Une société technologique à forte composante financière (et vice-versa) !

Dossier : Supplément : Fintech & croissanceMagazine N°785 Mai 2023
Par Richard WEISS (X72)

Dans cet entre­tien, Richard Weiss (X72), Pré­sident du Groupe GTI, revient sur le posi­tion­ne­ment de son groupe à la croi­sée entre la tech­no­lo­gie et le monde du finan­ce­ment.

Quels sont les métiers et le positionnement de Groupe GTI ?

Au cœur des métiers du Groupe GTI, on retrouve une très forte spé­cia­li­sa­tion à la croi­sée des fonds de finan­ce­ment et des trai­te­ments de don­nées en grands volumes. Cette exper­tise est por­tée par deux enti­tés distinctes.
GTI Asset Mana­ge­ment, notre socié­té de ges­tion agréée par l’AMF, est spé­cia­li­sée dans la concep­tion, la réa­li­sa­tion, et la ges­tion d’opérations de finan­ce­ment ados­sées à des actifs, ain­si que lorsque les cir­cons­tances s’y prêtent, la levée de fonds sélectifs.

His­to­ri­que­ment, GTI Asset Mana­ge­ment, exploi­tant sa tech­ni­ci­té impor­tée des Etats-Unis, tra­vaillait essen­tiel­le­ment pour des banques et de grandes socié­tés à une époque où ces struc­tures ne savaient pas réa­li­ser ce type de finan­ce­ment très répan­du Outre-Atlan­tique. Nous avons donc mis cette com­pé­tence à leur dis­po­si­tion afin qu’elles puissent béné­fi­cier de ce finan­ce­ment très sécu­ri­sé. Pro­gres­si­ve­ment, les banques ont déve­lop­pé une com­pé­tence en interne. Nous nous sommes donc diver­si­fiés en pro­po­sant ce type d’opérations à des ETI et PME. GTI Asset Mana­ge­ment traite tous types de fonds (fonds de prêts, créances com­mer­ciales, prêts hypo­thé­caires, prêts per­son­nels, prêts gra­nu­laires…) avec une exper­tise mar­quée sur les fonds gra­nu­laires, exi­geant des trai­te­ments de don­nées en grands volumes.

« Au cœur des métiers du Groupe GTI, on retrouve une très forte spécialisation à la croisée des fonds de financement et des traitements de données en grands volumes. »

Nous avons ain­si voca­tion à inter­ve­nir sur des opé­ra­tions com­plexes qui s’inscrivent dans des envi­ron­ne­ments tech­niques et qui néces­sitent une spé­ci­fi­ci­té par­ti­cu­lière. On se posi­tionne comme un acteur de niche alors que les grandes ins­ti­tu­tions ont ten­dance à gérer des opé­ra­tions plu­tôt stan­dards. Nous avons aus­si la par­ti­cu­la­ri­té d’avoir fait le choix d’internaliser tous nos métiers, nos com­pé­tences, nos maté­riels et logi­ciels, et même cer­taines fonc­tions sup­ports. L’ensemble de nos sys­tèmes sont « pro­prié­taires » afin de pou­voir réa­li­ser en interne nos cal­culs, pou­voir simu­ler les flux, négo­cier avec les agences de nota­tion, opti­mi­ser le pas­sif… Nous avons géré un fonds avec plus de 300 000 créances que nous sui­vions quo­ti­dien­ne­ment de manière indi­vi­duelle et très rigoureuse.

La seconde enti­té du groupe, Cre­da­tech, pro­pose, quant à elle, des ser­vices aux dépo­si­taires de fonds gra­nu­laires : le contrôle de cohé­rence et l’assistance à la véri­fi­ca­tion de l’existence des créances.

À quels besoins et problématiques répondez-vous ?

Nous appor­tons une réponse à la raré­fac­tion des finan­ce­ments ban­caires et à un accrois­se­ment des coûts de finan­ce­ment. Nous ciblons en prio­ri­té des entre­prises qui n’ont pas faci­le­ment accès au mar­ché de la dette, mais qui dis­posent d’actifs aux­quels une dette peut être ados­sée. Il peut notam­ment s’agir d’une grande entre­prise très endet­tée face à laquelle les banques vont avoir des réti­cences à aug­men­ter leurs enga­ge­ments. Au début des années 2000, nous avons ain­si mon­té des opé­ra­tions de titri­sa­tion pour CMA-CGM ou encore Alstom pour qui nous avions finan­cé les créances résul­tant des ventes de TGV à la SNCF.

« Aujourd’hui, nous nous intéressons également aux Fintechs qui ont de multiples besoins de financement : pour se développer elles-mêmes, mais aussi pour développer le support de leur activité. »

Aujourd’hui, nous nous inté­res­sons éga­le­ment aux Fin­techs qui ont de mul­tiples besoins de finan­ce­ment : pour se déve­lop­per elles-mêmes, mais aus­si pour déve­lop­per le sup­port de leur acti­vi­té. C’est, notam­ment, le cas des Fin­techs qui pro­posent des finan­ce­ments avec un par­cours simple ou qui pro­posent des ser­vices de BNPL (buy now pay later)… Dès qu’il y a un flux avec de nom­breuses lignes, il y a, en effet, du poten­tiel pour mon­ter des opé­ra­tions ados­sées à des actifs plus com­plexes. D’autant que les banques sont peu friandes de ces opé­ra­tions regrou­pant de très nom­breuses lignes, avec des échanges mul­tiples et un encours rela­ti­ve­ment faible. C’est aus­si un seg­ment qui néces­site une péda­go­gie intense et un accom­pa­gne­ment stable.

L’innovation et les nouvelles technologies jouent un rôle important dans votre modèle. Qu’en est-il ?

La tech­no­lo­gie est créa­trice d’opportunités. Elle est au cœur des modèles que les entre­pre­neurs déve­loppent aujourd’hui afin de concur­ren­cer les banques sur le seg­ment du finan­ce­ment ou du ser­vice. Pour déve­lop­per ces canaux alter­na­tifs, ils ont eux-mêmes besoin de finan­ce­ment pour le sup­port de leur activité.

Sur un plan plus opé­ra­tion­nel, la tech­no­lo­gie nous per­met de mieux gérer nos propres opé­ra­tions. Pour sécu­ri­ser un prêt à un tiers, il est capi­tal d’avoir des infor­ma­tions sur ce tiers, ses finances, sa façon de tra­vailler. C’est d’ailleurs pour­quoi, depuis plus d’un quart de siècle, nous mili­tons pour que les fonds puissent prê­ter et avoir accès au fichier des inci­dents de la Banque de France qui recense les inci­dents de paie­ment des entre­prises. Aujourd’hui, les nou­velles tech­no­lo­gies ont per­mis le déve­lop­pe­ment de l’Open Ban­king qui jus­te­ment contri­bue à la dif­fu­sion de ces informations.

« Nous nous considérons comme une société technologique avec une forte composante financière. »

Au-delà, nous nous consi­dé­rons comme une socié­té tech­no­lo­gique avec une forte com­po­sante finan­cière. Par exemple, quand nous mon­tons une opé­ra­tion de finan­ce­ment tran­chée sur des pools de 50 ou 100 000 prêts immo­bi­liers, nous réa­li­sons nous-mêmes tous les cal­culs et simu­la­tions en uti­li­sant nos propres modèles. Concrè­te­ment, notre acti­vi­té va au-delà de la ges­tion de fonds, car nous pre­nons en charge toute la chaîne de valeur depuis le conseil ini­tial jusqu’à la ges­tion, en pas­sant par le mon­tage d’une opé­ra­tion. De manière géné­rale, les grandes banques vont cou­vrir le volet « noble », qui consiste à conce­voir le mon­tage et lever les fonds, et vont relé­guer le volet ges­tion à leurs filiales dédiées à cette acti­vi­té de ges­tion de fonds. Nous avons pris le contre-pied de ce sché­ma pour inter­na­li­ser ces deux dimensions.

Parce que notre socié­té a été créée ex-nihi­lo, nous ne sommes pas tri­bu­taires d’un sys­tème infor­ma­tique très lourd. Nous avons notre propre sys­tème infor­ma­tique et notre propre tech­no­lo­gie que nous pou­vons appli­quer aux dif­fé­rentes normes et sujets. Par exemple, nous avons déve­lop­pé notre propre outil pour auto­ma­ti­ser le tra­vail autour du KYC ain­si que les pro­cé­dures de lutte contre le blan­chi­ment et le finan­ce­ment du terrorisme.

Aujourd’hui, quelles pistes explorez-vous pour faire évoluer vos services et solutions ?

Depuis le début de notre acti­vi­té, la tech­no­lo­gie a tou­jours été un levier de déve­lop­pe­ment. La néces­si­té d’innover, notam­ment sur le plan tech­no­lo­gique, nous a pous­sés à diver­si­fier notre acti­vi­té, à cou­vrir de nou­veaux besoins et à nous adres­ser à des clients différents.

Dans cette démarche d’innovation, nous tra­vaillons avec des socié­tés « tra­di­tion­nelles » mais aus­si avec les Fin­techs à qui nous appor­tons conseil, qua­li­té de ser­vice et rapi­di­té d’exécution. Ces socié­tés ont le double défi de se finan­cer elles-mêmes et de finan­cer le sup­port de leur acti­vi­té (par exemple les prêts mis en place). Nous avons donc élar­gi nos ser­vices en nous inté­grant ver­ti­ca­le­ment et nous exa­mi­nons d’autres ser­vices tels les créances com­mer­ciales hors affac­tu­rage ou encore le conseil en matière de struc­tu­ra­tion des fonds.

Et pour conclure, quelles pistes de réflexion pourriez-vous partager avec nos lecteurs ?

Les Fin­techs sont au cœur des métiers ban­caires, qu’elles contri­buent à moder­ni­ser ; celles qui opèrent sur le seg­ment du finan­ce­ment leur font concur­rence directe par­fois en sous-pon­dé­rant les contraintes légales et règle­men­taires liées à leur acti­vi­té. Mais pour assu­rer leur déve­lop­pe­ment, elles doivent veiller à res­pec­ter la règle­men­ta­tion appli­cable. La titri­sa­tion et les finan­ce­ments ados­sés en géné­ral sont le canal de finan­ce­ment paral­lèle et avec l’augmentation des taux d’intérêt, ces tech­niques sont appe­lées à se déve­lop­per et tout par­ti­cu­liè­re­ment pour finan­cer l’activité des Fin­techs. Il y a un impor­tant tra­vail de péda­go­gie qui doit être mené pour sen­si­bi­li­ser les jeunes entre­pre­neurs à cette réa­li­té. Et sur ces ques­tions et enjeux struc­tu­rants, nous avons la capa­ci­té d’accompagner l’ensemble des par­ties pre­nantes afin de trou­ver la solu­tion la plus pertinente.

Poster un commentaire