La France, première nation scientifique du monde ?

Dossier : ExpressionsMagazine N°659 Novembre 2010
Par Christian GERONDEAU (57)

Notre pays amène actuel­le­ment envi­ron près de 40 000 jeunes Fran­çais au niveau « mas­ter » (bac + 5), toutes dis­ci­plines scien­ti­fiques confon­dues. Près de 30 000 d’entre eux sont issus des « Grandes Écoles », et les autres pro­viennent des universités. 

Pour leur part, les États-Unis comptent chaque année, avec la même défi­ni­tion, envi­ron 37 000 mas­ters scien­ti­fiques attri­bués à des jeunes de citoyen­ne­té amé­ri­caine. Autre­ment dit, pour une popu­la­tion cinq fois moindre, nous for­mons par­mi nos conci­toyens plu­tôt plus de mas­ters scien­ti­fiques que les États-Unis par­mi les leurs ! 

Une désaffection des Américains pour les sciences

Ce constat éton­nant appelle deux remarques. La pre­mière concerne la désaf­fec­tion des jeunes Amé­ri­cains pour les sciences. Le sujet est si aigu que le Pré­sident Oba­ma a fait du ren­ver­se­ment de cette ten­dance l’une de ses prio­ri­tés, dont il est impos­sible de savoir si elle sera sui­vie de résul­tats concrets. Mais, même si la pro­por­tion de jeunes Amé­ri­cains accé­dant à un mas­ter scien­ti­fique dou­blait, ce qui est très peu pro­bable, elle serait encore très loin de la nôtre. 

Une exception au sein du monde occidental

Nous for­mons par­mi nos conci­toyens plus de mas­ters scien­ti­fiques que les États-Unis par­mi les leurs 

La véri­té, c’est que notre pays est une excep­tion au sein du monde occi­den­tal, excep­tion due à l’exis­tence des grandes écoles d’in­gé­nieurs, et tout par­ti­cu­liè­re­ment de l’É­cole poly­tech­nique dont le pres­tige en France n’a pas d’é­qui­valent à l’é­tran­ger. La Grande-Bre­tagne pro­duit ain­si deux fois moins de mas­ters scien­ti­fiques que nous. Quant aux Chi­nois eux-mêmes, ils en délivrent encore cinq fois moins que nous en regard de leur population. 

Dans quel autre pays occi­den­tal les jeunes de 17 à 20 ans accep­te­raient par dizaines de mil­liers d’être enfer­més pen­dant deux ou trois ans dans des éta­blis­se­ments le plus sou­vent aus­tères, pour y étu­dier douze heures par jour ou plus, y com­pris bien sou­vent les week-ends, des matières arides et abs­traites dans le seul espoir de réus­sir à inté­grer une « Grande École d’in­gé­nieur « , et si pos­sible l’É­cole poly­tech­nique ? Il faut toute la force de l’ha­bi­tude pour ne pas voir à quel point une telle situa­tion est étonnante. 

Deux ans de « prépa » qui en valent cinq

S’a­gis­sant de ceux qui accèdent à l’É­cole poly­tech­nique et qui consti­tuent un som­met de la pyra­mide des can­di­dats, on peut affir­mer que les deux ou trois années qu’ils ont pas­sées en classes pré­pa­ra­toires avec le concours de pro­fes­seurs à temps plein, moti­vés et le plus sou­vent remar­quables, équi­valent à coup sûr à quatre ou cinq dans un cur­sus stan­dard d’u­ni­ver­si­té fran­çaise ou étran­gère. On com­prend aus­si que les res­pon­sables des grandes uni­ver­si­tés étran­gères soient extrê­me­ment élo­gieux à l’é­gard d’une telle for­ma­tion qui n’a pas d’é­qui­valent chez eux. 

Ce constat est aus­si sur­pre­nant que mécon­nu. Il mérite qu’on en retire d’autres ensei­gne­ments, ce que nous ferons dans de pro­chains numé­ros de La Jaune et la Rouge. Grâce aux grandes écoles, nous sommes sans doute, en regard de notre popu­la­tion, la pre­mière nation scien­ti­fique du monde. 

Christian Gerondeau (57)

Commentaire

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Fran­çois FORESTrépondre
3 novembre 2010 à 21 h 06 min

La pre­pa est un ensei­gne­ment dif­fé­rent
L’au­teur oublie de pré­ci­ser en quoi la pré­pa est un ensei­gne­ment différent :
1) L’exa­men porte sur 2 ans d’ap­pren­tis­sage et non 3mois pour les par­tiels pra­ti­qués ailleurs
2) L’exa­mi­na­teur de concours est indé­pen­dant de l’en­sei­gnant (un mau­vais ensei­gnant met de bonnes notes à tout le monde sauf à celui qui lui dit que son cours est nul).

Bra­vo néan­moins pour l’é­loge des profs de pré­pas qui ont beau­coup plus de mérites que les ensei­gnants de l’é­cole. Il fau­drait remer­cier aus­si les orga­ni­sa­teurs des concours qui en défi­nis­sant des pro­grammes adap­tés rendent ensei­gne­ment et concours éfficaces.

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