La puissance par le gratuit

Dossier : ExpressionsMagazine N°640 Décembre 2008Par : Bruno MARTIN-VALLAS (68)

L’argent est un excellent ser­vi­teur, mais c’est un maître catas­tro­phique car il fabrique sa crois­sance en culti­vant les catas­trophes. La crois­sance d’un PIB se fabrique par la crois­sance des des­truc­tions. Guerres, des­truc­tions mili­taires, civiles, sociales, sani­taires, éco­lo­giques, dis­pa­ri­tion des espèces, trans­for­ma­tions cli­ma­tiques, déser­ti­fi­ca­tion, raré­fac­tion des res­sources, tout aug­mente nos mar­chés et nos emplois.

L’ex­plo­sion démo­gra­phique est la loco­mo­tive de ce sys­tème. La filière des dégâts sociaux finance la sur­na­ta­li­té des popu­la­tions les plus défa­vo­ri­sées pour fabri­quer les pro­blèmes qui pro­tègent nos emplois (tra­vailleurs sociaux, crèches, édu­ca­teurs spé­cia­li­sés, poli­ciers, gar­diens de pri­son, juges ou avo­cats, logements).

Le gratuit n’est pas le don

Culti­ver le gra­tuit n’est pas culti­ver le don, ce n’est pas prendre aux riches pour don­ner aux pauvres. C’est culti­ver la faci­li­té d’ac­cès aux ressources.

Un tra­vail en moins ce sont deux bras en plus, dis­po­nibles pour d’autres tâches

Un tra­vail en moins ce sont deux bras en plus dis­po­nibles pour d’autres tâches. Fré­dé­ric Bas­tiat l’é­cri­vait dès 1850. Pour illus­trer ce que signi­fie » pro­té­ger les emplois du jour en frei­nant la pro­duc­ti­vi­té « , il pro­po­sait d’in­ter­dire d’af­fû­ter les haches pour tri­pler les emplois de bûcherons.

Les emplois de cais­sières dans nos super­mar­chés vont dis­pa­raître en grand nombre par la pro­duc­ti­vi­té qu’ap­por­te­ra la lec­ture des articles sans vider nos cha­riots. Mais il n’y a aucune rai­son pour que les nou­velles tâches pro­po­sées à ces deux bras en plus créent ins­tan­ta­né­ment autant de valeur ajou­tée finan­cière que dans leur emploi précédent.

Par ces temps de recon­ver­sion il importe pour le tra­vailleur que ses res­sources res­tent viables. La pro­duc­ti­vi­té c’est de rendre moins cher ce qui est payant. Le pré­ven­tif c’est de le rendre gra­tuit. Notre sys­tème de répar­ti­tion est la clé pour trans­for­mer le tra­vail en source de reve­nu com­plé­men­taire et non de reve­nu vital.

Le sys­tème de répar­ti­tion pèse déjà la moi­tié du PIB, et il four­nit déjà la majo­ri­té de leurs reve­nus à la majo­ri­té des foyers fran­çais. Aujourd’­hui, seuls nos pro­blèmes méritent ses aides (chô­meur, sur­na­ta­liste, parent iso­lé, han­di­ca­pé, vieux, malade, incom­pé­tent, pauvre).

Faire dis­pa­raître les emplois n’im­plique pas davan­tage de chô­meurs. Retrai­tés, béné­voles, sta­giaires, étu­diants, il y a tant d’autres possibilités.

Témoigner et déranger l’ordre établi

Au lieu de ne rien voir, nous taire, ne rien témoi­gner, mani­fes­ter pour la pro­tec­tion de nos emplois ou la crois­sance de notre PIB, il faut déve­lop­per le gra­tuit. Pour ce faire, notre » tra­vail média­tique » est autre­ment plus impor­tant et pro­duc­tif de richesses que notre tra­vail pro­fes­sion­nel. Il consiste à s’in­ter­ro­ger sur nos propres com­por­te­ments (métier, sec­teur, pays), et à témoi­gner, en vou­lant l’in­té­rêt de tous.

La puis­sance aug­mente en accep­tant de voir ce qui dérange l’ordre éta­bli. Nos révo­lu­tions scien­ti­fiques sont nées d’a­voir eu le droit d’ob­ser­ver ce qui ne col­lait pas avec les évi­dences du jour. Le gra­tuit est un che­min éco­no­mique paci­fique et puis­sant pour la révo­lu­tion sociale mon­diale en cours.

par Bruno Martin-Vallas (68)

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