Un des principaux défis du XXIe siècle

Dossier : De l’eau pour tousMagazine N°683 Mars 2013
Par René COULOMB (51)

REPÈRES
L’eau est, par son abon­dance, la troisième molécule de l’univers après l’hydrogène et le gaz car­bonique. Elle existe sous forme de glace ou de vapeur d’eau, mais n’a pas encore été détec­tée sous forme liq­uide en sur­face ailleurs que sur notre planète.
Elle est présente dans une cen­taine de galax­ies situées à moins de 500 années-lumière de la Terre.

REPÈRES
L’eau est, par son abon­dance, la troisième molécule de l’univers après l’hydrogène et le gaz car­bonique. Elle existe sous forme de glace ou de vapeur d’eau, mais n’a pas encore été détec­tée sous forme liq­uide en sur­face ailleurs que sur notre planète.
Elle est présente dans une cen­taine de galax­ies situées à moins de 500 années-lumière de la Terre.
Dans le sys­tème solaire, on trou­ve de l’eau sur les planètes et leurs satel­lites ain­si que sur les astéroïdes et les comètes, mais seule la Terre dis­pose d’une eau de sur­face et d’océans qui la cou­vrent en majeure par­tie et d’une eau pro­fonde, le man­teau ter­restre con­tenant une masse d’eau du même ordre de grandeur que celle des océans.

L’eau est abon­dante sur notre planète et en quan­tité pra­tique­ment con­stante. Son stock total ne varie que très légère­ment dans le temps.

L’eau sur la Terre ne se perd ni ne se crée

Cette infime vari­a­tion du vol­ume de l’hydrosphère (par­tie de la planète, y com­pris l’atmosphère, occupée par l’eau quel que soit son état) est due aux échanges d’eau avec le man­teau ter­restre et aux pertes dans la haute atmo­sphère, où des molécules sont décom­posées par des rayons UV, l’hydrogène ain­si créé, trop léger pour être retenu par la grav­ité, s’échappant dans l’univers.

On peut dire, en fait, que l’eau sur la Terre ne se perd ni ne se crée, même si les échanges d’eau sont per­ma­nents entre les qua­tre grands réser­voirs d’eau : les mers et les océans ; les eaux con­ti­nen­tales (super­fi­cielles et souter­raines) ; la cryosphère et l’atmosphère. C’est le cycle de l’eau qui fait que l’on peut boire plusieurs fois la même eau.

Suffisamment d’eau

Glob­ale­ment, l’humanité dis­pose et dis­posera tou­jours de toute l’eau néces­saire. Même en se lim­i­tant à l’eau douce (plus de 97,5 % de l’eau sur Terre étant salée), il y en a bien plus qu’il n’en fau­dra pour sat­is­faire à tous les besoins de 9 mil­liards d’habitants en 2050 et d’une dizaine de mil­liards à la fin du siècle.

Mars
Mars, sœur de la Terre, mais plus éloignée qu’elle du Soleil, et que les hommes voudraient un jour con­quérir, n’a eu de l’eau liq­uide que dans un passé loin­tain, mais ce passé humide vient d’être con­fir­mé par le robot Curios­i­ty évolu­ant actuelle­ment sur Mars.

Le stock d’eau douce sur la Terre est de 40 mil­lions de kilo­mètres cubes, et même si le plus impor­tant est le flux d’eau renou­ve­lable (et non pas le stock), il tombe en moyenne sur les ter­res émergées 119 000 km3 chaque année.

Certes, guère plus du tiers de cette eau rejoint les cours d’eau et les nappes, mais cela fait en moyenne 6 000 m3 par habi­tant avec la pop­u­la­tion actuelle et cela fera encore 4 000 m3 par habi­tant à la fin du siècle.

En out­re, les eaux stock­ées dans les nappes représen­tent 10,5 mil­lions de kilo­mètres cubes, et l’on peut avoir une ges­tion active de ce stock, dans lequel on peut puis­er cer­taines années, en le lais­sant ensuite se reconstituer.

On peut même, comme la Libye l’avait entre­pris, puis­er dans des nappes « fos­siles » dont les eaux ne se renou­velleront pas à l’échelle humaine.

L’adduction des eaux souter­raines du Sahara vers les villes libyennes con­cen­trées sur la côte méditer­ranéenne pour­ra se pour­suiv­re durant un demi-siè­cle, avec d’ici là la cer­ti­tude de leur fournir de l’eau de mer dessalée à grande échelle.

Si l’on ajoute que ce dessale­ment est déjà moins coû­teux que le trans­port de l’eau sur de longues dis­tances et que la plu­part des méga­lopoles sont proches d’une mer ou d’un océan, les prob­lèmes par­fois très graves à résoudre ne sont pas dus à un manque glob­al d’eau.

Mais l’eau, néces­saire à la vie et pour laque­lle il n’existe aucune ressource de sub­sti­tu­tion, est très iné­gale­ment répar­tie dans l’espace et dans le temps. Le change­ment cli­ma­tique annon­cé entraîn­era égale­ment, tôt ou tard, des con­séquences impor­tantes avec des migra­tions de pop­u­la­tions s’ajoutant à celles dues à la sécher­esse de nom­breuses régions du monde, notam­ment dans le Sahel.

La mod­i­fi­ca­tion du climat
Depuis que la Terre existe, il y a, certes, eu de très impor­tantes mod­i­fi­ca­tions du cli­mat, de la tem­péra­ture de la Terre et du niveau des océans. Mais cela se pas­sait à une échelle de temps sans com­mune mesure avec ce qu’on observe depuis la Révo­lu­tion indus­trielle et l’ex­plo­sion démo­graphique, qui ont entraîné un accroisse­ment des con­cen­tra­tions dans l’at­mo­sphère des gaz à effet de serre, notam­ment le gaz car­bonique et le méthane.
Si cer­tains effets atten­dus à l’échelle du siè­cle don­nent lieu à des con­tes­ta­tions, il est cer­tain que la tem­péra­ture moyenne du globe, qui s’est déjà élevée d’un demi-degré entre 1906 et 2005, s’élèvera de plusieurs degrés (2 à 4 degrés) d’i­ci 2100, entraî­nant une fonte par­tielle des calottes polaires et des glac­i­ers et une élé­va­tion cor­réla­tive du niveau des océans.
Durant la deux­ième moitié du XXe siè­cle, ce niveau s’est déjà élevé en moyenne de 2 mm par an, et il s’élève main­tenant de 3 mm par an. Cela aura des con­séquences graves pour de nom­breuses îles, de nom­breuses régions côtières, de très grandes villes comme Bangkok, voire une grande par­tie d’un pays très peu­plé, le Bangladesh, dont 40% du ter­ri­toire est situé à moins de 10 m au-dessus du niveau de l’océan Indien.

Créer une solidarité

Près de la moitié de la pop­u­la­tion de la planète ne dis­pose pas d’un accès proche de son domi­cile à une eau par­faite­ment potable. Env­i­ron 2,6 mil­liards de per­son­nes ne dis­posent pas d’un assainisse­ment, même très rudi­men­taire, lequel per­me­t­trait d’enrayer la prop­a­ga­tion des mal­adies liées à l’eau qui con­stituent la pre­mière cause de mor­tal­ité dans le monde.

Plus d’un mil­liard de per­son­nes, essen­tielle­ment dans les pays du Sud, souf­frent de mal­nu­tri­tion, celle-ci étant liée à la disponi­bil­ité en eau pour l’agriculture, que cette eau vienne directe­ment de la pluie ou qu’il s’agisse d’eau d’irrigation. Les trois quarts de l’eau con­som­mée par l’humanité le sont pour­tant pour l’agriculture.

L’humanité dis­pose et dis­posera tou­jours de toute l’eau nécessaire

La sit­u­a­tion est très vari­able selon les régions du monde, et mal­heureuse­ment l’eau, presque incom­press­ible, à la dif­férence du gaz, coûte cher à trans­porter. C’est d’autant plus grave que les pays arides sont sou­vent les plus pau­vres. Il faut donc, pour réus­sir à don­ner de l’eau à tous les habi­tants de la planète, mobilis­er durant des années, voire des décen­nies, des moyens tech­niques et financiers bien plus impor­tants qu’actuellement et créer une réelle sol­i­dar­ité entre les pays dévelop­pés et les pays pauvres.

Le Con­seil Mon­di­al de l’Eau,laboratoire d’idées à l’échelle du monde, qui alerte les respon­s­ables des dif­férents pays sur l’ab­solue néces­sité de don­ner une pri­or­ité aux prob­lèmes de l’eau a été créé dans ce but en 1996. Il organ­ise tous les trois ans depuis 1997 des Forums mon­di­aux de l’eau per­me­t­tant de con­stater les avancées, insuff­isantes à ce jour, pour assur­er l’eau à tous les habi­tants de la planète.

Le 6e Forum, tenu en 2012 à Mar­seille, était le forum des « solu­tions ». Reste à les met­tre en œuvre. L’exigence accrue des con­som­ma­teurs pour une eau de qual­ité mal­gré la pol­lu­tion des nappes et des riv­ières entraîn­era en out­re de lourds investisse­ments, mais elle peut être sat­is­faite grâce aux pro­grès con­stants dans le traite­ment des eaux, même les plus polluées.

Y aura-t-il des guerres de l’eau ?

Mal­gré l’importance des défis à relever sur les plans poli­tique, tech­nique et financier, il faut rester opti­miste. Bien que le sujet soit sou­vent évo­qué, il n’y a pas eu jusqu’à présent de véri­ta­bles « guer­res de l’eau », et il faut tout faire pour qu’il n’y en ait pas.

Certes, l’eau est sou­vent un enjeu poli­tique, voire un moyen de pres­sion des pays qui dis­posent des ressources en eau dans la par­tie amont des fleuves à l’égard de leurs voisins situés à l’aval.

Il en est résulté et il en résul­tera des ten­sions, notam­ment dans le Proche et le Moyen-Ori­ent, mais pas néces­saire­ment des guer­res causées par le partage des eaux. Ain­si l’Égypte, très peu­plée et de beau­coup le prin­ci­pal util­isa­teur des eaux du Nil, indis­pens­ables pour l’irrigation, n’est entrée en guerre ni avec le Soudan ni avec l’Éthiopie qui pour­raient théorique­ment la priv­er en par­tie d’une ressource vitale.

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