Quelques réflexions sur l’avenir énergétique mondial au XXIè siècle

Dossier : ExpressionsMagazine N°615 Mai 2006Par : Jacques FROT, ancien directeur dans le Groupe pétrolier Mobil

Contexte général, pertinence de la démarche

La crois­sance de la consom­ma­tion mon­diale d’éner­gie, essen­tiel­le­ment dans les Pays non OCDE (80% de la popu­la­tion mon­diale), sou­lève de mul­tiples pré­oc­cu­pa­tions qui conduisent à des efforts de recherche tous azimuts.

Trois consi­dé­ra­tions majeures, bien qu’en­vi­ron­nées d’in­cer­ti­tudes pour 2 d’entre elles, fondent ces préoccupations :

1) l’é­pui­se­ment pro­gres­sif, incer­tain quant à l’é­chéance, des res­sources pla­né­taires de pétrole et de gaz natu­rel à l’ho­ri­zon de quelques décennies ;
2) l’im­pact des Gaz à Effet de Serre (G.E.S : prin­ci­pa­le­ment CO2, mais aus­si méthane CH4) sur notre ave­nir cli­ma­tique, bien connu dans son méca­nisme mais incer­tain quant à l’é­chéance (c’est peut-être com­men­cé) et quant à la nature et à la sévé­ri­té des consé­quences : on peut les craindre catas­tro­phiques voire cataclysmiques ;
3) la réti­cence, bien réelle celle-là, des socié­tés mon­diales vis-à-vis des chan­ge­ments de com­por­te­ments et, notam­ment, vis à vis de l’éner­gie nucléaire. Cette réti­cence socié­tale est confor­tée par le manque de cou­rage des gouvernants.

Le pano­ra­ma éner­gé­tique du futur loin­tain, mi xxie et orée du xxiie siècle, dépen­dra du com­por­te­ment des hommes et de l’is­sue des recherches entre­prises dans la majo­ri­té des pays de l’OCDE, en par­ti­cu­lier aux USA, au Japon, en France et au Royaume Uni : abou­ti­ront-elles ? Quand abou­ti­ront-elles et quels résul­tats, tech­niques et éco­no­miques, donneront-elles ?

Les actuels domaines de la Recherche & Développement (R & D) en matière énergétique sont multiples.

Pétrole et gaz natu­rel : grâce à l’évolution des tech­niques (off­shore et exploi­ta­tion des pétroles non conven­tion­nels) on en trou­ve­ra de nou­velles res­sources ; com­bien ? À quel prix sau­ra-t-on les exploi­ter, c’est-à-dire les trans­for­mer en réserves ? La ques­tion ne se pose pas pour le char­bon, bien répar­ti géo­gra­phi­que­ment et abon­dant même si cer­taines des res­sources char­bon­nières sont inex­ploi­tables pour des rai­sons de mau­vaises qua­li­tés ou de dif­fi­cul­tés minières.

Hydrates de gaz (CH4), ils sont for­mi­da­ble­ment abon­dants mais :
1) dan­ge­reux (libé­ra­tion de CH4 d’où effet de serre intense) ;
2) très dis­per­sés d’où exploi­ta­tion extrê­me­ment pro­blé­ma­tique et coû­teuse ; CH4 → CO2 = GES à moins que ne soient maî­tri­sées la cap­ta­tion et la séques­tra­tion du carbone.

Réac­teurs nucléaires du futur (4e géné­ra­tion, G IV) : quand sera atteint, et à quel prix, l’objectif d’en faire des outils qua­si­ment sans déchets (ou si peu : les seuls pro­duits de fis­sion (PF) à vie pas très longue), non pro­li­fé­rants, encore plus sûrs et plus propres que les réac­teurs actuels (G III) ? Ils sau­ront fabri­quer de l’hydrogène, c’est cer­tain, par élec­tro­lyse ou par ther­mo­chi­mie ; ils feront de l’uranium et du tho­rium des res­sources éner­gé­tiques abon­dantes pour des mil­liers, voire des dizaines de mil­liers d’années. Quand abou­ti­ra la fusion, grande ambi­tion du XXIe siècle ? Elle pour­rait inter­ve­nir dans une pro­chaine réflexion sur les scé­na­rios éner­gé­tiques du XXIIe siècle !

Ave­nir cli­ma­tique : les craintes mon­diales, de plus en plus pré­cises, seront-elles confir­mées ? En corol­laire par­vien­dra-t-on de façon accep­table pour l’environnement à cap­tu­rer et à séques­trer le car­bone et cela de façon suf­fi­sam­ment éco­no­mique, uni­ver­selle et propre afin de par­ti­ci­per à la réso­lu­tion du pro­blème de l’accroissement de l’effet de serre ?

Éner­gies renou­ve­lables non hydrau­liques : vent, solaire (ther­mique et pho­to­vol­taïque PV), bio­masse. C’est cher mais c’est nou­veau ; leur poten­tiel d’amélioration (coûts et tech­niques) est donc signi­fi­ca­tif. Sau­ra-t-on, mal­gré les impé­ra­tifs incon­tour­nables de la ther­mo­dy­na­mique, s’affranchir de leur péna­li­té d’énergies douces, donc encom­brantes et chères et, pour le vent et le soleil, de leur carac­tère aléa­toire et inter­mit­tent ? On retrouve ici le pro­blème du sto­ckage de l’électricité (vent et solaire PV).

Hydro­gène : on sait le fabri­quer, on sau­ra le fabri­quer encore mieux, pro­pre­ment et de façon moins oné­reuse qu’aujourd’hui, cela ne fait pas de doute, par les voies de la bio­masse, du nucléaire ou autres éner­gies renou­ve­lables. Mais par­vien­dra-t-on à le sto­cker de façon sûre et à un coût sup­por­table, sous pres­sion, sous froid ou sous forme d’hydrures ? Y com­pris à bord d’automobiles ? L’objectif fixé par G. W. Bush au DoE en 2003 est-il acces­sible ? Cet objec­tif est que le nou­veau-né amé­ri­cain de 2003 pas­se­ra son per­mis de conduire (à 16 ans donc en 2019) à bord d’une voi­ture propre, fonc­tion­nant avec de l’hydrogène fabri­qué de façon propre et à un coût équi­valent à celui de l’essence.

Piles à com­bus­tible : elles font par­tie du plan hydro­gène amé­ri­cain avec pour objec­tif majeur l’automobile. Noter que les piles à com­bus­tibles car­bo­nés ne résou­draient qu’en faible par­tie le pro­blème de l’accroissement de l’effet de serre.

Sto­ckage de l’électricité sous forme légère, peu encom­brante et cor­res­pon­dant notam­ment aux besoins de la voi­ture par­ti­cu­lière. Une solu­tion effi­cace sera-t-elle enfin trouvée ?

Usages de l’énergie : ils dépen­dront des formes d’énergie, de leurs vec­teurs et des tech­no­lo­gies sup­port. Par exemple l’hydrogène sera-t-il uti­li­sé dans des moteurs ther­miques ou dans des piles à com­bus­tible ? Si sto­ckage et trans­port de l’hydrogène ne sont pas maî­tri­sés, ira-t-on vers un maxi­mum de trans­ports en com­mun et de trans­ports de mar­chan­dises conti­nen­taux élec­tri­fiés et un déve­lop­pe­ment, pour les mar­chan­dises, du fer­rou­tage, du flu­vial et du cabotage ?

Les aspects socié­taux pré­si­de­ront, eux aus­si, à l’avenir éner­gé­tique : les hommes recon­naî­tront-ils, accep­te­ront- ils ou refu­se­ront-ils les risques asso­ciés aux GES (le chan­ge­ment cli­ma­tique), aux bar­rages hydro­élec­triques, aux réac­teurs nucléaires, à ceux d’aujourd’hui qui fonc­tion­ne­ront encore quelques décen­nies et aux réac­teurs du futur, ceux de G IV, qui fonc­tion­ne­ront encore durant la pre­mière moi­tié du XXIIe siècle ; accep­te­ront- ils les risques asso­ciés aux trans­ports rou­tiers ; accep­te­ront-ils, exi­ge­ront- ils, refu­se­ront-ils que le déve­lop­pe­ment devienne durable mais aus­si uni­ver­sel ; vou­dront-ils qu’une gou­ver­nance mon­diale plus ou moins géné­reuse, plus ou moins direc­tive se sub­sti­tue à un libé­ra­lisme par­fois extrême et que cette gou­ver­nance mon­diale conduise à un com­ble­ment plus rapide du fos­sé de richesses qui sépare les riches (≥ 1 Ghab en 2000) des moins riches et des pauvres (≈ 5 Ghab) ?

Quelles seront les capa­ci­tés socié­tales à ne plus gas­piller l’énergie (OCDE) ou à se déve­lop­per sans la gas­piller (non-OCDE)? Par exemple, dans le ter­tiaire et l’habitat de l’OCDE sau­ra-t-on mettre en oeuvre les for­mi­dables gise­ments d’économies poten­tielles d’énergie d’ores et déjà iden­ti­fiés. Notons à ce pro­pos, plus géné­ra­le­ment, que, au-delà d’une consom­ma­tion par habi­tant supé­rieure au tiers de celle des habi­tants de l’OCDE, on ne voit plus de rela­tion entre l’espérance de vie à la nais­sance et la consom­ma­tion d’énergie.

L’augmentation des prix de l’énergie sera-t-elle le prin­ci­pal outil de modé­ra­tion de la consom­ma­tion au risque de favo­ri­ser les riches ? Quel sera l’impact éner­gé­tique de la déma­té­ria­li­sa­tion du PIB des riches (~ OCDE)? Quand, à quel rythme et jusqu’à quel point inter­vien­dra une telle déma­té­ria­li­sa­tion dans les pays non- OCDE ?

Les hommes pri­vi­lé­gie­ront-ils le ration­nel ou l’irrationnel ? Quelle sera l’attitude des gou­ver­nants ? Les coûts éner­gé­tiques seront-ils le pro­mo­teur de la sagesse ?

Remarque : Le sou­ci d’économies d’énergie n’est que la consé­quence de deux pro­blèmes primordiaux :

1) épui­se­ments pro­bables et pro­chains (≤ 2100?) du pétrole et du gaz d’où ren­ché­ris­se­ment inévi­table et consé­quent de ces deux sources d’énergie, ain­si que du char­bon par effet de concurrence ;

2) risque de chan­ge­ment cli­ma­tique lié aux consom­ma­tions de fos­siles car­bo­nés. Si les hommes par­ve­naient à maî­tri­ser des sources d’énergie à la fois bon mar­ché, propres et inépui­sables ou qua­si inépui­sables, alors l’objectif d’économies d’énergie aurait-il encore un sens ? Momen­ta­né­ment (quelques décen­nies, peu­têtre un demi ou un siècle), le poids énorme (> 80%) des fos­siles car­bo­nés dans le bilan éner­gé­tique mon­dial et l’inertie socié­tale face au carac­tère pro­chain voire immé­diat de ces deux menaces font qu’il est urgent d’économiser l’énergie.

Bref, beau­coup de ques­tions, beau­coup d’espoirs, beau­coup d’enjeux mais aus­si de for­mi­dables incer­ti­tudes. Trop d’incertitudes pour qu’on se lance dans l’exercice de pré­vi­sions. Et les solu­tions qui sor­ti­ront des actuels efforts de R & D deman­de­ront, avant qu’on les trouve et que l’on puisse les mettre en oeuvre, des décen­nies d’efforts coûteux.

Une fois mises en oeuvre ces solu­tions vivront vrai­sem­bla­ble­ment long­temps, cer­tai­ne­ment au-delà de la fin du XXIe siècle.

La ques­tion du pano­ra­ma éner­gé­tique à cet hori­zon est suf­fi­sam­ment grave et les constantes de temps (de quelques décen­nies à cin­quante ou cent ans) suf­fi­sam­ment longues pour que l’élaboration de scé­na­rios éner­gé­tiques 2050–2100 soit consi­dé­rée comme une démarche pertinente.

Quatre scénarios

Les quatre scé­na­rios étu­diés excluent l’hypothèse d’un cata­clysme pla­né­taire car alors l’exercice devien­drait sans inté­rêt : ni guerre uni­ver­selle, ni pan­dé­mie, ni météo­rite géante…

La fusion : l’hypothèse est ici que la fusion ne sera pas une source d’énergie avant, au mieux, 2100.

Pas d’hydrates de CH4 dans nos scé­na­rios. Cette hypo­thèse signi­fie que d’autres res­sources, moins chères, plus acces­sibles et moins péna­li­santes pour l’en­vi­ron­ne­ment sont sup­po­sées dis­po­nibles jus­qu’en 2100.

La popu­la­tion mon­diale est sup­po­sée évo­luer de la même façon dans les 4 scé­na­rios : 6,1 Ghab en 2001 (1,1 OCDE + 5 non-OCDE) 9 en 2050 (1,1 + 7,9) et 10 (1,1 + 8,9) en 2100 ; la crois­sance est donc sup­po­sée se situer dans les seuls pays non-OCDE.

Le para­mètre fon­da­teur, com­mun aux 4 scé­na­rios, est le carac­tère plus ou moins ver­tueux du com­por­te­ment des hommes.

Les para­mètres secon­daires dont les « valeurs », variables d’un scé­na­rio à l’autre, carac­té­risent cha­cun de ces 4 scé­na­rios sont : 

• gou­ver­nance éner­gé­tique mon­diale : à par­tir de quand et avec quelle rigueur ?
• atti­tude vis-à-vis des géné­ra­tions futures : quel niveau de res­pon­sa­bi­li­té et à par­tir de quand ? déve­lop­pe­ment durable ;.
• atti­tude (géné­ro­si­té, efforts d’é­du­ca­tion, trans­mis­sion de savoir faire) des pays riches (OCDE) vis-à-vis des PVD ;
• recon­nais­sance du risque cli­ma­tique : à par­tir de quand et avec quelle rigueur ;
• recon­nais­sance des risques d’é­pui­se­ment pétrole, gaz : tout de suite ou plus tard ou igno­rance pure et simple ;
• efforts d’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique : tout de suite ou plus tard ; plus ou moins vigoureux ;
• course au PIB : dans l’OCDE frei­nage ou continuité ;
• accep­ta­tion du nucléaire : quand et quel niveau d’universalité ;
• >la séques­tra­tion du CO2 : beau­coup, un peu ou pas du tout ; bien­tôt ou plus tard.

Quatre scénarios du futur, dont 2 extrêmes encadrent l’évolution imaginable du panorama énergétique mondial. (Tableau 1)

a) Un scénario laxiste SSS (Scénario Sans Souci)

Tableau 1 SVa SVb SVc SSS
PARAMÈTRES Hyper­ver­tueux immédiatement Ver­tueux > 2020–2030 Ver­tueux très modé­ré > 2050 Ver­tueux très modé­ré > 2050
Gou­ver­nance énergétique Monde immédiat Monde ; + tard Par­tielle ; ++ tard Non
Pro­blèmes climat Recon­nu ; immédiat Recon­nu ; + tard Recon­nu ; ++ tard Ignoré
Déve­lop­pe­ment durable Oui ; immédiat Oui ; + tard Oui ; ++ tard Non
Géné­ro­si­té OCDE non-OCDE Oui ; immédiat Oui ; + tard Oui ; ++ tard Non
Épui­se­ment du pétrole et du gaz Recon­nu ; immédiat Recon­nu ; + tard Recon­nu ; ++ tard Ignoré
Inten­si­té énergétique Effort ; immédiat Modé­ré ; + tard Modeste ; ++ tard Non
Course au PIB (OCDE) STOP Frei­née ; + tard Frei­née ; ++ tard Go !
Nucléaire accepté Monde ; immédiat Monde ; + tard Monde ; ++ tard = 2000
Séques­tra­tion CO2 30% en 2100 20% en 2100 10% en 2100 Non


Point de repère extrême et insup­por­table : celui du conser­va­tisme extrême.

Les géné­ra­tions actuelles assu­mant les pro­blèmes posés par l’hé­ri­tage reçu de leurs ancêtres, ce scé­na­rio SSS sup­pose que les géné­ra­tions futures assu­me­ront de même l’hé­ri­tage qu’elles rece­vront. Chan­ge­ment cli­ma­tique et épui­se­ment des res­sources de pétrole et gaz sont ignorés.

Les pays riches sont sup­po­sés ne pas chan­ger de com­por­te­ment ; les pays non-OCDE sont sup­po­sés se mettre dans le sillage des riches

Les courses au PIB et à la consom­ma­tion per­durent ; les pays Non-OCDE se mettent dans cette course. En 100 ans le PIB mon­dial est qua­si­ment quin­tu­plé, prin­ci­pa­le­ment au pro­fit des pays Non-OCDE dont le PIB serait, lui, décuplé.

Aucun effort d’é­co­no­mies d’éner­gie : l’in­ten­si­té éner­gé­tique (consom­ma­tion d’éner­gie par uni­té de PIB) reste sen­si­ble­ment stable, à son niveau de l’an­née 2000.

Quelques chiffres 2100 résument le scé­na­rio SSS : La Consom­ma­tion mon­diale d’E­ner­gie Pri­maire (CEP) est, en 2100, voi­sine de 50 Gtep, presque quin­tuple de celle de 2000 (10 Gtep) ; les pays non-OCDE consom­me­ront 85% du total mon­dial au lieu de 45% en 2000 ; les éner­gies fos­siles car­bo­nées (pétrole + gaz natu­rel + char­bon) pèse­ront, comme en 2001 près de 80% du bilan éner­gé­tique mon­dial ; le nucléaire 7% (comme en 2001); les ENR (vent, soleil, géo­ther­mie) dis­pa­raissent (0,5% en 2001); la teneur de l’at­mo­sphère en CO2 (la part du CO2 issue des com­bus­tibles fos­siles car­bo­nés) est, en 2100, le triple de celle de 2000. (voir figures 1, 2 et 3)

b) Un scénario SVa vertueux à l’extrême et immédiatement.

Ce scé­na­rio SVa, inac­ces­sible point de repère, est l’autre extrême des com­por­te­ments imaginables.

Figure 1
Consom­ma­tion d’énergie pri­maire (CEP)

Les hommes sont conscients des grands pro­blèmes et jugent immi­nents les dan­gers : épui­se­ments pro­chains (quelques décen­nies, au mieux fin de siècle) du pétrole et du gaz natu­rel ; risque cli­ma­tique avé­ré et pris en compte. S’y ajoute la recon­nais­sance du carac­tère dan­ge­reux pour la paix du monde de l’i­né­gale répar­ti­tion des richesses. Les prix de l’éner­gie ajoutent leurs effets salu­taires en faveur de com­por­te­ments moins « énergie-voraces »

Le carac­tère pla­né­taire de ces pro­blèmes conduit les riches (OCDE) à don­ner immé­dia­te­ment aux pays non-OCDE l’exemple ou plu­tôt les exemples de l’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique, de la pro­pre­té éner­gé­tique et de la modé­ra­tion du PIB ; les riches s’as­so­cient pour orga­ni­ser immé­dia­te­ment une gou­ver­nance éner­gé­tique mon­diale dont le pre­mier but est d’ac­cé­lé­rer l’en­ri­chis­se­ment des plus pauvres, ceci dans un contexte de bonne effi­ca­ci­té éner­gé­tique c‑à-d d’in­ten­si­té éner­gé­tique décrois­sante. Cette gou­ver­nance vise à faire conver­ger le déve­lop­pe­ment des pays non-OCDE vers une struc­ture de richesses du même type que celle de l’OCDE. L’aide OCDE aux pays non-OCDE est, dans ce scé­na­rio SVa, tech­no­lo­gique et édu­ca­tive, une sorte de Plan Mar­shall pla­né­taire de four­ni­ture de maté­riel et de savoir-faire. Les prin­ci­paux axes de cette aide sont effi­ca­ci­té éner­gé­tique et culture de sûre­té (indis­pen­sable au déve­lop­pe­ment mon­dial du nucléaire).

L’élé­ment moteur du chan­ge­ment est le concept de déve­lop­pe­ment durable : d’a­bord la chasse aux com­bus­tibles fos­siles car­bo­nés, le déve­lop­pe­ment des éner­gies propres et abon­dantes mais aus­si la chasse au gas­pillage énergétique .

Le PIB / habi­tant de l’OCDE 2100 vs 2001 n’aug­mente pas et dimi­nue même légè­re­ment, ces pays riches aban­don­nant la course à l’ac­crois­se­ment du PIB. Le PIB / hab non-OCDE (Asie, ex URSS et Europe Est / cen­trale) rejoint celui de l’OCDE en 2100 mais demeure en retard en Amé­rique latine et très en retard en Afrique. Aujourd’­hui (début xxie siècle) le niveau de PIB dans l’OCDE inter­dit tout déve­lop­pe­ment durable.

La déma­té­ria­li­sa­tion du PIB des pays OCDE par­ti­cipe à la modé­ra­tion de leurs consom­ma­tions d’éner­gies. Cette déma­té­ria­li­sa­tion du PIB dans les pays non-OCDE n’in­ter­vien­dra que dans la deuxième moi­tié du xxie siècle, après qu’ils aient enfin acquis « la richesse matérielle ».

La chasse aux fos­siles car­bo­nées (causes G.E.S et / ou épui­se­ment pétrole et gaz) entraî­ne­ra un déve­lop­pe­ment consi­dé­rable de l’élec­tri­ci­té (nucléaire et pro­duite par les éner­gies nou­velles renou­ve­lables (ENR)) que seuls le solaire ther­mique (sur­tout dans les lati­tudes moyennes) et la géo­ther­mie modé­re­ront de façon significative.

L’in­ten­si­té éner­gé­tique OCDE est sup­po­sée, à l’ho­ri­zon 2100, dimi­nuer de moi­tié vs 19902000. Cette hypo­thèse cor­res­pond gros­siè­re­ment aux résul­tats de l’é­tude d’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique pré­sen­tée dans l’é­tude Ener­gie 2010–2020 du Com­mis­sa­riat Géné­ral au Plan fran­çais. À l’i­mage des efforts réa­li­sés par la Chine, qui a divi­sé par 2 son inten­si­té éner­gé­tique entre 1990 et 2000 (Ref AIE), les pays non OCDE sont sup­po­sés, dans ce scé­na­rio SVa, orien­ter pré­co­ce­ment leur déve­lop­pe­ment dans un contexte de bonne effi­ca­ci­té éner­gé­tique, ceci avec l’aide maté­rielle et édu­ca­tive de l’OCDE.

L’éner­gie nucléaire est sup­po­sée uni­ver­sel­le­ment accep­tée et recon­nue comme durable dès le milieu du siècle : cette accep­ta­tion est favo­ri­sée par :
1) les réac­teurs de 4ème géné­ra­tion (GIV) à sécu­ri­té intrinsèque,
2) la mul­ti­pli­ca­tion par 100 des res­sources fis­siles (ura­nium et tho­rium) grâce aux réac­teurs sur­gé­né­ra­teurs (RNR et Sels fondus),
3) la recon­nais­sance socié­tale uni­ver­selle de la bonne ges­tion des déchets,
4) le déve­lop­pe­ment d’une bonne culture de sûre­té dans les pays non OCDE.

Figure 2
CEP Monde-éner­gie (quatre scénarios)


 
Figure 3
C02 dans l’atmosphère

Cette éner­gie nucléaire du futur sau­ra fabri­quer de l’hy­dro­gène, par élec­tro­lyse ou pro­cé­dés ther­mo­chi­miques. Elle sera de plus « co-géné­ra­trice » de cha­leur et de des­sa­le­ment d’eau : ses ren­de­ments éner­gé­tiques glo­baux seront donc clai­re­ment supé­rieurs (peut-être doubles) à ceux d’aujourd’hui.

Des tech­niques de séques­tra­tion du CO2 sont maî­tri­sées, reçoivent une accep­ta­tion socié­tale et sont mises en œuvre. Elles sont tou­te­fois sup­po­sées ne per­mettre de séques­trer que 30% du CO2 (grosses indus­tries émettrices).(Figures 2 et 3) Quelques chiffres 2100 résument le scé­na­rio SVa : La consom­ma­tion mon­diale d’éner­gie pri­maire (CEP) avoi­sine en 2100 20 Gtep, presque double de celle de 2000 (10 Gtep) ; les pays non OCDE consom­me­ront près des 34 du total mon­dial au lieu de 45% en 2000 ; les éner­gies fos­siles car­bo­nées (pétrole + gaz natu­rel + char­bon) pèse­ront encore près du ¼ du bilan éner­gé­tique mon­dial (à com­pa­rer à 80% en 2000) ; le nucléaire 45% (à com­pa­rer à 30% seule­ment dans la France de 2000); les ENR (vent, soleil, géo­ther­mie) un bon 15% (0,5% en 2001); la teneur de l’at­mo­sphère en CO2 com­mence à décroître dans la deuxième moi­tié du siècle mais est encore, en 2100, supé­rieure de 50% à celle de 2000. (voir figures 1, 2 et 3)

C’est donc l’é­cart SSS / SVa qui défi­nit la plage dans laquelle se situe­ra, en 2100, le pano­ra­ma éner­gé­tique mon­dial ima­gi­né par ces scénarios.

c) Un scénario SVb raisonnablement vertueux mais pas tout de suite

La ver­tu ne com­mence à s’ins­tal­ler que dans 2 ou 3 décen­nies et de façon moins intense. Les para­mètres décrits en SVa évo­luent plus tard et moins vite.

La course au PIB / tête de l’OCDE ne se calme qu’a­près 2050. 

L’in­ten­si­té éner­gé­tique OCDE et non OCDE sera maî­tri­sée plus tar­di­ve­ment et plus mollement

La séques­tra­tion du CO2 est plus modeste (20% du CO2 séques­tré en 2100).

Quelques chiffres 2100 résument le scé­na­rio SVb :

La CEP1 est, en 2100, presque triple de celle de 2000 ; les pays non OCDE consom­me­ront envi­ron 85% du total mon­dial (45% en 2001) ; fos­siles car­bo­nés et nucléaire ont sen­si­ble­ment la même impor­tance et repré­sentent, à elles 2, les ¾ du bilan éner­gé­tique mon­dial ; les ENR 12% ; la teneur de l’at­mo­sphère en CO2 croît tout au long du siècle et atteint, en 2100, plus du double de la teneur 2000 mais la pro­gres­sion se ralen­tit après 2050. (voir figures 1, 2 et 3)

d) Un scénario SVc encore plus modestement vertueux et encore plus tard

La ver­tu ne s’ins­tal­le­ra que vers le milieu du siècle et modérément.

Les para­mètres décrits en SVa évo­luent donc encore plus tard et encore moins vite qu’en SVb.

Le PIB /habitant de l’OCDE ne cesse pas de croître d’i­ci la fin du siècle.

Les efforts d’in­ten­si­té éner­gé­tique se réduisent encore com­pa­rés à SVb.

La séques­tra­tion du CO2 n’est plus que de 10% en 2100

Quelques chiffres 2100 résument le scé­na­rio SVc :

La CEP 2100 est proche du qua­druple de celle de 2001 ; les pays non OCDE consom­me­ront plus de 85% du total mon­dial (45% en 2001) ; les fos­siles car­bo­nés pèsent 60% du bilan éner­gé­tique mon­dial ; le nucléaire un bon 20% (7% en 2001) ; les ENR (vent, soleil et géo­ther­mie) 6% ; la teneur de l’at­mo­sphère en CO2 croît tout au long du siècle et atteint, en 2100, près du triple de la teneur 2000 ; sa pro­gres­sion se ralen­tit à peine en 2100. (voir figures 1, 2 et 3)

Ces 4 scé­na­rios sont-ils recevables ?
Les pics de pro­duc­tion de pétrole et de gaz se pro­dui­ront très vrai­sem­bla­ble­ment durant la pre­mière moi­tié du siècle.
Le scé­na­rio SVa (« hyper-ver­tueux immé­dia­te­ment) s’en accom­mo­de­rait vraisemblablement.
Au contraire, le scé­na­rio SVb (« rai­son­na­ble­ment ver­tueux un peu plus tard) n’est pro­ba­ble­ment pas com­pa­tible avec ces 2 pics de pro­duc­tion même si la conver­sion du char­bon (aux res­sources pla­né­taires abon­dantes et bien dis­tri­buées géo­gra­phi­que­ment) en com­bus­tibles liquides et en gaz est propre à retar­der le problème.
Quant aux scé­na­rios SVc (modé­ré­ment ver­tueux à comp­ter de 2050) et SSS, à coup sûr ils ne passent pas : leur seule ver­tu est de mettre en évi­dence le carac­tère incon­tour­nable d’une modi­fi­ca­tion dras­tique et immé­diate des comportements.

Les marges de manœuvre

Les usages énergétiques

Les prin­ci­paux gise­ments d’é­co­no­mies se situent dans les trans­ports (en 2001 : 26% de la Consom­ma­tion Finale d’E­ner­gie (CFE : voir au § 2 ci-après ce qui dis­tingue CFE de CEP) et dans l’en­semble dit « Autres sec­teurs » (en 2001 : 40% de la CFE) qui com­prend en par­ti­cu­lier l’ha­bi­tat, le ter­tiaire et les ser­vices publics. (don­nées AIE 2003).

Remarque : Les indus­triels (en 2001 : 31% de la CFE), moti­vés par le sou­ci de com­pé­ti­ti­vi­té, ont fait des efforts consi­dé­rables d’é­co­no­mies d’éner­gie depuis plu­sieurs décen­nies (75% de la CFE en 1973). Ils approchent de l’asymptote.

Certes cette asymp­tote s’a­bais­se­ra à cause de l’aug­men­ta­tion des prix de l’éner­gie entraî­née par les pénu­ries pré­vi­sibles de pétrole et gaz natu­rel. Mais les éco­no­mies sup­plé­men­taires à espé­rer dans le domaine indus­triel sont modestes com­pa­rées au poten­tiel d’é­co­no­mies dans les trans­ports, l’ha­bi­tat et le ter­tiaire. Une baisse signi­fi­ca­tive des consom­ma­tions indus­trielles ne pour­raient venir que d’un évè­ne­ment socié­tal majeur : fin de la socié­té de consom­ma­tion au sens de fin du gas­pillage. L’a­gri­cul­ture ne pèse que 1 à 2% de la CFE mon­diale et ne peut donc repré­sen­ter un gise­ment signi­fi­ca­tif d’é­co­no­mies d’énergie.

Les vecteurs énergétiques

C’est la forme sous laquelle l’éner­gie finale est consommée.

Le pétrole en terre est une éner­gie ; l’es­sence un vec­teur éner­gé­tique, comme l’élec­tri­ci­té. La fabri­ca­tion des vec­teurs éner­gé­tiques est très « éner­gi­vo­race » et ceci de plus en plus : en 2001 elle coû­tait ⅓ de la consom­ma­tion d’éner­gie pri­maire (CEP) à com­pa­rer à ¼ en 1973. Une expli­ca­tion à cette évo­lu­tion : la part de l’élec­tri­ci­té dans la CFE aug­mente et, plus géné­ra­le­ment, l’éner­gie finale est de plus en plus sophis­ti­quée (ex : il faut plus d’éner­gie pour fabri­quer un litre d’es­sence en 2001 qu’en 1973).

Les vec­teurs sont en concur­rence per­ma­nente et le « résul­tat des courses » évo­lue avec les coûts éner­gé­tiques (mais éga­le­ment socié­taux, sani­taires et envi­ron­ne­men­taux) asso­ciés à chaque vec­teur : ther­mies ↔ élec­tri­ci­té ; Ther­mies solaires, bio, ou géo­ther­miques ↔ ther­mies ex fos­siles car­bo­nés ; Élec­tri­ci­té ↔ car­bu­rants ; Elec­tri­ci­té nucléaire ↔ élec­tri­ci­té renou­ve­lable ; Hydro­gène ↔ car­bu­rants pétro­liers (?); Hydro­gène solaire ou bio ↔ hydro­gène nucléaire.

Les gaspillages de la société de consommation

La socié­té de consom­ma­tion fabrique de l’ob­so­les­cence anti­ci­pée et emplit les pou­belles d’ob­jets non pas usés mais démo­dés. Est-ce durable ? Vrai­sem­bla­ble­ment NON. Une ques­tion socié­tale sur­git : l’a­ve­nir sera-t-il à « Avoir moins et Être plus » ou à « Avoir et Être autre­ment » étant enten­du que « Être » consomme moins d’éner­gie que « Avoir ».

La dématérialisation du PIB

Elle est vrai­sem­bla­ble­ment déjà enga­gée dans cer­taines couches sociales des pays de l’OCDE ; reste à savoir si elle s’é­ten­dra et à quel rythme. Quant aux pays non OCDE, on ne peut ima­gi­ner une déma­té­ria­li­sa­tion du PIB qu’a­près l’ac­cès de leurs popu­la­tions au néces­saire : nombre de PVD en sont encore loin.

Il est rai­son­nable de pen­ser que les coûts éner­gé­tiques seront l’un des prin­ci­paux moteurs de cette déma­té­ria­li­sa­tion, concept qui, lui aus­si, pose la ques­tion « Être ou Avoir »

Les coûts

Bien que cette démarche « scé­na­rios » ne soit pas une démarche « pré­vi­sion », on peut consi­dé­rer comme qua­si cer­tain que le monde connaî­tra, au cours de ce siècle, des conver­sions éner­gé­tiques majeures et coû­teuses : nucléaire et ENR prin­ci­pa­le­ment, mais aus­si explo­ra­tions minières (pétrole, gaz…) plus dif­fi­ciles, séques­tra­tion du carbone…

Pour causes d’ho­ri­zons trop loin­tains et de nou­veau­tés tech­no­lo­giques qui n’en sont encore qu’au stade R&D, il n’est pas sérieux de pré­tendre répondre à la ques­tion du coût.

Le cas du nucléaire mérite cepen­dant atten­tion car, dans les 3 scé­na­rios « ver­tueux », SVa, SVb et SVc, son déve­lop­pe­ment est signi­fi­ca­tif. D’autre part, alors qu’il pro­duit le kWh le moins cher, l’in­ves­tis­se­ment qu’il demande est lourd. Une approche gros­sière est pos­sible : à l’ho­ri­zon 2100, le nucléaire pèse­rait de l’ordre de 10 Gtep/an et exi­ge­rait ain­si la construc­tion, sur 100 ans, de 5000 GW de puis­sance ins­tal­lée soit, au coût de 3$/W (cycle com­plet : explo­ra­tion, pro­duc­tion de mine­rai, trai­te­ment, enri­chis­se­ment, fabri­ca­tion du com­bus­tible, construc­tion des réac­teurs, retrai­te­ment des com­bus­tibles usés et ges­tion des déchets), 15000 G$ ou, en moyenne chaque année et pen­dant 100 ans, 1 à 2‰ du pro­duit brut mon­dial. Noter ici que le pro­gramme nucléaire fran­çais a coû­té chaque année et durant 25 ans, 4‰ du PIB de notre pays.

Aux condi­tions actuelles, le déve­lop­pe­ment des ENR coû­te­rait encore plus cher : mais elles sont jeunes et sus­cep­tibles de dimi­nu­tions signi­fi­ca­tives de leurs coûts d’investissement.

Espoirs et problèmes


Ils sont multiples mais 2 sujets retiennent particulièrement l’attention :

a). Les transports :

si, à l’i­mage des USA, l’au­to­mo­bile (aujourd’­hui en jouissent dans le monde 1 habi­tant sur 4, bien­tôt 1 sur 3) enva­hit les pays non OCDE (c’est en cours en Chine et en Inde soit 40% de la popu­la­tion mon­diale pour l’en­semble de ces 2 seuls pays) et ceci de façon pérenne, la route va poser le double pro­blème de l’é­pui­se­ment du pétrole/gaz (même si le char­bon peut être un sub­sti­tut tem­po­raire) et du risque cli­ma­tique. Avec deux voies d’es­poir : l’hy­dro­gène et l’électricité.

L’hy­dro­gène : il en fau­drait, à l’ho­ri­zon 2100 et pour 2 mil­liards de véhi­cules (700 mil­lions aujourd’­hui), au moins 1 Gt/an dans le meilleur des cas (piles à hydro­gène), au pire 2 fois plus (moteurs ther­miques ali­men­tés à l’hy­dro­gène). On sait le fabri­quer, c’est très cher et sa fabri­ca­tion et sa mise en œuvre exigent, avec les pro­cé­dés maî­tri­sés aujourd’­hui, au moins 2 fois plus d’éner­gie qu’il n’en res­ti­tue­ra ; on peut croire que l’on sau­ra faire mieux et moins cher. Mais il fau­dra le sto­cker, le trans­por­ter, le mettre à bord des véhi­cules : ou bien sous 700 bars, ou à ‑253°c ou sous forme d’hy­drures. Ces pro­blèmes sont à l’é­tude : ils néces­si­te­ront des rup­tures scien­ti­fiques et tech­no­lo­giques. Seront-elles réus­sies ? Il faut beau­coup d’i­ma­gi­na­tion et de confiance dans les cher­cheurs pour y croire, comme le Pré­sident Bush.

Les trans­ports élec­triques : dans quelques décen­nies le che­min de fer à grande vitesse aura peut-être détrô­né l’a­vion sur les dis­tances de 2 à 3000 kms comme il l’a détrô­né sur Paris-Mar­seille. Quant au match fer-voi­ture son issue dépen­dra du coût du pétrole, du risque cli­ma­tique, de la maî­trise de la solu­tion hydro­gène, de l’is­sue (très dou­teuse) des recherches sur le sto­ckage d’élec­tri­ci­té mas­sif, léger et peu encom­brant, …et de la capa­ci­té des socié­tés de che­min de fer à faci­li­ter les trans­ports d’extrémité.

Les trans­ports de mar­chan­dises, confron­tés aux mêmes pro­blèmes, se détour­ne­ront peut-être de la route au pro­fit du fer­rou­tage, du flu­vial, du cabo­tage et du trans­port de camions par bateau.

b. La captation et la séquestration du carbone

Aujourd’­hui les hommes déposent chaque année et pour l’é­ter­ni­té, dans leur bio­sphère, 7 Gt de C pro­ve­nant des com­bus­tibles fos­siles. Tout tran­site par l’at­mo­sphère sous forme de 25 Gt/an de CO2 : la moi­tié est rapi­de­ment reprise par le sol, la végé­ta­tion et les océans ; l’autre moi­tié séjourne une cen­taine d’an­nées dans l’at­mo­sphère, créant le risque cli­ma­tique. Il semble que cette menace soit plus proche de nous que l’é­pui­se­ment des fos­siles car­bo­nés. D’où l’i­dée de séques­trer le gaz car­bo­nique. Plu­sieurs voies sont explo­rées : séques­tra­tion géo­lo­gique (puits de pétrole ou de gaz avec pro­duc­tions addi­tion­nelles de pétrole et de gaz ; veines char­bon­nières avec pro­duc­tion de méthane ; dômes de sel) ; séques­tra­tion océa­nique en eaux pro­fondes (avec risque de res­ti­tu­tion ulté­rieure à l’at­mo­sphère); séques­tra­tion ter­restre. Un effort inter­na­tio­nal de R & D est conduit par le Car­bon Seques­tra­tion Lea­der­ship Forum (CSLF). 17 pays, dont la France, y par­ti­cipent. Il est clair que toutes les voies explo­rées sou­lèvent des pro­blèmes envi­ron­ne­men­taux. Quelques sites de séques­tra­tion géo­lo­gique de CO2 sont d’ores et déjà exploi­tés aux USA et au Canada.

CONCLUSIONS


Une vague de rup­tures scien­ti­fiques et tech­niques vien­dra à l’ap­pui des conver­sions énergétiques.

Le bon sens socié­tal et le cou­rage poli­tique per­met­tront-ils la mise en œuvre de ces conversions ?

Bien­tôt un nuage pla­né­taire de gaz car­bo­nique ? Aujourd’­hui : un océan d’incertitudes.….dont on pressent les frontières.

Le pano­ra­ma éner­gé­tique des 21ème et 22ème siècles dépen­dra de la capa­ci­té socié­tale à accep­ter ou à refu­ser les risques asso­ciés à l’ac­crois­se­ment de l’ef­fet de serre, ceux liés à l’éner­gie nucléaire, aux trans­ports indi­vi­duels et à l’é­pui­se­ment des éner­gies fos­siles. Il dépen­dra aus­si des efforts d’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique et de la volon­té de se pré­oc­cu­per des pro­chaines géné­ra­tions. In fine, ce pano­ra­ma dépen­dra du choix que feront les hommes entre le ration­nel et l’ir­ra­tion­nel. Un haut fonc­tion­naire de la Com­mis­sion Euro­péenne disait en novembre 2001 « Ceux qui veulent à la fois réduire les émis­sions de gaz à effet de serre, sor­tir du nucléaire, avoir une sécu­ri­té d’ap­pro­vi­sion­ne­ment et sont contre les éoliennes car c’est mau­vais pour les oiseaux vont devoir faire des choix. ».

Une remarque par­ti­cu­lière à l’éner­gie nucléaire : elle est jeune, a l’âge qu’a­vait le che­min de fer en 1880. Vou­loir « Sor­tir du Nucléaire » est un com­bat d’ar­rière-garde auquel il faut sub­sti­tuer une lutte en vue d’un nucléaire durable, encore plus sûr et encore plus propre.

Durant une grande par­tie de ce siècle les bien­tôt 10 mil­liards d’hommes auront besoin de toutes les éner­gies et, en toute hypo­thèse, plus que tout, d’EF­FI­CA­CI­TÉ ÉNERGÉTIQUE. Il serait inéqui­table que les prix de l’éner­gie en soient le seul moteur.


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Réfé­rence
 : toutes don­nées his­to­riques sont issues de l’AIE « Key World Ener­gy Sta­tis­tics 2003 »

1. Consom­ma­tion d’énergie primaire.

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