Le vin de Champagne : dégustation, accords entre les mets et les vins

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°573 Mars 2002Rédacteur : Laurens DELPECH

Pour bien déguster le cham­pagne, il faut lui don­ner un verre qui per­me­t­tra d’optimiser ses arômes. Le vol­ume et la hau­teur doivent être suff­isants pour laiss­er aux bulles la place d’évoluer et per­me­t­tre à la tem­péra­ture de rester sta­ble le plus longtemps pos­si­ble. Il est impor­tant aus­si que le verre soit suff­isam­ment fin, pour que le con­tact avec les lèvres per­me­tte de max­imiser les sen­sa­tions gus­ta­tives. Il doit enfin être exempt de toute trace de déter­gent, qui tuerait les bulles et la mousse.

Quand il s’agit de rafraîchir le vin, la meilleure solu­tion con­siste à plac­er la bouteille dans un seau à cham­pagne rem­pli d’un mélange d’eau et de glaçon pen­dant env­i­ron une demi-heure. Si on veut que la bouteille rafraîchisse rapi­de­ment, il faut ajouter du gros sel à l’eau et à la glace et utilis­er un seau à vin d’Alsace (plus haut qu’un seau à cham­pagne). Sinon, on peut met­tre la bouteille au réfrigéra­teur au moins qua­tre heures avant de servir, puis, au moment du ser­vice, la plac­er dans un seau à champagne.

Le cham­pagne doit tou­jours être servi frap­pé, car dans les intérieurs con­tem­po­rains, sou­vent trop chauf­fés, il a ten­dance à rapi­de­ment mon­ter en tem­péra­ture dans le verre, s’il est bu lente­ment, ce qui est notam­ment le cas quand il est servi en apéritif.

Ce n’est pas dif­fi­cile d’ouvrir une bouteille de cham­pagne : le gaz fait presque tout le tra­vail… Pour ouvrir la bouteille, il faut enlever la coiffe, desser­rer le muse­let en main­tenant le bou­chon, puis faire tourn­er la bouteille inclinée à 45° en ten­ant fer­me­ment le bou­chon d’une main et la bouteille de l’autre. Quand on sent le bou­chon par­tir, il faut le frein­er pour le dégager douce­ment, à moins que l’on estime fes­tif d’entendre un bruit de détonation…

Déguster le champagne

La dégus­ta­tion est une mobil­i­sa­tion des sens, à com­mencer par celui de la vue : que voyez-vous dans votre verre ? La couleur du liq­uide et son effer­ves­cence sont des élé­ments de juge­ment impor­tants. Les cham­pagnes, en vieil­lis­sant, auront ten­dance à pren­dre des teintes plus rich­es, plus fon­cées, de même un vin prin­ci­pale­ment issu de cépages noirs aura des reflets gris, voire rosés.

L’œil doit aus­si éval­uer la finesse des bulles et du cor­don, aus­si appelé “ col­lier de per­les ” qui se forme à la sur­face du liq­uide et joue con­tre la paroi du verre.

Après la vue, l’odor­at nous apportera des infor­ma­tions essen­tielles. L’effervescence du cham­pagne fait qu’il est par­fois dif­fi­cile d’en percevoir les arômes, qui se répar­tis­sent, pour l’essentiel, en qua­tre grandes familles :

  • arômes flo­raux : tilleul, vio­lette, fleur d’oranger, aubépine…
  • arômes fruités : agrumes, comme le cit­ron, fruits jaunes, comme la pêche et l’abricot, autres fruits, comme la pomme, la poire, la fram­boise ou les fruits exotiques,
  • arômes végé­taux, comme l’amande fraîche, l’herbe coupée, la mousse de sous-bois ou la truffe,
  • arômes de fruits secs et de pâtis­serie : noisette, raisins secs, brioche, vanille, beurre frais, pain gril­lé, miel…

En bouche, vous retrou­verez les sen­sa­tions ini­tiale­ment perçues par le nez. Essayez d’évaluer l’attaque, ou pre­mier con­tact du vin avec la pointe de votre langue, qui doit être sou­ple et agréable, le milieu de bouche, où le vin doit rester présent et enfin la per­sis­tance du goût une fois que vous aurez avalé (les grands vins sont tou­jours per­sis­tants). Les vieux cham­pagnes de bons mil­lésimes pren­nent sou­vent des goûts de pain et de café très flatteurs.

Au nez comme en bouche, il faut ten­ter d’apprécier l’intensité, la vivac­ité et la com­plex­ité qui vous per­me­t­tront de porter un juge­ment glob­al sur le vin et de déter­min­er les mets avec lesquels il pour­ra être associé.

Les différents types de champagnes

On dis­tingue les cham­pagnes brut sans année, les mil­lésimés et les cuvées spé­ciales, tant pour les blancs que pour les rosés.

Les cham­pagnes brut sans année représen­tent plus de 80 % de la pro­duc­tion de cham­pagnes, ils sont générale­ment élaborés à par­tir d’un assem­blage de vins provenant des trois cépages (pinot noir, pinot meu­nier, chardon­nay) issus de dif­férentes par­celles et de plusieurs années. Sauf si vous con­nais­sez bien le pro­duc­teur, achetez plutôt des cham­pagnes de grandes firmes (Roed­er­er, Deutz…), ou de pro­duc­teurs con­nus qui sont encore gérés par une famille dont on con­naît l’exigence de qual­ité (Krug, Bollinger) et dîtes-vous bien que la plu­part des cham­pagnes de “ petits pro­duc­teurs ” sont en fait vinifiés par les coopératives…

Les bruts blancs de blancs sont faits unique­ment à par­tir de raisins blancs de chardon­nay, égale­ment issus de dif­férentes par­celles et de plusieurs années.

Les bruts blancs de noirs (assez rares) sont élaborés à par­tir de raisins noirs : pinot noir, pinot meunier.

Les mil­lésimés doivent être élaborés à par­tir de vins provenant du même mil­lésime. Comme à Por­to, en Cham­pagne, toutes les années ne sont pas mil­lésimées, il n’y a pas – par exem­ple – de 1980…

Les cuvées spé­ciales (Dom Pérignon, Cristal de Roed­er­er, Bollinger RD, Krug Grande Cuvée…) représen­tent le som­met de la gamme. À de rares excep­tions près, elles sont tou­jours mil­lésimées et provi­en­nent de par­celles classées grand cru.

Accords entre les mets et les vins de Champagne

Le cham­pagne peut accom­pa­g­n­er tout un repas. On recom­mande de boire les blancs de blancs en apéri­tif, notam­ment un cham­pagne jeune, un brut frais qui réveille bien les papilles, puis un mil­lésimé sur les entrées et sur les pois­sons, alors que les blancs de noirs et les mil­lésimés ou les cuvées spé­ciales inté­grant une bonne pro­por­tion de pinot iront mieux sur les vian­des et les plats en sauce. Ne pas oubli­er, au moment du fro­mage, les accords pos­si­bles avec les vins tran­quilles de Cham­pagne : coteaux cham­p­enois blancs ou rouges. Avec les desserts, servir éventuelle­ment le cham­pagne qui a servi à les con­fec­tion­ner, sinon servir de préférence du demi-sec.

Les vins de Cham­pagne accom­pa­g­nent bien la gas­tronomie cham­p­enoise, com­posée de potages, comme la soupe à l’oignon grat­inée au cham­pagne, et de char­cu­ter­ies réputées, comme les pieds de porc à la Sainte-Mene­hould, les andouil­lettes de Troyes, le jam­bon des Ardennes et le pâté de Reims. Cette char­cu­terie entre sou­vent dans la com­po­si­tion des potées cham­p­enois­es, qui ne sont pas sans évo­quer la potée lor­raine. À not­er de nom­breuses recettes de pois­sons et de volailles au cham­pagne. Il existe aus­si toute une tra­di­tion culi­naire du gibier, qui était abon­dant dans les forêts cham­p­enois­es. Reims jouit d’une excel­lente répu­ta­tion dans les domaines de la bis­cui­terie (bis­cuits ros­es, bis­cuits au cham­pagne…) et de la pâtis­serie (pavés de Reims, délices de Reims, flan au champagne…).

Si vous souhaitez vous ini­ti­er à la cui­sine au cham­pagne, voici une recette sim­ple mais savoureuse.

Fricassée de poulet au champagne

Un beau poulet fer­mi­er, 100 g de beurre, 20 cl de bouil­lon de poulet, 1 cuil­lère à soupe de farine, 20 cl de cham­pagne, 25 cl de crème fraîche, 2 jaunes d’oeufs, 250 g de champignons de Paris, sel et poivre.

Dans une sauteuse, faire revenir le poulet coupé en morceaux avec un peu de beurre. Mouiller de bouil­lon et laiss­er mijot­er 35 min­utes. Réserv­er dans un récip­i­ent cou­vert, à feu très doux. Pré­par­er un roux blond avec 50 g de beurre et de farine. Mouiller avec le cham­pagne et le liq­uide de cuis­son du poulet. Ajouter sel et poivre, puis la crème fraîche. Hors du feu, lier la sauce avec deux jaunes d’oeufs. Servir le poulet nap­pé de cette sauce avec les champignons de Paris sautés au beurre.

L’avantage de ce plat est qu’il peut être accom­pa­g­né de tous les vins de Cham­pagne, mais si vous voulez faire une forte impres­sion, servez-le avec du cham­pagne rosé…

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