Groupe SERL

SERL : la décarbonation, notre histoire à tous !

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°776 Juin 2022
Par Vincent MALFÈRE (X96)

Pour Vin­cent Malfère, directeur général de la SERL, la décar­bon­a­tion est une démarche parte­nar­i­ale pro­gres­sive à laque­lle des acteurs comme la SERL, société d’économie mixte d’aménagement et de con­struc­tion de la région lyon­naise, con­tribuent active­ment, à l’interface du secteur pub­lic et privé. Entretien.

Comment appréhendez-vous la question de la décarbonation ?

Au regard de la prob­lé­ma­tique du réchauf­fe­ment cli­ma­tique, la décar­bon­a­tion est d’abord un impératif. La typolo­gie des activ­ités de la SERL, amé­nage­ment urbain, con­struc­tion d’équipements publics, rend cette ques­tion pri­mor­diale au vu des émis­sions de gaz à effet de serre que ces activ­ités génèrent.

La décar­bon­a­tion est égale­ment incon­tourn­able, pour deux raisons. La pre­mière parce que les régle­men­ta­tions en la matière, comme la Régle­men­ta­tion Envi­ron­nemen­tale 2020 ou encore le décret ter­ti­aire sur la per­for­mance énergé­tique des immo­biliers ter­ti­aires, nous y enga­gent résol­u­ment. La deux­ième a trait à la demande poli­tique et citoyenne, émanant des ter­ri­toires avec lesquels nous tra­vail­lons. Ce mou­ve­ment n’est d’ailleurs pas spé­ci­fique à l’hyper-urbain et à la Métro­pole de Lyon et tra­verse, avec des enjeux certes dif­férents, tous les territoires. 

Dans ce con­texte, les opéra­teurs comme nous doivent être en mesure de dessin­er des chemins, pro­pos­er des équili­bres entre une marche à la fois for­cée et volon­taire vers la décar­bon­a­tion et les impérat­ifs d’ordres économiques et soci­aux liés notam­ment aux prix du loge­ment et à la qual­ité de vie au sein des bâti­ments et quartiers que nous con­stru­isons, en allant dès que le con­texte le per­met, au-delà de ce qu’impose la règlementation.

Dans ce cadre, comment vous positionnez- vous et comment faites-vous évoluer votre offre ?

Pré­cisons tout d’abord que nous exerçons aujourd’hui prin­ci­pale­ment qua­tre métiers complémentaires :

  • l’aménagement urbain : nous pro­duisons des quartiers nou­veaux, soit par trans­for­ma­tion de la ville sur elle-même, soit, de plus en plus mar­ginale­ment, en expan­sion urbaine ;
  • les équipements publics ou privés : nous con­cevons, pro­gram­mons, pilo­tons et réal­isons en man­dat ou assis­tance à maîtrise d’ouvrage des super­struc­tures dans deux domaines prin­ci­paux : l’enseignement (écoles pri­maires, col­lèges, lycées, uni­ver­sités…) et le domaine hos­pi­tal­ier et médico-social ;
  • l’investissement immo­bili­er en fonds pro­pres en sou­tien de poli­tiques publiques des col­lec­tiv­ités, et en par­ti­c­uli­er en matière de développe­ment économique. Nous por­tons ain­si par exem­ple un hôtel de logis­tique urbain, des vil­lages entre­pris­es, des pôles de ser­vice, des commerces… ;
  • le développe­ment des éner­gies renou­ve­lables : nous pro­posons en la matière des solu­tions de tiers-investisse­ment, notam­ment pour des toi­tures et ombrières photovoltaïques.

Cela se traduit chaque année par la con­duite d’une cen­taine de pro­jets de toutes tailles, à l’échelle de l’aire mét­ro­pol­i­taine lyon­naise et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et par­fois même au-delà, ce qui fait de nous une des plus impor­tantes SEM de France dans nos métiers.

Sur cette base, le con­seil d’administration de la SERL a souhaité en 2021 dot­er la société d’une rai­son d’être : « Avec les habi­tants, usagers et par­ties prenantes, amé­nag­er et con­stru­ire un cadre de vie de qual­ité pour soutenir les tran­si­tions écologique, sociale, et économique de nos ter­ri­toires ». Notre con­seil d’administration a donc souhaité expliciter un posi­tion­nement qui con­siste non seule­ment à amé­nag­er et con­stru­ire, nos métiers his­toriques, mais aus­si, par la diver­sité de nos pro­jets et métiers, à soutenir et à accom­pa­g­n­er nos clients, nos ter­ri­toires dans les transitions.

Pour cela, il s’agit d’intervenir tel un expert tout à la fois fiable sur les fon­da­men­taux de nos métiers, et agile et inno­vant afin d’adapter nos modes de faire et réal­i­sa­tions aux évo­lu­tions et aux attentes de nos clients. Il est ici ques­tion notam­ment de trou­ver le bon com­pro­mis, adap­té à chaque pro­jet et chaque con­texte, entre une ambi­tion forte et la capac­ité col­lec­tive à y répondre.

Il s’agit égale­ment de con­seiller, écouter, apporter des con­seils prag­ma­tiques et réal­istes, nour­ris de nos expéri­ences opéra­tionnelles. Ces pos­tures m’apparaissent par­ti­c­ulière­ment per­ti­nentes quand il s’agit d’accompagner les tran­si­tions et notam­ment la décar­bon­a­tion. La façon dont notre société se pré­pare à ces évo­lu­tions pour en per­me­t­tre la décli­nai­son opéra­tionnelle con­crète est égale­ment fon­da­men­tale pour sa com­péti­tiv­ité et son avenir.

Dans ce cadre, quels sont les principaux projets qui vous mobilisent actuellement ?

Il faut d’abord se dire qu’appréhender la ques­tion des tran­si­tions dans une entre­prise de 90 salariés, qui reste donc une PME, impose d’adopter une approche à la fois sou­ple, ciblée et pro­por­tion­née. C’est d’autant plus indis­pens­able quand on tra­vaille sur l’urbain, dont les prob­lé­ma­tiques sont très nom­breuses. C’est pourquoi nous avons fait le choix de struc­tur­er une démarche inno­va­tion ciblée sur un nom­bre restreint de thé­ma­tiques ques­tion­nées à inter­valles réguliers, incré­men­tale, et trou­vant à se déclin­er par et pour les pro­jets. Par les pro­jets parce qu’il s’agit là de notre prin­ci­pal levi­er d’impact puisque si notre struc­ture a un chiffres d’affaires de 10 M€, nous investis­sons chaque année env­i­ron 150 M€ sur les pro­jets qui nous sont con­fiés par voie de con­ces­sions ou de man­dats. Pour les pro­jets car nous n’avons pas voca­tion à con­duire des pro­jets de recherche, mais sommes plutôt dans l’idée que les sujets que nous explorons doivent pou­voir trou­ver un poten­tiel de mas­si­fi­ca­tion sur nos opéra­tions, au béné­fice de nos clients et usagers. 

Les thé­ma­tiques sur lesquelles nous tra­vail­lons sont les suivantes :

  • les matéri­aux et les ressources : matéri­aux bio et géosour­cés, rem­ploi de matéri­aux, économie cir­cu­laire… autant de leviers clés pour la décar­bon­a­tion de la Ville ;
  • la ville pro­duc­tive : quels choix retenir pour créer et main­tenir les activ­ités pro­duc­tives dans le cœur urbain à con­di­tion économique abor­d­able, afin d’éviter les nom­breuses exter­nal­ités néga­tives liées à leur local­i­sa­tion trop sys­té­ma­tique en franges urbaines ;
  • la copro­duc­tion avec les habi­tants et les usagers : il s’agit de mieux et plus mobilis­er la demande sociale de plus en plus forte d’un ren­force­ment du pou­voir d’agir des habi­tants et des usagers sur nos pro­jets, pour amélior­er ces derniers et en ren­forcer l’acceptabilité ;
  • le bien-être et la san­té, avec des ques­tion­nements de la place du médi­co-social dans la Ville et de l’urbanisme favor­able à la santé.

Il s’agit sur ces thé­ma­tiques à la fois d’explorer le champ des oppor­tu­nités et con­traintes, de tester des solu­tions ou démarch­es sur nos pro­jets, puis d’en tir­er les enseigne­ments en vue de leur sys­té­ma­ti­sa­tion… ou pas. 

Les sujets n’étant par nature jamais figés, nous tra­vail­lons égale­ment sur la logis­tique urbaine avec deux clés d’entrée : l’investissement dans un hôtel de logis­tique urbain de 30 000 m² des­tiné à accueil­lir une diver­sité de solu­tions de logis­tique décar­bonée du dernier kilo­mètre et les con­di­tions de desserte des com­merces du cen­tre-ville d’une ville de 150 000 habi­tants, en l’occurrence Villeur­banne, avec l’enjeu de la qual­ité de l’air, de l’encombrement des espaces publics et la per­ti­nence économique des mod­èles mis en place.

Alors que notre pays vise la neutralité carbone d’ici 2050, comment vous projetez-vous sur ce marché ? Quels sont les principaux enjeux et freins qui persistent ?

Il ne s’agit pas pour nous d’un marché mais, comme je l’ai dit, d’un impératif et d’un incon­tourn­able dont per­son­ne ne détient seul les clés. Nous nous inscrivons ain­si dans une démarche col­lec­tive avec nos clients, qui sont prin­ci­pale­ment des col­lec­tiv­ités locales, et nos parte­naires des fil­ières de l’urbanisme, de l’ingénierie, de l’immobilier et de la con­struc­tion : ensem­ble, nous voulons réori­en­ter pro­gres­sive­ment nos pro­duc­tions en mas­si­fi­ant les solu­tions vertueuses et décar­bonées tout en maîtrisant les prix de sor­tie et en régu­lant les ques­tions fon­cières. Les enjeux économiques et soci­aux parais­sent de ce point de vue tout aus­si pri­mor­diaux que les enjeux tech­niques. Je suis per­suadé que décar­bon­er la Ville passera par un change­ment de par­a­digme qui fera la part belle à nos métiers d’aménageur, car il s’agira non plus d’étaler, ce qui est rel­a­tive­ment sim­ple, mais de recon­stru­ire la ville sur la ville. La prob­lé­ma­tique de l’accès à la ressource fon­cière sera de plus en plus stratégique, on le voit bien sur une métro­pole dynamique comme celle de Lyon. 

Comment vous adaptez-vous dans cette continuité ?

Nous mis­ons avant tout sur la for­ma­tion con­tin­ue de nos salariés et leur ouver­ture à notre écosys­tème de parte­naires et con­seils. Un point clé, dans nos métiers, me paraît de veiller en per­ma­nence à ce que nos démarch­es d’innovation restent bien con­nec­tées à l’opérationnel et au développe­ment de nos offres de ser­vice. En ce sens, ce n’est pas un hasard si nous avons fait le choix de ne pas con­stituer un ser­vice inno­va­tion en tant que tel, mais plutôt de dégager du temps à une dizaine de chefs de pro­jets pour qu’ils puis­sent, sous l’impulsion de l’un d’entre eux placé en posi­tion d’animateur de la démarche, faire un pas de côté et con­tribuer aux réflex­ions sur telle ou telle thé­ma­tique. Nous souhaitons ain­si réelle­ment nous inscrire dans un proces­sus d’acculturation con­tin­ue dans l’évolution de nos pra­tiques métiers.

Et aujourd’hui, quels sont vos axes de développement ?

Nous souhaitons tir­er pleine­ment par­tie de notre ADN d’entreprise publique locale pour impulser, tester et déploy­er des offres répon­dant aux attentes des ter­ri­toires. Nous avons notam­ment pour ambi­tion d’être un acteur engagé dans le défi du zéro arti­fi­cial­i­sa­tion nette, qui vise à attein­dre l’objectif d’absence de toute arti­fi­cial­i­sa­tion nette des sols d’ici 2050 et qui con­stitue une véri­ta­ble oppor­tu­nité pour nos métiers pour tra­vailler la désir­abil­ité et l’intensité urbaines. Avec une con­vic­tion, décar­bon­er la ville, c’est aus­si la ren­dre plus attractive. 

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