Mode et développement durable

Mode et développement durable : quels leviers de transformation en 2021 ?

Dossier : Les X et la modeMagazine N°768 Octobre 2021
Par Maeva BESSIS
Par Géraldine VALLEJO (99)
Par Jeanne VICÉRIAL
Par Thérèse BOON FALLEUR

À La Caserne, quelques mois avant l’ouverture en sep­tembre 2021 de ce nou­vel espace qui se défi­nit comme le plus grand accé­lé­ra­teur de tran­si­tion éco­lo­gique dédié à la filière mode et luxe en Europe, trois femmes enga­gées dans la mise en œuvre et la pro­mo­tion d’une mode res­pon­sable se sont retrou­vées pour par­ta­ger leurs réflexions : Mae­va Bes­sis, direc­trice géné­rale de La Caserne, Géral­dine Val­le­jo, direc­trice des pro­grammes déve­lop­pe­ment durable chez Kering et Jeanne Vicé­rial, doc­teure en desi­gn mais aus­si desi­gner tex­tile et artiste qui se défi­nit comme chi­rur­gienne du vêtement.

« Le déve­lop­pe­ment durable répond aux besoins du pré­sent sans com­pro­mettre la capa­ci­té des géné­ra­tions futures à répondre aux leurs » : c’est de cette manière que le terme a été défi­ni à l’Assemblée géné­rale de l’ONU le 4 août 1987. Ce terme, lar­ge­ment popu­la­ri­sé aujourd’hui, ne sera pour­tant pris en compte par l’industrie de la mode qu’une ving­taine d’années plus tard, au moment où l’opinion publique s’empare d’actualités comme l’effondrement meur­trier du Rana Pla­za (1 127 morts par­mi les ouvriers et ouvrières de cette usine tex­tile à Dac­ca au Ban­gla­desh en 2013) ou comme les réa­li­tés éco­no­miques et envi­ron­ne­men­tales désas­treuses des gigan­tesques décharges de vête­ments qui ne cessent de gran­dir dans cer­tains pays d’Afrique subsaharienne.


REPÈRES

L’industrie de la mode est res­pon­sable de 2,1 mil­liards de tonnes d’émissions de CO₂ par an, soit envi­ron 4 % du total mondial. 

L’industrie de la mode émet à peu près la même quan­ti­té de CO₂ par an que les éco­no­mies de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni réunies. 

Selon la Fon­da­tion Ellen MacAr­thur, la pro­duc­tion de vête­ments a dou­blé au cours des quinze der­nières années, sous l’impulsion d’une classe moyenne crois­sante et des consom­ma­teurs qui dépensent plus en vête­ment qu’auparavant.

Source : Fashion on Cli­mate report, juin 2020, McKin­sey & Com­pa­ny and Glo­bal Fashion Agen­da / A New Tex­tiles Eco­no­my, 2017, Fon­da­tion Ellen MacArthur.


Maeva Bessis : incubation et apprentissage de la mode responsable à La Caserne 

Pour Mae­va Bes­sis, la mode a une carte à jouer, en plus de la res­pon­sa­bi­li­té qui lui incombe : son pou­voir d’influence et de pres­crip­tion lui confère un énorme poten­tiel pour mon­trer la voie aux autres indus­tries. Convain­cue de ce rôle d’avant-garde, la jeune femme, qui était direc­trice géné­rale adjointe de L’Exception, concept store de mode dédié à des marques fran­çaises et inter­na­tio­nales, a déci­dé de créer une pépi­nière dédiée à la mode res­pon­sable. Son envie découle de deux obser­va­tions : celle que les marques de mode qui sou­haitent se trans­for­mer n’ont pas for­cé­ment accès aux outils et à la for­ma­tion néces­saire pour mettre en place des démarches res­pon­sables et repen­ser la concep­tion de leurs pro­duits, et celle que les consom­ma­teurs sont de plus en plus deman­deurs d’informations et de conseils pour aiguiller leur sélec­tion. Le bâti­ment accueille­ra une sélec­tion de 25 marques qui ont la volon­té de pro­po­ser une mode éco­res­pon­sable sur la base de trois cri­tères : leur choix dans l’approvisionnement de matières pre­mières, la tra­ça­bi­li­té de ces matières et des pro­duits conçus et l’optimisation de leurs volumes de pro­duc­tion. L’équilibre finan­cier s’impose aus­si comme cri­tère pour créer un vrai tis­su éco­no­mique sec­to­riel et un réseau d’entreprises, et non pas des pro­jets à visée plus philanthropique.

“C’est par l’émulation et l’engouement que l’aventure durable a une chance de réussir.”
Maeva Bessis

Proposer un nouveau fonctionnement collectif

Pour Mae­va Bes­sis, le but n’est pas de s’opposer fron­ta­le­ment au sys­tème exis­tant mais de le contrer en pro­po­sant un nou­veau fonc­tion­ne­ment col­lec­tif. Pour avoir une chance d’imprégner nos usages de consom­ma­tion, celui-ci doit repo­ser sur des fon­de­ments opti­mistes et posi­tifs car c’est par l’émulation et l’engouement, et non par la pri­va­tion et la culpa­bi­li­sa­tion, que l’aventure durable a une chance de réus­sir. Le poten­tiel de trans­for­ma­tion de la jeu­nesse, qui prend la mesure des impacts du réchauf­fe­ments cli­ma­tique, appa­raît comme un levier majeur de trans­for­ma­tion des com­por­te­ments. Ce poten­tiel doit être nour­ri par l’information et la for­ma­tion, et cette for­ma­tion doit s’étendre à toute l’industrie et aux poli­tiques qui légi­fèrent sur le sujet. La Caserne est donc un lieu autant d’incubation que d’apprentissage.

Géraldine Vallejo (99) : le tournant vers le développement durable de Kering

Le par­cours de Géral­dine Val­le­jo est fon­dé sur sa convic­tion que la trans­for­ma­tion passe par la défi­ni­tion d’objectifs clairs et d’outils de mesure concrets, et que le chan­ge­ment repose sur l’innovation. Ancienne élève de Poly­tech­nique, elle a étu­dié la méca­nique et a com­men­cé sa car­rière chez Vin­ci comme ingé­nieur d’études pour la direc­tion scien­ti­fique du groupe sur des grands pro­jets urbains de construc­tion. C’est par le biais de l’innovation, axe fort pour toutes les entre­prises du CAC 40, qu’elle est ame­née à mettre en place des indi­ca­teurs d’écoconception et un plan de stra­té­gie car­bone en interne, avant de se retrou­ver à la tête du dépar­te­ment de déve­lop­pe­ment durable du groupe jusqu’en 2013. La même année, elle est appe­lée par Kering qui se trans­for­mait en un groupe de luxe et déve­lop­pait ses objec­tifs de déve­lop­pe­ment durable. Le sec­teur de la mode lui était incon­nu jusqu’alors, mais elle décide de quit­ter la méca­nique et l’ingénierie civile lorsqu’elle réa­lise l’impact de cette indus­trie sur l’environnement. La mis­sion don­née par Fran­çois-Hen­ri Pinault à l’ensemble de ses col­la­bo­ra­teurs est d’être le groupe de luxe le plus influent en termes de créa­ti­vi­té, de déve­lop­pe­ment durable et de per­for­mance à long terme. 

Un outil innovant pour mesurer et modérer son impact environnemental

Pour mettre en place cette stra­té­gie, le groupe a déve­lop­pé un outil pour mesu­rer l’impact envi­ron­ne­men­tal de ses acti­vi­tés : l’EP&L, Envi­ron­men­tal Pro­fit & Loss, ou compte de résul­tat envi­ron­ne­men­tal. Tout au long de la chaîne d’approvisionnement, l’EP&L mesure les émis­sions de CO₂, la consom­ma­tion d’eau, la pol­lu­tion de l’air et de l’eau, l’utilisation des sols et la pro­duc­tion de déchets, pour mesu­rer et com­pa­rer les impacts des acti­vi­tés du groupe sur l’environnement. Ces impacts sont conver­tis en valeurs moné­taires afin de quan­ti­fier l’utilisation des res­sources natu­relles et défi­nir des objec­tifs clairs. D’ici 2025, le groupe s’est enga­gé à réduire son EP&L de 40 % pour s’aligner avec les limites arrê­tées à l’échelle de la pla­nète. En 2020 ils étaient autour de 24 %. Le groupe veut aus­si atteindre 100 % de tra­ça­bi­li­té pour toutes ses matières d’ici 2025. En tant que direc­trice des pro­grammes de déve­lop­pe­ment durable à la hol­ding du groupe, Géral­dine Val­le­jo tra­vaille avec une équipe d’experts en appro­vi­sion­ne­ment res­pon­sable, effi­ca­ci­té éner­gé­tique, trai­te­ment des déchets, éco­no­mie cir­cu­laire, bio­di­ver­si­té, bien-être ani­mal et inno­va­tion, pour iden­ti­fier des solu­tions et des objec­tifs. Leurs recom­man­da­tions sont ensuite pro­po­sées à l’ensemble des mai­sons, qui les mettent en place en fonc­tion de leur iden­ti­té créa­tive et de leur cahier des charges. 

Quantifier et qualifier le durable

Ces objec­tifs reposent sur l’importance de prendre en compte le capi­tal natu­rel, point sur lequel Géral­dine Val­le­jo insiste for­te­ment. Le capi­tal natu­rel est consti­tué par l’ensemble des res­sources natu­relles qui per­mettent de pro­duire des biens et des ser­vices éco­lo­giques, comme la pro­duc­tion de l’oxygène ou la cap­ta­tion de CO₂ par les végé­taux, et qui ne doivent plus être consi­dé­rées comme des res­sources natu­relles pas­sives sans pro­duc­tion propre mais comme des res­sources néces­saires pour main­te­nir un éco­sys­tème béné­fique à l’humain et à la planète.
À côté de cette notion, elle parle aus­si de l’importance de l’unité de cal­cul pour quan­ti­fier et qua­li­fier la dura­bi­li­té d’un pro­duit et mettre en place des solu­tions cohé­rentes sur toute l’échelle de pro­duc­tion et de consom­ma­tion. Enfin, Géral­dine Val­le­jo sou­ligne l’importance non seule­ment de cor­ri­ger son impact, mais aus­si de le régé­né­rer. Pour exemple, pour régé­né­rer l’impact cau­sé par l’exploitation de 300 000 hec­tares de coton, Kering s’est enga­gé à pro­té­ger un mil­lion d’hectares d’écosystèmes excep­tion­nels et riches, comme des forêts.

Innovations de rupture et rétro-innovations

Cor­ri­ger son impact, le mesu­rer, pro­po­ser des solu­tions… pour Géral­dine Val­le­jo le relai passe ensuite par l’innovation. Il en existe deux types : les inno­va­tions de rup­ture qui portent sur toutes les nou­velles tech­no­lo­gies et les nou­velles matières, et les rétro-inno­va­tions qui reprennent des tech­niques déjà exis­tantes mais remises au goût du jour, comme l’agriculture régé­né­ra­trice. L’innovation s’applique à la pro­duc­tion, mais aus­si à la com­mer­cia­li­sa­tion des pro­duits de mode. D’ici 2025, il est pré­vu que la crois­sance du mar­ché de la seconde main sera trois fois plus éle­vée que la crois­sance du mar­ché de nou­veaux pro­duits. Kering a ain­si inves­ti dans Ves­tiaire Col­lec­tive, pre­mier site de dépôt-vente en ligne consa­cré au luxe et à la mode. Les nou­velles tech­no­lo­gies digi­tales réin­ventent le métier du vin­tage et de la seconde main, et poussent les marques à ne plus se consi­dé­rer sim­ple­ment comme des ven­deurs, mais aus­si comme des créa­teurs d’événements et de com­mu­nau­tés pour fédé­rer leurs clients autour de ce nou­veau marché. 

Jeanne Vicérial : l’innovation par la réinvention de nos modèles intellectuels 

Ques­tion­ner notre manière de consom­mer, sen­si­bi­li­ser au tra­vers d’autres moyens de com­mu­ni­ca­tion, pro­po­ser une créa­tion sans contraintes com­mer­ciales, voi­là sans doute plu­sieurs rôles que l’art peut endos­ser. Jeanne Vicé­rial s’est inté­res­sée au sujet du déve­lop­pe­ment durable par la pra­tique : après son diplôme des métiers d’arts elle a appris à faire des vête­ments sur mesure pour le théâtre et le ciné­ma. Elle a pour­sui­vi sa for­ma­tion dans le vête­ment aux Arts Déco­ra­tifs, où elle a appris les stan­dards de la pro­duc­tion indus­trielle. Elle réa­lise pro­gres­si­ve­ment qu’elle ne veut pas se posi­tion­ner entre le sur-mesure qui n’est plus réa­liste à l’échelle de la pla­nète et les vête­ments stan­dar­di­sés qui ont créé un nou­veau rap­port au corps qu’il lui paraît impor­tant de ques­tion­ner. Elle décide de réa­li­ser une thèse de doc­to­rat SACRe-PSL (sciences, arts, créa­tion, recherche) dans le groupe de recherche Soft Mat­ters à l’EnsadLab, le labo­ra­toire de recherche de l’École des Arts Déco­ra­tifs, et à l’École des Mines Paris­Tech pour ques­tion­ner la concep­tion contem­po­raine du vête­ment et la trans­for­ma­tion phy­sique de nos propres corps par le sport, la nutri­tion et la chi­rur­gie pour cor­res­pondre aux stan­dards S‑M-L des tailles des vête­ments actuels. Selon elle, le chi­rur­gien est presque deve­nu le cou­tu­rier du XXIe siècle.

“Le chirurgien est presque devenu le couturier du XXIe siècle.”
Jeanne Vicérial

Le vête­ment, cen­sé être notre seconde peau, n’a en réa­li­té plus beau­coup de liens avec l’individu. Paral­lè­le­ment à son doc­to­rat, elle déve­loppe une maille qui imite le tis­sage mus­cu­laire du corps humain en col­la­bo­ra­tion avec le labo­ra­toire de méca­tro­nique de l’École des Mines Paris­Tech, ce qui l’amène à déve­lop­per son propre stu­dio de créa­tion, Cli­nique Ves­ti­men­taire, avec l’idée que l’industrie de la mode serait comme tom­bée malade. Doc­teure en 2019, elle est ensuite pen­sion­naire de l’Académie de France à Rome à la vil­la Médi­cis (2019−2020) pen­dant le pre­mier confi­ne­ment. Là-bas, elle retrouve une cer­taine liber­té et elle décide de se consa­crer à une pra­tique artis­tique plu­tôt qu’à une forme de mili­tan­tisme dans la mode. C’est comme artiste qu’elle veut désor­mais pro­po­ser une autre concep­tion du vête­ment et une réflexion autour de notre consom­ma­tion, per­sua­dée que c’est par l’abolition des fron­tières entre les sec­teurs et les modes de com­mu­ni­ca­tion que l’industrie arri­ve­ra à un chan­ge­ment beau­coup plus global. 

Produire moins mais mieux

Dans le rap­port entre le vête­ment et le corps, la notion de qua­li­té des matières repré­sente un enjeu impor­tant. Si le vin­tage et la seconde main repré­sentent une évo­lu­tion inté­res­sante de nos modes de consom­ma­tion, Jeanne Vicé­rial met en garde contre le vide dans l’offre que va entraî­ner la mau­vaise qua­li­té des vête­ments pro­duits ces vingt der­nières années et qui ne peuvent pas entrer de façon durable dans le mar­ché des vête­ments de seconde main. L’enjeu va donc être de recy­cler ces vête­ments pour en recréer de nou­veaux, mais le recy­clage des maté­riaux com­po­sites est loin d’être per­for­mant. Pour Jeanne Vicé­rial, l’enjeu de la consom­ma­tion est donc de pro­duire moins mais mieux, de créer un lien de proxi­mi­té avec le vête­ment qu’on porte, de don­ner envie de l’entretenir, de le faire durer dans le temps, de le répa­rer, etc. Une solu­tion se trouve aus­si dans la diver­si­té des modèles de pro­duc­tion et de consom­ma­tion. Si tout le monde uti­lise du poly­es­ter recy­clé, la pro­duc­tion du poly­es­ter ne va pas dimi­nuer, mais, si d’autres modèles se concentrent sur d’autres tis­sus, ou réflé­chissent à un sys­tème de pré­com­mande ou de créa­tion avec zéro chute dans la coupe, on peut envi­sa­ger dif­fé­rentes formes d’économies et de sys­tèmes pour par­ve­nir à un équi­libre global. 

Un rôle indispensable de l’État et des institutions

La conver­sa­tion entre les trois femmes se ter­mine par une réflexion sur le rôle de l’État et des ins­ti­tu­tions. Toutes sont d’accord pour dire que l’évolution passe aus­si par la légis­la­tion et la mise en place de mesures coer­ci­tives. Pour que les modèles évo­luent, il faut une diver­si­té d’engagements, par les consom­ma­teurs, par les marques, mais aus­si par les orga­nismes qui légi­fèrent. Asso­ciée à la culture, à la créa­tion, la mode est his­to­ri­que­ment un sec­teur rela­ti­ve­ment peu régle­men­té. Aujourd’hui, la mode fait par­tie des huit sec­teurs pour les­quels l’Union euro­péenne demande davan­tage de lois en liai­son avec l’économie cir­cu­laire. Avec des entre­prises comme Danone, Kering a fait appel à la Com­mis­sion euro­péenne pour l’inciter à inté­grer plus de tra­ça­bi­li­té dans sa rené­go­cia­tion des clauses de com­merce inter­na­tio­nal. L’absence de régle­men­ta­tion consti­tue un frein à l’innovation, car les entre­prises qui innovent sans garan­tie que les solu­tions déve­lop­pées soient har­mo­ni­sées à l’ensemble de l’industrie paient le prix fort de l’innovation sans contrepartie.


Actualités

  • Le numé­ro #22 de A Maga­zine Cura­ted By, réa­li­sé avec la jeune desi­gner d’o­ri­gine bri­tan­nique et jamaï­caine Grace Wales Bon­ner (lau­réate du prix LVMH 2016), sor­ti­ra à la fin du mois de sep­tembre 2021. Il sera dis­po­nible à la vente en ligne sur notre site www.amagazinecuratedby.com et dans des points de vente dans le monde entier, dont OFR, Beau­bourg, Le Palais de Tokyo, Yvon Lam­bert, WH Smith ou encore au Drug­store Publi­cis à Paris. La liste com­plète des points de vente se trouve sur le site www.amagazinecuratedby.com.
  • Expo­si­tion solo de Jeanne Vice­rial aux Maga­sins Géné­raux, du 15 octobre au 14 novembre 2021. 1 rue de l’Ancien Canal, 93500 Pantin.
  • Suivre les évè­ne­ments de la Caserne ouverts au public sur https://www.lacaserneparis.com/ et sur Ins­ta­gram @lacaserneparis

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