Le principe de précaution

La précaution, pas le principe !

Dossier : ExpressionsMagazine N°763 Mars 2021
Par Philippe KOURILSKY (62)

Notre cama­rade Phi­lippe Kou­rils­ky, coau­teur d’un impor­tant rap­port sur le prin­cipe de pré­cau­tion, revient ici sur son dévoie­ment actuel, à la lumière de plu­sieurs débats de san­té publique récents, et notam­ment de la crise sani­taire de la Covid-19.

Il y a plus de vingt ans, je fus char­gé avec une émi­nente juriste, Mme Gene­viève Viney, de rédi­ger pour le Pre­mier ministre un rap­port sur le prin­cipe de pré­cau­tion. Il nous fal­lut un an de tra­vail avec deux rap­por­teurs et une cen­taine d’auditions pour pro­duire un opus de 500 pages aux conclu­sions très nuan­cées, qui fut remis fin 1999 à Lio­nel Jos­pin. Loin d’être enter­ré, comme beau­coup d’autres, ce rap­port fut lar­ge­ment dif­fu­sé et com­men­té. Nous n’avions pas recom­man­dé que le prin­cipe soit consti­tu­tion­na­li­sé, ce que fit Jacques Chi­rac en 2005. Mon avis sur le prin­cipe de pré­cau­tion est deve­nu de plus en plus cri­tique à mesure que j’ai obser­vé l’usage qui en a été fait. J’estime aujourd’hui que, tel qu’il est majo­ri­tai­re­ment enten­du (et sous-enten­du), il est deve­nu plus nui­sible qu’utile, alors que la pré­cau­tion garde toute sa valeur. Comme je l’écrivais dans Le Point le 4 octobre 2013, je per­siste et signe : La pré­cau­tion, pas le principe ! 

La Charte de 2004 annexée à la Consti­tu­tion de 2005 sti­pule : « Lorsque la réa­li­sa­tion d’un dom­mage, bien qu’incertaine en l’état des connais­sances scien­ti­fiques, pour­rait affec­ter de manière grave et irré­ver­sible l’environnement, les auto­ri­tés publiques veillent, par appli­ca­tion du prin­cipe de pré­cau­tion et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de pro­cé­dures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures pro­vi­soires et pro­por­tion­nées afin de parer à la réa­li­sa­tion du dommage. »


La mal­hon­nê­te­té intel­lec­tuelle est tris­te­ment banale. J’en avais fait l’expérience pen­dant l’élaboration du rap­port. Un jour, nous avions enten­du (en pri­vé) un mili­tant éco­lo­giste avec qui nous avions dia­lo­gué de façon par­fai­te­ment rai­son­nable et même agréable. Comme je m’en réjouis­sais naï­ve­ment en le rac­com­pa­gnant à la porte, il écla­ta de rire en me disant : « Vous savez bien que, une fois fran­chie cette porte, je dirai exac­te­ment le contraire. »


Les problèmes posés par le principe de précaution

Ce prin­cipe sou­lève de nom­breux pro­blèmes. Le pre­mier a trait à son ambi­va­lence. Il est trop sou­vent com­pris comme une atti­tude d’abstention face aux risques poten­tiels en situa­tion d’incertitude, alors qu’il devrait être une inci­ta­tion à l’action, comme le pré­co­nisent les « dix com­man­de­ments de la pré­cau­tion », que j’ai mis en avant dans mon livre Du bon usage du Prin­cipe de pré­cau­tion (Odile Jacob, 2001). Ceux-ci sont bien mal obser­vés. En par­ti­cu­lier, l’obligation de recherche néces­saire pour sor­tir de l’incertitude est loin d’être tou­jours suivie. 

Il se prête aus­si à l’instrumentalisation poli­tique et aux mani­pu­la­tions idéo­lo­giques que faci­lite la com­plexi­té des situa­tions à risque. Le trai­te­ment de la com­plexi­té requiert une rigueur d’analyse par­ti­cu­lière. En ajou­tant la com­plexi­té à l’incertitude, le prin­cipe de pré­cau­tion est pro­pice aux glis­se­ments du sens et four­nit un ter­rain fer­tile pour la mal­hon­nê­te­té intel­lec­tuelle, les infox et la « postvérité ». 

Par exemple, les résul­tats de la recherche sont sou­vent contes­tés par des détrac­teurs qui n’hésitent pas à agi­ter des argu­ments non scien­ti­fiques, en invo­quant entre autres de pos­sibles conflits d’intérêts impli­quant les cher­cheurs et leurs com­man­di­taires. Les mêmes sont moins regar­dants sur les finan­ce­ments de cer­taines ONG.

Proportionnalité et réversibilité

Autre pro­blème : la pro­por­tion­na­li­té, et les cri­tères qui la gou­vernent. Lors de la catas­trophe nucléaire de Fuku­shi­ma en 2011, l’écrasante majo­ri­té des vic­times a résul­té de l’évacuation de plu­sieurs cen­taines de mil­liers de per­sonnes de la zone jugée conta­mi­née (de l’ordre de 1 500 vic­times d’accidents de la route et de sui­cides, sur­tout de per­sonnes âgées, ver­sus moins de dix décès direc­te­ment attri­buables à la radio­ac­ti­vi­té). D’où je déduis que, si le péri­mètre de sécu­ri­té avait été réduit, on aurait sans doute évi­té des cen­taines de morts. Les arbi­trages en cours dans le choix des per­sonnes vac­ci­nées en prio­ri­té en France relèvent d’une pro­blé­ma­tique sem­blable, dont la dimen­sion morale ne peut évi­dem­ment être igno­rée. Une pla­ni­fi­ca­tion visant à mini­mi­ser le nombre de morts fait sens tant que les consé­quences éco­no­miques et sociales ne viennent pas contre­ba­lan­cer les « béné­fices » de l’approche.

Enfin, la réver­si­bi­li­té. Lorsque les déci­sions de pré­cau­tion sont ins­crites dans des lois ou dans des régle­men­ta­tions, l’irréversibilité est ins­tal­lée de fait, et le prin­cipe de pré­cau­tion opère comme une machine à cli­quets dont les effets sont rare­ment cor­ri­gés, même lorsqu’il est cer­tain que la déci­sion de départ était mal fon­dée. Bien qu’inhérente à ce der­nier, la réver­si­bi­li­té est pré­sen­tée comme un recul. L’irréversibilité devient ain­si un enjeu poli­tique, comme le montre le cas des OGM.

Le cas des OGM

C’est au nom du prin­cipe de pré­cau­tion que les OGM, comme toutes les avan­cées tech­no­lo­giques des der­nières décen­nies, ont été sou­mis « à la ques­tion », enten­due comme une tor­ture pour faire avouer le mal dont les inno­va­tions sont cen­sées être por­teuses. Les oppo­sants aux OGM ont obte­nu leur qua­si-inter­dic­tion en France et en Europe. Celle-ci est injus­ti­fiée sur le plan sani­taire et tech­ni­que­ment absurde, même si elle a indi­rec­te­ment, ce qui est une bonne chose, sti­mu­lé le mar­ché du « bio ». Qui est conscient aujourd’hui que les pro­blèmes des abeilles n’ont rien à voir avec les OGM, que cer­tains, bien à tort, mettent sur le même pied que les pes­ti­cides ? La Cour euro­péenne de jus­tice a, en 2018, consi­dé­ré que l’usage des ciseaux géné­tiques (Cris­pr-Cas9) sur les plantes entrait dans le cadre de la régle­men­ta­tion sur les OGM. Ce qui équi­vaut à les inter­dire. Se pri­ver de ce pro­grès majeur, hono­ré par le prix Nobel en 2020, est une aber­ra­tion, une faute contre l’esprit, une balle tirée dans le pied de l’agriculture moderne et, inci­dem­ment dans la lutte contre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique, qui va impo­ser une adap­ta­tion rapide de cer­taines espèces végé­tales. Après les OGM, ce seront les « ondes », la 4G, la 5G, que sais-je ? N’oublions pas que dans les années 2000 le séquen­çage de l’ADN fut contes­té au motif que les connais­sances acquises pou­vaient être dan­ge­reuses. Aujourd’hui, il nous sauve lit­té­ra­le­ment la vie : c’est grâce à lui que nous avons si vite dis­po­sé de diag­nos­tics, de sui­vi et de vac­cin pour lut­ter contre la Covid-19.

Santé et précaution 

Le domaine de la san­té a été enva­hi par le prin­cipe de pré­cau­tion dans les années 1980 avec les affaires du sang conta­mi­né et de l’hormone de crois­sance. Leur réso­lu­tion ne lui doit rien, hor­mis des pro­cès inter­mi­nables qui ont nour­ri plus d’avocats que de vic­times. Elles ont sur­tout pro­mu une judi­cia­ri­sa­tion qui n’a ces­sé de croître. Aujourd’hui, plus de la moi­tié des nou­veaux médi­ca­ments anti­can­cé­reux et une bonne part des nou­veaux vac­cins sont des OGM. Ceux-là sont lar­ge­ment exo­né­rés du péché ori­gi­nel dont sont affu­blés leurs équi­va­lents végétaux. 

Jus­te­ment, dira-t-on, le prin­cipe de pré­cau­tion n’a pas inter­fé­ré avec le déve­lop­pe­ment et la mise en place de la vac­ci­na­tion dans la pan­dé­mie de Covid-19. Jamais on n’aura été aus­si vite dans le déve­lop­pe­ment et la mise en place d’un vac­cin. Mais que n’a‑t-on enten­du sur le manque de recul par rap­port aux vac­cins anti-Covid, qui allaient trop vite sans aller assez vite, par­ti­cu­liè­re­ment les vac­cins à ARN par­ti­cu­liè­re­ment inno­vants ! L’opposition à la vac­ci­na­tion est remar­quable par sa pré­gnance dans le pays de Pas­teur. Elle a plu­sieurs causes, mais je suis convain­cu que le prin­cipe de pré­cau­tion lui four­nit un ter­rain permissif.

Judiciarisation et politisation

Judi­cia­ri­sa­tion et poli­ti­sa­tion sont deve­nues les deux mamelles du prin­cipe de pré­cau­tion. Pour moi, hor­mis l’épisode ini­tial des masques, la crise de la Covid-19 a été très bien gérée par un gou­ver­ne­ment conseillé par d’excellents scien­ti­fiques. Pour­tant, et sou­vent sous la ban­nière du prin­cipe de pré­cau­tion, la poli­ti­sa­tion a été outran­cière et la cri­tique sys­té­ma­tique. On note­ra que les charges sont tou­jours diri­gées contre l’exécutif et non contre l’administration. Comme s’il suf­fi­sait qu’un ministre décide pour que tout arrive.

“Nous allons devoir
vivre avec ce virus
comme nous vivons
avec la grippe.”

Je pense au pré­ten­du « scan­da­leux » retard de vac­ci­na­tion d’une hui­taine de jours début jan­vier 2021, dans les Ehpad, qui ont effec­ti­ve­ment reçu un guide de 45 pages décri­vant com­ment faire une piqure. Mais d’où venait ce docu­ment ? De la plume du ministre ? Et pour­quoi pas du Pré­sident de la Répu­blique ? On devrait s’interroger plus avant sur le degré de péné­tra­tion du prin­cipe de pré­cau­tion dans des admi­nis­tra­tions déjà enclines au contrôle a prio­ri, au petit pou­voir qu’il pro­cure, mais aus­si au para­pluie qu’il offre.

Un risque pour la démocratie ?

Cette remarque est moins anec­do­tique qu’il n’y paraît. Elle illustre le fait que le prin­cipe de pré­cau­tion pré­sente des risques pour la démo­cra­tie, notam­ment parce qu’il en dimi­nue l’efficacité. L’efficacité sociale de la démo­cra­tie est une notion trop peu répan­due qui me paraît aujourd’hui essen­tielle, vitale même, et urgente à pro­mou­voir. Face aux per­for­mances de pays auto­ri­taires comme la Chine dans la lutte contre l’épidémie (et dans bien d’autres domaines), les démo­cra­ties occi­den­tales sont mises en demeure de démon­trer que l’on peut com­bi­ner effi­ca­ci­té sociale, liber­tés indi­vi­duelles et pro­cé­dures de dis­cus­sion et de déci­sion démocratiques. 

La démo­cra­tie a des lour­deurs dont cer­taines ne manquent pas de légi­ti­mi­té. Recon­nais­sons tou­te­fois que le prin­cipe de pré­cau­tion en rajoute : il n’incite pas l’innovation ; il encou­rage la judi­cia­ri­sa­tion de pans entiers de l’action publique et pri­vée ; il exalte les véri­fi­ca­tions tatillonnes ex ante comme ex post ; et il flatte le goût bien fran­çais de la double néga­tion. Certes, l’arithmétique nous enseigne que moins par moins égale plus, mais on est moins rapide et effi­cace en pro­gres­sant par obs­tacles sur­mon­tés qu’en visant direc­te­ment le but. Fina­le­ment, on peut craindre que son intro­duc­tion dans la Consti­tu­tion ouvre la voie à l’inclusion d’autres prin­cipes tout aus­si confus dont on débat aujourd’hui au sujet de l’environnement.

Hasard, probabilités et doute 

Le prin­cipe de pré­cau­tion est cen­sé nous aider à prendre les meilleures (ou les moins mau­vaises) déci­sions en situa­tion d’incertitude. Qui dit incer­ti­tude dit hasard. Qui dit hasard en sciences dit pro­ba­bi­li­tés. Qui dit recherche scien­ti­fique dit doute. Hasard, pro­ba­bi­li­tés, doute : trois termes qui ren­voient à des notions et des pos­tures mal per­çues, mal com­prises ou mal accep­tées par un public qui est sur­tout avide de cer­ti­tudes et qui mani­feste une appé­tence crois­sante pour le risque zéro, avec pour faux nez le risque infi­ni­té­si­mal : tout indi­vi­du doté d’un cor­tex nor­mal affir­me­ra avec la plus grande vigueur que le risque zéro n’existe pas. Tou­te­fois, si un risque mal­heu­reux se réa­lise, il ne sera pas attri­bué au hasard : on ne se pri­ve­ra pas de déga­ger sa res­pon­sa­bi­li­té sur une auto­ri­té supé­rieure (jusqu’au som­met de l’État) et à judi­cia­ri­ser le dom­mage. Cela doit faire par­tie de nos biais cog­ni­tifs. Plus les risques objec­tifs dimi­nuent, plus la per­cep­tion du risque rési­duel devient insupportable.

Ce déni recouvre un refus de la science. Les deux sont trop sou­vent obser­vés chez les défen­seurs du prin­cipe de pré­cau­tion. Le refus de la science est injus­ti­fié. S’agissant du cli­mat, les vrais lan­ceurs d’alerte ont été les experts du GIEC, plus que les ONG qui s’en pré­va­laient. S’agissant de la pan­dé­mie, le tra­vail scien­ti­fique a été d’une effi­ca­ci­té extra­or­di­naire. Je l’affirme sans com­plexe : la science a bien fait son bou­lot. Et elle conti­nue­ra de le faire si les idéo­lo­gies rétro­grades et les mani­pu­la­tions poli­tiques n’y font pas obs­tacle. Bien sûr, les ONG ont leur place, la science n’est pas tout et ne peut pas tout. Mais elle peut et doit éclai­rer les déci­sions publiques qui relèvent du pou­voir poli­tique, sur­tout lorsque, face aux incer­ti­tudes, comme dans la crise sani­taire, celui-ci ne peut que pilo­ter à vue. En outre, elle dégage des solu­tions pra­tiques et effi­caces dont les vac­cins anti-Covid sont l’avatar spectaculaire.

Épilogue

J’écris ces lignes fin jan­vier 2021. Je suis convain­cu que la vac­ci­na­tion, désor­mais en cours et très conve­na­ble­ment pro­gram­mée, nous sor­ti­ra col­lec­ti­ve­ment de l’ornière. Ima­gine-t-on, dans la grogne ambiante, dans quelle situa­tion nous serions si (comme je le croyais il y a un an) il avait fal­lu dix ans pour mettre au point un vac­cin, ce qui était la règle com­mune il y a seule­ment deux ans ? De la même manière, la science res­te­ra indis­pen­sable dans le sui­vi de la vac­ci­na­tion et la sur­veillance, essen­tielle, de variants dan­ge­reux. Bien qu’aléatoire, leur émer­gence est qua­si iné­luc­table, en rai­son de l’énorme masse de virus qui cir­cule. Nous allons devoir vivre avec ce virus comme nous vivons avec la grippe. Et c’est aus­si pour­quoi il fau­dra vac­ci­ner le monde entier et faire preuve d’une géné­ro­si­té et d’une soli­da­ri­té mon­diales, qui pour l’instant font plu­tôt défaut dans la lutte, elle aus­si urgente et vitale, contre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique et pour la pré­ser­va­tion de la planète.

La pré­cau­tion est une atti­tude ins­pi­rée et ins­truite par la science. Per­sonne, et cer­tai­ne­ment pas moi, n’est hos­tile à la pré­cau­tion. Le prin­cipe de pré­cau­tion a eu pour ver­tu d’insister, après Hans Jonas, sur la res­pon­sa­bi­li­té à l’égard des géné­ra­tions futures. Je lui en fais cré­dit. Au-delà, il ne sert pas à grand-chose et il est même contre-pro­duc­tif. C’est la pré­cau­tion qui compte. Pour bien gérer la pré­cau­tion, nous n’avons pas besoin d’un prin­cipe qui véhi­cule ambi­guï­tés, dog­ma­tismes et idéo­lo­gies, mais de bon sens, d’honnêteté et de beau­coup de science.


Pour aller plus loin : 

Phi­lippe Kou­rils­ky et Gene­viève Viney, Le prin­cipe de pré­cau­tion, Odile Jacob, La docu­men­ta­tion fran­çaise, 2000.

Phi­lippe Kou­rils­ky, Du bon usage du Prin­cipe de pré­cau­tion, Odile Jacob, 2001, notam­ment p. 77.

Phi­lippe Kou­rils­ky, Le jeu du hasard et de la com­plexi­té, Odile Jacob, 2014.

Phi­lippe Kou­rils­ky, De la science et de la démo­cra­tie, Odile Jacob, 2019.

3 Commentaires

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Hele­na DRGONOVÁrépondre
16 mars 2021 à 9 h 17 min

J’ai lu cet article juste avant d’ap­prendre que l’u­ti­li­sa­tion du vac­cin Astra­Ze­ne­ca était sus­pen­due en France. À croire que les res­pon­sables de cette déci­sion avaient lu eux aus­si l’ar­ticle et tenaient à mon­trer que Phi­lippe Kou­rils­ky avait rai­son : le risque zéro n’existe pas mais 17 cas sur 4 000 000 (si j’ai bien rete­nu les nombres) jus­ti­fient de prendre du retard sur une vac­ci­na­tion indispensable..

Julien Lefèvrerépondre
23 mars 2021 à 20 h 08 min

Bon­jour, vous ne men­tion­nez pas la ques­tion du chan­ge­ment cli­ma­tique et pour cause. Le risque d’aug­men­ta­tion de la tem­pé­ra­ture glo­bale a mini­ma de +1.5°C en 2050 n’est qu’un risque a mini­ma puisque d’autres sce­na­rii évoquent +2°C et bien pire. Le prin­cipe de pré­cau­tion ne s’ap­plique certes pas compte tenu qu’on est en pré­sence d’un risque qua­si cer­tain. Pour autant les chan­ge­ments néces­saires n’ont encore aucun carac­tère contrai­gnant et pire, on en est encore à débattre de s’il faut accé­lé­rer le « pro­grès » tout azi­muth, au risque de pro­vo­quer une flam­bée d’é­mis­sions GES par des effets rebond non anti­ci­pés. J’au­rais donc bien aimé avoir votre éclai­rage sur les mesures juri­diques à mettre en place pour nous évi­ter la catas­trophe. Mer­ci, bien à vous
Julien Lefèvre

robert.ranquet.1972répondre
27 mars 2021 à 10 h 48 min
– En réponse à: Julien Lefèvre

Réponse de P. Kourilsky

Excel­lente ques­tion bien que je ne sai­sisse pas le sens du « et pour cause » dans la phrase :
vous ne men­tion­nez pas la ques­tion du chan­ge­ment cli­ma­tique et pour cause.

La ques­tion du chan­ge­ment cli­ma­tique (à laquelle je fais allu­sion en ren­voyant au GIEC et en men­tion­nant que nous aurons besoin d’OGM pour aider à la com­battre) est abso­lu­ment majeure et je la tiens pour telle, J’en traite abon­dam­ment dans d’autres écrits.

La ques­tion de la contrainte que vous posez jus­te­ment appelle de mon coté quelques remarques

1- Elle est bien pré­sente sous forme de régle­men­ta­tions : ex : inter­dic­tion à venir des moteurs Die­sel et bien d’autres en cours et à venir. C’est du cas par cas, mais c’est plus adap­té à mon sens que des dis­po­si­tions trop générales.

2- La modi­fi­ca­tion de la Consti­tu­tion a une valeur sym­bo­lique et de façon géné­rale encou­rage et faci­lite la judi­cia­ri­sa­tion. Mais :
a- Il y a un grave pro­blème de défi­ni­tion. Ain­si la défi­ni­tion de la pré­cau­tion reste ambigüe et com­prise dif­fé­rem­ment par les uns et les autres. Idem pour le « crime d’écocide » dont il est impos­sible de cer­ner le péri­mètre pour l’excellente rai­son qu’il est impos­sible de déli­mi­ter (sauf par consen­sus) le péri­mètre d’un éco­sys­tème natu­rel : pro­blème théo­rique et pra­tique très réel et profond
b- Cela revient alors à lais­ser l’appréciation au juge, lequel, en ces matières, est lar­ge­ment incom­pé­tent et peut com­mettre de lourdes erreurs

3- On peut trou­ver para­doxal de s’interroger lon­gue­ment sur le fait de rendre ou non le vac­cin anti-Covid obli­ga­toire, alors qu’on pense néces­saire de régle­men­ter les com­por­te­ments anti-éco­lo­giques. Cela revient à la ques­tion très idéo­lo­gique (ou plus noble­ment phi­lo­so­phique) d’un choix de prio­ri­té entre la nature et l’homme ou l’inverse.

4- Une ques­tion majeure est celle du par­tage au niveau inter­na­tio­nal et des éven­tuelles contraintes qui peuvent y être asso­ciées. Elle me parait beau­coup plus grave que toutes les autres en matière d’efficacité de réso­lu­tion du pro­blème à l’échele mon­diale, qui est sa véri­table dimension.

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