Le pétrole dans le golfe de Guinée

Dossier : L'Afrique centraleMagazine N°565 Mai 2001
Par Michel BÉNÉZIT (74)

Le groupe Total­Fi­naElf dans ses trois com­po­santes d’o­ri­gine a une tra­di­tion afri­caine très ancienne, plus que cin­quan­te­naire, qui fait de lui aujourd’­hui la pre­mière com­pa­gnie pétro­lière inter­na­tio­nale en Afrique, que ce soit dans le raf­fi­nage dis­tri­bu­tion où il par­tage le lea­der­ship avec Shell, ou dans l’ex­plo­ra­tion production.

Sur le conti­nent afri­cain le Groupe pro­duit quelque 630 000 barils d’é­qui­valent pétrole par jour, soit l’é­qui­valent de 30 % de sa pro­duc­tion glo­bale. His­to­ri­que­ment Total­Fi­na et Elf ont sui­vi en Afrique des routes dif­fé­rentes dans le déploie­ment de leurs acti­vi­tés d’ex­plo­ra­tion pro­duc­tion. Total s’est prin­ci­pa­le­ment implan­té au Magh­reb, res­tant en Algé­rie alors qu’Elf s’en reti­rait, après la natio­na­li­sa­tion par­tielle de l’in­dus­trie pétro­lière en 1971 pour concen­trer ses efforts dans le golfe de Gui­née (voir ci-contre).

Optimiser la rentabilité des champs existants

En Afrique sub-saha­rienne, les pre­mières recherches pétro­lières d’Elf ont vu le jour au Gabon et au Came­roun ain­si qu’au Nige­ria et au Congo. Plus récentes, les acti­vi­tés en Ango­la datent du début des années 80. Ces der­nières années, le ralen­tis­se­ment pré­vi­sible de la pro­duc­tion de cer­tains champs a pu être frei­né grâce à la mise en œuvre de tech­niques nou­velles plus per­for­mantes. De plus, une poli­tique volon­ta­riste de réduc­tion des coûts en a amé­lio­ré la ren­ta­bi­li­té. Ain­si, l’ex­ploi­ta­tion du domaine minier se trouve-t-elle dynamisée.

Au Gabon, notre entre­prise est le prin­ci­pal opé­ra­teur devant Shell. Ensemble, ils repré­sentent 72 % de la pro­duc­tion gabo­naise. Celle-ci, en recul par rap­port aux années pré­cé­dentes, s’est éle­vée cepen­dant à 100 mil­lions de barils en 2000, grâce notam­ment à la pro­duc­tion du champ de Rabi-Koun­ga qui a pro­duit près de 100 000 barils de pétrole brut par jour en 2000.

En Ango­la, le Groupe détient des par­ti­ci­pa­tions dans des per­mis situés par de faibles pro­fon­deurs d’eau. Ain­si, il opère le bloc 3 et par­ti­cipe au déve­lop­pe­ment du bloc 2, opé­ré par Texaco.

Au Congo, il opère sur douze champs et est asso­cié sur deux autres avec l’E­ni. Les der­niers mis en pro­duc­tion sont N’Kos­sa depuis 1996, Kom­bi et Lika­la­la depuis sep­tembre 1999 et Tchi­be­li en avril 2000.

Pre­mier pro­duc­teur de pétrole d’A­frique avec 2,1 mil­lions de barils par jour, soit plus de 100 mil­lions de tonnes par an, le Nige­ria a un poten­tiel de déve­lop­pe­ment pétro­lier et gazier excep­tion­nel. Pro­duit à terre et en mer par faible pro­fon­deur d’eau, le pétrole nigé­rian a, de sur­croît, un faible coût tech­nique de production.

Outre l’ex­ploi­ta­tion de per­mis à terre com­men­cée dès 1962, le Groupe opère le per­mis OML 58 où il met en valeur le gaz nigé­rian, dans le cadre du pro­jet Obite. Le gaz asso­cié du champ d’O­ba­gi et le gaz du champ d’I­be­wa appro­vi­sionnent l’u­sine de liqué­fac­tion de Bon­ny où le Groupe est membre du consor­tium Nige­ria LNG. En pro­duc­tion depuis octobre 1999, cette usine devrait expor­ter quelque 7 mil­liards de m3 de gaz natu­rel vers l’Eu­rope. Par ailleurs, le Groupe détient une par­ti­ci­pa­tion de 10 % sur les per­mis opé­rés par Shell, ce qui lui donne accès au plus vaste domaine minier du pays.

Mais c’est la pro­duc­tion en mer qui assure aujourd’­hui les deux tiers de celle opé­rée par l’en­tre­prise. En mer peu pro­fonde, elle opère notam­ment les champs d’O­du­du et d’O­fon et le pro­jet d’A­me­nam qui devrait pro­duire 125 000 barils par jour en 2003.

Au Came­roun, le Groupe est le prin­ci­pal acteur de l’ex­plo­ra­tion pro­duc­tion. Son domaine est concen­tré dans le bas­sin du Rio del Rey, qui par­ti­cipe au sys­tème pétro­lier du Del­ta du Niger, où il a mené une intense acti­vi­té d’ex­plo­ra­tion. Les décou­vertes ont per­mis de main­te­nir la pro­duc­tion à son niveau.

L’offshore profond : un enjeu majeur

De toute évi­dence, l’a­ve­nir pétro­lier de l’A­frique de l’Ouest se joue dans les mers pro­fondes, voire ultra-pro­fondes. Les gise­ments sont suf­fi­sam­ment impor­tants pour assu­rer la ren­ta­bi­li­té des inves­tis­se­ments néces­si­tés par ce type d’ex­ploi­ta­tion nova­teur. Fort de son avance tech­no­lo­gique et de ses capa­ci­tés d’o­pé­ra­teur, le Groupe entend deve­nir un acteur majeur de cette nou­velle pro­vince pétro­lière qui pour­rait à terme relayer les pro­duc­tions terrestres.

L’un des pays les plus pro­met­teurs est l’An­go­la où l’es­sen­tiel de la pro­duc­tion pétro­lière se fera en mer pro­fonde, comme par exemple sur le bloc 14 dont le Groupe détient 20 % et qui a pro­duit ses pre­miers barils fin 1999. En explo­ra­tion, notre entre­prise est opé­ra­teur sur le fameux bloc 17 où 10 puits d’ex­plo­ra­tion sur 12 ont conduit à des décou­vertes majeures : Giras­sol, Dalia, Rosa, Lirio, Tuli­pa, Orqui­dea, Cra­vo, Came­lia, Jas­mim et Per­pe­tua. Giras­sol entre­ra en pro­duc­tion fin 2001 (voir ci-contre).

Exploitation du puit de pétrole de GirassolLes décou­vertes effec­tuées en Ango­la ces der­nières années ont sus­ci­té un très vif inté­rêt de la part des com­pa­gnies inter­na­tio­nales au Congo pour le domaine minier par grands fonds. Un impor­tant pro­gramme d’ex­plo­ra­tion est en cours afin de déter­mi­ner le poten­tiel de cette zone. Le Groupe y est pré­sent sur la tota­li­té du domaine minier et il y opère le per­mis Mer très pro­fonde Sud où il a effec­tué l’an pas­sé la décou­verte d’An­dro­mède par 1 900 mètres d’eau.

Au Nige­ria, les per­mis en mer pro­fonde s’an­noncent éga­le­ment très pro­met­teurs. Par­te­naire de Shell en mer pro­fonde, le Groupe a par­ti­ci­pé à l’im­por­tante décou­verte de Bon­ga sur OPL 212, par plus de 1 000 mètres de pro­fon­deur d’eau. Le déve­lop­pe­ment en cours pour­rait lui per­mettre à terme d’aug­men­ter encore sa pro­duc­tion. Nous déte­nons une par­ti­ci­pa­tion de 24 % dans le per­mis en mer pro­fonde OPL 246 dont nous pilo­tons l’ex­plo­ra­tion. D’une super­fi­cie de 2 500 kilo­mètres car­rés, celui-ci se trouve à une pro­fon­deur d’eau com­prise entre 1 200 et 1 800 mètres. Le Groupe y a fait en 2000 une décou­verte pro­met­teuse avec le puits Akpo 1.

En Gui­née-Équa­to­riale et au Gabon, des per­mis d’ex­plo­ra­tion en mer pro­fonde nous ont été attri­bués sur les­quels des forages seront réa­li­sés cette année.

Total­Fi­naElf a un objec­tif de crois­sance forte de sa pro­duc­tion mon­diale qui doit pas­ser de 2.2 Mbbl/j (110 Mt/an) en 2001 à 2.8 Mbbl/j (140 Mt/an) en 2005. Pour y par­ve­nir le Groupe compte beau­coup sur l’A­frique sub­sa­ha­rienne, prin­ci­pa­le­ment en off­shore pro­fond. Grâce à sa maî­trise tech­no­lo­gique et à l’ex­pé­rience acquise dans l’en­semble des pays concer­nés, Total­Fi­naElf est bien armé pour pour­suivre et accroître ses acti­vi­tés d’o­pé­ra­teur pétro­lier majeur dans le golfe de Gui­née. Il pré­voit d’y inves­tir quelque 6 mil­liards de dol­lars au cours des cinq pro­chaines années.

Éléments géopolitiques et statistiques

Place du golfe de Guinée dans le monde

L’A­frique pro­duit aujourd’­hui envi­ron 10 % du pétrole de la pla­nète pour moi­tié à par­tir du golfe de Gui­née et le reste pro­ve­nant essen­tiel­le­ment des pays du Maghreb.

Les grandes décou­vertes réa­li­sées ces der­nières années, notam­ment en Ango­la et au Nige­ria, et les déci­sions de déve­lop­pe­ment qui en ont résul­té per­mettent d’a­bor­der l’a­ve­nir avec confiance, d’au­tant que l’ef­fort d’ex­plo­ra­tion se pour­suit dans l’en­semble de la zone.

Répartition entre les différents pays du golfe de Guinée

La répar­ti­tion actuelle de la pro­duc­tion des prin­ci­paux pays pro­duc­teurs du golfe de Gui­née a été esti­mée par BP en 1999 comme suit :

  • Ango­la 780 000 barils par jour
  • Came­roun 95 000 barils par jour
  • Congo-Braz­za­ville 295 000 barils par jour
  • Gabon 340 000 barils par jour
  • Gui­née-Équa­to­riale 100 000 barils par jour
  • Nige­ria 2 030 000 barils par jour


On consi­dère géné­ra­le­ment dans l’in­dus­trie que l’es­sen­tiel de la crois­sance des pro­duc­tions vien­dra à court terme de l’An­go­la et du Nige­ria ain­si que de la Guinée-Équatoriale.

Présence des grandes sociétés pétrolières dans le golfe de Guinée

Toutes les grandes socié­tés pétro­lières mon­diales sont pré­sentes dans le golfe de Gui­née. L’im­por­tance de leur implan­ta­tion est le résul­tat de l’in­té­rêt stra­té­gique qu’elles ont mani­fes­té pour chaque pays et du plus ou moins grand suc­cès qu’elles ont eu en explo­ra­tion. La répar­ti­tion des acteurs indus­triels a bien enten­du été affec­tée par les mou­ve­ments de fusion obser­vés ces der­niers temps dans le monde du pétrole. Le tableau ci-des­sous résume l’im­plan­ta­tion des dif­fé­rents opé­ra­teurs significatifs.

TotalFinaElf Exxon Mobil Shell BP Che­vron Texaco Agip
Ango­la
Came­roun
Congo-Braz­za­ville
Gabon
Gui­née-Équa­to­riale
Nige­ria


À côté des grands groupes on note aus­si dans cer­tains pays de la zone la pré­sence de socié­tés pétro­lières de moindre taille sou­vent spé­cia­li­sées dans l’ex­ploi­ta­tion à bas coût des champs en déclin.

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