Au sein d’Engie, il y a une grande variété et diversité de métiers autour des énergies renouvelables : l’installation de champs éoliens et solaires ; l’exploitation des barrages hydrauliques ; les biogaz et le développement des méthaniseurs ; la production d’hydrogène… Cela devrait contribuer à atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2045

Vers la neutralité carbone dès 2045

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°780 Décembre 2022
Par Didier HOLLEAUX (X79)

Enga­gé depuis plu­sieurs années dans la décar­bo­na­tion et le déve­lop­pe­ment des éner­gies renou­ve­lables, Engie ren­force son enga­ge­ment dans un contexte éner­gé­tique ten­du depuis le début de la guerre en Ukraine. Dans cet entre­tien, Didier Hol­leaux (X79), Direc­teur Géné­ral Adjoint d’Engie, revient sur la stra­té­gie d’Engie et les prin­ci­paux enjeux que le groupe s’est fixé, notam­ment en matière d’énergies renou­ve­lables. Il nous en dit éga­le­ment plus sur les freins qui per­sistent dans le cadre de la décar­bo­na­tion de l’énergie. 

La décarbonation est un enjeu qui mobilise tous les secteurs, dont celui de l’énergie. Dans ce cadre, l’objectif d’Engie est d’atteindre la neutralité carbone à horizon 2045. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

C’est, en effet, un enga­ge­ment fort qu’Engie a pris. Dans cette démarche, nous nous appuyons sur la métho­do­lo­gie inti­tu­lée « Science Based Tar­gets ». Notre objec­tif est ain­si d’atteindre la neu­tra­li­té car­bone sur les scopes 1 et 2 qui recouvrent les consom­ma­tions directes et indi­rectes de l’entreprise, mais aus­si sur le scope 3, qui concerne les opé­ra­tions dans les­quelles nous sommes mino­ri­taires, les pro­duits que nous ven­dons à des tiers, soit un volet très impor­tant pour Engie dont un des métiers est de vendre du gaz aux par­ti­cu­liers… Étant pro­duc­teur d’énergie, cela implique aus­si que nous sor­tions de la pro­duc­tion d’électricité à par­tir du char­bon. Ce sera le cas en Europe dès 2025 et à par­tir de 2027 pour le reste du monde. D’ici 2045, le conte­nu éner­gé­tique des kilo­watt­heures élec­triques que nous pro­dui­sons devra être neutre en car­bone. Pour les pro­duits que nous com­mer­cia­li­sons, nous visons le net zéro à hori­zon 2045. À par­tir de cette date, nous ne ven­drons, en pra­tique, que du gaz renou­ve­lable (bio­mé­thane pro­duit par métha­ni­sa­tion des déchets agri­coles, bio­gaz pro­duit par pyro­ga­zéi­fi­ca­tion des déchets de bois ou plas­tiques, hydro­gène renou­ve­lable…) ou, dans cer­tains cas, du gaz avec cap­ture et sto­ckage du CO2 ou du car­bone noir. 

Cet engagement implique des investissements et des actions ambitieuses. Qu’en est il ?

En tant que pro­duc­teur d’électricité, nous avons donc l’ambition de sor­tir de la pro­duc­tion d’électricité à par­tir des res­sources fos­siles (gaz, char­bon). En contre­par­tie, nous allons aug­men­ter consi­dé­ra­ble­ment notre pro­duc­tion d’électricité renou­ve­lable. Concrè­te­ment, nous allons pas­ser d’un rythme actuel d’installation de pro­duc­tion renou­ve­lable de 3 giga­watts par an à 4 par an sur les années 2022 à 2025, puis à 6 par an à par­tir de 2025. En quatre ans, nous allons ain­si dou­bler notre capa­ci­té d’investissement dans les moyens de pro­duc­tion d’électricité renou­ve­lable. S’agissant des gaz renou­ve­lables, nous visons une pro­duc­tion de 4 téra­watt­heures de bio­mé­thane en France en 2030, ce qui repré­sen­te­ra près de 10 % de part de mar­ché de la pro­duc­tion du bio­mé­thane à cet hori­zon. Dans le domaine de l’hydrogène, notre objec­tif est d’avoir à hori­zon 2030 4 giga­watts de capa­ci­tés d’électrolyse pour pro­duire de l’hydrogène à par­tir d’une élec­tri­ci­té renouvelable. 

Enfin, à hori­zon 2025, nous visons une capa­ci­té de pro­duc­tion décen­tra­li­sée de 8 giga­watts sup­plé­men­taires à des­ti­na­tion de nos clients (grands indus­triels, col­lec­ti­vi­tés locales, uni­ver­si­tés, hôpi­taux…). Il s’agit, par exemple, de déployer des pan­neaux solaires sur les toits des hôpi­taux ou des éta­blis­se­ments indus­triels, d’installer des capa­ci­tés de géo­ther­mie pour les réseaux de cha­leur des col­lec­ti­vi­tés locales… Nous mobi­li­sons toutes les tech­no­lo­gies dis­po­nibles pour appor­ter à nos clients ces 8 giga­watts sup­plé­men­taires qui vien­dront s’ajouter aux 32 déjà existants. 

Dans cette démarche, quelles sont les énergies qui vous intéressent plus particulièrement ?

Nous nous inté­res­sons à toutes les éner­gies bas car­bone. Très sou­vent, on constate que quand on parle d’énergies ou d’électricité bas car­bone, nos inter­lo­cu­teurs pensent uni­que­ment au solaire et à l’éolien. Nous nous inté­res­sons bien évi­dem­ment à l’éolien onshore et off­shore, et au solaire, mais il ne faut pas oublier que nous sommes éga­le­ment un opé­ra­teur impor­tant de l’hydraulique notam­ment en France, au Por­tu­gal, et au Bré­sil. Il ne faut pas oublier la géo­ther­mie qui est une éner­gie extrê­me­ment impor­tante pour décar­bo­ner le chauf­fage en France, étant don­né qu’il est pos­sible de faire de la géo­ther­mie à moyenne ou basse tem­pé­ra­ture dans la plu­part des bas­sins sédi­men­taires. À cela s’ajoutent les gaz renou­ve­lables qui ont un rôle très impor­tant à jouer : bio­mé­thane, bio­gaz, hydro­gène renou­ve­lable… On peut aus­si citer la récu­pé­ra­tion de la cha­leur fatale, un pro­cé­dé assez mécon­nu du grand public, qui, dans le domaine de l’industrie, per­met de réuti­li­ser cette cha­leur pour d’autres appli­ca­tions. Par exemple, pour un de nos clients qui a une usine agro-ali­men­taire, nous récu­pé­rons cette cha­leur fatale pour chauf­fer, via un réseau de cha­leur, les HLM voi­sins. Engie a, en effet, fait le choix fort de mobi­li­ser toute la gamme des éner­gies renou­ve­lables dis­po­nibles loca­le­ment afin de mini­mi­ser les coûts de trans­port et opti­mi­ser leur uti­li­sa­tion ou récu­pé­ra­tion. Enfin, Engie est aus­si l’opérateur des cen­trales nucléaire belges. Nous consi­dé­rons, d’ailleurs, que le nucléaire exis­tant, est un vec­teur de la tran­si­tion énergétique.

Qu’en est-il de la question de la décarbonation de l’industrie ?

Comme pré­cé­dem­ment men­tion­né, il y a le pro­ces­sus de récu­pé­ra­tion de cha­leur fatale qui va jouer un rôle très impor­tant dans la décar­bo­na­tion de l’industrie, car une part signi­fi­ca­tive de l’énergie est consom­mée par des pro­cess indus­triels ther­miques qui requièrent de la cha­leur à des tem­pé­ra­tures moyennes. Il est pos­sible de pro­duire de la cha­leur à par­tir d’électricité, mais ce n’est pas tou­jours le moyen le plus effi­cace. Pre­nons un exemple, si un indus­triel a besoin de cha­leur haute tem­pé­ra­ture, il peut uti­li­ser du bio­mé­thane avec une tem­pé­ra­ture de flamme à envi­ron 1850° ou de l’hydrogène qui a une tem­pé­ra­ture de flamme supé­rieure. Et si, en plus, le méthane ou l’hydrogène uti­li­sés sont renou­ve­lables, l’industriel va avoir de la cha­leur à haute tem­pé­ra­ture sans émettre de CO2. Pour des tem­pé­ra­tures plus basses, l’industriel peut avoir recours à une source géo­ther­mique com­bi­née à une pompe à chaleur. 

Pour les pro­ces­sus élec­triques, l’idée est plu­tôt d’avoir recours à des sys­tèmes éoliens ou solaires en ins­tal­lant, par exemple, des pan­neaux pho­to­vol­taïques sur le toit d’une usine et en com­plé­tant cette ins­tal­la­tion avec une bat­te­rie et une cogé­né­ra­tion à bio­gaz pour palier intermittence.

Se pose aus­si la ques­tion des réseaux de froid dans le ter­tiaire et occa­sion­nel­le­ment dans l’industrie.. Engie est convain­cu de la per­ti­nence du déve­lop­pe­ment de ces réseaux de froid qui sont un moyen beau­coup plus effi­cace qu’un cli­ma­ti­seur indi­vi­duel pour four­nir du froid. 

En effet, au-delà de la capa­ci­té de pro­duire mas­si­ve­ment du froid, un réseau favo­rise son sto­ckage sous forme d’eau froide, ce qui per­met non seule­ment de pro­duire le froid quand l’électricité ou l’énergie est dis­po­nible, mais aus­si d’en dis­po­ser plus tard et indé­pen­dam­ment de la pro­duc­tion. Le réseau de froid a voca­tion à s’imposer comme une solu­tion effi­cace pour des usages ter­tiaires ain­si que pour les réseaux de froid urbain. 

Engie est notam­ment action­naire de Fraî­cheur de Paris, le réseau de froid urbain de la ville. Et nous opé­rons et déve­lop­pons d’autres réseaux de ce genre à Sin­ga­pour, mais aus­si au Moyen-Orient. 

Qu’en est il des principaux freins et enjeux qui persistent actuellement ?

Actuel­le­ment, le prin­ci­pal frein à l’efficacité éner­gé­tique est que, si les indus­triels et les entre­prises ter­tiaires sou­haitent faire des éco­no­mies d’énergie, ils sont sou­vent frei­nés dans cette démarche par leur capa­ci­té d’investissement. À par­tir de là, notre rôle est de pou­voir leur pro­po­ser des solu­tions clé-en-main et d’investir chez notre client à sa demande. Pour de grandes uni­ver­si­tés amé­ri­caines, nous pre­nons en charge la tota­li­té de leurs réseaux d’énergie (froid, chaud, air com­pri­mé…). Nous réa­li­sons les inves­tis­se­ments pour les moder­ni­ser, les rendre plus effi­caces et répondre aux nou­veaux besoins, puis nous leur ven­dons l’énergie comme un ser­vice dans le cadre d’un accord contrac­tuel sur une durée de 50 ans. Concrè­te­ment, ils n’ont pas eu à mobi­li­ser leurs capi­taux et ils payent uni­que­ment pour le ser­vice dont ils ont besoin. C’est un moyen qui per­met de contour­ner les dif­fi­cul­tés rela­tives à l’investissement ini­tial. C’est aus­si la pos­si­bi­li­té pour nos clients de se concen­trer sur leur cœur de métier et de délé­guer la ges­tion des ques­tions éner­gé­tiques et de la décar­bo­na­tion de leurs réseaux et usages à un acteur expert et spé­cia­li­sé comme Engie. 

Quel regard portez-vous sur le contexte énergétique actuel et la question de la décarbonation ? Comment vous projetez vous ?

Aujourd’hui, nous sommes confron­tés à une situa­tion assez para­doxale. Dans le contexte de crise actuelle, qui est le fruit de la guerre en Ukraine, afin de sécu­ri­ser l’approvisionnement en élec­tri­ci­té pour cet hiver, la France a été ame­née à retar­der la fer­me­ture de ses cen­trales à char­bon. Si aujourd’hui, on peut avoir l’impression que la crise ralen­tit la tran­si­tion éner­gé­tique, au sein d’Engie, nous sommes au contraire convain­cus qu’elle va contri­buer à son accé­lé­ra­tion. En effet, le moyen le plus effi­cace pour contrer les prix éle­vés du gaz, du pétrole et de l’électricité est de déve­lop­per encore plus les renouvelables. 

Glo­ba­le­ment, les éner­gies renou­ve­lables sont pro­duites à prix fixe. De manière sché­ma­tique, une fois l’investissement ini­tial dans l’éolienne réa­li­sé, le vent, ensuite, est quant à lui gra­tuit ! Il en est même pour une ins­tal­la­tion de métha­ni­sa­tion qui va pro­duire du bio­gaz à par­tir de déchets agri­coles et ali­men­taires. Ce sont des pro­duc­tions à coûts fixes sur le long terme qui ne sont pas sou­mises à la vola­ti­li­té des prix. 

La décarbonation et la transition énergétique sont aussi des enjeux humains. Quels sont les talents que vous recherchez pour relever ce défi ?

Au sein d’Engie, il y a une grande varié­té et diver­si­té de métiers autour des éner­gies renou­ve­lables : l’installation de champs éoliens et solaires ; l’exploitation des bar­rages hydrau­liques ; les bio­gaz et le déve­lop­pe­ment des métha­ni­seurs ; la pro­duc­tion d’hydrogène…

Avant tout, nous recher­chons des femmes et des hommes moti­vés qui veulent avoir un impact posi­tif sur leur envi­ron­ne­ment et sur la pla­nète et qui sou­haitent s’investir dans l’accélération de la tran­si­tion éner­gé­tique de nos clients. Nous avons pour objec­tif de faire pro­gres­ser le Groupe dans la diver­si­fi­ca­tion de cer­taines popu­la­tions et de faire de tous les envi­ron­ne­ments de tra­vail des lieux inclu­sifs en agis­sant sur la diver­si­té, la pari­té, l’équité et l’inclusion. Engie est un lieu où chaque indi­vi­du peut se sen­tir libre d’être soi-même pour déployer son plein poten­tiel et ain­si contri­buer au mieux à l’ambition col­lec­tive du Groupe et de sa per­for­mance. Une poli­tique gobale D&II « BeU@ENGIE » est déployée pour aller à la conquête de ses talents. Et d’un point de vue opé­ra­tion­nel, nous recher­chons une majo­ri­té de tech­ni­ciens, des ingé­nieurs et des busi­ness déve­lop­peurs pour répondre au besoin busi­ness, mais aus­si des fonc­tions sup­ports (finance, mar­ke­ting, com­mu­ni­ca­tion, juridiques…).

Poster un commentaire