La lutte contre le chômage à Vichy

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°577 Septembre 2002Par : Antoinette Maux-RobertRédacteur : Gérard BRUNSCHWIG (43)

Hen­ri Maux (20 N), ingénieur des Ponts et Chaussées colo­ni­aux, fit de bril­lants débuts en 1927, au Cam­bodge puis en Cochin­chine. Mais n’aimant guère l’esprit “ colo­nial ”, il accepte en 1937 une mis­sion des Affaires étrangères auprès de la Chine de Chi­ang Kai-shek, mis­sion que trans­forme du tout au tout le début de la guerre sino-japon­aise. Il en gardera une fas­ci­na­tion pour la Chine.

Il revient en France à la veille de la guerre qui l’envoie, cap­i­taine du Génie, sur la ligne Mag­inot. En juin 1940, il est con­vo­qué d’urgence à Rennes, pour pren­dre part à l’organisation du chimérique “ Réduit bre­ton ”. L’armistice le libère.

À la recherche d’un poste, Hen­ri Maux se trou­ve écartelé entre trois min­istères : les Travaux publics, les Colonies et les Affaires étrangères. Après plusieurs con­tacts à Vichy, il entre au cab­i­net de René Belin, min­istre du Tra­vail, qui le fait nom­mer Com­mis­saire adjoint à la lutte con­tre le chô­mage (CLC) pour la zone libre, François Lehideux étant nom­mé Com­mis­saire et rési­dant à Paris.

C’est la vie et l’action de ce catholique social qu’était Hen­ri Maux au sein du CLC, d’octobre 1940 à mars 1943, qui con­stituent la plus grande par­tie du livre écrit par sa fille1 en s’appuyant sur des archives per­son­nelles et famil­iales très abon­dantes, ain­si que sur des archives offi­cielles et plusieurs dizaines de témoignages. Son ouvrage, extrême­ment doc­u­men­té, fait revivre ce que fut l’activité d’un fonc­tion­naire courageux et empreint d’humanisme au cours de ces années tragiques.

Hen­ri Maux eut à faire face à de mul­ti­ples et com­plex­es prob­lèmes, dans l’environnement de plus en plus délétère de Vichy, avec ses luttes d’influence, ses trac­ta­tions poli­tiques, les réper­cus­sions du con­flit mon­di­al sur la poli­tique de l’État français. Le CLC eut à s’occuper, non seule­ment du sort des chômeurs français, mais de celui des étrangers, ain­si que des Juifs français et étrangers, soumis à rafles, interne­ments et dépor­ta­tions. Le Ser­vice social des étrangers (SSE), ani­mé par son col­lab­o­ra­teur Gilbert Lesage, réus­sit sou­vent des mir­a­cles dans ces cir­con­stances dramatiques.

Hen­ri Maux fut un des rares fonc­tion­naires à refuser l’octroi de la Fran­cisque et le ser­ment au maréchal Pétain.

Démis­sion­naire en mars 1943 du CLC, ser­vice promis à une prochaine liq­ui­da­tion (con­séquence du STO), Hen­ri Maux adop­ta une posi­tion de retrait volon­taire, rési­dant à Paris et affec­té à un poste sec­ondaire du secré­tari­at d’État à la Marine et aux Colonies, avant d’accepter en juil­let 1943 celui de directeur du personnel.

À la suite de dis­cus­sions très ser­rées, il réus­sit à faire exempter du STO pra­tique­ment tous les jeunes du Ministère.

Par ailleurs, un ancien du CLC, Saint-Hilaire, après un voy­age clan­des­tin aller et retour à Alger, mit H. Maux en rela­tion avec René Pleven, Com­mis­saire du CFLN aux Colonies. Maux lui fit par­venir clan­des­tine­ment plusieurs notes sur la sit­u­a­tion du per­son­nel colo­nial qui servirent de base de tra­vail après la Libéra­tion. Il fut aus­si cor­re­spon­dant du réseau Mar­co, affil­ié au SR Kléber.

Sa pas­sion pour l’Extrême-Orient lui fit accepter de diriger en Chine la Mis­sion économique d’Extrême-Orient, dès sa créa­tion fin 1945 jusqu’à sa mort dans un acci­dent d’avion à Bahreïn, le 13 juin 1950.

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1. Épouse de Claude Robert (56).

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