Bercy en mouvement :

Dossier : La réforme de l'ÉtatMagazine N°595 Mai 2004
Par Francis MER (59)

La néces­sité de don­ner une impul­sion forte à la réforme de l’É­tat est aujour­d’hui dev­enue indis­pens­able et urgente. Le monde con­cur­ren­tiel dans lequel nous vivons l’exige.

Le poids financier et régle­men­taire que les admin­is­tra­tions font peser sur les acteurs économiques doit être le plus léger pos­si­ble au regard des ser­vices qu’elles ren­dent. Il en va de leur crédi­bil­ité et plus large­ment de l’ac­cept­abil­ité de leur action, sous toutes ses formes.

Notre com­péti­tiv­ité économique générale est à ce prix. Elle ne sera assurée que si l’ad­min­is­tra­tion se met en sit­u­a­tion de ren­dre le meilleur ser­vice au moin­dre coût. Cela implique qu’elle ren­force son effi­cac­ité et sa productivité.

Dans ce con­texte, le min­istère de l’É­conomie, des Finances et de l’In­dus­trie (Mine­fi), qui occupe une place cen­trale dans l’ap­pareil d’É­tat et emploie plus de 180 000 agents, est directe­ment impliqué, de par la nature de ses mis­sions, dans le développe­ment des moyens pro­pres à établir cette com­péti­tiv­ité. Il ne pou­vait donc rester à l’é­cart d’une dynamique qu’il s’ef­force d’im­pulser et d’ac­com­pa­g­n­er tant dans la sphère admin­is­tra­tive que dans le monde marchand.

C’est pourquoi il impor­tait qu’il soit, bien au con­traire, exem­plaire dans cette indis­pens­able mise sous tension.Encore fal­lait-il pour cela dévelop­per une véri­ta­ble stratégie, claire­ment iden­ti­fiée, adap­tée aux enjeux et à même de provo­quer la néces­saire mobil­i­sa­tion de l’ensem­ble de ses agents, de ses capac­ités et de ses moyens.

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En lançant l’ini­tia­tive Bercy en mou­ve­ment en octo­bre 2002, j’ai donc enten­du ouvrir à cette admin­is­tra­tion les voies de la per­for­mance et de la qual­ité, en m’ap­puyant sur la pro­mo­tion affir­mée d’une cul­ture de résul­tats et sur la moti­va­tion effec­tive des agents, mais égale­ment en dévelop­pant un mode orig­i­nal et man­agér­i­al de con­duite du changement.

De fait, il fal­lait trou­ver, pour un min­istère où la réforme avait longtemps piét­iné, de nou­velles manières d’abor­der ce ren­dez-vous impérieux.

C’est pourquoi, au moment de con­cevoir le pro­gramme Bercy en mou­ve­ment, les actions à met­tre en œuvre ont été ordon­nées autour des principes suivants :

  • la trans­parence
    en affichant claire­ment les objec­tifs pour­suiv­is de recherche de pro­duc­tiv­ité et d’amélio­ra­tion de la qual­ité du ser­vice ren­du ; en annonçant chaque action et en en définis­sant pré­cisé­ment les con­tours, les ten­ants et les aboutissants ;
  • le prag­ma­tisme
    en visant à un partage clair des rôles entre les direc­tions, chargées de la mise en œuvre des dif­férentes mesures et de la décli­nai­son des dif­férents pro­jets à leur niveau, et le secré­taire général en charge de leur impul­sion et de leur coor­di­na­tion, en s’at­tachant à l’ob­ten­tion de résul­tats pré­cis, vis­i­bles, mesurables et concrets ;
  • le dia­logue
    chaque ini­tia­tive a été présen­tée aux organ­i­sa­tions syn­di­cales et débattue avec elles, chaque action en découlant fait l’ob­jet d’une infor­ma­tion spé­ci­fique et d’un exa­m­en dans le cadre des instances par­i­taires compétentes ;
  • le partage
    cha­cun, usagers, admin­is­tra­tion, fonc­tion­naires, doit trou­ver un avan­tage à cette mise en mou­ve­ment que ce soit en ter­mes de sim­pli­fi­ca­tion ou de facil­i­ta­tion, en ter­mes de réduc­tion des coûts et de meilleure allo­ca­tion des moyens ou en ter­mes de recon­nais­sance de ses qual­i­fi­ca­tions et de son implication.


Cela a impliqué par ailleurs de mobilis­er l’ensem­ble des leviers de change­ment disponibles et acces­si­bles à une admin­is­tra­tion telle que le Minefi :

  • en ter­mes d’ex­a­m­en et de ratio­nal­i­sa­tion des mis­sions autour du cœur de ses métiers ;
  • en ter­mes de resser­re­ment de ses struc­tures et de développe­ment de nou­velles formes d’in­ter­ven­tion et de présence du ser­vice public ;
  • en ter­mes d’or­gan­i­sa­tion de l’ad­min­is­tra­tion autour des besoins des usagers et non plus au gré du for­mal­isme des procé­dures, ou encore,
  • en ter­mes de sim­pli­fi­ca­tion, d’al­lége­ment et de requal­i­fi­ca­tion des tâch­es des agents.


L’ensem­ble ain­si con­sti­tué, visant à met­tre Bercy en mou­ve­ment, per­met ain­si de pro­duire des résul­tats cohérents et con­crets puisqu’ils se décli­nent en une trentaine d’ac­tions ciblées dont la mise en œuvre et le suivi sont effec­tive­ment et quo­ti­di­en­nement assurés.

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La stratégie de réforme du Minefi porte un nom : Bercy en mouvement

Elle pour­suit deux objec­tifs : accroître de façon mesurable sa pro­duc­tiv­ité et amélior­er de façon vis­i­ble le ser­vice ren­du à l’usager.

Elle utilise pour ce faire qua­tre leviers :

  • réex­am­in­er les mis­sions et resser­rer les structures,
  • installer une cul­ture de résul­tats, tout cela pour ren­forcer la productivité,
  • plac­er l’usager au cœur de son organ­i­sa­tion et amélior­er con­crète­ment le ser­vice rendu,
  • motiv­er les agents en recon­nais­sant leur qual­i­fi­ca­tion et leur mérite per­son­nel, c’est-à-dire en définis­sant les instru­ments permettant :
    - d’é­val­uer objec­tive­ment l’im­pli­ca­tion indi­vidu­elle des agents dans leur travail,
    - de récom­penser effec­tive­ment et de manière sélec­tive cette implication.


Enfin, pour s’as­sur­er de la pleine effi­cac­ité de ces leviers, cette stratégie les active grâce à un mode de pilotage man­agér­i­al, spé­ci­fique et novateur.

Dans son principe la méthode retenue est sim­ple et vise à l’ef­fi­cac­ité et à la clarté.

Les min­istres fix­ent les objec­tifs et don­nent les impul­sions stratégiques néces­saires à la pro­gres­sion des dif­férents chantiers ; le secré­taire général en assure pour leur compte la décli­nai­son et la super­vi­sion quo­ti­di­ennes ; les direc­tions en exé­cu­tent la réal­i­sa­tion et la mise en œuvre concrètes.

Quant à l’or­gan­i­sa­tion mise en place elle repose sur trois piliers :

  • une instance de pilotage con­cen­trée ani­mée par le secré­taire général,
  • un suivi man­agér­i­al de l’a­vance­ment des chantiers met­tant en œuvre un dis­posi­tif spé­ci­fique de compte ren­du aux ministres,
  • le recours à des formes adap­tées et ciblées de mobil­i­sa­tion des compétences.


Con­crète­ment, chaque action fait l’ob­jet d’une mise en œuvre adap­tée à son objet. Il peut s’a­gir, selon les actions :

  • d’un pilotage direct, en s’ap­puyant sur les ser­vices con­cernés : celui-ci con­cerne essen­tielle­ment les actions stricte­ment direc­tion­nelles ou cer­tains dossiers trans­ver­saux, sus­cep­ti­bles d’être mis en œuvre de manière spé­ci­fique par les directions ;
  • d’un pilotage indi­rect et une ani­ma­tion de réseaux, en util­isant le relais de ” grands témoins ” (hauts fonc­tion­naires en mis­sion tem­po­raire situés hors organ­i­gramme et ayant une expéri­ence appro­fondie, éten­due et recon­nue, de niveau direc­to­r­i­al) ou en faisant appel à des mis­sions d’in­spec­tion ou à des con­sul­tants privés, la recherche de la sou­p­lesse et de l’ef­fi­cac­ité com­man­dant le choix de telle ou telle approche, voire leur combinaison.


Bercy en mou­ve­ment est donc, à la fois, un plan com­plet de réformes et une manière de con­duire le change­ment dans l’administration.

Ce plan s’ap­pelle à des­sein ” Bercy en mou­ve­ment “. Il ne s’ag­it, en effet, ni de boule­vers­er de manière anar­chique les struc­tures, ni de nier les ver­tus du ser­vice pub­lic et la qual­ité pro­fes­sion­nelle des agents. Mais il ne s’ag­it pas non plus de se sat­is­faire d’une logique du ” tou­jours plus ” ou de refus du changement.

La réforme de l’É­tat doit con­sis­ter, dans la durée, à agir sur le périmètre de ses mis­sions et la per­ti­nence de son organ­i­sa­tion afin de ren­forcer sys­té­ma­tique­ment et méthodique­ment sa per­for­mance et son efficacité.

Les gains de pro­duc­tiv­ité qui en découlent peu­vent alors être util­isés pour réduire sa masse salar­i­ale en abais­sant le nom­bre de ses agents et pour amélior­er le ser­vice ren­du à l’usager, qui, de plus en plus, entend être con­sid­éré comme un client.

Pour cela, il faut aller dans le détail et s’in­téress­er au résul­tat comme fac­teur de dynamisme plutôt qu’à la procé­dure qui est un gage d’in­er­tie. Et il faut le faire en y asso­ciant les agents, en les respon­s­abil­isant et en les motivant.

C’est pré­cisé­ment l’ob­jet de Bercy en mou­ve­ment : met­tre en marche le Min­istère à tra­vers la refonte de son organ­i­sa­tion et de son fonctionnement.

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Les premiers résultats sont au rendez-vous

Les com­pé­tences du Min­istère sont resser­rées autour de ses cœurs de mis­sions. Nous avons exter­nal­isé celles qui pou­vaient être exer­cées par d’autres et mieux que nous ne le fai­sions. Nous faisons faire et nous con­trôlons ce qui est fait. C’est le cas pour le con­trôle tech­nique des véhicules lourds par exem­ple ou pour le poinçon­nage des métaux précieux.

Nous avons adap­té notre organ­i­sa­tion aux attentes et aux besoins de nos dif­férentes caté­gories d’usagers en lançant un pro­gramme ” Pour vous faciliter l’im­pôt ” à des­ti­na­tion des con­tribuables, qui englobe, par exem­ple, des aspects aus­si dif­férents que :

  • l’amélio­ra­tion de l’accueil,
  • la sim­pli­fi­ca­tion des con­tacts — une demande même si elle n’est pas adressée au bon ser­vice lui est trans­mise pour prise en charge, par le ser­vice qui l’a reçue ;
  • l’amélio­ra­tion des dis­posi­tifs exis­tants, en matière de paiement automa­tisé de l’impôt.


Nous avons aus­si adap­té notre organ­i­sa­tion de manière à ren­dre très con­crète pour tous nos clients, entre­pris­es, par­ti­c­uliers et col­lec­tiv­ités locales, la notion d’in­ter­locu­teur unique.

Par ailleurs nous ratio­nal­isons nos struc­tures pour les ren­dre plus effi­caces, pour en élim­in­er les dou­blons et pour les ren­dre plus pro­duc­tives, plus professionnelles.

Enfin, nous pas­sons au peigne fin nos procé­dures pour en élim­in­er les couch­es inutiles et redon­dantes. Les usagers, les agents et l’ad­min­is­tra­tion y gag­nent ensemble.

C’est cet ensem­ble d’ac­tions qui nous per­met de restituer à la col­lec­tiv­ité nationale une par­tie des moyens qu’elle nous avait attribués, notam­ment en ter­mes d’ef­fec­tifs, puisque nous avons d’ores et déjà sup­primé en deux ans près de 3 300 emplois, soit plus que sur les dix ans précé­dents, tout en ayant con­tin­ué d’amélior­er la qual­ité du ser­vice que nous lui ren­dons, indi­vidu­elle­ment ou col­lec­tive­ment. Ce rythme devrait se main­tenir dans les années à venir. 

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