Le séquençage du VIH : de la biologie à la thérapeutique

Dossier : La santé et la médecine à l'aube du XXIe siècleMagazine N°562 Février 2001
Par Sylvie DELASSUS (83)
Par Philippe KOURILSKY (62)

Un problème majeur de santé publique

Il s’est main­te­nant écou­lé près de vingt ans depuis la des­crip­tion des pre­miers signes cli­niques de ce qui devait s’a­vé­rer comme une nou­velle mala­die. En 1981, le centre de sur­veillance des mala­dies recen­sa aux États-Unis, dans la com­mu­nau­té homo­sexuelle, un nombre anor­ma­le­ment éle­vé de patho­lo­gies rares. Le point com­mun entre toutes ces patho­lo­gies était l’al­té­ra­tion, voire l’ef­fon­dre­ment, du sys­tème immu­ni­taire des malades.

L’en­semble de ces tableaux cli­niques est main­te­nant regrou­pé sous le terme de Syn­drome d’im­mu­no­dé­fi­cience acquise ou SIDA. À ce jour, l’OMS a recen­sé 53 mil­lions de per­sonnes infec­tées et 18,8 mil­lions de morts. Cette mala­die est pré­sente sur tous les conti­nents avec deux foyers majeurs en Afrique sub-saha­rienne (24,5 mil­lions de cas) et en Asie du Sud et du Sud-Est (5,6 mil­lions de cas).

Cette mala­die est à ce jour la seule mala­die infec­tieuse en crois­sance loga­rith­mique et repré­sente donc un pro­blème majeur de san­té publique, de même enver­gure que la tuber­cu­lose dans les pays en voie de développement.

De la description à la séquence

Le carac­tère infec­tieux de cette nou­velle mala­die appa­rut rapi­de­ment. Dès 1982, la conta­mi­na­tion de per­sonnes ayant subi des trans­fu­sions san­guines ou de déri­vés san­guins, et notam­ment le cas des hémo­philes qui reçoivent des pro­duits fil­trés, indi­qua l’o­ri­gine virale de la maladie.

En 1983, un type nou­veau de rétro­vi­rus humain fut iso­lé par le groupe du pro­fes­seur Mon­ta­gnier à l’Ins­ti­tut Pas­teur, à par­tir d’un patient homo­sexuel atteint d’une lym­pha­dé­no­pa­thie géné­ra­li­sée per­sis­tante épi­dé­mio­lo­gi­que­ment reliée au sida1.

Ce rétro­vi­rus fut ensuite iso­lé par des équipes fran­çaises et amé­ri­caines à par­tir de patients atteints d’autres syn­dromes asso­ciés à la mala­die et les indi­ca­tions lais­sant entre­voir son rôle étio­lo­gique dans le sida s’ac­cu­mu­lèrent rapidement.

L’i­so­le­ment du virus repré­sen­tait une étape très impor­tante. Il per­mit notam­ment le déve­lop­pe­ment indus­triel de tests diag­nos­tiques qui furent bre­ve­tés par l’Ins­ti­tut Pas­teur en 1983. Grâce à ces tests de détec­tion ain­si qu’à l’in­ter­ro­ga­tion des don­neurs afin d’é­car­ter de la col­lecte les échan­tillons ris­qués, le cri­blage sys­té­ma­tique des dons de sang put être mis en œuvre, menant à la qua­si-éli­mi­na­tion de la conta­mi­na­tion par transfusion.

La recherche de la séquence du virus, ini­tia­le­ment appe­lé LAV (Lym­pha­de­no­pa­thy-Asso­cia­ted Virus) par les Fran­çais et HTLV-III (Human T‑cell Leu­ke­mia-lym­pho­ma Virus type III) par l’é­quipe de Robert Gal­lo aux États-Unis, fut une course contre la montre.

À peine un mois après le démar­rage du pro­jet, l’é­quipe de l’Ins­ti­tut Pas­teur avait ache­vé le tra­vail et publiait la séquence de ce virus d’un type nou­veau2. Les pro­blèmes de nomen­cla­ture furent réso­lus, en 1986, par l’a­dop­tion du nom de Virus d’im­mu­no­dé­fi­cience humaine et du sigle VIH correspondant.

De la séquence aux tentatives de vaccins

L’ob­ten­tion de plu­sieurs séquences du VIH par divers groupes fran­çais et amé­ri­cains et leur com­pa­rai­son révé­lèrent un nou­vel obs­tacle. Le nou­veau virus était géné­ti­que­ment instable, c’est-à-dire que les iso­lats pro­ve­nant de dif­fé­rents endroits ne pré­sen­taient pas exac­te­ment la même séquence. Ce phé­no­mène était déjà connu, le meilleur exemple étant le virus de la grippe contre lequel on n’est tou­jours pas par­ve­nu à pro­duire de vac­cin » uni­ver­sel « . Il était donc évident que l’ob­ten­tion d’un vac­cin contre le VIH néces­si­te­rait de nou­veaux concepts, et qu’une col­la­bo­ra­tion cher­cheurs – méde­cins – indus­tries phar­ma­ceu­tiques serait indispensable.

Il fal­lait d’a­bord appré­hen­der l’é­ten­due de la varia­bi­li­té géno­mique du VIH. Les tra­vaux effec­tués par les groupes de Simon Wain-Hob­son, Mal­colm Mar­tin et Bea­trice Hahn mirent en évi­dence un phé­no­mène d’une ampleur non éga­lée à ce jour.

Non seule­ment les iso­lats dif­fèrent d’une région à une autre, mais au sein d’un même indi­vi­du, le virus évo­lue au cours de la pro­gres­sion de la mala­die. La com­pa­rai­son des mul­tiples séquences obte­nues dans le monde entier per­mit de défi­nir les régions clés du génome pour le déve­lop­pe­ment de vac­cins et de médicaments.

Les essais de vac­cins pro­phy­lac­tiques contre le VIH sont fon­dés soit sur l’ex­pé­rience tirée de vac­cins effi­caces contre d’autres virus, soit sur de nou­veaux concepts éma­nant de la com­pré­hen­sion de la façon spé­ci­fique dont le VIH induit des réponses immunes poten­tiel­le­ment pro­tec­trices, et notam­ment l’in­duc­tion de cel­lules tueuses cyto­ly­tiques. Les prin­ci­pales approches comprennent :

  • la par­ti­cule virale entière inactivée,
  • des par­ti­cules virales incomplètes,
  • les vac­cins vivants atténués,
  • des vec­teurs recom­bi­nants vivants : le maté­riel géné­tique du virus, com­plet ou frag­men­té, est intro­duit dans un virus ou une bac­té­rie non patho­gène qui sont uti­li­sés comme vecteurs ;
  • des vac­cins ADN : comme pour les vec­teurs recom­bi­nants, des frag­ments de l’ADN viral sont intro­duits dans de l’ADN bac­té­rien. Mais cette fois, ce sont les cel­lules humaines rece­veuses qui pro­duisent les pro­téines déclen­chant la réponse immunitaire ;
  • des sous-uni­tés recom­bi­nantes cor­res­pon­dant à une pro­téine virale pro­duite dans des levures. Cette approche fut uti­li­sée pour la pre­mière fois avec suc­cès contre l’hé­pa­tite B ;
  • des pep­tides, petites séquences pro­téiques virales. Les réponses contre ces pep­tides dépendent du com­plexe majeur d’his­to­com­pa­ti­bi­li­té de chaque indi­vi­du et sont extrê­me­ment spé­ci­fiques, ren­dant dif­fi­cile l’ex­ten­sion d’un tel vac­cin à la popu­la­tion totale.


Les vac­cins contre les autres mala­dies ain­si que les essais de vac­ci­na­tion anti-VIH chez le singe montrent que la forme la plus effi­cace de vac­ci­na­tion consiste à uti­li­ser le virus vivant atté­nué. Il est hélas impen­sable d’u­ti­li­ser ce type de vac­cins chez l’homme dans la mesure où l’in­fec­tion par le VIH dure toute la vie et que des évé­ne­ments de recom­bi­nai­son in vivo, fré­quents dans le cas de ce virus, pour­raient mener à la réémer­gence de formes virulentes.

Tous les autres concepts de vac­cins sont actuel­le­ment en phase d’es­sais cli­niques, à dif­fé­rents stades. La phase I éva­lue l’im­mu­no­gé­ni­ci­té ain­si que la sûre­té et l’ab­sence de toxi­ci­té d’un vac­cin chez un petit nombre de volon­taires sains et à faible risque. La phase II véri­fie l’im­mu­no­gé­ni­ci­té chez un plus grand nombre de volon­taires et la phase III com­prend des essais d’ef­fi­ca­ci­té pré­ven­tive chez un grand nombre de volon­taires à risque.

Le pro­gramme de recherche sur un vac­cin contre le sida d’A­ven­tis Pas­teur est l’un des plus avan­cés. La stra­té­gie est basée sur l’u­ti­li­sa­tion com­bi­née de plu­sieurs immu­no­gènes : virus de la variole (cana­ri-pox) recom­bi­nant et sous-uni­tés pro­téiques recom­bi­nantes, pour déclen­cher les réponses cel­lu­laires et humo­rales humaines. Un essai de phase III doit être conduit en Thaï­lande sur plu­sieurs dizaines de mil­liers de volontaires.

Ces vac­cins pour­raient non seule­ment pro­té­ger des per­sonnes non infec­tées mais aus­si avoir un effet thé­ra­peu­tique chez les indi­vi­dus séro­po­si­tifs, allon­ger la période de non-pro­gres­sion de la mala­die, dimi­nuer le taux de trans­mis­sion et per­mettre des amé­na­ge­ments de la tri­thé­ra­pie (ci-après). De longues et dif­fi­ciles études cli­niques seront néces­saires pour en éta­blir la validité.

De la séquence aux trithérapies

La dif­fi­cul­té de la mise au point d’un vac­cin et le nombre crois­sant de per­sonnes infec­tées ont ren­du urgente la mise au point de thé­ra­pies effi­caces. De plus, la pos­si­bi­li­té d’é­vo­luer géné­ti­que­ment confère à un virus une sus­cep­ti­bi­li­té impor­tante de résis­tance aux médi­ca­ments par l’ob­ten­tion de variants d’échappement.

Maquette du VIH
Maquette du Virus d’Immunodéficience Humaine
Un virus est un agent infec­tieux de très petite taille, ne pos­sé­dant qu’un seul type d’acide nucléique, ADN ou ARN.
Il ne peut se repro­duire qu’en para­si­tant une cel­lule car il a besoin des outils méta­bo­liques de cette cel­lule hôte pour assu­rer sa propagation.
Un rétro­vi­rus est un virus à ARN.

La varia­bi­li­té du génome du VIH est esti­mée de l’ordre de 10-4, ce qui signi­fie que pour trou­ver un variant échap­pant à une molé­cule thé­ra­peu­tique don­née il suf­fit de 104 par­ti­cules virales. Or un malade en stade avan­cé peut héber­ger de l’ordre de 1010 cel­lules infec­tées, et sous la pres­sion de sélec­tion due à la pré­sence du médi­ca­ment, il est esti­mé qu’un variant d’é­chap­pe­ment peut sur­gir en six jours.

Si l’on uti­lise deux prin­cipes actifs ayant des sites d’ac­tion dis­tincts, il faut alors de l’ordre de 108 par­ti­cules virales pour trou­ver un variant d’é­chap­pe­ment, et 1012 si le trai­te­ment com­prend trois médi­ca­tions. Par consé­quent, une tri­thé­ra­pie com­bi­nant des molé­cules agis­sant sur des cibles dif­fé­rentes per­met de contre­car­rer le pro­blème de résis­tance aux médicaments.

Actuel­le­ment, les thé­ra­pies sont basées sur l’u­ti­li­sa­tion de molé­cules thé­ra­peu­tiques blo­quant les dif­fé­rentes enzymes virales, ce qui per­met d’in­ter­rompre la cas­cade de réac­tions chi­miques néces­saires à la sur­vie du virus. Les trai­te­ments com­binent des anti­pro­téases et des anti­trans­cip­tases inverses. En effet, la struc­ture cris­tal­lo­gra­phique de la trans­crip­tase inverse, enzyme très spé­ci­fique du VIH, a per­mis aux firmes phar­ma­ceu­tiques de défi­nir des médi­ca­ments agis­sant sur dif­fé­rents sites de l’enzyme.

Le pro­blème majeur des anti­pro­téases actuelles est leur toxi­ci­té à long terme. Le trai­te­ment est en outre contrai­gnant et oné­reux. Il est pro­bable que les per­sonnes actuel­le­ment infec­tées devront prendre ces médi­ca­ments toute leur vie et c’est dans ce contexte que les firmes phar­ma­ceu­tiques conti­nuent à cher­cher des molé­cules thé­ra­peu­tiques ayant une meilleure effi­ca­ci­té et une moindre toxicité.

Du laboratoire au patient : une implication mondiale

La situa­tion très dif­fé­rente des patients infec­tés par le VIH sui­vant leur pays de rési­dence impose une ouver­ture en direc­tion des pays en voie de déve­lop­pe­ment. L’en­vi­ron­ne­ment joue un rôle impor­tant dans le déve­lop­pe­ment de la mala­die, et notam­ment dans l’é­mer­gence d’in­fec­tions oppor­tu­nistes. L’é­tude des aspects évo­lu­tifs de l’in­fec­tion à VIH (étude de l’his­toire natu­relle, ana­lyse des fac­teurs aggra­vants ou pro­tec­teurs) est un volet pri­mor­dial de la recherche.

La pan­dé­mie de sida qui touche cer­tains pays en voie de déve­lop­pe­ment ain­si que son cor­tège de mala­dies infec­tieuses oppor­tu­nistes chez l’a­dulte comme chez l’en­fant ont créé une situa­tion sani­taire pré­oc­cu­pante, sou­vent dra­ma­tique, en termes de pré­ven­tion, de diag­nos­tic micro­bio­lo­gique et de prise en charge thérapeutique.

La recherche pra­ti­quée notam­ment dans les labo­ra­toires du réseau inter­na­tio­nal des Ins­ti­tuts Pas­teur et Ins­ti­tuts asso­ciés répond à trois types de besoins : l’in­ves­ti­ga­tion sur le ter­rain, l’é­ta­blis­se­ment de labo­ra­toires poly­va­lents dans les pays en voie de déve­lop­pe­ment et le diag­nos­tic de réfé­rence en zone inter­tro­pi­cale. Le champ des actions néces­saires est très large.

Voi­ci quelques exemples qui per­mettent d’ap­pré­hen­der la spé­ci­fi­ci­té du pro­blème dans les pays en voie de développement.

  • Pour inter­ve­nir sur le ter­rain, les Ins­ti­tuts du Réseau ont déve­lop­pé une trousse auto­nome et mis au point des méthodes ori­gi­nales pour s’af­fran­chir de la chaîne du froid, du pho­to­mètre et de la micro­sco­pie à fluo­res­cence et donc réus­sir des diag­nos­tics directs sur les pré­lè­ve­ments sans avoir recours à des tech­niques uti­li­sables seule­ment en laboratoire.
  • Pour per­mettre la com­pa­rai­son des résul­tats obte­nus dans dif­fé­rents centres, des méthodes uni­for­mi­sées avec des réac­tifs com­muns ont été déve­lop­pées. Grâce à la sim­pli­fi­ca­tion des pro­to­coles de fabri­ca­tion des outils, cer­taines struc­tures médi­cales iso­lées et dému­nies sont capables de réa­li­ser des diag­nos­tics bio­lo­giques et des études épidémiologiques.


Schéma général de la réplication des rétrovirusPour les mala­dies infec­tieuses oppor­tu­nistes, des avan­cées ont été obte­nues dans la mise au point d’al­go­rithmes amé­lio­rant consi­dé­ra­ble­ment la prise en charge thé­ra­peu­tique de la diar­rhée au cours du sida chez l’adulte.

Ces pro­cé­dures, déve­lop­pées à l’Ins­ti­tut Pas­teur de Ban­gui, ont ensuite été dif­fu­sées pour ouvrir des struc­tures opé­ra­tion­nelles pour le diag­nos­tic et la prise en charge des mala­dies infec­tieuses oppor­tu­nistes dans les régions où l’in­fec­tion VIH/sida a une forte pré­va­lence (Viêt­nam, Cam­bodge, Côte-d’I­voire, Sénégal).

Dans des pays où il n’y a pas de contrôle effi­cace de l’é­pi­dé­mie VIH/sida et où l’in­fra­struc­ture médi­cale ne fait pas face aux demandes de soins, les obser­va­toires des patho­lo­gies infec­tieuses oppor­tu­nistes ont per­mis d’en­ga­ger des actions pour que ces infec­tions soient trai­tées avec l’aide d’un diag­nos­tic micro­bio­lo­gique mini­mum et d’or­ga­ni­ser une recherche dans le but d’a­mé­lio­rer leur prise en charge thérapeutique.

Deux autres pro­jets sont en cours de réa­li­sa­tion : une cel­lule de sur­veillance et d’in­ter­ven­tion pour l’A­frique cen­trale et un centre de pro­duc­tion de réac­tifs spé­cia­li­sés, non com­mer­cia­li­sés ou trop oné­reux pour les pays en voie de développement.

Le VIH au service de la thérapie génique

La recherche sur le VIH a des retom­bées impor­tantes dans de nom­breux domaines de la recherche médi­cale, notam­ment en viro­lo­gie, immu­no­lo­gie et recherche cli­nique. La capa­ci­té d’in­té­gra­tion du virus dans le génome des cel­lules de l’hôte infec­té a ouvert la voie à de nou­veaux concepts, en fai­sant notam­ment des outils déri­vés du VIH des vec­teurs de choix pour la thé­ra­pie génique.

En effet, un des obs­tacles majeurs au déve­lop­pe­ment de la thé­ra­pie génique est l’ab­sence de sys­tèmes de trans­fert de gènes thé­ra­peu­tiques suf­fi­sam­ment fiables et effi­caces. En théo­rie, le VIH com­bine les avan­tages des vec­teurs viraux clas­siques sans en pré­sen­ter les incon­vé­nients : il est capable de trans­fé­rer des gènes dans des cel­lules qui ne se divisent pas, sans expri­mer de gènes viraux, et donc sans entraî­ner le rejet par l’or­ga­nisme des cel­lules mani­pu­lées. Une étape clé du trans­fert de gènes dans des cel­lules qui ne se divisent pas est le pas­sage de l’ADN thé­ra­peu­tique dans le noyau des cellules.

Or des tra­vaux menés depuis plu­sieurs années par un groupe de l’Ins­ti­tut Pas­teur sur le pas­sage de l’ADN viral dans le noyau des cel­lules hôtes ont conduit à la décou­verte d’un méca­nisme bio­lo­gique ori­gi­nal. L’ADN du VIH porte en son centre une petite région inha­bi­tuelle à trois brins qui est néces­saire au pas­sage du génome viral dans le noyau des cel­lules3.

La connais­sance de ce méca­nisme per­met aujourd’­hui d’a­mé­lio­rer nota­ble­ment l’ef­fi­ca­ci­té des vec­teurs déri­vés du VIH et d’es­pé­rer déte­nir un vec­teur appli­cable à la thé­ra­pie génique chez l’homme. Ain­si, ce déri­vé d’un redou­table virus, contre lequel on ne sait pas encore vac­ci­ner, pour­rait être appli­qué en méde­cine humaine pour la thé­ra­pie génique de nom­breuses mala­dies comme le sida, les can­cers et les mala­dies génétiques.

Le cas du sida est exem­plaire en ce sens qu’il met en valeur les impli­ca­tions des dif­fé­rents par­te­naires dans un pro­blème de san­té publique. Par­tie d’une obser­va­tion médi­cale, l’i­den­ti­fi­ca­tion du virus en cause a été faite par la com­mu­nau­té des cher­cheurs aidée par les méde­cins qui trans­met­taient obser­va­tions et prélèvements.

Les décou­vertes fon­da­men­tales faites au labo­ra­toire furent ensuite uti­li­sées par les indus­tries phar­ma­ceu­tiques pour le déve­lop­pe­ment de médi­ca­ments et vac­cins, et par l’en­semble du corps médi­cal et social.

Cette tra­jec­toire n’est-elle pas la ver­sion contem­po­raine de ce que Louis Pas­teur énon­çait voi­ci plus de cent ans :

Il n’existe pas de caté­go­ries de sciences aux­quelles on puisse don­ner le nom des sciences appli­quées. Il y a la science et les appli­ca­tions de la science, liées entre elles comme le fruit à l’arbre qui l’a porté ?*

_____________________________________
* Pour­quoi la France n’a pas trou­vé d’hommes supé­rieurs au moment du péril. Louis Pas­teur, 1871.
1. Bar­ré-Sinous­si F. et al., 1983, Science, 220 : 868.
2. Wain-Hob­son S. et al., 1985, Cell, 40 : 9.
3. Zen­nou V. et al., 2000, Cell, 101 : 173.

Poster un commentaire