L’entrepreneur dans le commerce mondial

Au moment de la grande rencontre préparée par l’Organisation mondiale du commerce à Seattle, La Jaune et la Rouge s’interroge sur l’avenir des entrepreneurs de tous niveaux dans le contexte mondial et particulièrement le commerce international.
Les exportations sont en effet une activité importante pour notre pays, puisqu’elles correspondent à un chiffre d’affaires d’environ 1 800 milliards de francs par an, à comparer à un produit intérieur brut (PIB) voisin de 8 000 milliards de francs. Presque un Français sur quatre a son emploi rémunéré par les exportations.
Si l’on tient compte des secteurs non marchands dans le PIB, comme l’armée, l’enseignement, et plus généralement les Fonctions et services publics, on remarque que la France est un pays très largement ouvert à l’international.
Plus de la moitié de notre production industrielle est exportée.
Ceci montre que nos entreprises sont largement compétitives. Ce n’est certes pas grâce à une sous-évaluation de notre monnaie. La surévaluation du franc durant les années 1990 a au contraire conduit nos entreprises à des gains incessants de productivité dont elles recueillent aujourd’hui les fruits.
Est-ce à dire que tout va bien en France dans le domaine du commerce international ?
Pas tout à fait.
Tout d’abord, nous n’avons pas su aider nos PME comme les Italiens ou les Allemands.
Nos banques sont trop parisiennes.
Les aides publiques s’orientent trop souvent vers les seules grandes entreprises.
Les expositions commerciales françaises à l’étranger bénéficient enfin de crédits insuffisants.
Mais le grand enjeu de Seattle est ailleurs.
Doit-on introduire des normes sociales et environnementales dans les échanges internationaux ?
Cela permettrait de mettre nos industries traditionnelles (textile, électronique grand public, etc.) dans des conditions plus objectives de compétition.
Les pays en voie de développement y sont bien sûr opposés.
Mais les Européens et notamment les Allemands, comme les Américains du Nord, y sont très favorables.
C’est là le grand pari de Seattle.
Il mérite que nous ne nous opposions pas trop aux Américains sur l’agriculture, qui correspond en France à 4 % de l’activité professionnelle, voire sur l’exception culturelle.
Dans ces deux domaines si sensibles, nous devons moderniser notre action et subventionner les acteurs plutôt que les produits.
Ensuite, l’ouverture du capital des services publics français pose à terme un problème de fond.
La dictature des marchés financiers conduit, en effet, à une forte rentabilité à court terme et à financer beaucoup moins d’études et de développements.
La numérisation des télécommunications, le développement de trains à grande vitesse, d’avions civils de transport, de centrales nucléaires électriques auraient-ils été possibles dans le nouveau contexte français ?
Ceci rend d’autant plus nécessaire de rééquilibrer les exportations françaises entre les grandes sociétés et les PME.
Par une action au plan financier, nous l’avons dit, mais aussi au plan humain. Avons-nous, dans les services français du commerce extérieur, assez de techniciens aptes à dialoguer avec les entrepreneurs de formation scientifique ?
Enfin, la France méconnaît gravement les entraves au commerce mondial dues aux normes techniques.
C’est sans doute de peu d’importance quand on considère les prises électriques non normalisées au sein de la seule Union européenne. On y a renoncé semble-t-il…
Le problème est plus préoccupant pour les normes dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Pensons à l’imbroglio créé dans le domaine des portables par les Américains.
Nos négociateurs doivent en prendre conscience et ne plus hésiter désormais, d’une part à se réorganiser afin d’introduire cette dimension dans leurs argumentations et d’autre part à attaquer devant l’OMC les mesures techniques anticoncurrentielles.