Les régimes de retraite complémentaires du secteur privé

Dossier : Les retraitesMagazine N°609 Novembre 2005
Par Bruno PASQUIER (68)

Historique

Historique

Les régimes de retraite com­plé­men­taire du secteur privé ont été créés par con­ven­tions ou accords des parte­naires soci­aux, c’est-à-dire des organ­i­sa­tions patronales et con­fédéra­tions syn­di­cales. Ils ont pour objet de com­pléter l’as­sur­ance vieil­lesse du régime général de la Sécu­rité sociale. Ils sont fondés sur le principe de la répar­ti­tion et, sauf excep­tions his­toriques, fonc­tion­nent en ” points ” ce qui cor­re­spond à une acqui­si­tion de droits selon un principe contributif.

Le pre­mier accord fon­da­teur de ces régimes est celui de la Con­ven­tion nationale du 14 mars 1947 qui a mis en place le régime de l’A­GIRC (Asso­ci­a­tion générale des insti­tu­tions de retraite des cadres). Dès cette orig­ine, l’ob­jet du régime AGIRC est d’as­sur­er aux cadres des droits à retraite par des coti­sa­tions assis­es sur la part de salaire excé­dant le pla­fond de la Sécu­rité sociale, le régime général étant lui-même assis sur le seul salaire plafonné.

La con­ven­tion de 1947 a incidem­ment per­mis de définir par­mi les salariés la caté­gorie des cadres. Il est à not­er que c’est l’emploi exer­cé, et non le fait de béné­fici­er d’un salaire dépas­sant le pla­fond, qui jus­ti­fie l’ap­par­te­nance à cette caté­gorie, les règles en ayant été pré­cisées par des accords pro­pres aux dif­férentes branch­es professionnelles.

Dans la péri­ode qui a suivi, d’autres accords, au sein de branch­es pro­fes­sion­nelles ou à voca­tion inter­pro­fes­sion­nelle, ont mis en place des régimes par­ti­c­ulière­ment des­tinés aux autres salariés (fréquem­ment désignés par l’ex­pres­sion peu heureuse de ” non-cadres ”). Les coti­sa­tions à ces régimes por­taient sur l’ensem­ble du salaire, le taux de coti­sa­tion étant sou­vent majoré pour la part éventuelle dépas­sant le plafond.

En 1961, un accord inter­pro­fes­sion­nel a fédéré l’ensem­ble de ces quelque 50 régimes ” non-cadres ” au sein de l’AR­RCO (Asso­ci­a­tion des régimes de retraites com­plé­men­taires), organ­isme dont la mis­sion ini­tiale com­por­tait trois volets : coor­don­ner les régimes mem­bres, organ­is­er entre eux une com­pen­sa­tion finan­cière à base démo­graphique et assur­er la péren­nité de l’ensemble.

Dans la décen­nie 1970, divers­es dis­po­si­tions lég­isla­tives ou con­ven­tion­nelles ont général­isé l’oblig­a­tion d’ad­hé­sion des entre­pris­es à ces régimes, les cadres étant désor­mais affil­iés, en plus de l’A­GIRC, à un régime ARRCO pour leur part de salaire inférieure au plafond.

Les parte­naires soci­aux nationaux, CNPF devenu MEDEF, CGPME et UPA, représen­tant les employeurs, et les cinq syn­di­cats de salariés représen­tat­ifs au plan nation­al inter­pro­fes­sion­nel, CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et CGT-FO, ont dû ensuite pren­dre régulière­ment les mesures des­tinées à adapter les règles et paramètres de fonc­tion­nement des régimes aux évo­lu­tions de toute nature aux­quelles ils devaient faire face : crois­sance du taux de chô­mage, retraite à 60 ans, évo­lu­tion des ratios démo­graphiques, etc.

Les accords suc­ces­sifs qu’ils ont ain­si signés régulière­ment ont égale­ment organ­isé une évo­lu­tion du sys­tème d’ensem­ble vers une plus grande homogénéité. C’est ain­si que les taux de coti­sa­tion ont été, autant que pos­si­ble, unifiés et que, à par­tir de 1999, les régimes de l’AR­RCO ont été fon­dus au sein d’un régime unique. Il n’ex­iste donc plus aujour­d’hui que deux régimes com­plé­men­taires, l’A­GIRC et l’AR­RCO, dont les parte­naires soci­aux s’at­tachent à sim­pli­fi­er et à rap­procher les règles de fonctionnement.

Les négo­ci­a­tions sur les deux régimes sont désor­mais sys­té­ma­tique­ment con­jointes et les deux fédéra­tions qui en assurent les fonc­tion­nements respec­tifs, regroupées en un GIE, sont, depuis peu, dirigées par le même directeur général.

Mode de gouvernance

Le mode de gou­ver­nance qui s’ap­plique à l’ensem­ble des per­son­nes morales met­tant en œuvre les retraites com­plé­men­taires est celui du par­i­tarisme qui se car­ac­térise par des instances dirigeantes réu­nis­sant en nom­bre égal des représen­tants des employeurs (les adhérents) et des représen­tants des coti­sants et des allo­cataires (les par­tic­i­pants). Il en est ain­si des Con­seils d’ad­min­is­tra­tion des fédéra­tions et des com­mis­sions par­i­taires de leurs deux régimes.

La ges­tion admin­is­tra­tive des opéra­tions des régimes de retraite com­plé­men­taire est réal­isée par des insti­tu­tions, per­son­nes morales rel­e­vant du code de la Sécu­rité sociale, dis­posant de Con­seils d’ad­min­is­tra­tion et d’Assem­blées générales eux-mêmes par­i­taires. Divers­es vari­antes de statuts déter­mi­nent les modal­ités d’ac­ces­sion à ces instances : élec­tions par l’ensem­ble des par­tic­i­pants pour le col­lège qui les représente ou désig­na­tion directe par les con­fédéra­tions syndicales.

Le col­lège des adhérents est, plus générale­ment, com­posé par désig­na­tion du MEDEF con­join­te­ment avec la CGPME et l’UPA.

Admin­is­tra­teurs et délégués aux Assem­blées générales exer­cent leurs man­dats bénév­ole­ment, seuls les frais encou­rus leur étant remboursés.

Les Con­seils d’ad­min­is­tra­tion élisent en leur sein le prési­dent et le vice-prési­dent issus de col­lèges dif­férents, avec principe d’al­ter­nance à chaque renou­velle­ment. Ils nom­ment un directeur général, salarié, à qui ils délèguent les pou­voirs néces­saires au fonc­tion­nement courant. Ils se réu­nis­sent trimestrielle­ment pour définir les ori­en­ta­tions et véri­fi­er leur mise en œuvre par les services.

Chaque année, l’Assem­blée générale ordi­naire est appelée à se pronon­cer sur le rap­port moral du Con­seil et à rat­i­fi­er les comptes de l’ex­er­ci­ce préal­able­ment audités par un com­mis­saire aux comptes.

Le car­ac­tère social et sans but lucratif des insti­tu­tions se traduit en par­ti­c­uli­er par l’ex­is­tence d’un Fonds social, ali­men­té par une frac­tion des coti­sa­tions et des pro­duits financiers, don­nant con­sis­tance à une action sociale pilotée, dans le cadre des ori­en­ta­tions générales du régime, par la Com­mis­sion sociale du Con­seil d’administration.

Les groupes de protection sociale

Depuis une dizaine d’an­nées de façon sys­té­ma­tique, les insti­tu­tions se sont réu­nies par groupes de pro­tec­tion sociale.

Les groupes de pro­tec­tion sociale sont, eux aus­si, gou­vernés par­i­taire­ment. Out­re les insti­tu­tions de retraite com­plé­men­taire AGIRC et ARRCO, ils com­por­tent d’autres organ­ismes comme des insti­tu­tions de prévoy­ance, des mutuelles ou des organ­ismes spé­cial­isés en épargne salar­i­ale. Au sein d’un groupe, les insti­tu­tions de retraite du même régime doivent fusion­ner en appli­ca­tion d’une déci­sion des parte­naires sociaux.

Les parte­naires soci­aux en avaient fixé le nom­bre à 25, de façon indica­tive, à l’oc­ca­sion d’un accord signé en 2001. Cepen­dant une ten­dance à la con­cen­tra­tion en pour­suit la diminu­tion et la sit­u­a­tion pour­rait se sta­bilis­er à une quinzaine.

La ten­dance à la con­cen­tra­tion résulte d’une recherche de pro­duc­tiv­ité, ren­due néces­saire dans une péri­ode récente par une baisse con­tin­ue des dota­tions de ges­tion. Depuis peu, elle est stim­ulée par la mon­tée en charge sig­ni­fica­tive des actes de ges­tion liés à l’ar­rivée à la retraite des généra­tions du ” baby-boom ” ain­si que par les exi­gences accrues en matière d’in­for­ma­tion des salariés sur la con­sti­tu­tion de leurs droits futurs.

Les autres activ­ités qui relèvent sou­vent du domaine de la libre con­cur­rence ne sont pas étrangères aux con­sid­éra­tions de pro­duc­tiv­ité, et leur développe­ment implique un com­porte­ment con­cur­ren­tiel com­pa­ra­ble à celui d’une com­pag­nie d’assurances.

Les prin­ci­paux moyens dont les groupes ont besoin pour rem­plir leurs mis­sions de ges­tion admin­is­tra­tive sont d’une part le per­son­nel, poste budgé­taire qui dépasse couram­ment 60 % des dépens­es, et d’autre part les sys­tèmes d’information.

Une con­cen­tra­tion spé­ci­fique s’ap­plique à ce sec­ond fac­teur de pro­duc­tion. Jus­ti­fiée pour des raisons d’é­conomie et d’ef­fi­cac­ité, elle est encour­agée et d’une cer­taine façon organ­isée par le GIE des fédéra­tions qui a mis sur pied un plan de con­ver­gence infor­ma­tique dont l’ob­jec­tif, à moyen terme, est un appli­catif unifié de ges­tion de toutes les opéra­tions admin­is­tra­tives des insti­tu­tions AGIRC et ARRCO.

Les groupes ont ain­si mutu­al­isé leurs moyens en per­son­nel infor­mati­cien, en matériel et en logiciel.

Les mou­ve­ments en cours vont réduire à moins de 10 le nom­bre des plates-formes infor­ma­tiques partagées par les groupes.

Les principes de la répartition

Les principes de la répar­ti­tion dont nous avons vu qu’ils étaient à la base du fonc­tion­nement des régimes com­plé­men­taires méri­tent quelques pré­ci­sions car cer­taines de leurs par­tic­u­lar­ités sont par­fois méconnues.

La grande dif­férence de ce sys­tème avec celui de la cap­i­tal­i­sa­tion tient à son absence de règle générale de pro­vi­sion­nement des engage­ments par des act­ifs financiers. Ce mode de fonc­tion­nement ne sig­ni­fie cepen­dant pas l’ab­sence de toute réserve, ni évidem­ment l’ab­sence de prévi­sion à court, moyen et long terme.

Les Anglo-Sax­ons dis­ent ” Pay as you go ” de façon quelque peu péjo­ra­tive mais un régime de retraite par répar­ti­tion n’est pas dépourvu d’in­stru­ments de pilotage.

En effet, les recettes d’un exer­ci­ce ne sont pas redis­tribuées instan­ta­né­ment entre les prestataires du moment, ce qui con­duirait à des valeurs de points chao­tiques et sans garantie de con­ti­nu­ité. Au con­traire, sur la base d’hy­pothès­es économiques et démo­graphiques, les régimes con­duisent en per­ma­nence des études d’équili­bre pluriannuel.

Les régimes com­plé­men­taires, qui fonc­tion­nent en points, fix­ent chaque année leur prix d’ac­qui­si­tion par coti­sa­tion ain­si que leur valeur de ser­vice après liquidation.

D’autres leviers ont été mis en place pour assur­er les équili­bres : ain­si les coti­sa­tions font l’ob­jet d’un ” taux d’ap­pel “. Inférieur à 100 % à une époque bénie des pre­mières années de l’A­GIRC, il est aujour­d’hui fixé à 125 %, le sup­plé­ment de 25 % n’é­tant pas généra­teur de droits.

L’âge de la retraite est évidem­ment un paramètre impor­tant pour l’équili­bre d’un régime. Il est aus­si très sen­si­ble poli­tique­ment et a don­né lieu à de nom­breuses négo­ci­a­tions ; nous évo­querons ce sujet un peu plus loin.

Si des droits à retraite sont attribués sans coti­sa­tion aux chômeurs indem­nisés par l’UNEDIC, ceux-ci font cepen­dant l’ob­jet d’un finance­ment quoique réduit par cet organ­isme. Il en est de même pour cer­tains dis­posi­tifs à finance­ment public.

Mais le ” qua­si-mir­a­cle ” de la répar­ti­tion appa­raît lors de sa mise en place : le régime est alors immé­di­ate­ment en mesure de valid­er des péri­odes qui n’ont jamais été cotisées. Dès qu’une tré­sorerie suff­isante est con­sti­tuée, les ressources des coti­sa­tions per­me­t­tent de vers­er des presta­tions alors que les droits acquis par coti­sa­tions sont encore minimes.

Les régimes de retraite com­plé­men­taire ont donc accom­pa­g­né leur démar­rage de la val­i­da­tion sou­vent inté­grale des péri­odes antérieures non cotisées, non seule­ment au béné­fice des par­tic­i­pants coti­sants mais aus­si des anciens salariés des entre­pris­es adhérentes.

Ce mécan­isme a égale­ment été mis en œuvre à l’oc­ca­sion d’aug­men­ta­tions de taux de coti­sa­tion con­tractuelle, notam­ment dans les régimes ARRCO qui, jusqu’en 1995, pro­po­saient aux entre­pris­es toute une plage de valeurs pour leur taux de coti­sa­tion con­tractuelle : de 4 à 8 % sur le salaire pla­fon­né et de 4 à 16 % au-delà du plafond.

L’aug­men­ta­tion de taux s’ac­com­pa­g­nait donc de la reval­ori­sa­tion des droits des péri­odes antérieures des act­ifs, et, totale­ment ou par­tielle­ment pour les retraités du même groupe, en fonc­tion d’une ” pesée ” con­sis­tant à estimer le rap­port de charge de l’opéra­tion (presta­tions nouvelles/cotisations nou­velles) sur une péri­ode de quinze ans.

Ces pos­si­bil­ités attrac­tives ne sont plus offertes par les régimes com­plé­men­taires, les taux con­tractuels de coti­sa­tion ayant été unifiés à 6 % et 16 % respec­tive­ment sur les tranch­es A (part de salaire inférieure au pla­fond) et B (part de salaire com­prise entre 1 et 4 plafonds).

Des dis­po­si­tions antérieures cepen­dant, il résulte des sit­u­a­tions d’en­tre­pris­es et même de branch­es pro­fes­sion­nelles qui appliquent tou­jours des taux supérieurs à ces stan­dards. Le retour à la sit­u­a­tion de référence ne peut pas se faire gra­tu­ite­ment : la dis­pari­tion de ressources dif­féren­tielles devrait, symétrique­ment à ce qui s’é­tait pro­duit lors de l’aug­men­ta­tion, don­ner lieu à annu­la­tion des droits cor­re­spon­dants même s’ils ont été cotisés et sont en cours de ser­vice ! À cette solu­tion dif­fi­cile prévue par la régle­men­ta­tion, on préfère celle du verse­ment au régime d’une ” con­tri­bu­tion de main­tien des droits ” représen­tant la valeur actuelle des flux de presta­tions futures main­tenues sans con­trepar­tie de coti­sa­tions. Par sa nature, cette dernière opéra­tion est équiv­a­lente à celle d’un régime en capitalisation.

Intégrations

Le champ d’ap­pli­ca­tion des régimes AGIRC et ARRCO n’a cessé de s’é­ten­dre à des secteurs pro­fes­sion­nels qui, ayant mis en place précédem­ment des sys­tèmes de retraite par­ti­c­uliers leur appa­rais­sant plus favor­ables, avaient préféré rester hors de la sol­i­dar­ité interprofessionnelle.

L’équili­bre de ces sys­tèmes devenant trop dif­fi­cile à main­tenir en ter­mes de coti­sa­tions du fait des ten­dances de la démo­gra­phie pro­pre à leur périmètre réduit, il devient alors impératif pour eux de rejoin­dre les régimes com­plé­men­taires inter­pro­fes­sion­nels. Il s’ag­it alors d’une inté­gra­tion qui, vue des régimes, doit être traitée de manière à ne pas mod­i­fi­er défa­vor­able­ment les équili­bres à venir. Une pesée est alors pra­tiquée pour estimer le taux de val­i­da­tion des ser­vices passés qui sera neu­tre sur ceux-ci. Lorsque le résul­tat ne per­met pas une val­i­da­tion à 100 % des ser­vices passés, il revient alors au secteur inté­gré de choisir entre la val­i­da­tion par­tielle résul­tant de la pesée et le verse­ment d’une ” soulte ” de même nature que la con­tri­bu­tion de main­tien des droits men­tion­née précédemment.

Les pesées se font actuelle­ment en prenant en con­sid­éra­tion des prévi­sions sur une péri­ode future de vingt-cinq ans. Lorsqu’une soulte s’avère néces­saire, un paramètre très sen­si­ble est le taux d’ac­tu­al­i­sa­tion retenu pour la cal­culer. Il fait générale­ment l’ob­jet d’âpres négociations.

Il con­vient de not­er que l’évo­lu­tion des normes compt­a­bles inter­na­tionales est depuis peu à l’o­rig­ine de deman­des d’in­té­gra­tion. Ces normes con­traig­nant à porter au bilan de l’en­tre­prise l’ensem­ble des engage­ments soci­aux gérés en interne, le pas­sif cor­re­spon­dant aux engage­ments de retraite ” mai­son ” serait générale­ment insup­port­able et pour­rait con­duire à la liq­ui­da­tion pour insuff­i­sance d’actif.

Par­mi les inté­gra­tions impor­tantes réal­isées, il faut citer l’ensem­ble des ban­ques AFB qui ont apporté leurs adhé­sions respec­tives à divers groupes de pro­tec­tion sociale en 1994.

Le cas des indus­tries élec­triques et gaz­ières a aus­si été traité récem­ment d’une manière par­ti­c­ulière ; les médias en ont fait écho. L’o­rig­i­nal­ité de ce secteur a con­sisté à ne pas souhaiter une inté­gra­tion admin­is­tra­tive com­plète, mais une forme finan­cière­ment équiv­a­lente qui a été appelée ” adossement “.

Les cal­culs de pesée sont faits de façon stan­dard, mais les opéra­tions d’en­caisse­ment des coti­sa­tions et de verse­ment des allo­ca­tions, réal­isées dans le strict respect des régle­men­ta­tions de l’A­GIRC et de l’AR­RCO, sont déléguées à la Caisse nationale des indus­tries élec­triques et gaz­ières. Cet organ­isme créé à cet effet se charge égale­ment de met­tre en œuvre au prof­it des salariés de son secteur leur règle­ment de retraite qui, inchangé par l’in­té­gra­tion, est sen­si­ble­ment dif­férent de celui que con­nais­sent les par­tic­i­pants directs de l’A­GIRC et de l’ARRCO.

La pesée a con­duit à ne valid­er les ser­vices passés qu’à 54,8 % à l’AR­RCO et à 94,7 % à l’A­GIRC ce qui minore néan­moins sig­ni­fica­tive­ment les engage­ments à pro­vi­sion­ner par les entre­pris­es du secteur.

Retraite à 60 ans

Bien que cela ait été envis­agé dans le cadre de cer­taines négo­ci­a­tions, ce qui a par­fois sus­cité des inquié­tudes bien médi­atisées, l’A­GIRC et l’AR­RCO ne se sont pas dis­so­ciées du régime général.

Il con­vient toute­fois de soulign­er que les ges­tion­naires des régimes com­plé­men­taires ont, jusqu’à présent, con­servé dans leur régle­men­ta­tion 65 ans comme seuil d’ou­ver­ture des droits.

C’est un dis­posi­tif, aujour­d’hui dénom­mé AGFF, extérieur aux régimes com­plé­men­taires pro­pre­ment dits, qui assure le finance­ment des droits servis avant cet âge. Il est ali­men­té par des coti­sa­tions spé­ci­fiques (actuelle­ment de 2 % sur la tranche A et de 2,2 % sur la tranche B) et prend en charge les retraites com­plé­men­taires ver­sées aux allo­cataires de moins de 65 ans. Les excé­dents éventuels de ce finance­ment sont rever­sés aux régimes AGIRC et ARRCO à pro­por­tion de leurs charges d’allocations.

Remar­quons que l’AGFF n’ap­pelle pas de coti­sa­tions sur la tranche C (entre 4 et 8 pla­fonds SS), dont l’A­GIRC dis­tingue les droits de ceux qui provi­en­nent de la tranche B. Les points ” tranche C ” ne peu­vent donc pas être liq­uidés sans abat­te­ment avant 65 ans et les par­tic­i­pants con­cernés ont le choix entre une liq­ui­da­tion avec un abat­te­ment fonc­tion de leur âge de départ en retraite et une liq­ui­da­tion dif­férée à leur 65e anniversaire.

Solidarité AGIRC ARRCO

Les évo­lu­tions économiques, démo­graphiques et sociales ne sont pas par­ti­c­ulière­ment favor­ables aux régimes de retraite. Le car­ac­tère dif­féren­tiel de son assi­ette de coti­sa­tion a aus­si plus sou­vent que l’in­verse pénal­isé les ressources du régime AGIRC. En effet, l’assi­ette de coti­sa­tion AGIRC est directe­ment entamée par toute reval­ori­sa­tion du pla­fond de la Sécu­rité sociale et, en 1994 notam­ment, le régime des cadres a dû pren­dre des mesures douloureuses pour rééquili­br­er ses comptes qui plongeaient claire­ment dans le rouge.

Les mesures pris­es ont été effi­caces d’au­tant que les parte­naires soci­aux les ont ensuite con­solidées par un principe de sol­i­dar­ité entre les deux régimes. Ce principe a été mis en œuvre ini­tiale­ment par une com­pen­sa­tion clas­sique entre l’ensem­ble ARRCO et le régime AGIRC, les opéra­tions de celui-ci étant pris­es en compte avec un fac­teur 6/16 pour tenir compte du fait que l’aug­men­ta­tion d’une unité de la valeur du pla­fond SS fai­sait per­dre 16 cen­times de coti­sa­tion à l’A­GIRC mais n’ap­por­tait qu’un sup­plé­ment de 6 cen­times à l’ARRCO.

Le dernier accord signé par les parte­naires soci­aux en novem­bre 2003 part d’une analyse dif­férente por­tant sur les agents de maîtrise assim­ilés cadres (arti­cle 36 dans le jar­gon AGIRC) qui avaient his­torique­ment apporté beau­coup de coti­sa­tions au régime, leurs effec­tifs étant nom­breux et leurs salaires dépas­sant générale­ment bien le plafond.

Mal­heureuse­ment cette sit­u­a­tion a large­ment dis­paru, cette caté­gorie ayant vu ses effec­tifs régress­er et ses salaires ne plus franchir que rarement le pla­fond. Il en résulte, pour cette pop­u­la­tion de par­tic­i­pants, des charges d’al­lo­ca­tions impor­tantes pour les nom­breux retraités, sans rela­tion avec les coti­sa­tions des act­ifs actuels.

La modal­ité retenue con­siste donc désor­mais à ce que le régime ARRCO prenne en charge le déficit tech­nique con­staté par l’A­GIRC pour le groupe des ” arti­cles 36 “.

Adaptations

TABLEAU 1
Exer­ci­ce 2004 (Mds d’euros) AGIRC ARRCO
PRODUITS Coti­sa­tions entreprises 13,6 29,0
Coti­sa­tions des tiers
0,6 2,5
TOTAL 14,2 31,5
CHARGES Allo­ca­tions totales  16,2 31,1
Allo­ca­tions à la charge de l’AGFF
— 2,1 — 4,2
Allo­ca­tions à la charge du régime 
14,1 26,9
Dota­tion de gestion 
0,3 1,1
Dota­tion d’Action sociale
0,1 0,2
TOTAL 14,5 28,2
SOLDE TECHNIQUE AVANT SOLIDARITÉ  — 0,3 3,3
SOLIDARITÉ AGIRC-ARRCO  0,7 — 0,7
CONTRIBUTION ÉQUILIBRE AGFF 0,7 1,2
RÉSULTAT TECHNIQUE APRÈS SOLIDARITÉ  1,1 3,8
RÉSULTAT FINANCIER  0,2 0,9
RÉSULTAT DE L’EXERCICE 1,3 4,7

TABLEAU 2
Au 31/12/2004 (Mds d’euros) AGIRC ARRCO
RÉSERVE TECHNIQUE (valeur compable) 14,5 45,6
PLUS-VALUES LATENTES
0,6 1,6

TABLEAU 3
AGIRC 2005 2006
Effec­tif cotisants 1,6% 1,6%
Masse salariale 3,2% 3,6%
Pla­fond SS 1,6% 3,0%
Assi­ette TB + TC 3,2% 2,0%
Sol­de tech­nique après transferts 0,45 Md€ 0,2 Md€
ARRCO 2005 2006
Effec­tif cotisants 0,2% 0,5%
Salaire moyen 2,5% 2,5%
Assi­ette de cotisation 2,7% 3,0%
Sol­de tech­nique après transferts 3,1 Md€ 2,3 Md€

D’autres adap­ta­tions ont été retenues lors de ce dernier accord qui s’est négo­cié après la pub­li­ca­tion de la loi Fil­lon qui avait apporté un cer­tain nom­bre de nova­tions au régime général, comme la pos­si­bil­ité de départ en retraite avant 60 ans pour les salariés ayant com­mencé à tra­vailler très jeunes, celle de val­i­da­tion par rachat de coti­sa­tion de péri­odes d’é­tudes, tout en main­tenant jusqu’à 2008 la durée de coti­sa­tion req­uise pour un départ en retraite entre 60 et 65 ans.

Les régimes com­plé­men­taires sont directe­ment con­cernés par les mesures que la loi instau­re en matière d’in­for­ma­tion des act­ifs sur leurs droits à retraite. Ils s’or­gan­isent pour être en mesure d’al­i­menter les sys­tèmes d’in­for­ma­tion en cours de con­struc­tion dans le cadre d’un Groupe­ment d’in­térêt pub­lic créé à cet effet.

Les per­spec­tives économiques et démo­graphiques ont con­duit les sig­nataires de l’ac­cord à prévoir, pour les deux régimes, les évo­lu­tions de paramètres suivantes :

  • valeur du point indexée sur l’indice des prix hors tabac de l’INSEE,
  • salaire de référence (prix d’achat d’un point par la coti­sa­tion con­tractuelle) indexé sur le salaire moyen des par­tic­i­pants actifs.


L’ac­cord est val­able jusqu’en 2008 mais il com­porte une clause de ” revoyure ” en 2006 pour effectuer un suivi de la sit­u­a­tion et, le cas échéant, pren­dre de nou­velles décisions.

Situation et perspectives

Les dernières sit­u­a­tions con­nues des régimes com­plé­men­taires se rap­por­tent à la clô­ture de l’ex­er­ci­ce 2004. Ils présen­tent une sit­u­a­tion glob­ale­ment excé­den­taire (tableau 1).

L’ap­pré­ci­a­tion de l’équili­bre des régimes com­plé­men­taires doit aus­si pren­dre en compte les réserves tech­niques dont ils dis­posent et qui font l’ob­jet de place­ments financiers respec­tant une régle­men­ta­tion pru­den­tielle (tableau 2).

Ces réserves finan­cières représen­tent respec­tive­ment pour l’A­GIRC et pour l’AR­RCO 103 % et 170 % des allo­ca­tions de l’exercice.

Les per­spec­tives à moyen terme sont à éval­uer à par­tir de cette sit­u­a­tion de départ et des hypothès­es les plus vraisem­blables d’évo­lu­tion des paramètres déterminants.

Con­cer­nant les ressources des régimes, il est à not­er que le taux de coti­sa­tion con­tractuelle AGIRC passe en 2006 de 16 % à 16,24 %. Cela étant, c’est la sit­u­a­tion de l’emploi salarié et des salaires qui con­stitue l’hy­pothèse centrale.

Les ser­vices des régimes ont retenu pour la péri­ode 2005–2006 les évo­lu­tions et prévi­sions suiv­antes (tableau 3).

Comme nous l’avons indiqué, les parte­naires soci­aux, ges­tion­naires des régimes, ont prévu de se réu­nir en 2006 pour faire le point et pren­dre si néces­saire des déci­sions pour le pilotage des régimes complémentaires.

Deux ans plus tard, en 2008, les Pou­voirs publics sont engagés par la loi Fil­lon à réex­am­in­er les per­spec­tives de l’ensem­ble des régimes de retraite dont ils assu­ment la respon­s­abil­ité. Cette date coïn­cide pour les parte­naires soci­aux de l’A­GIRC et de l’AR­RCO avec l’échéance de leur accord de novem­bre 2003 et les réu­ni­ra donc à nou­veau autour d’une table de négociation. 

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