Présentation au drapeau de la promotion 1999

Dossier : ExpressionsMagazine N°560 Décembre 2000

Sui­vant la tra­di­tion, la pré­sen­ta­tion au Dra­peau de la pro­mo­tion 1999 s’est tenue le same­di 21 octobre en pré­sence d’une nom­breuse assis­tance. Elle a été aus­si l’occasion pour les familles de faire connais­sance avec l’École.

Cette année, la céré­mo­nie était pré­si­dée par Mon­sieur Alain Richard, ministre de la Défense. Tout s’est remar­qua­ble­ment dérou­lé et après le pas­sage en revue des élèves, la musique et le défi­lé ont été appré­ciés par toute l’assistance. Le dis­cours du géné­ral de Noma­zy, direc­teur géné­ral de l’École, s’adressant aux élèves, a rete­nu leur attention.

Ensuite la mati­née s’est pour­sui­vie à l’amphithéâtre Poin­ca­ré où après un mot d’accueil de Mon­sieur Pierre Faurre, pré­sident du conseil d’administration de l’École, Mon­sieur Alain Richard a pro­non­cé l’allocution que nous publions ci-après. L’amphithéâtre était plein mais on pou­vait suivre du Grand hall par vidéo.

Discours de Monsieur Alain Richard, ministre de la Défense, à l’École polytechnique

Mes­sieurs les Parlementaires,
Mon­sieur le Préfet,
Mes­sieurs les Élus locaux,
Mon­sieur le Haut-Commissaire,
Mon­sieur le Président,
Mon­sieur le Direc­teur général,
Mes­sieurs les Offi­ciers généraux,
Mes­sieurs les Directeurs,
Mes­dames, Messieurs,

Je suis très heu­reux de venir pour la deuxième fois pré­si­der la céré­mo­nie de pré­sen­ta­tion au dra­peau d’une pro­mo­tion, aujourd’hui la pro­mo­tion 99. D’abord parce que votre École n’est pas une ins­ti­tu­tion comme les autres, qu’elle est le sym­bole de la qua­li­té des écoles d’ingénieurs fran­çaises et de l’excellence de notre recherche scien­ti­fique. Mais je suis tout par­ti­cu­liè­re­ment heu­reux de venir saluer votre École alors que s’achève la mise en place de la réforme de la sco­la­ri­té qui s’appliquera en grande par­tie à votre pro­mo­tion et en tota­li­té à la pro­mo­tion 2000.

Les grands objectifs du “ projet X‑2000 ” – la vocation de l’École polytechnique

Il s’agit bien sûr du “pro­jet X‑2000 ” dont j’avais annon­cé, il y a deux ans, à vos cama­rades les grandes lignes. J’avais alors sou­hai­té une mobi­li­sa­tion rapide et intense de toutes les éner­gies de votre École pour le mettre en œuvre rapi­de­ment. Je vou­drais aujourd’hui remer­cier tous ceux qui ont per­mis d’avancer ain­si dans cette voie : Pierre Faurre, le pré­sident de l’École, les direc­teurs géné­raux suc­ces­sifs, le corps ensei­gnant et les cher­cheurs, l’ensemble des per­son­nels civils et mili­taires ain­si que la com­mu­nau­té poly­tech­ni­cienne qui a sou­te­nu ces évolutions.

En adap­tant l’esprit de Poly­tech­nique aux évo­lu­tions de notre envi­ron­ne­ment, vous res­tez fidèles à l’esprit et aux hautes exi­gences des fon­da­teurs de cette Ins­ti­tu­tion, Car­not et Monge. Ils ont vou­lu mettre à contri­bu­tion, par une for­ma­tion appro­priée, les meilleurs talents scien­ti­fiques, pour construire une nation moderne. Cette idée fon­da­trice est plus que jamais d’actualité.

Le “pro­jet X‑2000 ” per­met aujourd’hui de ren­for­cer la triple voca­tion de l’École poly­tech­nique : for­mer, pour les entre­prisesdes cadres à fort poten­tiel, des inno­va­teurs, des jeunes ayant l’esprit d’entreprise ; for­mer, pour la recherche, des savants de haut niveau aptes à abor­der les domaines les plus nou­veaux ; for­mer, pour les ser­vices de l’Étatde futurs hauts fonc­tion­naires qui pour­ront appré­hen­der, dans un cadre mul­ti­na­tio­nal ou com­mu­nau­taire, les aspects les plus nova­teurs des mis­sions de l’État.

À titre d’exemple, en tant que ministre de la Défense, je peux témoi­gner de l’importance pour mon minis­tère de dis­po­ser, grâce au Corps de l’armement, d’ingénieurs de haut niveau pour don­ner à notre pays les capa­ci­tés néces­saires à la maî­trise de l’ensemble des dimen­sions de sa sécu­ri­té et de sa défense. Par ailleurs, la pré­sence d’officiers issus de l’École poly­tech­nique au sein des forces armées per­met d’en diver­si­fier le recru­te­ment et d’y insuf­fler l’esprit d’excellence de Polytechnique.

La varié­té des par­cours des anciens élèves de l’École poly­tech­nique est un apport indé­niable pour le pays. Elle sera ren­for­cée par la diver­si­fi­ca­tion du recru­te­ment des élèves fran­çais, et par l’augmentation du nombre d’élèves étrangers.

Ce contact gar­dé entre vous après l’École, et qui fait votre force, sachez en faire un réseau créa­tif pour l’intérêt géné­ral, sans le lais­ser déri­ver vers le tra­di­tio­na­lisme ou le cor­po­ra­tisme. Faites-le rayon­ner dans un esprit d’ouverture et d’échange. L’École res­te­ra ain­si un élé­ment de notre patri­moine, sym­bo­li­sant un atta­che­ment pro­fond à l’élitisme répu­bli­cain, à la ratio­na­li­té et à la rigueur scien­ti­fiques, et aux res­sources de l’intelligence créatrice.

La fidé­li­té aux tra­di­tions et aux valeurs de l’École d’une part, cette ambi­tion nou­velle à la hau­teur des enjeux de la mon­dia­li­sa­tion d’autre part sont au cœur du “pro­jet X‑2000”. Pour cela, il met en œuvre trois axes qui me paraissent essentiels.

La modernisation du cursus de formation des élèves

Le pre­mier est la moder­ni­sa­tion du cur­sus de for­ma­tion des élèves. Elle doit s’appuyer sur les points forts qui ont tou­jours été ceux de la for­ma­tion dis­pen­sée à l’École.

Il s’agit d’abord, au cours des deux pre­mières années, de la for­ma­tion poly­scien­ti­fique des élèves, qui per­met de déve­lop­per leurs qua­li­tés de rigueur, d’intuition et d’innovation. Elle est la base de l’image d’excellence scien­ti­fique de l’enseignement dis­pen­sé par l’École et des qua­li­tés de poly­va­lence recon­nues à ses anciens élèves.

Il s’agit éga­le­ment de 1’importance accor­dée à la for­ma­tion humaine. Cette spé­ci­fi­ci­té, qui trouve son ori­gine dans le sta­tut mili­taire que l’École a héri­té de l’histoire, est aus­si un puis­sant atout pour l’avenir.

Il est en effet essen­tiel que les poly­tech­ni­ciens, appe­lés à exer­cer d’importantes res­pon­sa­bi­li­tés, acquièrent les qua­li­tés humaines qui en sont le sup­port, le goût du tra­vail en équipe, et aus­si le sens des res­pon­sa­bi­li­tés civiques et sociales. Ce sont ces qua­li­tés qui vous per­met­tront d’exercer vos res­pon­sa­bi­li­tés avec 1e sens de l’intérêt col­lec­tif et la recon­nais­sance de vos par­te­naires. Le main­tien du sta­tut mili­taire dans le contexte de la sup­pres­sion du ser­vice natio­nal contri­bue­ra aus­si à ren­for­cer le lien entre la nation et les Armées, ce à quoi je suis par­ti­cu­liè­re­ment attentif.

Il s’agit enfin, au cours des 3e et 4e années, d’acquérir une com­pé­tence scien­ti­fique et pro­fes­sion­nelle plus spé­cia­li­sée recon­nue à l’échelle inter­na­tio­nale. Cette deuxième phase de la sco­la­ri­té ren­force la diver­si­té du cur­sus de for­ma­tion ce qui per­met­tra à chaque élève de bâtir pro­gres­si­ve­ment son propre pro­jet professionnel.

Cette moder­ni­sa­tion de la for­ma­tion exige en par­ti­cu­lier le déve­lop­pe­ment d’une péda­go­gie inno­vante, inté­grant les nou­velles tech­no­lo­gies de l’information et de la com­mu­ni­ca­tion, sur­tout dans la pers­pec­tive de la qua­trième année pro­fes­sion­na­li­sante, qui se déroule au sein d’écoles d’ingénieurs, d’universités ou d’écoles doc­to­rales, fran­çaises ou étrangères.

La qua­trième année de for­ma­tion ren­for­ce­ra les liens déjà impor­tants de l’École avec les ins­ti­tu­tions dis­pen­sant cette for­ma­tion com­plé­men­taire. À titre d’exemple, j’ai noté avec satis­fac­tion les pro­jets de créa­tion de nou­veaux labo­ra­toires com­muns avec 1’ENSTA.

Cela va éga­le­ment rap­pro­cher l’École des entre­prises et de leurs centres de recherche ; la déci­sion récente du groupe Danone d’implanter un impor­tant centre de recherche juste à côté de l’École en est, déjà, une pre­mière confirmation.

L’internationalisation de l’École polytechnique

Le deuxième axe du “pro­jet X‑2000” c’est l’internationalisation de l’École polytechnique.

L’École doit s’imposer comme une grande ins­ti­tu­tion de for­ma­tion au plan euro­péen et mon­dial. Soyez conscients qu’elle est sou­mise à une concur­rence vive qui néces­site de s’adapter rapi­de­ment afin que ses diplômes jouissent de la plus grande recon­nais­sance pos­sible au plan international.

La lisi­bi­li­té de son nou­veau cur­sus l’y aide­ra. Mais il faut éga­le­ment aug­men­ter encore le recru­te­ment d’élèves étran­gers, en pro­ve­nance notam­ment des pays de l’Union euro­péenne. L’École poly­tech­nique a déjà enga­gé des efforts impor­tants pour élar­gir le recru­te­ment des élèves. En accueillant 79 élèves étran­gers au sein de la pro­mo­tion 99, l’École est en avance sur bien des écoles d’ingénieurs.

Cela passe éga­le­ment par une inter­na­tio­na­li­sa­tion, dans des pro­por­tions adap­tées, du corps ensei­gnant et du centre de recherche.

La dimen­sion inter­na­tio­nale de l’École résul­te­ra enfin du déve­lop­pe­ment de ses capa­ci­tés d’enseignement et de recherche.

Le développement des capacités d’enseignement et de recherche 

C’est donc logi­que­ment le troi­sième axe du “ pro­jet X‑2000 ”, car le poten­tiel scien­ti­fique d’une école est le prin­ci­pal cri­tère de qua­li­té recon­nu au plan international.

Les efforts finan­ciers que l’État consent pour l’École sont très impor­tants. Il est cepen­dant illu­soire d’imaginer que les res­sources publiques pour­ront accom­pa­gner seules les déve­lop­pe­ments néces­saires en matière de recherche et d’enseignement.

L’École doit donc réus­sir, seule ou en par­te­na­riat avec d’autres éta­blis­se­ments ou entre­prises, à déve­lop­per ses res­sources propres. Je sou­haite que l’École se mobi­lise sur cet objec­tif en visant notam­ment à davan­tage valo­ri­ser les tra­vaux de recherche. Les recherches d’une excep­tion­nelle qua­li­té qui sont menées ici doivent plus sou­vent conduire à des appli­ca­tions indus­trielles, notam­ment par le démar­rage de “ jeunes pousses ” inno­vantes. Ceci per­met­tra de déve­lop­per l’esprit d’entreprise des élèves, et ren­for­ce­ra les liens entre l’École et le monde de l’entreprise.

L’extension LULI 2000 du Labo­ra­toire pour l’utilisation des lasers intenses (LULI) que j’ai eu le plai­sir d’inaugurer ce matin, est un bon exemple de la vita­li­té du centre de recherche. Le déve­lop­pe­ment du LULI s’appuie sur des par­te­na­riats ren­for­cés avec les grands acteurs de la recherche fran­çaise, notam­ment le CNRS, le CEA et l’INSERM. Le LULI 2000 illustre la qua­li­té de cette coopé­ra­tion, puisqu’il est une Uni­té mixte du CNRS, du CEA, de l’École poly­tech­nique et de l’Université Paris VI. Il asso­cie éga­le­ment les col­lec­ti­vi­tés locales. Il a voca­tion à deve­nir une grande ins­tal­la­tion euro­péenne, qui contri­bue­ra au rayon­ne­ment de l’École et qui devrait sus­ci­ter un grand nombre de déve­lop­pe­ments com­muns avec l’industrie.

Ce pro­jet est éga­le­ment un modèle des syner­gies entre les efforts de recherche civile et mili­taire. Roger-Gérard Schwart­zen­berg et moi-même sommes très atta­chés à déve­lop­per cette dua­li­té mutuel­le­ment béné­fique. Le ren­for­ce­ment des efforts de la Défense en matière de recherche consti­tue l’une des prio­ri­tés de mon action car cela condi­tionne l’accès pérenne de nos forces aux capa­ci­tés tech­no­lo­giques qui leur sont nécessaires.

Au total, le plan “X 2000” est de nature à per­mettre à l’École poly­tech­nique de se don­ner les moyens de rele­ver le défi de la concur­rence mon­diale des orga­nismes de for­ma­tion et de recherche. L’État, l’École et ses par­te­naires se sont mobi­li­sés très tôt pour enga­ger une réflexion pro­fonde. Il vous reste aujourd’hui à “ trans­for­mer l’essai ”.

Aux élèves de la promotion 99

Je vou­drais ter­mi­ner mon pro­pos en m’adressant plus par­ti­cu­liè­re­ment à vous, les élèves de la pro­mo­tion 99.

Au cours des deux siècles écou­lés, l’École poly­tech­nique a su évo­luer consi­dé­ra­ble­ment. À votre tour, sachez évo­luer, pre­nez-en l’initiative, pour pro­lon­ger l’élan de vos anciens. L’adaptation n’est-elle pas une ver­tu scientifique ?

Le domaine scien­ti­fique néces­site, je crois, de l’opiniâtreté, et en même temps de l’aptitude à chan­ger : savoir renon­cer à ses hypo­thèses, en inven­ter d’autres, les dis­qua­li­fier à leur tour pour trou­ver enfin les bonnes solu­tions. Bref, tou­jours conser­ver la méthode, mais savoir faire son deuil des pos­tu­lats dépassés.

Le bap­tême de votre pro­mo­tion est un jour impor­tant pour vous. Il l’est aus­si pour vos parents et vos familles, qui sont pré­sents autour de vous aujourd’hui, car ils ont for­te­ment contri­bué à votre réus­site dont ils peuvent être légi­ti­me­ment fiers.

Ce jour solen­nel est aus­si pour moi l’occasion de vous rap­pe­ler vos enga­ge­ments. Édu­qués comme une élite de la connais­sance et du savoir, vous avez plus de devoirs que d’autres. Grâce à votre tra­vail, grâce aus­si à l’investissement de la col­lec­ti­vi­té, vous avez main­te­nant, cha­cune et cha­cun d’entre vous, votre rôle à jouer dans la construc­tion de notre ave­nir commun.

En vous sou­hai­tant bonne chance pour vos enga­ge­ments et vos pro­jets futurs, je garde à l’esprit notre tâche exi­geante de main­te­nir ici ce pôle d’excellence qui par­ti­cipe nota­ble­ment à nos suc­cès col­lec­tifs dans le monde.

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Le Ministre a inau­gu­ré l’extension LULI 2000 du Labo­ra­toire pour l’utilisation des lasers intenses (LULI). Ce labo­ra­toire, situé dans l’enceinte de l’École, est com­mun au CNRS, au CEA, à l’École poly­tech­nique et à l’Université Paris VI. Le LULI pos­sède déjà les plus grands lasers civils français.

Cette visite inau­gu­rale du Ministre de la Défense a mis en avant l’intérêt des efforts conjoints entre recherches civile et de défense. LULI 2000 avec ses retom­bées tech­no­lo­giques déve­lop­pées en par­te­na­riat avec de nom­breux indus­triels des nou­velles tech­no­lo­gies au sein de la Val­lée de l’Optique (qui regroupe les ins­ti­tuts de recherche et les indus­triels autour de la val­lée d’Orsay et des pla­teaux de Saclay- Palai­seau et Mar­cous­sis) en est le meilleur exemple.

Après le cock­tail, puis le déjeu­ner, l’après-midi a été bien rem­plie par les “ portes ouvertes aux labo­ra­toires ” et la visite de l’exposition Bienvenüe.

Enfin la confé­rence scien­ti­fique de Mon­sieur Jean-Louis Mar­tin, pro­fes­seur de bio­lo­gie, Bio­lo­gie de “ l’après génome ” : l’heure du décloi­son­ne­ment et des syner­gies puis le concert pré­sen­té par Musi­ca­lix, Les chœurs de l’armée fran­çaise, avec Mozart, Schu­bert, Ver­di et Ber­lioz ont bien clô­tu­ré cette journée.

Tous les par­ti­ci­pants méritent d’être féli­ci­tés pour le dérou­le­ment de cette jour­née dont les familles se sou­vien­dront longtemps.

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