La découverte du virus du Sida

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°649 Novembre 2009Par : Maxime Schwartz (59) et Jean Castex D’après un texte de Raymond DedonderRédacteur : Bernard ESAMBERT (54)Editeur : Odile Jacob 15, rue Soufflot, 75005 Paris.

Couverture du livre : la découverte du virus du SIDAL’attribution du prix Nobel de méde­cine à Fran­çoise Bar­ré-Sinous­si et Luc Mon­ta­gnier a convain­cu Maxime Schwartz, ancien direc­teur géné­ral de l’Institut Pas­teur, et Jean Cas­tex, qui en a été le direc­teur admi­nis­tra­tif et finan­cier, de reve­nir sur les cir­cons­tances de la décou­verte du virus du Sida et sur la lutte dif­fi­cile que la direc­tion de l’Institut Pas­teur a dû mener contre le gou­ver­ne­ment des États-Unis pour faire recon­naître l’antériorité des tra­vaux pas­teu­riens sur ceux menés par l’équipe amé­ri­caine de Robert Gallo.

La nar­ra­tion de cette véri­table épo­pée montre à quel point la science a per­du une large par­tie de son indé­pen­dance et n’est plus, sou­vent, qu’un élé­ment dans le jeu de la puis­sance de la poli­tique des États. Che­min fai­sant, on com­prend que, contrai­re­ment à ce que R. Gal­lo pré­tend encore aujourd’hui, non seule­ment il n’a pas été le pre­mier à iso­ler le VIH, mais il n’a pas été non plus le pre­mier à mon­trer que ce virus était la cause du Sida ni à mettre au point le test de détec­tion de l’infection par ce virus. On est aus­si conduit à regar­der dif­fé­rem­ment la fameuse « affaire du sang conta­mi­né » et l’on prend conscience que bien des faits consi­dé­rés comme éta­blis par le public sont tota­le­ment erro­nés. Ain­si, par exemple, il n’y a jamais eu d’accord signé entre Jacques Chi­rac et Ronald Rea­gan au sujet de la décou­verte du virus et Luc Mon­ta­gnier n’a jamais été contraint de quit­ter la France en 1997 en rai­son d’une mise à la retraite pré­ma­tu­rée. Il est res­té pro­fes­seur à l’Institut Pas­teur jusqu’en 2000 et y a conser­vé son labo­ra­toire jusqu’à cette date.

Dans les cou­lisses de cette affaire, on com­prend mieux le bond en avant de la recherche fran­çaise jusqu’à la mise au point des pre­miers tests et les des­sous de l’inégale com­pé­ti­tion entre la France et les États-Unis. Qu’en aurait-il été si le labo­ra­toire de Robert Gal­lo avait été situé dans le grand-duché de Luxem­bourg ? Luc Mon­ta­gnier et Fran­çoise Bar­ré- Sinous­si auraient par­ta­gé dix ans plus tôt le prix Nobel et le par­tage des royal­ties en eût été dif­fé­rent. En revanche, cette contro­verse n’a pas retar­dé la mise sur le mar­ché en France du test de diag­nos­tic. Et elle n’a pas été qu’une affaire finan­cière, mais avant tout une affaire d’éthique et d’intégrité de la recherche.

À la lec­ture de cet ouvrage pré­cis, docu­men­té et écrit d’une plume alerte, on com­prend mieux com­ment, dans la guerre éco­no­mique, la puis­sance peut accom­pa­gner et sou­te­nir, au-delà du rai­son­nable en l’occurrence, la recherche et ses débouchés.

Pour avoir vécu l’un des épi­sodes de cette affaire, je peux témoi­gner de l’esprit de rigueur des auteurs qui se sont éga­le­ment ins­pi­rés d’un docu­ment éta­bli par l’ancien direc­teur de l’Institut Pas­teur à l’époque de son démarrage.

À lire impé­ra­ti­ve­ment pour mieux com­prendre l’une des grandes batailles scien­ti­fiques et médi­cales de notre époque.

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