de demain. 

L’engagement de tous est essen­tiel pour créer un écosys­tème vertueux autour des entre­pre­neurs et des PME indus­trielles afin qu’ils puis­sent s’inscrire dans une crois­sance durable et être com­péti­tifs à l’échelle mondiale. 

Sur ces enjeux d’actualité, quelles sont les pistes de réflexion que vous pourriez partager avec nos lecteurs ?

En France où nous avons un des plus impor­tants taux d’épargne en Europe, il me sem­ble néces­saire de lancer une réflex­ion autour du fléchage de l’épargne des Français vers le finance­ment des entre­pre­neurs qui pren­nent des risques, innovent, trans­for­ment notre out­il indus­triel et con­tribuent à la décarbonation ! 

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