Les itinéraires d’Émile Guimet

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°566 Juin/Juillet 2001Par : Différents auteurs sous la direction de Françoise Chappuis et Francis MacouinRédacteur : Michel DUREAU (53)

Cet ouvrage col­lec­tif, auquel a par­ti­ci­pé Fran­çois Chap­puis (55), paraît au moment où la réou­ver­ture du musée Gui­met, après quatre ans de tra­vaux, attire l’attention sur un des plus riches musées d’art asia­tique du monde. Son fon­da­teur, Émile Gui­met (1836−1918), fut un homme éton­nant dont sont retra­cés les “ iti­né­raires ” : ceux d’un indus­triel, d’un voya­geur, d’un savant, d’un col­lec­tion­neur, d’un bâtis­seur, d’un musi­cien, d’un mécène qui offrit à l’État les immenses tré­sors qu’il avait rassemblés.

Le pre­mier cha­pitre évoque son père, Jean-Bap­tiste Gui­met (1795−1871), X 1813, fon­da­teur d’un empire indus­triel grâce à son inven­tion, en 1827, de l’outremer arti­fi­ciel, le “ bleu Gui­met ”, qui lui appor­ta noto­rié­té et fortune.

Il aurait pu être un héros bal­za­cien : poly­tech­ni­cien s’échappant de l’École pour com­battre les Alliés en 1814, excellent chi­miste qui pas­sa dix-sept ans dans le corps des Poudres et Sal­pêtres, inven­teur qui indus­tria­li­sa et exploi­ta magis­tra­le­ment sa décou­verte, il créa en 1855 la socié­té qui devien­dra Pechi­ney après avoir été en 1859 la pre­mière à pro­duire indus­triel­le­ment l’aluminium ; vingt ans conseiller muni­ci­pal de Lyon, il appor­ta à la ville de grandes amé­lio­ra­tions : réseau d’alimentation en eau, parc de la Tête d’Or.

Émile Gui­met fut le digne suc­ces­seur de son père dans l’industrie, tout en consa­crant une grande par­tie de son temps et de sa for­tune à diverses pas­sions qui l’animèrent toute sa vie :

  • la musique qu’il pra­ti­qua en vrai pro­fes­sion­nel, com­po­sant de nom­breuses oeuvres dont un opéra ;
  • les voyages, dont un tour du monde en 1876–1877, qui lui fit décou­vrir l’Asie, en par­ti­cu­lier le Japon, et mar­qua pro­fon­dé­ment la seconde moi­tié de sa vie ;
  • la col­lec­tion, qu’il qua­li­fie lui-même d’effrénée, d’objets d’art égyp­tiens, gré­co-romains puis sur­tout asia­tiques, de manus­crits, de livres, etc. ;
  • la construc­tion à Lyon d’un théâtre et d’un pre­mier musée, puis du musée de Paris ;
  • la phi­lo­so­phie, en par­ti­cu­lier l’étude des religions.

Homme excep­tion­nel vou­lant faire par­ta­ger à tous le savoir, l’accès à l’art et à la culture, il fit, en 1885, don à l’État de toutes ses col­lec­tions, construi­sit et diri­gea le musée qui les abrite, s’attachant à en faire un centre de rayon­ne­ment consa­cré à l’étude des civi­li­sa­tions et des reli­gions asia­tiques ain­si qu’au rap­pro­che­ment entre l’Orient et l’Occident en déve­lop­pant leur connais­sance mutuelle.

De la Res­tau­ra­tion à la guerre de 1914–1918 les vies de Jean-Bap­tiste et d’Émile Gui­met couvrent un siècle d’histoire de France extra­or­di­nai­re­ment riche : rayon­ne­ment artis­tique et scien­ti­fique, expan­sion éco­no­mique et indus­trielle, pres­tige mon­dial. L’un et l’autre y ont tenu un rôle.

Ce livre éru­dit, mais agréable à lire, riche d’informations variées, remar­qua­ble­ment illus­tré, en consti­tue un témoi­gnage intéressant.

Poster un commentaire