Prévention et santé au travail : comment les entreprises peuvent-elles s’emparer de ce sujet ?

Dossier : Supplément : Fintech & croissanceMagazine N°785 Mai 2023
Par Camille MOSSE
Par Lionel NATAF (X88)

Au cours des dernières années, la ques­tion de la san­té au tra­vail et de la préven­tion est dev­enue de plus en plus prég­nante. Si les entre­pris­es et les pou­voirs publics ont tou­jours eu con­science de l’importance de sujet, beau­coup reste à faire sur le ter­rain, au cœur des entre­pris­es. Camille Mosse, Direc­trice Tech­nique et Offres du départe­ment Health, et Lionel Nataf (X88), mem­bre du Comité Exé­cu­tif de Mer­cer, nous expliquent com­ment Mer­cer appréhende cet enjeu afin d’accompagner les entreprises.

Pouvez-vous nous rappeler les métiers et le positionnement de Mercer ?

Mer­cer, fil­iale de Marsh McLen­nan, acteur majeur du con­seil en ressources humaines depuis plus de 75 ans, accom­pa­gne la trans­for­ma­tion des entre­pris­es de toutes tailles pour repenser le monde du tra­vail en mod­ernisant leurs régimes de san­té, de prévoy­ance et de retraite mais aus­si en recon­sid­érant la ges­tion de leurs tal­ents pour amélior­er leur per­for­mance et leur bien-être.
Cette trans­for­ma­tion passe égale­ment par la dig­i­tal­i­sa­tion des proces­sus, tant pour les fonc­tions RH que Finance, que Mer­cer pro­pose en s’appuyant sur la solu­tion Cloud Work­day per­me­t­tant aux organ­i­sa­tions de gag­n­er en agilité et en performance.
Les direc­tions finan­cières peu­vent aus­si béné­fici­er des con­seils et solu­tions tech­nologiques sur-mesure de Mer­cer pour opti­miser leurs straté­gies d’investissement.

“En France, Mercer déploie aussi son expertise auprès des TPE-PME, des travailleurs indépendants et des particuliers.”

En France, Mer­cer déploie aus­si son exper­tise auprès des TPE-PME, des tra­vailleurs indépen­dants et des par­ti­c­uliers (cou­ver­ture san­té et prévoy­ance, com­plé­men­taires san­té étu­di­ante, famille ou senior, épargne salar­i­ale, mul­ti­risque, retraite, mobil­ité inter­na­tionale, téléas­sis­tance, assureur emprun­teur,…) grâce à son départe­ment dédié « Mes Solu­tions Mercer ».

Aujourd’hui, Mer­cer compte env­i­ron 25 000 col­lab­o­ra­teurs – dont plus de 700 en France, répar­tis sur 12 sites — implan­tés dans 43 pays, qui aident au quo­ti­di­en ses clients à con­stru­ire un avenir plus promet­teur dans 130 pays.

Le groupe Marsh McLen­nan (NYSE : MMC) — spé­cial­iste mon­di­al de la ges­tion des risques et du courtage d’assurance — s’appuie sur 85 000 col­lab­o­ra­teurs et présente un chiffre d’affaires annuel de plus de 20 mil­liards $ par l’intermédiaire de ses qua­tre entités : Mer­cer, Marsh, Guy Car­pen­ter et Oliv­er Wyman.

Dans un contexte marqué par la réforme des retraites, la santé des salariés est un enjeu structurant. Qu’en est-il ? Quel regard portez-vous sur ce sujet ?

La san­té des salariés est un sujet qui est au cœur des préoc­cu­pa­tions des entre­pris­es et des employeurs pour divers­es raisons. En effet, un salarié en mau­vaise san­té s’absente plus sou­vent et peut poten­tielle­ment être en arrêt mal­adie, par­fois longue durée. Ces absences pèsent finan­cière­ment sur les con­trats d’assurance, elles ont des impacts forts sur l’organisation du tra­vail et sur la per­for­mance économique de l’entreprise.

“La santé des salariés est un sujet qui est au cœur des préoccupations des entreprises et des employeurs pour diverses raisons.”

À un autre niveau, la prise en compte de la san­té et du bien-être de ses col­lab­o­ra­teurs est aujourd’hui un impor­tant vecteur d’attraction et de réten­tion des tal­ents sur un marché du tra­vail en forte ten­sion. Pren­dre soin de ses col­lab­o­ra­teurs con­tribue à ren­forcer leur engage­ment. Les enquêtes que nous réal­isons régulière­ment le prou­vent : le rap­port au tra­vail a forte­ment évolué. Les salariés atten­dent désor­mais de leur employeur bien plus que leur rémunéra­tion : ils ont, en effet, des attentes et des besoins plus mar­qués en ter­mes de qual­ité de vie au tra­vail, d’équilibre vie pro / vie perso…

Ce sujet est encore plus impor­tant aujourd’hui dans un con­texte de réforme de la retraite où il est demandé aux salariés de tra­vailler plus longtemps. Si on veut que les Français tra­vail­lent jusqu’à 64 ans et au-delà, il est pri­mor­dial de se préoc­cu­per de leur san­té et de leur bien-être afin qu’ils soient en capac­ité de rester en activité.

Comment les entreprises doivent-elles se positionner par rapport à ce sujet ? Quel rôle doivent-elles jouer ?

La san­té des Français relèvent bien sur pri­or­i­taire­ment de la respon­s­abil­ité de la Sécu­rité Sociale et de l’Assurance Mal­adie. Un bud­get sig­ni­fi­catif est d’ailleurs alloué en ce sens à la préven­tion en France (0,6 % du PIB soit une moyenne de 222 euros par habi­tant d’après la Cour des Comptes). Toute­fois, mal­gré ces investisse­ments sig­ni­fi­cat­ifs réal­isés par l’Assurance Mal­adie, l’impact et l’empreinte des actions menées, comme les cam­pagnes gra­tu­ites de vac­ci­na­tion ou de dépistage, restent très lim­ités, voir médiocre d’après la Cour des Comptes. Nous pou­vons citer par exem­ple, dans le cadre de la lutte con­tre le papil­lo­mavirus, le taux de vac­ci­na­tion qui peine à attein­dre 25 %, loin der­rière nos pays voisins européens.

“La santé des Français relèvent bien sur prioritairement de la responsabilité de la Sécurité Sociale et de l’Assurance Maladie.”

Forte de ce con­stat, l’entreprise pour laque­lle la san­té des col­lab­o­ra­teurs, est un enjeu cri­tique, a voca­tion à jouer un rôle à ce niveau, en com­plé­ment des ini­tia­tives menées par la Sécu­rité sociale Très sim­ple­ment, les employeurs sont beau­coup plus proches de leur col­lab­o­ra­teur que ne l’est la Sécu­rité Sociale. Elles peu­vent donc non seule­ment soutenir les actions de préven­tion, mais aus­si con­tribuer au quo­ti­di­en à l’amélioration de la san­té de leurs collaborateurs.
Depuis la pandémie, le sujet de la qual­ité de vie au tra­vail, de la san­té men­tale et de l’équilibre vie pro/perso a gag­né en visibilité.

Comment accompagnez-vous les entreprises dans ce cadre ? Quels sont les leviers à leur disposition ?

Ces notions ne sont pas nou­velles et le sujet de la préven­tion est prég­nant en France depuis plus de 10 ans, sans toute­fois pro­duire des effets. Pour bâtir notre stratégie en la matière, nous avons donc cher­ché à com­pren­dre les raisons de cet échec et à iden­ti­fi­er les fac­teurs clés de suc­cès d’une poli­tique de préven­tion. Trois points sail­lants ont alors émergé de notre analyse et nous ont servi pour asseoir notre stratégie.

Pre­mière­ment, la poli­tique de l’entreprise doit être ciblée et adap­tée aux besoins de san­té des salariés et non à l’idée qu’on peut se faire de ces prob­lé­ma­tiques. Les out­ils et l’exploitation de la data sont aujourd’hui pos­si­bles pour accom­pa­g­n­er la réflex­ion des entre­pris­es et les aider à mieux cibler les actions de préven­tion per­ti­nentes. Nous com­mençons donc tou­jours par réalis­er un diag­nos­tic basé sur l’exploitation des don­nées au regard des prin­ci­paux enjeux de san­té en France : la san­té buc­co-den­taire, les mal­adies graves, le can­cer du sein, etc… Cette démarche nous per­met d’indiquer à nos clients les risques pri­or­i­taires sur lesquels ils doivent con­cen­tr­er leurs efforts.

“Le sujet de la prévention est prégnant en France depuis plus de 10 ans, sans toutefois produire des effets.”

Deux­ième­ment, nous tra­vail­lons sur la val­ori­sa­tion des actions déployées pour accroitre l’usage et donc l’impact des solu­tions. Les ser­vices et les actions de préven­tion san­té doivent être portés effi­cace­ment à la con­nais­sance des salariés con­cernés pour avoir un réel impact. Pour opti­miser cette vis­i­bil­ité auprès des salariés, nous cap­i­tal­isons sur notre por­tail mis à la dis­po­si­tion de nos assurés, sur lequel ils con­sul­tent déjà leurs dépens­es de san­té. Sur ce por­tail, ces derniers peu­vent désor­mais accéder facile­ment à l’ensemble des ser­vices de préven­tion dont ils bénéficient.

Enfin, nous nous sommes intéressés à une dimen­sion qui n’était jusque-là pas cou­verte par les offres disponibles sur le marché : le suivi et la mesure de l’impact de notre stratégie sur l’entreprise. Nous avons ain­si dévelop­pé un por­tail dédié pour que les entre­pris­es suiv­ent en temps réel l’utilisation et l’impact de ces ser­vices à dif­férents niveaux (absen­téisme, impact sur le con­trat com­plé­men­taire san­té…). Ces trois axes que nous adres­sons spé­ci­fique­ment sont les clés de la réus­site d’une démarche de préven­tion et de san­té au travail.

Et pour conclure, quelles pistes de réflexion pourriez-vous partager avec nos lecteurs ?

Dans le con­texte actuel, il y a une ten­dance infla­tion­niste au niveau des prix des con­trats d’assurance san­té et de prévoy­ance. D’autres élé­ments con­jonc­turels et struc­turels vont égale­ment se réper­cuter sur les prix : désen­gage­ment de la Sécu­rité Sociale, évo­lu­tion des tar­ifs des médecins… Les entre­pris­es ne doivent pas appréhen­der ces sujets comme une fatal­ité, car il est pos­si­ble de lim­iter ces impacts. Par­mi les leviers qu’elles peu­vent action­ner, il y a juste­ment le fait de tra­vailler sur la préven­tion et l’amélioration de la san­té de leurs collaborateurs.

Si cette stratégie présente l’avantage de con­tenir les coûts, il s’agit de sur­croit d’une démarche qui présente l’avantage de fédér­er l’ensemble des par­ties autour d’un pro­jet vertueux : employeur, parte­naires soci­aux, assureurs…

Poster un commentaire