Nouvelle-Aquitaine Très Haut Débit (NATHD), un opérateur d’infrastructure pas comme les autres !

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°776 Juin 2022
Par Mathieu HAZOUARD

Nou­velle-Aquitaine Très Haut Débit (NATHD) exploite et com­mer­cialise ses pro­pres réseaux de fibre optique. Math­ieu Hazouard, son prési­dent, nous explique le posi­tion­nement de cet acteur unique et inno­vant qui bous­cule les codes du monde des télécommunications.

Présentez-nous Nouvelle-Aquitaine Très Haut Débit. 

NATHD est l’opérateur d’infrastructures mis en place par la Région Nou­velle-Aquitaine et les col­lec­tiv­ités de sept départe­ments ruraux néo-aquitains (la Dor­dogne, les Lan­des, le Lot-et-Garonne, la Char­ente, la Cor­rèze, la Creuse et la Haute-Vienne) pour con­tribuer à l’aménagement numérique des ter­ri­toires et plus par­ti­c­ulière­ment l’exploitation du réseau Fibre d’initiative publique et sa com­mer­cial­i­sa­tion auprès des opéra­teurs four­nisseurs d’accès à internet.

Quelles sont les caractéristiques de votre modèle ?

C’est un mod­èle inno­vant qui s’appuie sur une démarche d’aménagement du ter­ri­toire portée par une dynamique de ser­vice pub­lic pour apporter le très haut débit et la fibre à tous les habi­tants de la Nou­velle-Aquitaine. Ce par­ti pris nous per­met de pal­li­er de manière con­crète le manque d’investissement privé sur notre ter­ri­toire. NATHD est un opéra­teur d’infrastructures qui com­mer­cialise ses réseaux de fibre et qui génère ain­si un retour sur investisse­ment pour ses action­naires publics, les syn­di­cats mixtes numériques qui sont en charge de la con­struc­tion du réseau. De manière générale, dans cer­taines régions où les opéra­teurs privés ne con­stru­isent pas d’infrastructures, la puis­sance publique et plus par­ti­c­ulière­ment la Région, les Départe­ments, les com­mu­nautés de com­mune, l’État et par­fois l’Europe vien­nent financer ces infra­struc­tures. Nou­velle-Aquitaine Très Haut Débit ajoute un nou­veau niveau d’intervention en exploitant la fibre et en louant les réseaux aux opéra­teurs com­mer­ci­aux qui veu­lent déploy­er des ser­vices de télé­phonie, de télévi­sion, d’internet fixe… à des­ti­na­tion des par­ti­c­uliers et des entre­pris­es. Cette exploita­tion et cette com­mer­cial­i­sa­tion nous per­me­t­tent de rentabilis­er les investisse­ments que nous avons engagés. Aujourd’hui, nous dépas­sons les 100 000 usagers et exploitons près de 350 000 pris­es. À terme, le réseau comptera un total de 720 000 pris­es éli­gi­bles (foy­ers, entre­pris­es, collectivités).

Comment appréhendez-vous cette question de la couverture du territoire ? 

À l’heure actuelle, elle n’est pas encore totale­ment effec­tive. Toutes les par­ties prenantes se mobilisent pour accélér­er le déploiement des réseaux de fibre optique alors que l’arrêt du réseau his­torique, en cuiv­re, est prévu en 2030. Il faut main­tenir cet effort col­lec­tif pour que chaque Français et Française puisse avoir accès au très haut débit. C’est une ques­tion d’équité alors qu’il existe encore de très fortes dis­par­ités entre les grandes métrop­o­les et les zones moins dens­es et rurales. À mon sens, c’est aus­si une ques­tion d’équilibre démoc­ra­tique, une dimen­sion qui est, d’ailleurs, au cœur de notre action et de notre engagement !

Au niveau de la commercialisation de la fibre, quels sont les sujets qui vous mobilisent ? 

Si les réseaux nous appar­ti­en­nent, nous ne sommes pas des opéra­teurs de télé­com­mu­ni­ca­tions. Notre objec­tif est que l’ensemble des opéra­teurs soient présents de manière trans­par­ente et non dis­crim­i­na­toire sur notre ter­ri­toire pour répon­dre aux besoins de nos habitants.

Aujourd’hui, les qua­tre prin­ci­paux opéra­teurs, des opéra­teurs de prox­im­ité ain­si que 45 opéra­teurs d’entreprise sont présents en Nou­velle-Aquitaine, sur notre périmètre d’intervention.

En par­al­lèle, notre enjeu est aus­si d’améliorer le taux de com­mer­cial­i­sa­tion de nos réseaux. En col­lab­o­ra­tion avec les com­munes et les com­mu­nautés de com­munes, nous met­tons égale­ment en œuvre des actions pour pré­par­er l’arrivée de la fibre et inscrire notre activ­ité dans un mod­èle économique pérenne. Au-delà, avec l’État et l’Arcep, nous tra­vail­lons sur l’optimisation du mod­èle économique de notre struc­ture afin que nos recettes de com­mer­cial­i­sa­tion du réseau soient bien en équili­bre vis-à-vis de nos charges d’exploitation. Toute­fois, les tar­ifs actuels, sous con­trôle de l’Arcep depuis 2016, nous sem­blent plutôt bas, et risquent de ne pas nous per­me­t­tre de cou­vrir totale­ment nos charges d’exploitation d’autant que le secteur vit actuelle­ment des évo­lu­tions fortes qui n’ont pas été suff­isam­ment anticipées (absence de ser­vice uni­versel, dis­pari­tion du cuiv­re, risques cli­ma­tiques liés au réchauf­fe­ment). Il est essen­tiel de tra­vailler sur cet aspect pour être en capac­ité notam­ment de pro­pos­er à l’ensemble des util­isa­teurs une qual­ité de ser­vice aus­si bien pour leurs usages pro­fes­sion­nels que personnels.

Enfin, il s’agit aus­si pour nous de pou­voir dévelop­per des nou­veaux usages à con­di­tion que les évo­lu­tions du secteur des télé­com­mu­ni­ca­tions nous per­me­t­tent de con­serv­er un équili­bre économique. 

L’actualité est notamment marquée par le décommissionnement du cuivre. Qu’en est-il ?

Aujourd’hui, il n’est pas per­ti­nent de con­serv­er deux réseaux aus­si bien sur un plan tech­nique, d’exploitation que financier. L’arrêt du réseau de cuiv­re représente un événe­ment majeur dans le secteur des télé­com­mu­ni­ca­tions et mar­que ain­si le bas­cule­ment d’une infra­struc­ture vieil­lis­sante vers une nou­velle. Toute­fois, il est impératif d’être vig­i­lant au cal­en­dri­er et cadence­ment du retrait du cuiv­re afin de garan­tir que ce réseau ne soit pas retiré dans une zone qui ne béné­fi­cie pas encore de la fibre afin que les habi­tants ne soient pas privés des ser­vices qu’ils utilisent au quo­ti­di­en. Il faut aus­si garder à l’esprit que ce réseau est aus­si util­isé pour des téléser­vices notam­ment d’assistance, d’alarme, de soins à domi­cile… Cela représente des aspects qu’il faut bien pren­dre en con­sid­éra­tion dans ce cadre.

Avec la fin du service universel, comment voyez-vous votre rôle ? 

Ce mécan­isme qui per­me­t­tait à tous les Français d’avoir accès à l’infrastructure en cuiv­re, mais aus­si aux per­son­nes en sit­u­a­tion de pré­car­ité d’avoir accès à une tar­i­fi­ca­tion sociale n’existe plus depuis novem­bre dernier. His­torique­ment, Orange était le seul acteur sus­cep­ti­ble d’être désigné par l’État afin de ren­dre ce ser­vice dont le finance­ment était assuré par les autres opéra­teurs. Aujourd’hui, il s’agit de savoir qui doit pren­dre en charge le rac­corde­ment des habi­ta­tions et locaux pro­fes­sion­nels au réseau. Beau­coup ren­voie la ges­tion du ser­vice uni­versel à des opéra­teurs d’infrastructures et des sociétés publiques locales comme NATHD sans qu’un cadre légal, organ­i­sa­tion­nel et financier n’ait été prévu et mis en place. Nous avons été pen­sés comme un out­il au ser­vice de l’aménagement du ter­ri­toire. Si nous devons faire évoluer notre mis­sion afin d’étendre notre périmètre et nous voir con­fi­er de nou­velles mis­sions comme le ser­vice uni­versel, l’enjeu est de bien pren­dre en compte l’ensemble des dimen­sions, notam­ment économiques, pour con­stru­ire un mod­èle pérenne et effi­cient qui fonc­tionne de manière optimale.

Quels sont les autres sujets et enjeux qui vous mobilisent ? 

Au cœur de nos préoc­cu­pa­tions, on retrou­ve égale­ment la ques­tion de l’accès aux ser­vice fibre dédié aux entre­pris­es qui ont des besoins spé­ci­fiques dif­férents de ceux du grand pub­lic comme la garantie de temps de rétab­lisse­ment en cas de coupure de ser­vice. En effet, face à une panne, un pro­fes­sion­nel ne peut pas atten­dre une semaine avant que le réseau soit rétabli. 

Au-delà, il est impor­tant de gag­n­er en vis­i­bil­ité pour que les entre­pris­es quels que soient leurs tailles et leurs besoins nous con­nais­sent et sachent qu’elles peu­vent être rac­cordées à la fibre en Nou­velle-Aquitaine. L’idée est, en effet, aus­si de garder ces acteurs économiques sur le ter­ri­toire, y com­pris dans les zones éloignées des grands cen­tres urbains. 

Enfin, à un éch­e­lon local, avec d’autres départe­ments, nous réfléchissons à com­ment inven­ter des ser­vices et des usages pour prof­iter des réseaux que nous avons créés. C’est d’ores et déjà une nou­velle étape qui se pro­file pour NATHD. 

Nou­velle-Aquitaine Très Haut Débit exploite et com­mer­cialise le réseau pub­lic fibre de 7 départe­ments néo aquitains

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