Le système de santé : contradictions macroéconomiques

Dossier : La santé et la médecine à l'aube du XXIe siècleMagazine N°562 Février 2001
Par Béatrice MAJNONI D'INTIGNANO
Par Philippe ULMANN

La macroéconomie de la santé

Un sys­tème de san­té est un ensem­ble plus ou moins cohérent de moyens de finance­ment, d’in­for­ma­tion, de préven­tion et de traite­ment organ­isé en vue de main­tenir et d’amélior­er la san­té. Ce texte en abor­dera les aspects macroé­conomiques, c’est-à-dire globaux.

La double équivalence

Une dou­ble équa­tion décrit bien les échanges financiers qui s’in­stau­rent entre les prin­ci­paux agents d’un sys­tème de san­té et sym­bol­ise les rela­tions macroé­conomiques entre eux. Une dou­ble équiv­a­lence s’in­stau­re au niveau macroé­conomique dans tout sys­tème de san­té entre l’of­fre de soins des pro­fes­sion­nels, la demande des malades et la dépense engagée pour pay­er les pre­miers et faire face à la dépense des seconds.

Elle peut être présen­tée de manière sim­ple en décom­posant l’of­fre en un pro­duit de la rémunéra­tion des soignants ou pro­duc­teurs de biens médi­caux par leur nom­bre : H/S x N. On sché­ma­tis­era cette rémunéra­tion par H et S pour représen­ter les hon­o­raires H des médecins, des den­tistes, des kinésithérapeutes, ou autres acteurs paramédi­caux et les salaires S des hos­pi­tal­iers ou des lab­o­ran­tins, mais aus­si les salaires des per­son­nels des caiss­es d’as­sur­ance mal­adie et même les div­i­den­des des action­naires des lab­o­ra­toires phar­ma­ceu­tiques…, et par N pour représen­ter leur nom­bre respec­tif, c’est-à-dire l’emploi dans le secteur des soins, un paramètre social important.

En effet, si env­i­ron 80 % des dépens­es de san­té sont directe­ment ver­sées à des soignants et le reste con­sacré à acheter des biens et ser­vices médi­caux, les revenus des pro­thé­sistes et des action­naires des lab­o­ra­toires font aus­si par­tie des dépens­es de soins qui devi­en­nent des revenus dans l’économie.

Ain­si, H/S sera un vecteur hor­i­zon­tal comp­tant autant d’items qu’il existe de types de rémunéra­tions et N sera un vecteur ver­ti­cal comp­tant autant de caté­gories de per­son­nels qu’il en existe dans le sys­tème de santé.

On peut de même présen­ter la demande de soins comme le pro­duit du prix des soins (par unité d’hono­raire, d’hos­pi­tal­i­sa­tion ou de médica­ment) par leur vol­ume respec­tif. On sché­ma­tis­era alors la dépense cor­re­spon­dante par P x Q pour représen­ter les prix P des con­sul­ta­tions ou de vis­ites des médecins, ou encore des journées d’hos­pi­tal­i­sa­tion et enfin des pro­duits phar­ma­ceu­tiques ou de pro­thès­es, et les vol­umes cor­re­spon­dants Q pour le nom­bre de con­sul­ta­tions, de journées passées à l’hôpi­tal, enfin le nom­bre de médica­ments con­som­més et de pro­thès­es. Ain­si P sera un vecteur hor­i­zon­tal, com­posé d’au­tant d’items qu’il existe de ser­vices médi­caux et Q un vecteur ver­ti­cal en comp­tant autant qu’il aura été con­som­mé de biens et de ser­vices médicaux.

Enfin, on peut présen­ter la dépense de soins selon son orig­ine par la somme (I + C) + M + A des sym­bol­es I et C représen­tant les impôts ou coti­sa­tions con­sid­érés comme des prélève­ments oblig­a­toires et appelés ” fonds publics ” par les écon­o­mistes, M les tick­ets mod­éra­teurs ou sommes financés directe­ment par les malades et A les primes d’as­sur­ances ver­sées volon­taire­ment par les assurés à titre privé et ser­vant au rem­bourse­ment des soins, appelés ” fonds privés “.

Cette présen­ta­tion macroé­conomique se révèle un instru­ment ana­ly­tique et péd­a­gogique puissant…

Les ter­mes de l’équa­tion ne sont pas spon­tané­ment en équili­bre. Il importe donc de bien com­pren­dre les rela­tions entre les trois par­ties de l’équation.

Les déséquilibres spontanés

On abor­dera suc­ces­sive­ment la ques­tion de l’in­ter­dépen­dance entre les trois élé­ments de l’équa­tion, puis la diver­sité des sit­u­a­tions selon les groupes de pays, les diver­gences d’in­térêts et de coali­tion, on se deman­dera qui finance et qui tire par­ti des soins et qui régule, enfin on évo­quera quelques fauss­es bonnes idées fréquem­ment émises.

1 — Interdépendance entre les termes de l’équation

Tout change­ment dans l’un des ter­mes de l’équa­tion se réper­cute inévitable­ment sur les deux autres. Ain­si, une aug­men­ta­tion de la dépense de soins favorise soit la rémunéra­tion soit le nom­bre des soignants, soit les deux. Elle exige aus­si de nou­veaux moyens de finance­ment, donc soit les prélève­ments oblig­a­toires aug­menteront, soit les soins seront moins bien rem­boursés, soit les primes d’as­sur­ances seront plus lourdes.

Si par exem­ple les infir­miers et per­son­nels des hôpi­taux obti­en­nent une aug­men­ta­tion de salaires, la dépense aug­mentera mais aus­si, inéluctable­ment, les impôts ou les coti­sa­tions, puisque les dépens­es hos­pi­tal­ières sont en général bien rem­boursées. À moins que les médecins et les lab­o­ra­toires phar­ma­ceu­tiques n’ad­met­tent de voir dimin­uer leur revenu pour com­penser l’aug­men­ta­tion des infir­miers hos­pi­tal­iers et main­tenir le niveau de la dépense.

A con­trario, sup­posons que le Par­lement décide de réduire les impôts ou les coti­sa­tions pour dimin­uer la pres­sion qu’ex­er­cent les prélève­ments oblig­a­toires sur l’é­conomie, soit les deux autres sources de finance­ment vien­dront en sub­sti­tu­tion, à dépense égale, et on assis­tera alors à une pri­vati­sa­tion du finance­ment, soit les dépens­es de san­té et les revenus des soignants diminueront.

Dans cette deux­ième hypothèse, il peut s’a­gir soit des prix des soins et donc de la rémunéra­tion des soignants, soit des vol­umes con­som­més, et donc du nom­bre de travailleurs.

Les inter­re­la­tions peu­vent être encore plus com­plex­es. Sup­posons que le gou­verne­ment, soucieux de réduire les dépens­es de san­té rem­boursées, décide de faire porter son effort sur le prin­ci­pal poste de dépense : l’hos­pi­tal­i­sa­tion. Il réduira le nom­bre de lits et cer­tains malades devront doré­na­vant être traités en ville. Donc la dépense d’hono­raires et de médica­ments aug­mentera. Si elle aug­mente moins vite que les dépens­es d’hos­pi­tal­i­sa­tion ne dimin­u­ent, le gou­verne­ment aura atteint son objec­tif. Dans le cas con­traire, il aura échoué.

Mais en out­re, comme les dépens­es d’hos­pi­tal­i­sa­tion sont mieux rem­boursées que les dépens­es de ville, le finance­ment pub­lic en sera allégé d’au­tant et les fonds privés, la par­tic­i­pa­tion des malades ou des assureurs en l’oc­cur­rence, aug­menteront. Cet effet induit et mécanique accentuera le suc­cès de la poli­tique engagée mais accentuera la pri­vati­sa­tion du finance­ment. Tous les ter­mes de l’équa­tion auront, comme tou­jours, changé.

2 — Diversité des situations par pays

Les ter­mes de l’équa­tion vari­ent dans des pro­por­tions impor­tantes selon les sys­tèmes de san­té. Dans les sys­tèmes inspirés par Bev­eridge (Roy­aume-Uni ou Suède), financés surtout par l’im­pôt, la dépense totale est bien con­trôlée, la par­tic­i­pa­tion des malades reste en général faible, les prix peu­vent être élevés, tels les revenus des général­istes ou les prix des médica­ments au Roy­aume-Uni, et en général l’emploi reste peu important.

Dans les sys­tèmes de type Bis­mar­ck, dits pro­fes­sion­nels (Alle­magne), financés surtout par des coti­sa­tions sociales prélevées sur les revenus et un peu par l’im­pôt, la dépense totale sem­ble plus élevée, ain­si que la charge imposée aux malades. La France appar­tient à ce groupe. L’im­pôt y finance une part mod­este et les coti­sa­tions presque 75 %. Les malades paient d’im­por­tants tick­ets mod­éra­teurs et les assur­ances com­plé­men­taires jouent un rôle crois­sant. Les prix des soins sont bas, en par­ti­c­uli­er les hon­o­raires des général­istes et les prix des médica­ments, et les vol­umes con­som­més élevés.

Aux États-Unis, en principe pays du libéral­isme et du marché, l’im­pôt finance 40 % de la dépense et les assur­ances et les malades cha­cun 30 %. Les prix sont élevés, ain­si que les revenus des soignants et l’emploi est très impor­tant, ce qui explique que ce pays con­sacre deux fois plus de sa pro­duc­tion nationale aux soins (14,5 %) que l’An­gleterre (7 %) et un plus d’un tiers de plus que la France (9,5 %). Mais les Améri­cains sem­blent con­som­mer le même vol­ume de soins que les Européens.

3 — Qui paye, qui consomme et qui régule ?

La pop­u­la­tion se divise en deux ou trois en sous-groupes jouant des rôles dif­férents. D’une part le groupe des act­ifs, en général bien por­tants et ayant une capac­ité de finance­ment élevée : ils sont forts con­tribuables ou coti­sants aux prélève­ments oblig­a­toires, forts deman­deurs d’as­sur­ance et faibles con­som­ma­teurs de soins. D’autre part le groupe des retraités et des grands malades ou invalides ne pou­vant tra­vailler : ils sont faibles con­tribuables ou coti­sants et forts con­som­ma­teurs de soins.

Dans l’ensem­ble des pays rich­es, le sec­ond groupe dépense la moitié des soins. Sché­ma­tique­ment, une impor­tante redis­tri­b­u­tion se pro­duit : les act­ifs bien por­tants payent pour les inac­t­ifs malades les soins rem­boursés. Par con­tre, ce sont les malades qui sup­por­t­ent eux-mêmes les charges directes ou les tick­ets modérateurs.

Deman­dons-nous alors qui régule, c’est-à-dire qui con­trôle, la répar­ti­tion de la dépense totale entre I, C et M ? Pour les biens et les ser­vices tra­di­tion­nels, comme les machines à laver ou les sor­ties au théâtre, c’est le marché qui régule, donc la demande des con­som­ma­teurs, qui met­tent en bal­ance l’u­til­ité atten­due de leur achat et son coût, compte tenu de leur revenu. Pour les ser­vices publics, c’est le Par­lement qui met en bal­ance les ser­vices d’é­d­u­ca­tion et de jus­tice, par exemple.

Pour la san­té, les choses sont plus com­pliquées. Une dou­ble régu­la­tion par le Par­lement et par le marché coex­iste. Le mon­tant de I et de C est régulé par le Par­lement qui vote le mon­tant des prélève­ments oblig­a­toires et leur affec­ta­tion entre la san­té et les autres fonc­tions de l’É­tat. Au con­traire, le mon­tant de M et de A dépend de la volon­té de pay­er des malades ou des assurés, il est donc assez large­ment régulé par le marché.

Mais de toute façon, aucune ressource finan­cière n’échappe à une forme ou à une autre de régu­la­tion. Les moyens financiers ne sont en aucun pays ni illim­ités ni incon­trôlés. Ils le sont seule­ment plus ou moins. Et l’ex­péri­ence inter­na­tionale démon­tre que les fonds publics sont mieux con­trôlés que les fonds privés. Autrement dit, plus I et C sont élevés en pro­por­tion et moins la dépense glob­ale de soins est forte, alors que plus les malades payent de leur poche ou finan­cent par des assur­ances privées, et plus elle est élevée.

4 — Divergences et coalitions d’intérêts politiques

Dès lors, quels sont les intérêts en présence ? Il existe dans tout sys­tème de san­té une coali­tion d’in­térêts entre les offreurs et les deman­deurs de soins, donc entre les soignants et les malades, pour voir aug­menter la dépense, au détri­ment des con­tribuables et/ou des coti­sants. Les malades, en effet, souhait­ent tou­jours des soins de meilleure qual­ité, donc à prix P plus élevé et en vol­ume Q plus impor­tant supposent-ils.

Les besoins ressen­tis exprimés à cet égard sont illim­ités et tou­jours crois­sants. On va de la sat­is­fac­tion de besoins de base (accouche­ments et mal­adies infec­tieuses) à celle de besoins plus tech­niques (can­cers) puis à celle de soins de con­fort (esthé­tique ou stress).

De même, le groupe des soignants, médecins, hos­pi­tal­iers et lab­o­ra­toires, désir­era tou­jours, comme tout groupe act­if et c’est légitime, recevoir des rémunéra­tions H/S plus élevées et être plus nom­breux, donc faire aug­menter N.

Soit par souci de l’emploi, soit par souci de pou­voir, comme cela s’ob­serve dans les grandes insti­tu­tions comme les hôpi­taux dont les directeurs sont d’au­tant plus puis­sants qu’ils comptent plus de lits, ou chez les syn­di­cats tou­jours soucieux de mul­ti­pli­er leurs électeurs poten­tiels et de favoris­er l’emploi.

On voit ain­si tou­jours se for­mer des coali­tions entre les malades et les soignants pour obtenir plus de moyens de finance­ment. Étrange para­doxe, les mêmes émet­tent sou­vent en même temps des cri­tiques récur­rentes sur le ” trou de la Sécu ” et le ” trop d’im­pôts “, l’ad­min­is­tra­tion en étant sou­vent ren­due respon­s­able. Et en ce sens la demande comme l’of­fre de soins sont illim­itées, quel que soit le sys­tème de soins. Tout sys­tème de soins présente une ten­dance spon­tanée à l’ac­croisse­ment de la dépense. Il faut bien pren­dre con­science de cette réal­ité économique incon­tourn­able. C’est pourquoi les straté­gies des offreurs et des deman­deurs pour obtenir plus de dépense sus­ci­tent à leur tour une stratégie défen­sive des payeurs et néces­si­tent des régulations.

En réponse, les act­ifs qui versent les fonds publics ont intérêt à reporter la charge le plus pos­si­ble sur les malades, c’est-à-dire sur M ou sur A, donc à pri­va­tis­er le finance­ment. Les intérêts des con­tribuables aisés coïn­ci­dent alors avec ceux des médecins : pri­va­tis­er le finance­ment. Et cette stratégie ren­con­tre fréquem­ment celle des soignants, lesquels savent que les fonds privés sont plus dif­fi­ciles à con­trôler et que plus la part du finance­ment privé est impor­tante et plus la dépense totale sera élevée ou augmentera.

Ain­si voit-on les médecins revendi­quer une aug­men­ta­tion des fonds privés, dans le but d’aug­menter la dépense totale, et être soutenus dans leur démarche à la fois par la pop­u­la­tion active aisée, dont le pou­voir de lob­by­ing et de per­sua­sion à l’é­gard des médias est impor­tant, et qui reste soucieuse de pay­er moins d’im­pôts, et par cer­tains assureurs privés ou par les syn­di­cats soucieux de voir aug­menter l’emploi.

Alors sur­git un prob­lème d’équité. En effet, les fonds privés sont à la charge des malades, plus défa­vorisés par déf­i­ni­tion et plus sou­vent pau­vres. On dit que le finance­ment privé est con­traire au principe d’é­gal­ité devant l’ac­cès aux soins (antire­dis­trib­u­tif).

5 — Trois fausses bonnes idées

Elles sont sou­vent invo­quées par les parte­naires en présence : le déficit, les besoins, le rationnement des soins. L’équa­tion macroé­conomique mon­tre qu’ils n’ont guère de fonde­ment scientifique.

On évo­quera tout d’abord le con­cept de ” déficit du sys­tème de san­té “. Que l’as­sur­ance mal­adie soit publique ou privée, un déficit provient d’une insuff­i­sance des recettes par rap­port aux dépens­es. Si la ten­dance au déficit est uni­verselle pour l’of­fre et la demande de soins qui peu­vent aug­menter indéfin­i­ment, le déficit lui-même peut au plus per­dur­er un an. Les principes de la compt­abil­ité, publique comme privée, exi­gent en effet qu’il y soit mis fin au moment de la clô­ture des comptes. Il doit se résor­ber en fin d’an­née soit par une aug­men­ta­tion des recettes, donc de l’un des ter­mes (I + C) + M + A, soit par un emprunt qui repousse l’échéance. Mais l’emprunt ne fait que reculer le moment de vérité et reporter la charge de la dépense sur les généra­tions futures qui devront pay­er soit plus d’im­pôts, soit plus de coti­sa­tions pour le rembourser.

La vraie ques­tion posée par le finance­ment n’est donc pas celle du déficit, mais de l’im­por­tance de I et de C, voire de A ? Qui paye et com­bi­en ? Cela se mesure par la pro­por­tion des prélève­ments oblig­a­toires et des assur­ances dans la pro­duc­tion nationale, soit par (C + I)/PIB soit par A/PIB. Le con­cept per­ti­nent n’est donc pas le déficit si sou­vent invo­qué, mais la part des dépens­es publiques ou privées de san­té dans le PIB et la part des charges imposées aux malades dans les dépens­es de san­té, soit M/PQ. L’é­con­o­miste améri­cain Lester Thurow a rap­pelé, dès 1984, qu’au­cun secteur ne peut croître plus vite que la richesse nationale sous peine de met­tre en dan­ger les équili­bres macroéconomiques.

On évo­quera ensuite le con­cept de ” besoin de san­té “. Sou­vent invo­qué pour jus­ti­fi­er l’aug­men­ta­tion des fonds des­tinés à la san­té, il n’a guère de sens lui non plus. Soit il s’ag­it du vecteur Q qui décrit tous les soins con­som­més en vol­ume : con­sul­ta­tions, scan­ners et analy­ses… Et alors on se heurte à la dif­fi­culté de recenser cette myr­i­ade d’élé­ments, dif­fi­culté sur laque­lle buta la plan­i­fi­ca­tion sovié­tique dans tous les secteurs, y com­pris celui de la san­té. Soit il s’ag­it du pro­duit PQ et alors le besoin, ain­si défi­ni, dépend non seule­ment des soins au sens matériel, mais aus­si du niveau de la rémunéra­tion des soignants, laque­lle peut n’avoir que peu de rap­port avec la qual­ité des soins.

Cer­tains sys­tèmes de san­té don­nent de très bons résul­tats avec des rémunéra­tions mod­estes et d’autres de très mau­vais avec des rémunéra­tions élevées, comme le démon­tre la con­fronta­tion Alle­mag­ne/É­tats-Unis par exem­ple. Le con­cept de besoin se révèle donc peu opéra­tionnel et il est sou­vent util­isé par les ten­ants de l’aug­men­ta­tion de la dépense.

La recherche et la poli­tique actuelle ten­tent de situer le besoin à l’in­térieur d’une fourchette raisonnable à l’in­térieur d’un planch­er min­i­mum et d’un pla­fond max­i­mum, en définis­sant un ” panier de biens et ser­vices médi­caux ” jugés indis­pens­ables, donc rem­boursables, afin de les met­tre à la dis­po­si­tion de toute la population.

Évo­quons enfin le con­cept de ” rationnement des soins “, lui aus­si sou­vent invo­qué. Il n’a pas plus de sens que celui de besoin et pour les mêmes raisons. La men­ace d’un rationnement appa­raît quand le Par­lement impose une lim­ite à la dépense de san­té ou à son aug­men­ta­tion, comme depuis les années 1950 en Angleterre ou depuis les années 1990 en France.

Il y a rationnement si d’une part il n’ex­is­tait aucun gaspillage dans le vol­ume de soins Q con­som­mé antérieure­ment et si, d’autre part, l’a­juste­ment de la dépense totale porte sur Q. Alors, les lits d’hôpi­taux ou les pro­thès­es peu­vent man­quer. Mais il peut aus­si porter sur P, donc sur H et/ou S. Dans ce cas, la lim­ite imposée à la dépense peut sig­ni­fi­er que le Par­lement accorde une pri­or­ité à d’autres actions col­lec­tives que la san­té, comme sou­vent au Roy­aume-Uni, ou qu’il impose une sol­i­dar­ité entre l’évo­lu­tion des revenus des con­tribuables ou des coti­sants et celle des rémunéra­tions des soignants, comme en Allemagne.

Le système de santé français

Longtemps objet de fierté pour avoir con­cil­ié finance­ment social­isé et médecine libérale, le sys­tème de san­té français recèle de curieux para­dox­es. Coû­teux sans pou­voir rester généreux, à la fois pléthorique et rationné, il souf­frait d’un excès de cen­tral­i­sa­tion et d’une dilu­tion des respon­s­abil­ités pour n’avoir jamais voulu choisir entre la logique de Bis­mar­ck et celle de Bev­eridge et répar­tir claire­ment les rôles entre l’É­tat et les parte­naires sociaux.

Cette répar­ti­tion ubuesque des respon­s­abil­ités a eu des effets désas­treux. Alors qu’il fig­ure par­mi les plus coû­teux pour les tra­vailleurs qui cotisent, il se range par­mi les moins généreux pour les malades et une par­tie des pro­fes­sion­nels qui y tra­vail­lent. Qua­trième des pays de l’OCDE pour la dépense en pour­cent­age du PIB (der­rière les États-Unis, la Suisse et le Cana­da) et deux­ième de l’U­nion européenne (der­rière l’Alle­magne avec sa charge des Län­der de l’Est), il impose aux assurés les plus lourds prélève­ments oblig­a­toires alors que le taux de rem­bourse­ment par l’as­sur­ance mal­adie oblig­a­toire dimin­ue (de 76 % à 74 % depuis dix ans) au point de fig­ur­er par­mi les plus bas (après celui des États-Unis).

Une assurance maladie éclatée

Rap­pelons l’essen­tiel de son his­toire. Une loi de 1946 prévoy­ait l’as­su­jet­tisse­ment oblig­a­toire à un futur régime unique de tous les Français et rési­dants sur le ter­ri­toire et la ges­tion de cet organ­isme selon les principes de la démoc­ra­tie sociale : un ” régime général ” à voca­tion uni­verselle est alors créé.

La même année, un décret main­tient les régimes spé­ci­aux de fonc­tion­naires, créés dans les années 1930. Puis une loi crée des régimes autonomes pour les exploitants agri­coles et pour les tra­vailleurs non salariés et non agri­coles. Enfin, une loi de 1999 crée la Cou­ver­ture médi­cale uni­verselle (CMU). Les beaux principes d’u­nité et d’u­ni­ver­sal­ité datant de la libéra­tion ont donc cédé aux démons de la diver­sité et du corporatisme.

L’as­sur­ance mal­adie française actuelle se com­pose de trois régimes impor­tants et d’un filet de sécu­rité pour les pau­vres, qui cou­vrent les frais de mal­adie pro­pre­ment dits, la mater­nité, les acci­dents du tra­vail et l’in­va­lid­ité décès.

a) La Caisse nationale de l’as­sur­ance mal­adie des tra­vailleurs salariés (CNAMTS), la plus impor­tante, gère aus­si les régimes autonomes des pen­sion­nés et des grands invalides, des assurés volon­taires, des adultes hand­i­capés, des fonc­tion­naires civils et mil­i­taires de l’É­tat, des agents des col­lec­tiv­ités locales, des étu­di­ants et des per­son­nels médi­caux con­ven­tion­nés, enfin les béné­fi­ci­aires de la CMU (revenu indi­vidu­el inférieur à 3 500 francs men­su­els). La CNAMTS rem­bourse les dépens­es de soins rem­boursables par nature, à l’ex­clu­sion de la préven­tion, et sans en con­trôler vrai­ment l’ef­fi­cac­ité médi­cale. En principe, le rem­bourse­ment atteint 75 % des hon­o­raires des médecins, entre 35 et 65 % des frais de médica­ments et 90 % des frais d’hos­pi­tal­i­sa­tion, enfin 100 % de tous les soins des per­son­nes atteintes d’une mal­adie grave et inval­i­dante (affec­tion de longue durée).

b) La Caisse nationale des tra­vailleurs ” non salariés non agri­coles ” (CANAM) rem­bourse bien les ” gros risques “, comme l’hos­pi­tal­i­sa­tion, mais les ” petits risques ” à 50 % seulement.

c) La Mutu­al­ité sociale agri­cole (MSA) com­porte l’as­sur­ance mal­adie des exploitants agri­coles (AMEXA) et l’as­sur­ance mal­adie des salariés agri­coles (ASA).

À ces trois régimes s’a­joutent une quin­zaine de ” régimes spé­ci­aux ” pour les agents de la SNCF, de la RATP et de l’EDF-GDF, les per­son­nels des mines, de la Banque de France, de la Cham­bre de com­merce de Paris, des Français de l’é­tranger (hors CEE), les marins, les clercs de notaires, enfin, une Caisse autonome du Sénat et un Fonds de l’Assem­blée nationale. Des mutuelles gèrent par délé­ga­tion les intérêts des fonc­tion­naires (MGEN), des étu­di­ants (MNEF) et des agents des col­lec­tiv­ités locales. La plu­part des régimes spé­ci­aux ne peu­vent sur­vivre sans l’aide de l’É­tat ou du Régime général qui verse en réal­ité 89 % des presta­tions totales si on y inclut la com­pen­sa­tion démographique.

Cette diver­sité des régimes de base intro­duit des iné­gal­ités cumu­la­tives de pro­tec­tion sociale entre les Français, liées à leur pro­fes­sion. Les moins exposés au chô­mage sont les mieux pro­tégés par les régimes oblig­a­toires vis-à-vis de la mal­adie. Iné­gal­ités accen­tuées par l’as­sur­ance com­plé­men­taire (privée ou mutu­al­iste) dont béné­fi­cient surtout les fonc­tion­naires et les tra­vailleurs à statut et à laque­lle une par­tie de la pop­u­la­tion, surtout des ouvri­ers ou des chômeurs, pas assez pau­vres pour béné­fici­er de la CMU, n’ont pas accès.

Une dualité difficile à contrôler

En France coex­is­tent en fait un sys­tème de type Bev­eridge pour cer­taines activ­ités de préven­tion (préven­tion mater­nelle et infan­tile, ou sco­laire) et pour les hôpi­taux publics (placés sous la tutelle de l’É­tat, étroite­ment plan­i­fiés, dont les médecins sont salariés, et financés par un bud­get glob­al) et un sys­tème de type Bis­mar­ck pour les clin­iques privées et la médecine de ville (payées à l’acte ou à la journée d’hos­pi­tal­i­sa­tion), organ­isé par con­trat entre l’as­sur­ance mal­adie et les pro­fes­sions médicales.

Cet ensem­ble fig­ure par­mi les plus diver­si­fiés d’Eu­rope : la présence d’hôpi­taux publics (les deux tiers des capac­ités) et de clin­iques privées (un tiers) dont cer­taines, à but non lucratif, sont assim­ilées aux hôpi­taux publics, et d’autres, à but lucratif, gérées selon une logique de béné­fice, offre toute liber­té de choix à la pop­u­la­tion et aux médecins.

Une ” Con­ven­tion ” entre les ” Syn­di­cats médi­caux représen­tat­ifs ” et les trois régimes d’as­sur­ance mal­adie fixe, env­i­ron tous les cinq ans, les hon­o­raires et cer­taines con­di­tions d’ex­er­ci­ce des médecins ; mais elle doit recevoir l’a­gré­ment du min­istère de la San­té qui déter­mine la nomen­cla­ture des actes et fixe, in fine et sans tou­jours tenir compte du résul­tat de la négo­ci­a­tion, les tar­ifs des actes applic­a­bles (rem­boursés) ; puis le con­trôle en revient aux médecins con­seil de la CNAMTS.

Le min­istère assure la tutelle de la San­té publique, mais dis­pose de peu de médecins et de moyens de recherche et d’é­val­u­a­tion dérisoires : ” Déficit d’in­tel­li­gence ” juge le prési­dent de la com­mis­sion des Comptes de la Sécu­rité sociale ; la CNAMTS en regorge en revanche, avec son ser­vice de ” médecins con­seil ” qui con­stitue le plus grand ser­vice d’au­dit interne français (2 500 prati­ciens et 7 500 agents admin­is­trat­ifs), et son ser­vice infor­ma­tique, qui regroupe la moitié de ses per­son­nels, longtemps can­ton­né dans le con­trôle administratif.

L’as­sur­ance mal­adie ne dis­pose en effet d’au­cun sys­tème d’in­for­ma­tion lui per­me­t­tant de rap­procher les affec­tions dont souf­fre la pop­u­la­tion des traite­ments appliqués par les médecins, comme le font les pays étrangers.

La difficile maîtrise des dépenses

Jusqu’aux années 1990, la France util­i­sait des méth­odes de régu­la­tion tra­di­tion­nelles : faible prix des médica­ments ou des hon­o­raires et forte par­tic­i­pa­tion finan­cière des malades. La poli­tique du min­istère con­sis­tait, depuis des années, à blo­quer l’évo­lu­tion des prix, lais­sant l’as­sur­ance mal­adie con­trôler les vol­umes, ce qu’elle n’a jamais su faire. Cette par­tic­u­lar­ité française témoigne de la mécon­nais­sance des mécan­ismes élé­men­taires de régu­la­tion et de la dilu­tion des respon­s­abil­ités entre l’É­tat et les caisses.

Le min­istère de la San­té et les régimes d’as­sur­ance mal­adie se reprochent mutuelle­ment soit leur excès soit leur manque de pou­voir ou de respon­s­abil­ité. Le pre­mier, suiv­ant une logique économique, doit pren­dre les déci­sions aux­quelles répug­nent les parte­naires soci­aux : aug­menter les taux des coti­sa­tions, maîtris­er les dépens­es hos­pi­tal­ières, les plus lour­des et in fine, faire avancer les accords avec les pro­fes­sion­nels de la santé.

À la logique admin­is­tra­tive et économique du min­istère, qui doit lim­iter la pro­gres­sion de la dépense, s’op­po­sait la logique des revenus et des besoins du corps médi­cal et de l’as­sur­ance mal­adie. Cet ensem­ble hétérogène, inca­pable d’adapter spon­tané­ment ses dépens­es à la crois­sance économique, a subi un plan de redresse­ment d’ur­gence, imposé par le gou­verne­ment, tous les dix-huit mois en moyenne.

Ces plans ont certes mod­éré les dépens­es de san­té, puisque le taux de crois­sance de la con­som­ma­tion médi­cale en vol­ume, autre­fois de 2 à 3 points supérieur à celui du PIB en est proche depuis 1994. Toute­fois, le déficit tend à réap­pa­raître à chaque péri­ode de réces­sion, et il sub­siste même en 1999, péri­ode de forte croissance.

La ques­tion de la qualité

À par­tir de 1990, une série de rap­ports con­ver­gents firent appa­raître les effets désas­treux de la non-ges­tion. À l’in­quié­tude récur­rente quant à la dépense s’a­joute une soudaine angoisse quant à la qualité.

Le rap­port Béraud démon­tre com­ment les médecins pre­scrivent mal des médica­ments aus­si courants et coû­teux que les antibi­o­tiques ou les anti-ulcéreux, choi­sis­sent les spé­cial­ités phar­ma­ceu­tiques chères ou récentes de préférence aux génériques, moins chers mais de com­po­si­tion iden­tique, ordon­nent simul­tané­ment plusieurs pro­duits sim­i­laires aux vieillards…

Le rap­port Zari­fi­an estime que les Français con­som­ment sans rai­son trois fois plus de psy­chotropes que les Alle­mands alors même que les grandes douleurs restent non traitées.

L’af­faire du sang con­t­a­m­iné par le virus du sida et trans­fusé, celle des petites mater­nités, peu sûres car mal équipées, celle des trans­plan­ta­tions effec­tuées en nom­bre sur­prenant sur des étrangers alors que la liste d’at­tente des patients français aug­mente, le nom­bre d’in­fec­tions dues aux déchets hos­pi­tal­iers… un pareil fais­ceau d’in­for­ma­tions con­ver­gentes rendait néces­saire une réforme de grande ampleur.

La réforme de 1996 ou réforme Juppé

Il s’ag­it d’une réforme fon­da­men­tale en ce qu’elle mod­i­fie les insti­tu­tions, les respon­s­abil­ités et les rela­tions entre les agents. Le gou­verne­ment ori­en­tera doré­na­vant l’ensem­ble du sys­tème de san­té sous le con­trôle du Par­lement. Des rela­tions con­tractuelles définiront les oblig­a­tions et les respon­s­abil­ités récipro­ques, en par­ti­c­uli­er, les engage­ments de l’as­sur­ance mal­adie et des pro­fes­sions médi­cales. Enfin, la ges­tion sera région­al­isée. Au niveau nation­al, une Con­férence nationale de la san­té et une Agence nationale d’ac­crédi­ta­tion et d’é­val­u­a­tion en san­té (ANAES) définiront les pri­or­ités et les critères d’appréciation.

Le Par­lement, au nom des assurés et des con­tribuables, con­fér­era une légitim­ité démoc­ra­tique à la maîtrise de la dépense en fix­ant un ” Objec­tif nation­al de dépens­es d’as­sur­ance mal­adie, compte tenu des prévi­sions de recettes ” pour les dépens­es rem­boursées (ONDAM). Une ” con­ven­tion d’ob­jec­tifs et de ges­tion ” liera le gou­verne­ment et les caiss­es d’as­sur­ance mal­adie, à défaut, celui-ci leur noti­fiera l’ob­jec­tif, qu’elles devront alors respecter. Les caiss­es pro­fes­sion­nelles sub­sis­tent, gérées par des con­seils d’ad­min­is­tra­tion com­posés à par­ité de 13 représen­tants du patronat et 13 des syn­di­cats, plus qua­tre per­son­nal­ités qual­i­fiées, tous nom­més. La réforme intro­duit donc une dou­ble représen­ta­tion des assurés : par leurs députés au Par­lement et par les syn­di­cats pro­fes­sion­nels aux con­seils d’ad­min­is­tra­tion de la CNAMTS.

Toute référence à une démoc­ra­tie sociale spé­ci­fique dis­paraît donc avec l’a­ban­don de principe de l’élec­tion. Le min­istère de la San­té con­trôlera les hôpi­taux et les caiss­es la médecine de ville. L’ar­chi­tec­ture bis­mar­ck­i­enne, préservée par crainte de l’op­po­si­tion des parte­naires soci­aux, sem­ble vouée à s’estom­per. Il ne s’ag­it ni d’é­tati­sa­tion ni de pri­vati­sa­tion comme cer­tains l’ont affir­mé. Plutôt du mariage diplo­ma­tique de Bev­eridge et de Bis­mar­ck en quelque sorte.

Au niveau région­al, 24 agences régionales de l’hos­pi­tal­i­sa­tion (ARH) com­posées à par­ité de représen­tants de l’É­tat et des Caiss­es, com­pé­tentes pour les hôpi­taux publics comme privés, doivent accréditer les hôpi­taux et leur impos­er un con­trôle de qual­ité ; fer­mer ou restruc­tur­er les struc­tures, réduire les iné­gal­ités, répar­tir l’en­veloppe régionale de dépens­es et pass­er avec eux des con­trats d’ob­jec­tifs. Des Unions régionales des caiss­es d’as­sur­ance mal­adie (URCAM) négocieront les con­ven­tions avec les médecins de ville et organ­is­eront les fil­ières de soins expéri­men­tales, cen­trées autour des généralistes.

Le monde médical face à la réalité économique

Il sait s’u­nir pour s’op­pos­er. Pour adhér­er, il reste divisé. Il revendique les prérog­a­tives du salari­at et de la pro­fes­sion libérale tout à la fois (revenu garan­ti et indépen­dance), mais refuse les incon­vénients de cha­cune de ces formes de tra­vail (comptes à ren­dre ou risque économique). Cha­cun peut aus­si con­stater à son niveau les gaspillages dans les hôpi­taux sans pou­voir y remédi­er, mais doit subir les man­ques de matériel ou de per­son­nel, et des lacunes graves met­tent l’hôpi­tal en péril (urgences par exemple).

Cer­tains pro­fes­sion­nels s’in­quiè­tent de leur avenir. les infir­miers dépourvus de car­rière, les chirurgiens dont l’ac­tiv­ité passe de l’ar­ti­sanat à l’in­dus­tri­al­i­sa­tion par­tielle, les médecins de famille exposés sans pré­cau­tions à la con­cur­rence des spé­cial­istes. Le syn­di­cal­isme médi­cal tout à fait minori­taire et divisé, qui com­porte qua­tre syn­di­cats jugés représen­tat­ifs a blo­qué toute évo­lu­tion et par­ticipe à la dés­in­for­ma­tion, à part peut-être MG-France.

Aucune for­ma­tion sys­té­ma­tique à la ges­tion, à l’é­conomie de la san­té, ou à la san­té publique ne fig­ure au pro­gramme des études de médecine. Au nom des principes d’é­gal­ité, la dif­féren­ci­a­tion des hon­o­raires par région et les rémunéra­tions inci­ta­tives furent refusées. Au nom de l’u­nité syn­di­cale, le paiement à l’acte fut revendiqué pour les général­istes, alors qu’il les dessert. Au nom de la liber­té de pre­scrip­tion, tout con­trôle des dépens­es fut refusé, con­duisant à de futurs rationnements ou à des dépens­es incon­sid­érées pour les malades. Le monde médi­cal français, à l’in­star de celui de l’u­ni­ver­sité, se trou­ve con­fron­té au choix entre paupéri­sa­tion et restructuration.

Mais nul ne sait com­ment sor­tir d’une sit­u­a­tion où les acteurs refusent de pren­dre leurs respon­s­abil­ités et jouent la stratégie du statu quo. Peut-être le raison­nement économique, au sens tech­nique d’op­ti­mi­sa­tion, per­me­t­trait-il d’in­tro­duire une cer­taine logique et un peu de clarté dans cette évolution.

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