L’entrée en vigueur de Solvabilité II : quelles conséquences sur le marché ?

Dossier : Dossier FFEMagazine N°715 Mai 2016
Par Virak NOU (00)

« LES ORGANISMES D’ASSURANCE MANQUENT ENCORE DE VISIBILITÉ SUR LE PILOTAGE DU CAPITAL »

S’il est un aspect sur lequel les organ­ismes sont encore large­ment en manque de vis­i­bil­ité, c’est sur le pilotage du cap­i­tal. Sous solv­abil­ité I, la marge de solv­abil­ité était unique­ment fonc­tion du chiffre d’affaires ou du niveau du bilan des organ­ismes et était en par­ti­c­uli­er indépen­dante de la nature des risques gérés.

Ain­si, les niveaux de marge étaient très faciles à anticiper. Le recul acquis sur cette régle­men­ta­tion a même per­mis aux assureurs de se posi­tion­ner aux niveaux qui leur parais­saient cor­re­spon­dre à leurs objec­tifs stratégiques. À titre d’exemple, ce ratio était supérieur à 600 % à fin 1998 en assur­ance dom­mages ce qui a notam­ment per­mis aux assureurs de résis­ter aux tem­pêtes de 1999 tout en étant en mesure de con­tin­uer leur activité.

Solv­abil­ité II efface tous ces repères : le nou­veau ratio de solv­abil­ité (SCR) est désor­mais risk based, c’est- à‑dire qu’il dépend de la nature des risques sup­port­és par l’assureur (risque de marché, risque de souscription…).

Cela a deux con­séquences majeures : d’une part le niveau de cap­i­tal req­uis ne dépend plus que du chiffre d’affaires, d’autre part ce SCR est beau­coup plus volatil puisqu’il dépend notam­ment des con­di­tions de marché.

« LE NOUVEAU RATIO DE SOLVABILITÉ (SCR) EST DÉSORMAIS RISK BASED »

Sur l’aspect niveau de cap­i­tal req­uis, cela sig­ni­fie que l’assureur dis­pose d’une marge de manoeu­vre beau­coup plus impor­tante dans le pilotage de son ratio. Il peut en effet mod­i­fi­er son allo­ca­tion d’actif, sa poli­tique de ges­tion des assurés, la mod­éli­sa­tion de ses risques… de manière à opti­miser son niveau de SCR.

Cela requiert à la fois de la tech­nic­ité dans la mise en oeu­vre des cal­culs, mais surtout de la finesse et du recul dans l’analyse de l’impact des choix et des aspects tech­niques sur les indi­ca­teurs de pilotage.

Sur le volet de la volatil­ité du ratio de cou­ver­ture, la prob­lé­ma­tique est poten­tielle­ment plus déli­cate à pilot­er. Les assureurs ne sont pas habitués à cette volatil­ité et vont naturelle­ment être amenés à con­stituer une marge de sécu­rité afin de pal­li­er une aug­men­ta­tion du SCR due aux aléas de marché.

De fait, cette marge de sécu­rité (qui se for­malise au tra­vers du pili­er II) vien­dra s’ajouter au cap­i­tal néces­saire à la cou­ver­ture du seul SCR et pour­rait con­duire le marché à sur­cap­i­talis­er ou à priv­ilégi­er les assureurs qui parvi­en­nent à con­tenir cette volatil­ité (par leur taille ou leur exposition).

Du point de vue des besoins futurs du marché de l’assurance, la mon­tée en tech­nic­ité amor­cée depuis main­tenant plusieurs années va con­tin­uer afin de con­solid­er le savoir-faire dévelop­pé pour met­tre en oeu­vre les cal­culs du pili­er I, mais aus­si afin de faire le lien entre les mod­èles de cal­cul et les indi­ca­teurs de pilotage.

Mais au-delà de ces aspects tech­niques, on va assis­ter à une péri­ode de tran­si­tion dans le pilotage stratégique du ratio de cou­ver­ture, péri­ode à l’issue de laque­lle les assureurs auront mis en place de nou­veaux stan­dards de pilotage (nou­velles tech­niques d’allocation d’actifs, nou­velles références en ter­mes de cou­ver­ture du cap­i­tal prospectif…).

Pour cela, ce sont plus les pro­fils experts en stratégie d’entreprise qui pour­raient tir­er leur épin­gle du jeu.

Poster un commentaire